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Cet entretien est particulièrement savoureux, notamment par le manque de modestie des showrunners. On a le droit de se référer aux classiques, aux films et aux séries les mieux accueillies (ce qui n'est guère le cas de TROP à la réception tout de même contrastée), mais le faire dans une visée apologétique de la sorte...
Milton ?
Chez Milton, Satan a de la grandeur : d'une part, le personnage est l'ange déchu par excellence, d'autre part, Milton est un immense écrivain, pas quelqu'un qui essaie ses gammes en matière de versification et de caractérisation.
Tolkien lui-même, lorsqu'il écrit à propos des Valar, de Melkor, de Sauron, s'inspire de différentes mythologies et des classiques, qui donnent le ton pour écrire un personnage de nature divine et le faire parler : chacun peut avoir en tête les propos de Morgoth face à Húrin, la façon de s'exprimer d'Eru lui-même dans l'Ainulindalë, les prises de parole de Manwë, d'Ulmo. C'est ce qui explique l'intérêt des lecteurs pour le panthéon tolkienien : une véritable aura de divinité entoure ces personnages.
C'est important à considérer. Sauron n'est pas un être humain, ni un elfe d'ailleurs. Il va bien sûr sombrer dans des péchés et des vices qui concernent aussi l'humanité, mais c'est en tant que dieu/ange déchu qu'il le fait et c'est une différence essentielle. Et je parle d'un "vrai" dieu/ange déchu, pas d'un personnage de comics hésitant entre l'anti-super-héroïsme ou de personnage dans un monde à l'imaginaire très mêlé et souvent à l'opposé de la recherche d'un Tolkien (cf. Stephen King et Neil Geiman comme points de référence, je crois, et pour ce qui concerne la télévision, les mondes à la Supernatural).
C'est pour cela que j'espérais que Halbrand ne fût pas Sauron, car vu le traitement d'Halbrand, cela ne pouvait conduire qu'à une seule chose : une nouvelle fois, le martyre du personnage de Sauron dans une œuvre dérivée.
Cette fois-ci, le pire, c'est qu'ils partent... d'une idée de Tolkien, pourtant présente en dehors de leurs droits d'adaptation - mais précisément, cela leur enlève le contexte de l'évolution du personnage chez Tolkien. Je pense à l'idée de pénitence et de rédemption. On sait dans quel contexte particulier elle est présente à la fin du Premier âge en ce qui concerne Sauron : ces éléments sont nécessaires à la compréhension du personnage (la scène devant Eonwë, la peur du jugement des Valar, la fuite, la volonté de Sauron d'agir pour le bien, sa rechute puisque son hybris reprend le dessus, ainsi que son habitude d'imposer sa volonté aux autres, puis le recours aux expédients maléfiques), mais la série n'en disposait pas.
Les scénaristes ont donc tricoté quelque chose qui peut difficilement avoir la même qualité, et qui s'avère difficile à suivre. Leur prologue était déjà confus : pourquoi faire mourir Finrod après le Premier âge ? Pourquoi dire que les orques se sont multipliés après la chute de Morgoth, donc sous influence sauronienne, alors que la suite indique précisément l'inverse ? Même si la narratrice du prologue n'est pas fiable (forcément, rien n'est fiable chez la "Galadriel" de la série, à part la certitude du public que cette Elfe fait beaucoup de bêtises), c'est dur à suivre. On est censé croire que Sauron aurait voulu changer et faire le bien, mais il le faisait tout de même en sacrifiant des orques à la recherche d'un pouvoir occulte ? Puis Sauron prend une forme humaine (?), est vaincu par Adar qui est celui qui va mettre en œuvre le projet initial de Sauron (créer le Mordor) ? Comment Sauron se retrouve-t-il en pleine mer ? Soit il voulait en finir, soit il avait la préscience de savoir que Galadriel allait rencontrer son esquif à un moment donné ? La série semble confondre plusieurs niveaux : le pur hasard (mais quel pur hasard permettrait à Galadriel de tomber sur Sauron en pleine mer puis de conduire Sauron successivement dans les lieux les plus intéressants à visiter pour lui ?), le plan divin (la providence d'Eru, donc : c'est très tolkienien comme idée, que Galadriel ait été complice involontaire de Sauron, évidemment, par Manwë !), le plan ourdi de longue date (Sauron connaît la Musique, mais bon, à ce point-là...).
Surtout, c'est traité comme dans une série B, tout ça. Je veux bien que les images soient belles, mais le résultat de cette mystery box d'Halbrand est plutôt affreux : c'est du lieu commun à la pelle et ça me fait penser à ce qu'on aurait dans un Marvel. Après, le personnage et les showrunners enrobent cela d'un discours qui fait comme si c'était très intéressant et réfléchi, mais franchement, non : l'exécution ne me donne pas l'impression qu'il s'agit de Sauron. C'est plutôt un personnage de méchant standard passé par le filtre d'une imagination qui n'est pas assez forte pour aller jusqu'à la sève mythique et qui essaie d'y suppléer en faisant passer l'affaire pour telle dans le discours d'escorte.
Le point le mieux réussi dans la série, c'est les Harfoots, parce qu'au moins leur histoire est relativement indépendante du reste. Mais leur inclusion a été motivée par la complaisance et ils sont liés à un autre point de scénario qui est encore plus complaisant : nous avons donc affaire à l'origin story de... Gandalf, évidemment. Et comment est-elle signifiée ? C'est ce que je trouve rigolo dans la fabrique de cette série : l'Étranger est désigné comme Istar, donc par une réplique easter egg destiné au public de lecteurs pro-adaptations (parce que je ne sais pas pour vous, mais moi, je me moque absolument de la présence d'easter eggs détail utilisés comme leurres lorsque l'esprit de l'œuvre n'est pas respectée et que l'essentiel est chamboulé voire nié), un easter egg complètement extrait de son contexte dans l'œuvre originelle. Mais qu'est-ce qui va désigner définitivement Gandalf pour les amateurs des films, en réalité ceux qui sont cajolés prioritairement par l'équipe ? Eh bien, la reprise d'une citation présente seulement dans le premier film de Jackson, avec juste un changement de prénom.
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Je m'étonne que personne ne donne la véritable raison du scénario de cette série : la découverte par les scénaristes d'un texte posthume de Tolkien retrouvé dans une valise oubliée et qui sera sans nulle doute rendu public d'ici peu. Selon les meilleures sources, son titre serait : "Galadriel & Sauron: A love story". Car le stade de la fan-fiction ou du jeu de rôle en Terres du Milieu a désormais été dépassé.
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Excellent
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Hi ! Hi ! :)
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N'ayant pas vu la série - encore faut-il se prendre l'abonnement adéquat - il y a quand même quelque chose que je ne suis pas bien dans les critiques sur Halbrand/Sauron...
L'idée même de vouloir montrer comment "un" Sauron devient "le" Sauron que nous avons au 3e âge - sans présumer, donc, de la réalisation effective dans ladite série, mais juste en lisant propos et spoilers - me parait, pour le moins, "couillue" - si vous me le permettez: tout au mieux, osée et bienvenue - quoique casse-gueule...
Les ressources convoquées par les showrunners, entre Shakespeare et Milton, sont plutôt judicieuses, au demeurant... Milton surtout, dont on a pu tisser, sinon des liens explicites, au minimum une parenté de surface avec le légendaire tolkiénien... Bienvenu, donc... Car là, clairement, Tolkien ne nous donne que peu de billes (mais voir infra, plus largement.)
Je m'explique un peu plus... Comment le "mal" apparaît et se développe, à l'absolu, est une question intéressante, non? Lucas s'y est frotté et s'y est (à mon sens) cassé les dents, assez pitoyablement. Le Darth Vader de sa "première" trilogie (au sens de la date de parution) est impressionnant, inquiétant, puissant, délétère... Et trouve son point d'achoppement juste dans le "Retour du Jedi", où l'Empereur est aussi bien campé, sombre et terrible à souhait - le Morgoth de Lucas en quelque sorte. Tout cela fonctionne "plutôt bien", efficacement... Mais je suis loin d'être satisfait de la seconde "trilogie", soit la "préquelle", où cet Anakin nouveau, un gentil gamin facétieux, doit devenir le Vader redouté et craint de tous... C'est laborieux, et pour le moins... Stupide. Ou: Raté, je trouve. Peu impressionnant, guère inquiétant sinon dans l'acceptation la plus faible du terme - oh, il tue des gamins sans vraie raison, le vilain colérique que voilà... - faible et... peureux, comme un adolescent asocial découvrant la dureté de la vie et n'y comprenant rien, ne cessant de s'y chercher, ne sachant rien gérer alors qu'il a tout à sa disposition... C'est raté, que je dis... amené de façon inintéressante et déplaisante. Insuffisant, pour le moins, à l'aune du mythe qu'était sensé incarner Vader...
Mais plus largement, Morgoth même, chez Tolkien, peine à me convaincre... Le seul texte, que j'aime fondamentalement, où je le "sens" comme une présence implacable, une force de nuisance en mouvement, c'est les "Wanderings of Hurin". Ah, là, bigre... Chaque mot fait ou défait... Tout mot, tout acte, pèse son poids...
Bref, l'idée de montrer un Sauron en devenir, quand bien même Tolkien ne l'aurait pas ou peu fait, m’interpelle à plus d'un titre ; ce que l'acteur lui-même donne à voir en interview de ses lectures et questions est intéressant...
D.
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Montrer Sauron en devenir, pourquoi pas (bien que le sujet ne m'intéresse pas), même si c'est faire preuve de peu d'imagination que de vouloir imiter Star Wars. Mais montrer une love story entre Sauron et Galadriel, avec Sauron en anti-héros auquel Galadriel redonne confiance, comme le fait la série, c'est une autre histoire. Encore une fois, on ne peut pas parler de cette série ridicule et à cent lieues de Tolkien sans l'avoir vue sinon on raisonne hors sol.
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Cher Semprini,
afin de t'écouter, j'ai vu les 4 premiers épisodes (du temps perdu) mais m'en suis tenu là. Faut pas pousser (hors-sol). Je n'ai pas bu le calice jusqu'à la lie.
A propos de calice, j'ai préféré m'offrir en dvd "le Calice d'argent (the Silver Chalice)", tout premier film de Paul Newman, un péplum un peu long, décors en carton mais scénario correct - Jack Palance en Simon le Magicien fait le job) - le héros, orfèvre, est recruté par Luc et Joseph d'Arimathie pour réaliser un vase destiné à inclure la coupe de la Cène en y ajoutant les portraits des apôtres, ce qui l'entraine à Jérusalem, Antioche, Rome. Un curieux film inégal (dvd rare à trouver en ligne) mais pas mauvais quoiqu'en disent les critiques sur le net qui ne connaissent pas les sources à l'origine du scénario.
Pour la scène culinaire, je ne t’épargnerai pas , quinze ans avant Fellini, le banquet de Néron dans ce film vaut celui du Satyricon ou celui de Garovirus un an plus tard dans Astérix.
S.
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PS (faut toujours un ps) : j'aime bien la comparaison avec Star Wars
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Cher Semprini,
afin de t'écouter, j'ai vu les 4 premiers épisodes (du temps perdu) mais m'en suis tenu là. Faut pas pousser (hors-sol). Je n'ai pas bu le calice jusqu'à la lie.
A propos de calice, j'ai préféré m'offrir en dvd "le Calice d'argent (the Silver Chalice)", tout premier film de Paul Newman, un péplum un peu long, décors en carton mais scénario correct - Jack Palance en Simon le Magicien fait le job) - le héros, orfèvre, est recruté par Luc et Joseph d'Arimathie pour réaliser un vase destiné à inclure la coupe de la Cène en y ajoutant les portraits des apôtres, ce qui l'entraine à Jérusalem, Antioche, Rome. Un curieux film inégal (dvd rare à trouver en ligne) mais pas mauvais quoiqu'en disent les critiques sur le net qui ne connaissent pas les sources à l'origine du scénario.
Pour la scène culinaire, je ne t’épargnerai pas :) , quinze ans avant Fellini, le banquet de Néron dans ce film vaut celui du Satyricon ou celui de Garovirus un an plus tard dans Astérix. :)
S.
Merci Silmo. Quatre épisodes c'est déjà bien ! :) Mais effectivement, tu as manqué les développements de la love story entre Galadriel et Sauron/Vador. Pour ma part, j'ai tout vu pour être en mesure d'avoir un avis. Je n'ai jamais vu Le Calice d'argent, qui n'a pas très bonne réputation mais a l'air rigolo à te lire. Un banquet qui vaut celui, prodigieux, du Satyricon de Fellini ? Et bien, cela doit être quelque chose ! Fellini, ça c'était un cinéaste. Dommage qu'il n'ai pas adapté Le Seigneur des Anneaux. Au moins, la mise en scène aurait été très belle.
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Loin de Fellini, hélas et mal réputé pour son côté kitch mais bien inspiré d'un roman de Thomas Costain qui connaissait ses sources, y compris ce qui ridiculisait antisémitisme et ses clichés. Malgré ses moyens modestes côté décors, parfois surprenants, les auteurs s'efforcent de passer quelques messages bienvenus.
Côté cuisine, citons "un superbe paon rôti capturé en Égypte, un sanglier venant des chasses réservées de César, de succulents écureuils arrosés de jus de pavot, des huitres garnies de prunes de Damas et saupoudrées de cumin et de benjoin, des saucisses farcies aux œufs de pluvier aux cœurs de faisans, des sauterelles adultes frittes dans du miel et dorées comme le soleil, de gras et jeunes ortolans rôtis à point entourés d’œufs brillants comme des perles.... plus tard, il est question d'un dîner de chapon moelleux farci de graines de lotus et de langues de colibris"
Bon appétit et je ne fais que citer sans inventer !
S.
et si le sujet commence à t'intéresser, sans être exhaustif, je mentionnerai par exemple "Tolérance" (1989, SALFATI) avec la création d'une académie culinaire, ou "Salé,sucré" (1994, ANG Lee), "Saveurs et servitudes" (2011, WANG Feng), la liste est longue :-)
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Mieux vaut en rire qu'en pleurer... Source
[...]
Merci à UmbarParrot pour ce nouveau partage. J'aurai pu y réagir le jour-même, mais c'est aussi bien que Mairon ait d'abord donné son avis le lendemain, a fortiori en ayant pris la peine d'avoir vu la série Amazon de bout en bout, ce que je n'aurai certainement pas la patience de faire pour ma part, du moins dans l'immédiat.
Après tout, je pourrais dire que, pour l'heure et en la matière, j'ai assez donné, il y a presque dix ans, lorsque je suis allé voir en salles la deuxième trilogie de PJ, en 2012, puis en 2013, puis enfin en 2014, en faisant à chaque fois l'effort de formuler en ces lieux, comme il se doit, des critiques réfléchies et nuancées (à propos d'une deuxième trilogie qui me semble être, au final, un ratage à peu près complet... ce que n'est pas la première trilogie de PJ en comparaison, le premier film de 2001 restant pour moi celui qui a in fine le mieux vieilli) : à l'époque (de la deuxième trilogie), c'était JR qui passait son tour, alors tant mieux si les rôles se sont inversés cette fois-ci, car cela contribue, quelque-part, à la dimension communautaire des échanges sur ce forum vieux de bientôt un quart de siècle.
Je suis globalement d'accord avec Mairon, pour tout ce dont je puis juger (n'en déplaise à Semprini, semble-t-il) sans avoir vu de la série autre chose que quelques extraits — dans des bandes-annonces, et aussi plus récemment dans une sélection de séquences dont un(e) fan de la série a fait une vidéo, autour de la thématique Sauron/Galadriel désormais fameuse...
Cet entretien est particulièrement savoureux, notamment par le manque de modestie des showrunners.
C'est à mon avis le point le plus saillant de ce nouvel entretien, qui semble décidément confirmer un attitude des intéressés déjà présente dans l'autre entretien précédemment évoqué par UmbarParrot. Même sans avoir vu la série, même en souhaitant rester aussi mesuré que possible dans mon jugement, leur prétention saute aux yeux. Et ils osent, en particulier, se réclamer du Paradise Lost de Milton ? Après tous les discours lourdement promotionnels déjà précédemment entendus sur cette série, personnellement, je crois que l'on touche le fond.
Les ressources convoquées par les showrunners, entre Shakespeare et Milton, sont plutôt judicieuses, au demeurant... Milton surtout, dont on a pu tisser, sinon des liens explicites, au minimum une parenté de surface avec le légendaire tolkiénien...
Certes, et d'ailleurs, pour mémoire, un fuseau en ces lieux est consacré au Paradise Lost de Milton : https://www.jrrvf.com/fluxbb/viewtopic.php?id=7420
Mais des références bienvenues sur le principe ne garantissent pas, en soi, la justesse et l'inventivité d'une approche narrative.
Ce que je trouve vraiment consternant, personnellement, c'est le fait que les deux "coureurs de spectacle" (©JR/Isengar) en question n'aient rien trouvé de mieux comme idée d'histoire qu'une énième variation sur le thème de l'origin story. Franchement, quel concept éculé... On ne compte plus les films et séries qui s'appuient là-dessus, alors même que c'est là loin d'être une idée neuve. En ce qui me concerne, c'est la dernière chose que j'ai envie de (re)voir (encore) appliqué dans une fiction audiovisuelle... non seulement parce que cela ne m'intéresse pas (ou ne m'intéresse plus : on en avait déjà assez vu avec ce que George Lucas a fait de Star Wars, par exemple), mais aussi et surtout parce que cela ne fait qu'acter une volonté de s'appuyer sur un univers littéraire célèbre, de façon utilitaire, pour raconter tout autre chose que ce que cet univers propose à l'origine.
Nous parlons là de Tolkien, mais à cette aune, je pense évidemment aussi à Robert E. Howard, car le film Conan the Barbarian de John Milius, en son temps, entrait pleinement dans un tel paradigme : je ne vais pas répéter ici tout ce que j'ai bien des fois déjà dit et répété ailleurs, mais rappelons simplement que Milius a scénarisé et réalisé un film (en soi toujours très bon à mon avis, par ailleurs) dont le propos ne reprenait seulement que quelques éléments fictionnels proprement howardiens (dont le célèbre nom de Conan lui-même), éléments tous largement sortis de leurs contexte d'origine, pour raconter tout autre chose qu'une histoire de Conan de Howard, le personnage principal joué par Arnold Schwarzenegger apparaissant de facto comme un personnage qui n'est tout simplement pas Conan le Cimmérien, un personnage que Howard a notamment volontairement créé sans lui donner de biographie. La fonction d'un tel personnage, chez Robert Howard, n'est pas principalement d'être un héros ou même un anti-héros dont les aventures seraient en permanence au centre du propos : sa fonction est plutôt d'être une sorte de révélateur pour les personnages dont il croise la route, dans le contexte d'une dichotomie civilisation/barbarie placée dans le contexte d'un univers de fantasy. À cette aune, raconter une histoire de vengeance autour d'un traumatisme survenu dans l'enfance et, entre autres, d'un "secret de l'acier", ce qu'a choisi de faire Milius dans son film, n'a rien à voir avec Howard, malgré la plasticité que peut offrir l'Âge Hyborien comme terrain de jeu narratif, à l'instar de la Terre du Milieu.
On pourra noter que le film de Marcus Nispel, trente ans après celui de Milius, toujours en utilisant le nom de Conan, a proposé une fois de plus une origin story. Ce fut aussi le cas, un peu avant le Conan de Nispel, lorsque Michael J. Bassett a réalisé, là encore, une origin story d'un autre personnage howardien, Solomon Kane, créé lui aussi par Howard sans lui donner de biographie. Résultat : Milius s'en est bien sorti parce que son film, en tant que tel, est maîtrisé de bout en bout, et qu'il est en particulier porté par la magnifique musique de Basil Poledouris, mais les deux autres films de cinéma, nés certes dans un autre contexte, se sont incontestablement plantés. Le fait est qu'une origin story n'a selon moi d'intérêt que si l'auteur lui-même l'a imaginé au départ, a fortiori comme un élément essentiel vis-à-vis de l'histoire racontée. Chez Howard, ce n'est pas le cas pour Conan le Cimmérien ou Solomon Kane, mais c'est le cas pour Agnès de Chastillon, personnage howardien que l'on pourrait éventuellement qualifier de féministe avec bien plus de raison qu'on ne le fait avec Eowyn ou Galadriel, à mon humble avis : la nouvelle Sword Woman, écrite par Howard en 1934 et qui met en scène Agnès pour la première fois, attend toujours une adaptation, parmi tant d'autres récits de Howard. Au lieu de cela, on préfère continuer à (essayer d')exploiter le filon "Red Sonja" (si éloigné de Howard)... mais j'arrête-là la digression.
Tout cela pour dire que les origin stories relèvent non seulement d'un domaine narratif battu et rebattu, mais qu'elles n'ont pas vocation à s'imposer systématiquement quand on prétend vouloir intéresser un public, surtout si cela ne renvoie pas aux conceptions originelles des auteurs dont on est censé s'inspirer. J'ai parlé de Howard, mais c'est la même chose pour Tolkien. Celui-ci n'a pas, à ma connaissance, prévu des textes inédits détaillant la "jeunesse" de Galadriel ou de Sauron, de telle sorte que cela apparaitrait comme essentiel dans la fonction de ces personnages au sein de la fiction tolkienienne. Pourquoi ne pas simplement respecter cela, et ne pas dès lors même s'abstenir d'exploiter des noms de personnages célèbres, et le nom de leur créateur même, afin qu'ils servent de prétexte à des "coureurs de spectacle" pour "donner aux masses ce qu'elles demandent" ? Ce dont je suis profondément las, aujourd'hui, c'est de tout le mélange de paresse et de prétention qui se manifeste à l'occasion de la conception et de la diffusion d'une production audiovisuelle comme cette série Amazon censée s'inspirer de Tolkien. Ce n'est pourtant pas si compliqué : soit on s'inspire d'un auteur en s'en réclamant directement et on l'assume dès lors avec tout le degré d'humilité et d'originalité requis, soit on s'inspire éventuellement d'un auteur (ou de plusieurs auteurs) mais en assumant de raconter des histoires originales sans chercher à exploiter des noms (d'auteurs, de leurs univers, de leurs personnages) comme autant de marques commerciales. Mais non, visiblement, il est bien trop tentant, pour ces gens, de se réclamer de quelque-chose de connu pour vendre leur came, avec une belle étiquette valant label sur l'emballage : voila bien là quelque-chose typiquement à l'image de l'absence totale de prise de risques qui caractérise notre époque, en matière de productions audiovisuelles destinées à une large audience. À cette aune, la véritable audace, si elle devait (enfin) se manifester, ne résiderait plus, à mes yeux, dans le fait d'explorer sempiternellement la "face cachée" de personnages célèbres (combien de fois cela a-t-il déjà été fait ?), mais à créer de nouveaux personnages originaux, tout simplement, ce qui est toujours possible même en s'inspirant directement de sources anciennes, et même a fortiori en entendant ne pas être complètement soumis aux conformismes du moment. Comme nous en sommes loin aujourd'hui... du moins à ce qu'il me semble.
Fellini, ça c'était un cinéaste. Dommage qu'il n'ai pas adapté Le Seigneur des Anneaux. Au moins, la mise en scène aurait été très belle.
Quand je pense au cinéaste qui a réalisé, entre autres, La strada, Les Nuits de Cabiria, La dolce vita, Huit et demi, Satyricon et Le Casanova de Fellini, au cinéaste qui a imaginé un projet de film comme celui de Voyage à Tulum — que Fellini a finalement adapté en bande dessinée avec Milo Manara —, je me demande ce qu'il aurait bien pu faire avec Le Seigneur des Anneaux, une oeuvre qui me semble ne pas être, disons, assez latine pour correspondre à l'imaginaire fellinien, et cela malgré la maîtrise qui était assurément celle de Fellini en matière de mise en scène... J'aurai, pour ma part, été curieux de voir ce que John Boorman (qui, par ailleurs, a connu Fellini) aurait fait en ayant la possibilité d'aller jusqu'au bout de son projet d'adaptation du roman de Tolkien... Le résultat n'aurait sans doute pas été forcément très orthodoxe d'un point de vue "strictement" tolkienien (ainsi que le laisse notamment deviner le scénario parvenu jusqu'à nous), mais Boorman aurait sûrement proposé une vraie vision d'auteur, en tout cas.
Hyarion a écrit :[...] Je repense à ces phrases prononcées par Orson Welles à la fin de son film F For Fake (Vérités et Mensonges, 1973) : “What we professional liars hope to serve is truth. I'm afraid the pompous word for that is "art". Picasso himself said it. Art (he said) is a lie. A lie that makes us realize the truth.” Dans le cas de showrunners comme ceux de la série Amazon dont il est question ici, je me demande où ils peuvent bien se situer, en matière de vérité et en matière d'art... En fait, la seule vérité qu'ils me paraissent révéler, en l'état, renvoie à la « loi du marché »...
excellente citation à rappeler et malvenue d'Orson Welles.
Picasso a bien joué la-dessus pour sa propre fortune mais l'art n'est pas que mensonge ou tromperie, sinon autant fermer tous les musées et les bibliothèques.
Loi du marché, oui mais beauté aussi, sinon je change de job, sauf à penser que les auteurs ne sont que des producteurs, pas des artistes. Je reconnais, certes que ce fut un gagne pain pour beaucoup mais sans rien enlever à la création.
Il ne faut pas oublier le ton et l'esprit avec lesquels Welles prononcent ces phrases, dans un film sur le vrai et le faux évoquant notamment la question de la valeur que l'on accorde aux notions d'auteur et d'art. Dans ces propos, qui se situent à la fin de son film, il y a de l'ironie, mais pas du tout de cynisme, a fortiori lorsque l'on n'oublie pas la méditation qu'Orson Welles partage précédemment dans ce même long métrage, dans une séquence où il se met en scène en train de contempler la cathédrale de Chartres, qu'il admirait beaucoup (également lecteur de Montaigne, le réalisateur de Citizen Kane était francophile) : https://www.youtube.com/watch?v=oB3tj1c1Itg
J'accompagne cette belle citation, que je n'ose traduire, de deux tableaux auxquels elle m'aura fait penser.
Jean-Baptiste Camille Corot (1796-1875).
La Cathédrale de Chartres, 1830/1872.
Huile sur toile, 64 × 51,5 cm.
Paris, musée du Louvre.
And this has been standing here for centuries. The premier work of man perhaps in the whole Western world, and it's without a signature: Chartres.
A celebration to God's glory and to the dignity of man. All that's left, most artists seem to feel these days, is man. Naked, poor, forked radish. There aren't any celebrations. Ours, the scientists keep telling us, is a universe which is disposable. You know, it might be just this one anonymous glory of all things, this rich stone forest, this epic chant, this gaiety, this grand, choiring shout of affirmation, which we choose when all our cities are dust, to stand intact, to mark where we have been, to testify to what we had it in us to accomplish.
Our works in stone, in paint, in print, are spared, some of them for a few decades or a millennium or two, but everything must finally fall in war or wear away into the ultimate and universal ash. The triumphs and the frauds, the treasures and the fakes. A fact of life. We're going to die. “Be of good heart”, cry the dead artists out of the living past. Our songs will all be silenced — but what of it? Go on singing. Maybe a man's name doesn't matter all that much.
Orson Welles, F for Fake.
Zdzisław Beksiński (1929-2005).
Œuvre sans titre (Peinture AA83), 1983.
Huile sur panneau, 87 x 73 cm.
Sanok (Pologne), Musée historique.
Peace and love,
B.
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We're going to die. “Be of good heart” selon Orson Welles
Bon, au cas où, il y a tout de même un défibrillateur dans la nef de la cathédrale de Chartres, en entrant à gauche
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Hisweloke, je dirais que l'acteur qui joue Halbrand/Sauron n'est pas mauvais, mais que le discours d'escorte qu'il utilise pour parler de son jeu est plus ambitieux que son jeu lui-même et que la direction de son jeu. Tout cela est en-deçà de ce que j'attends pour dépeindre un ange/dieu déchu comme Sauron, mais les choix scénaristiques dans l'affaire ne peuvent que ternir celle-ci. J'ajoute qu'il est louable que les acteurs aillent au-delà du cahier des charges. Christopher Lee, par exemple, parvenait à donner un tour un peu particulier au personnage de Saruman dans la trilogie de Peter Jackson, qui venait sans doute du mélange de sa longue expérience d'acteur et de sa vraie connaissance de l'œuvre originelle. In fine, cependant, même si cela peut être plutôt positif pour qui recherche les fragments de l'original, Lee jouait essentiellement le Saruman de Jackson, évidemment.
Tu évoques la "prélogie" de Star Wars. J'étais encore adolescent à l'époque de sa diffusion (je suis en début de trentaine), mais j'avais déjà approché les classiques (faisant grec et latin) et je sentais que le cadre était malaisé pour réussir à lier à l'esprit Star Wars de la trilogie originelle à une ambition plus grande, plus tragique, qui était nécessaire pour souligner la transformation d'Anakin et de la République en Vader et en Empire (respectivement). Lucas ne pouvait pas non plus être Shakespeare (là où les showrunners de TROP se voudraient Milton ?!), qui mélange les registres et même les genres comme diable (ce qui fut sur nos bords considéré comme une abomination, avant les Romantiques), mais Shakespeare n'avait pas comme mission secondaire de vendre des produits dérivés, cela étant dit. Ajoutons à cela que la prélogie a été assez maladroite dans sa construction (d'où l'idée plus tard de faire les séries Clone Wars) : en faisant du premier épisode la préquelle de la préquelle, Lucas a diminué le temps disponible, ensuite, pour traiter de ce qui comptait à propos du renversement d'Anakin.
Curieusement, je trouve plutôt les mêmes problèmes dans cette série, en ce qui concerne Halbrand/Sauron, ou le rétrécissement et la rapidité incroyables de la création des Anneaux - enfin des Trois...
Il n'est pas impossible de concevoir la progression d'un personnage sauronien, en se fondant sur ce que Tolkien en dit. Il a fourni la trame, explicite ou implicite, même s'il y a des doutes, notamment dans l'essai sur la motivation des personnages du Silmarillion (dans les derniers HoME). La difficulté, c'est que la série a réussi à reprendre certains fragments de cette idée (sur l'histoire de la demi-repentance complexe de Sauron), mais évidemment, en l'absence des droits et vu le changement d'inspiration, ça donne... autre chose. Et en suivant la mode actuelle, on aboutit à un duo Sauron/Galadriel, qui permet bien pratiquement de suivre la tendance perceptible dans des séries de genres variés mais aussi dans l'imaginaire. Pendant ce temps, la relation Sauron/Celebrimbor a été délaissée : elle est évidemment plus difficile à mettre en place. Il faut imaginer ce que Tolkien laisse dans la brume et qui est difficile, là où Sauron/Galadriel correspond à des motifs et à des types déjà assez souvent vus à l'écran.
Morgoth me semble en effet efficace et bien écrit en effet dans l'histoire de Húrin. J'ai envie de citer ses mots :
"I am the Elder King: Melkor, first and mightiest of the Valar, who was before the world, and made it. The shadow of my purpose lies upon Arda, and all that is in it bends slowly and surely to my will. But upon all whom you love my thought shall weigh as a cloud of Doom, and it shall bring them down into darkness and despair. Wherever they go, evil shall arise. Whenever they speak, their words shall bring ill counsel. Whatsoever they do shall turn against them. They shall die without hope, cursing both life and death."
Comme ailleurs, ici, on sent que Tolkien connait ses classiques - et évidemment, il comprend le mythique, le tragique, l'épique... de façon intime. Il sait aussi faire parler un dieu maléfique. Ensuite, comme tu l'écris, ça se sent dans les Wanderings of Húrin, du côté de l'influence indirecte de Morgoth.
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Il n'est pas impossible de concevoir la progression d'un personnage sauronien, en se fondant sur ce que Tolkien en dit. Il a fourni la trame, explicite ou implicite, même s'il y a des doutes, notamment dans l'essai sur la motivation des personnages du Silmarillion (dans les derniers HoME). La difficulté, c'est que la série a réussi à reprendre certains fragments de cette idée (sur l'histoire de la demi-repentance complexe de Sauron)
J'ai toujours eu une certaine fascination quant à la situation de Sauron à la fin du 1er âge. Je le vois reconnaître sans peine la défaite et donc la futilité morale de son entreprise, en bon utilitariste corrompu. D'autant plus qu'il peut en rejeter la responsabilité sur son ancien patron. Ce premier constat ouvre la porte à un second bien plus pénible à digérer : celui d'avoir eu potentiellement tort sur toute la ligne, sentiment d'autant plus plausible que l'absence nouvelle de Morgoth lui fait prendre la mesure de l'emprise que ce dernier avait sur lui. Cette succession d'humiliations devient insupportable pour le fantasque Sauron, qui rechigne à s'incliner devant Eönwë, pas aidé par la symétrie de leurs positions respectives, en prime.
Sauron, peut-être, fantasme alors sur une solution satisfaisant son narcissisme: il est le seul à pouvoir imposer, sous sa puissance fédératrice, la coexistence apaisée en Terre du Milieu, chose que les Valar, Elfes, Nains, Humains et compagnie sont trop moralement atrophiés pour envisager. Délusion qui se transformera à son rythme en désillusion avant d'être tout à fait abandonnée. Annatar émergera plus tard sous d'autres motivations...
La lassitude et l'amertume avec laquelle Charlie Vickers joue Sauron se prête parfois bien à cette interprétation, si on replace l'action au début du 2nd âge. C'est un des rares acteurs qui se montre relativement supportable, je trouve. J'ai su parfois aussi apprécier la bonhomie de Durin et sa compagne.
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Quelque temps plus tard...
Je ne sais pas quand la série télé Amazon des "Anneaux de Pouvoir" reviendra à nouveau sur le devant de la scène avec une nouvelle saison, mais c'est peu de dire que l'absence d'attente vis-à-vis d'elle reste constante me concernant...
Je me permets de remonter ce fuseau parce que l'on y a parfois parlé aussi d'autres productions audiovisuelles, et que, comme j'ai déjà pu l'écrire ailleurs, depuis l'automne de l'année dernière, je me suis décidé à retourner de temps en temps dans les salles obscures, et ce jusqu'en octobre dernier, après quoi la motivation a de nouveau fondue, face à une offre d'aujourd'hui qui continue à ne pas beaucoup me parler, l'accumulation des soucis s'arrangeant rien (même si je n'ai pas renoncé, pour autant et par ailleurs, mais lorsque j'ai encore le temps, aux visites de musées, aux concerts classiques [tant que je peux], et au visionnage de films en DVD)...
Or il se trouve que je viens justement de retrouver les tickets de séances de cinéma pour les quelques films récents que j'ai vus sur grand écran depuis novembre 2022...
Inventaire :
La Maison d'Anissa Bonnefont, d'après le roman/récit/autofiction homonyme d'Emma Becker. Je n'aime pas le genre littéraire contemporain de l'autofiction, qui reflète trop souvent un privilège de "bobo" produisant du vide nombriliste, mais j'ai fait une exception pour ce roman-ci et donc pour le film qui en est librement inspiré, en raison du sujet traité — la prostitution, ici vue d'un regard féminin. Le film m'a paru, dans l'ensemble, plutôt correct, sachant tous les clichés (souvent misérabilistes) que l'on risque toujours de trouver dans un long métrage traitant d'un tel sujet : dans ce cas-ci, malgré la maladresse de certains passages (pour lesquels il aurait parfois mieux valu rester proche du roman de Becker), la prétention réaliste de certains éléments pourtant téléphonés (le jugement de la famille d'Emma sur son activité, par exemple) et la persistance de préjugés à l'égard du sujet (influence du porno, etc.), le film tient globalement la route, l'inévitable couplet moralisateur m'ayant paru avoir été mis davantage en veilleuse que d'habitude, ce qui contribue déjà en soi à rendre ce long métrage regardable, de mon point de vue ;
Avatar 2 : la voie de l'eau de James Cameron. Je suis allé à la séance à reculons, car j'ai toujours détesté le côté mégalomane de Cameron et la promotion pachydermique de ses films à chacune de leur sortie en salles. Cependant, après une première demi-heure laborieuse où l'on s'efforce de justifier le film comme étant la suite du précédent, je reconnais que l'on se laisse prendre par l'histoire, certes cousue de fil blanc (comme d'habitude), de cette fable écologique, truffée par ailleurs de références à d'autres longs métrages célèbres de Cameron ;
Caravage (L'Ombra di Caravaggio) de Michele Placido. De facture assez classique, mais sans être lourdement didactique pour autant, ce film constitue une bonne évocation de la vie tourmentée du peintre et de sa créativité, dans le contexte violent, inégalitaire et intolérant de son temps (fin XVIe, début XVIIe siècle ; Caravage est mort la même année qu'Henri IV en France, en 1610). La photographie du film est excellente, mettant en valeur les teintes que l'on retrouve dans la peinture du Caravage, dont les tableaux, et ceux d'autres peintres de l'époque (dont Artemisia Gentileschi, qui apparait dans le film) ont été reproduits en imitant les textures d'origine, pour plus de crédibilité. Malgré quelques petits problèmes de post-synchronisation des voix pour cette production franco-italienne, le casting du film m'a paru à la hauteur du sujet traité. Les décors et les costumes sont réalistes, avec notamment ce qu'il faut de saleté, comme dans un autre film "biopic" assez récent, sur un autre génie de l'époque : Michel-Ange d'Andreï Konchalovsky (ou Kontchalovski), un autre bon long métrage sur la création et ses tourments, vu sur grand écran en mai 2021 (c'était alors la première fois que je revenais dans un cinéma depuis... l'été précédent !) ;
John Wick : chapitre 4 de Chad Stahelski. Je n'avais jusque-là encore jamais vu sur grand écran un film de la série "John Wick", ayant découvert le premier long métrage de ladite série à la télé, quelques jours avant d'aller voir au cinéma, par curiosité, ce quatrième film, dont l'action se passe en partie à Paris (notamment à Montmartre et jusqu'à l'intérieur du musée du Louvre). Le fait de savoir que Stahelski dit s'être inspiré de Point Blank (Le Point de non-retour, 1967) de John Boorman (à mes yeux, un des meilleurs films de Boorman avec Excalibur) pour développer le personnage de John Wick, m'a aidé notamment à faire le parallèle entre, d'une part, la séquence très amusante du film de Boorman se passant dans une boîte/discothèque psychédélique californienne (le Movie-House) et se finissant par une baston, et d'autre part les séquences de bagarre de Wick comme celle se passant, dans ce quatrième film de la franchise, dans une discothèque berlinoise pour laquelle la Alte Nationalgalerie de Berlin a servi de décor extérieur : ainsi, avec ce type de référence cinéphile, le film d'action de Stahelski peut-il être regardé avec une appréciable dimension de second degré ;
Jeanne du Barry de Maïwenn. Tourné dans des décors magnifiques et avec des costumes somptueux, c'est un bon film historique, qui peut se regarder comme tel, sans forcément penser qu'il est aussi une manière pour la cinéaste de raconter sa vie à travers celle de la dernière favorite du roi Louis XV ;
Il Beomo de Petr Václav. Un excellent film historique, dont l'action se passe au XVIIIe siècle comme le précédent cité, et qui évoque pour sa part la vie en Italie du musicien et compositeur pragois Josef Mysliveček (1737-1781), admiré par le jeune Mozart. Il Beomo a été présenté comme étant dans le sillage d'Amadeus et de Barry Lyndon, sans avoir cependant la frénésie du premier (ce qui est plutôt un avantage) ni l'ampleur biographique du second (ce qui sert plutôt le propos, concentré sur la carrière italienne — à Venise, Naples, Rome... — de la vie de Mysliveček). Ce beau long métrage, notamment par le grand soin accordé à la reconstitution historique, en matière de décors, de costumes, de contexte culturel (celui du siècle des Lumières et de la façon dont on jouait la musique à cette époque), est à la hauteur de l'oeuvre musicale méconnue de ce compositeur, certes moins important que ses contemporains Haydn et Mozart dans l'histoire de la musique de ce temps, mais qui mérite de ne pas être oublié ;
Indiana Jones et le Cadran de la destinée de James Mangold. Une conclusion correcte de la série "Indiana Jone" au cinéma, sachant cependant qu'il était difficile de faire pire que le film précédent sorti en 2008, et ce malgré le fait que le thème du voyage dans le temps ne soit pas en soi très intéressant (car notamment trop aberrant scientifiquement). Harrison Ford s'en sort honorablement, mais vu son âge avancé, il était franchement plus que temps que la série s'arrête. Le premier film de cette série, Les Aventuriers de l'arche perdue (Raiders of the Lost Ark, 1981), reste à mes yeux le meilleur de tous, et un des rares films de Steven Spielberg que je peux revoir aujourd'hui avec plaisir (globalement, la "magie" de ce cinéaste ne "marche" plus sur moi) ;
Oppenheimer de Christopher Nolan. Le premier film de Nolan que j'ai pris la peine d'aller voir sur grand écran depuis Interstellar... C'est un bon "biopic" sur Robert Oppenheimer (1904-1967), monumental dans sa facture mais dans lequel le cinéaste fait l'effort d'être didactique vu la complexité du sujet. Le film, intéressant, demande de l'attention de la part du spectateur, mais j'avoue que je n'ai pas vu passer les trois heures de projection.
À cela s'ajoute quelques vieux films vus ou revus cette année sur grand écran, à la Cinémathèque de Toulouse :
Les Tueurs (The Killers, 1946) de Robert Siodmak, avec notamment Burt Lancaster et Ava Gardner ;
La Dame de Shanghai (The Lady from Shanghai, 1947) d'Orson Welles, qui est un des chefs-d'œuvre de Welles : je suis allé aux deux séances programmées ;
Péché mortel (Leave Her to Heaven, 1945) de John M. Stahl ;
Basic Instinct (1992) de Paul Verhoeven, déjà revu sur grand écran à la Cinémathèque de Toulouse, mais il y a déjà de très nombreuses années (vers 2005) ;
La Dolce Vita (1960) de Federico Fellini, chef-d'œuvre revu pour la première fois sur grand écran, en version restaurée, et lors de ce qui a été la dernière séance de cinéma me concernant pour le moment, au début du mois d'octobre dernier.
Aurai-je à nouveau à la fois le temps et la motivation pour retourner dans les salles obscures à l'avenir ? On verra bien...
Restent les films à voir ou à revoir en DVD, "à l'ancienne"... et parfois aussi quelques séries télé, diffusées en dehors des plateformes payantes, notamment sur la chaîne ARTE...
Peace and Love,
B.
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Je pose ça ici, si jamais ce sujet intéresse quelqu'un :
Quelques infos sur la saison 2 des AdP
I.
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Je pose aussi ça ici.
I.
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Et la VF, sans surprises...
https://youtu.be/UFFyYrxMd6Y?feature=shared
I.
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La saison 2 approche. Va-t-elle tenir toutes ses promesses ?
Les sites spécialisés vous présentent ces jours-ci plein de nouveaux nénelfes :
D'abord Camnir, « un Elfe expert en cartographie particulièrement doué pour naviguer dans les bois de l'Eriador », interpété par Calam Lynch ; puis Rían, « une Elfe réputée pour être l'une des meilleures archères de Lindon », jouée par Selina Lo.
Vous découvrirez également Mirdania « la protégée du maître forgeron Celebrimbor » qui sera jouée par Amelia Kenworthy.
Une fois n'est pas coutume dans ce monde de la mise en image de la Terre du Milieu, la franchise a essayé de faire un petit effort sur les noms.
On peut deviner une racine mírdan (s. joallier) dans le nom de Mirdania, ce qui pourrait être cohérent avec son rôle à proximité de Celebrimbor (même si la terminaison en "ia" ne me semble guère elfique). Quant à Rían, le nom pourrait être inspiré de la seconde partie du nom Celebrían, l'épouse d'Elrond, dont Tolkien avait tardivement précisé dans une lettre qu'il pourrait signifier "reine" (lettre 345 à Meriel Thurston).
Enfin, Camnir est plus bizarre. En décomposant en cam+nîr, on obtiendrait un nom sindarin pour le moins étrange étrange : la « Main qui pleure (?) »
On peut aussi signaler l'apparition d'un personnage de Tolkien, le nain Narvi, celui qui a créé la Porte ouest de la Moria avec Celebrimbor. « Cet habile forgeron », nous dit la franchise, sera joué par Kevin Eldon.
J'ai piqué sans vergogne les images sur un site qui s'appelle hypnoweb.net.
La saison 2 débutera dès le 29 août sur Prime Video. Ce sera sans moi.
I.
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La saison 2 approche. Va-t-elle tenir toutes ses promesses ?
J'ai appris, il y a déjà quelque temps (vers la fin du mois de mai dernier, de mémoire), que le personnage de Tom Bombadil a été intégré à « l'aventure » de cette série pour sa deuxième saison : les quelques photos diffusées en ligne et les propos sans relief des "coureurs de spectacle" les accompagnant (dans Vanity Fair notamment, et là encore de mémoire) ne donnaient pas envie, comme pour le reste...
Ce sera sans moi.
Ni moi. De toute façon, en matière de divertissement cet été, n'avons-nous pas déjà tout ce qu'il faut « à domicile » (dans tous les sens du terme) ?
Alea jacta est :
https://x.com/nocontextfre/status/1816477586056515629
(ou No comment, comme dirait Serge... ^^)
Amicalement,
B.
P.S. (27/07/2024 ; 02h37 du matin) : Bon, concernant l'ouverture des Jeux olympiques de Paris à laquelle j'ai fait allusion avec mon lien hypertexte, j'avoue que je n'étais particulièrement enthousiaste à la base, mais ayant tout de même regardé la cérémonie d'ouverture ce vendredi soir à la télé, je reconnais qu'elle était réussie, malgré la pluie, et les contraintes liées au fait que l'événement avait lieu au cœur de Paris et le long de la Seine. Il y a eu des choses bien, et d'autres moins bien, mais il en fallait pour tout le monde. J'imagine que Philippe de Villiers a dû avoir une attaque cardiaque devant le tableau du spectacle situé à la Conciergerie, avec Gojira et une Marie-Antoinette décapitée chantant « Ah ! Ça ira », et Alain Finkielkraut a dû pour sa part être consterné, lui qui est loin d'être bête mais qui n'aime pas le rap, de voir ce qui a été proposé du côté de l'Institut de France. Tant pis (pour eux). Pour ma part, j'ai apprécié entre autres que, musicalement, quelques grands compositeurs français soient au programme (Rameau, Saint-Saëns, Bizet, Offenbach, Satie, Dukas, Ravel et ses Jeux d'eau joués par Alexandre Kantorow, Debussy avec son Prélude à l'après-midi d'un faune...), et que les œuvres d'art des collections du Louvre soient utilisés de manière intelligente. Pour le reste, chacun ses goûts, et c'était en tout cas varié et festif la plupart du temps... mais même moi qui ne suis pas du tout amateur ni de Céline Dion, ni du répertoire d'Édith Piaf, j'ai trouvé émouvante la prestation musicale finale de la star québécoise sur la Tour Eiffel, qui fut un grand moment. Et la conclusion dans le jardin des Tuileries, avec l'allumage de la vasque de la flamme olympique, vasque finalement suspendue dans les airs avec une montgolfière : c'était tout simplement grandiose.
Bref, voilà au moins quelque-chose d'à la fois international et français (pour une fois), et de vraiment inédit, que l'on aura pu voir avec intérêt, en direct, sans même être obligé de payer un abonnement à Netflix ou Amazon Prime...
Oui, je sais, tout cela est hors-sujet, mais bon, ce n'est pas la première fois et après tout, il fallait que ce soit dit, histoire d'être un peu plus positif que d'habitude ces derniers temps...
B.
[EDIT: correction de fautes]
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J'ai appris, il y a déjà quelque temps (vers la fin du mois de mai dernier, de mémoire), que le personnage de Tom Bombadil a été intégré à « l'aventure » de cette série pour sa deuxième saison
Mais oui, Tom Bombadil ! Roooh... J'avais oublié
Je crois qu'il est visible dans ce nouveau trailer un peu plus long, qui date d'hier :
https://youtu.be/FZYQmY4sEUM?feature=shared
Je n'ose pas vous souhaiter un bon visionnage. Si vous aimez l’œuvre de Tolkien, mieux vaut passer votre chemin.
I.
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Rían, « une Elfe réputée pour être l'une des meilleures archères de Lindon », jouée par Selina Lo.
Quant à Rían, le nom pourrait être inspiré de la seconde partie du nom Celebrían, l'épouse d'Elrond, dont Tolkien avait tardivement précisé dans une lettre qu'il pourrait signifier "reine" (lettre 345 à Meriel Thurston).
Le nom Rían existe en tant que tel dans les textes, il s'agit de la femme de Huor et donc la mère de Tuor
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Arf ! Merci !
Depuis que je me suis spécialisé dans le Deuxième Âge, j'oublie mes classiques
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Je vais sans doute visionner la deuxième saison, parce qu'il faut le faire pour pouvoir en parler, parce que je m'intéresse à ce nouveau passage d'étape en matière de réception/"adaptation"/déformation de l'œuvre, vers des territoires de plus en plus éloignés de Tolkien, évidemment.
Je m'intéresse aussi à ce qui dans la série peut retranscrire le zeitgest des concepteurs, de l'industrie culturelle et des téléspectateurs.
Le côté complètement chimérique et absurde du projet (traiter du Deuxième Âge alors qu'on a légalement accès à quelques pages, sur les centaines qui existent ; prétendre respecter l'esprit de l'œuvre alors qu'on va à l'encontre, forcément, du matériau littéraire non accessible et qu'on suit une forme de projet de "modernisation" de cette Terre du Milieu...) me semble intéressant à étudier aussi. Tout autant que la sorte d'échec de l'opération, pour la première saison : comment, avec un tel budget, parvenir à ce résultat qui semble assez maigre (j'ai l'impression, peut-être fausse, que House of the Dragon fait bien plus parler d'elle que The Rings of Power) ?
La lassitude et l'amertume avec laquelle Charlie Vickers joue Sauron se prête parfois bien à cette interprétation, si on replace l'action au début du 2nd âge.
J'ai eu du mal à vraiment saisir le personnage et le jeu de l'acteur ainsi... Mais je dois dire que j'ai regardé distraitement. Tout l'aspect "Galadriel rencontre Sauron fortuitement en pleine mer et s'embarque avec lui pour des aventures sans queue ni tête" primait, dans ma perception. Le reste était ni clair, ni correct. S'il fallait installer une ambivalence, ce serait celle que Tolkien place dans le personnage au début du Second Âge, mais ce n'est pas exactement ce que fait la série, il me semble. De toute façon, la rupture de la chronologie empêche toute évolution vraisemblable de ce côté-là.
Il fallait au moins se fonder sur ce que Tolkien avait écrit ailleurs, quitte à là aussi le trahir - ou ne rien faire du tout, me dis-je. Là, le choix de trahir y compris le peu de matière accessible, voire les fondements mêmes de la mythologie d'Arda (par exemple en modifiant les motifs pour faire des Anneaux, en faisant se passer en même temps des événements qui ne peuvent pas chez Tolkien avoir de vraisemblance à la même période), c'est aussi ce qui explique les problèmes de la série et l'impression de patchwork bizarre qui s'en dégage.
D'après le trailer de la deuxième saison, les Anneaux semblent déjà dominés par Sauron alors même qu'il n'a pas l'Unique ? Enfin bon, de toute façon, même sans considérer Tolkien, pour la cohérence interne de cette "Terre du Milieu", on repassera.
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Le dernier trailer en date :
I.
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J'ai eu la curiosité d'écouter récemment un peu de la musique composée par Bear McCreary pour la deuxième saison de cette série Amazon : même si la forme d'expression symphonique est toujours appréciable en soi, le résultat me parait assez étroitement conçu pour plus ou moins coller aux images d'une série que par ailleurs je ne souhaite pas regarder, ce qui dès lors limite forcément un peu l'intérêt de l'expérience. Toutefois, parmi les extraits musicaux que propose depuis quelques jours le compositeur sur YouTube, je suis tout de même tombé sur une interprétation sympathique de “Old Tom Bombadil” (d'après le texte du SdA), chantée par l'artiste canado-américain Rufus Wainwright, pièce qui se suffit à elle-même et s'apprécie comme telle :
https://www.youtube.com/watch?v=L7oaZxdAMzI
La mise en musique instrumentale et chorale par McCreary me semble bien faite, et l'on sent un côté folk dans l'interprétation du chanteur qui me parait sonner juste vis-à-vis des paroles de Tolkien.
À noter que Rufus Wainwright, s'il est surtout connu pour sa carrière d'auteur-compositeur-interprète dans un domaine plutôt pop/rock, aime aussi par ailleurs la musique dite classique, au point d'avoir écrit lui-même deux opéras et un requiem (ce dernier, avec notamment l'actrice Meryl Streep en récitante, ayant été créé mondialement à Paris en juin dernier, dans l'Auditorium de Radio France). À cette aune, Wainwright a aussi notamment réalisé, il y a quelques années, un album live avec l'Amsterdam Sinfonietta, sorti en 2021, dans lequel il a souhaité inclure, étant francophile, des interprétations d'un air d'opéra de Jean-Philippe Rameau, « Tristes apprêts », et une des mélodies des Nuits d'été d'Hector Berlioz, « L'Île inconnue » :
- « Tristes apprêts » (Rameau) : https://www.youtube.com/watch?v=ZIJME3BFpAU
- « L'Île inconnue » (Berlioz) : https://www.youtube.com/watch?v=kbWhUUAPqRE
Peace and Love,
B.
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En effet, c'est un morceau réussi, au même titre que les autres pistes intradiégétiques de l'album.
Cette bande originale reste écoutable en dehors d'une prise en compte de la série elle-même, même si c'est un peu différent de la BO précédente qui proposait plus de "thèmes purs". La BO est anthologique de toute façon (même la piste portant sur la guerre en Eregion semble plus un assortiment qu'un morceau qu'on entendra comme cela en suivi lors de l'épisode). Mais j'aime trop le travail de Bear McCreary depuis longtemps pour ne pas l'écouter et j'arrive parfaitement à le distinguer des images, auxquelles je ne reviens pas (même si je me force à regarder cette série parce qu'il faut le faire pour pouvoir en discuter et éventuellement en tirer quelque chose en matière d'étude de la réception au dix-septième degré de la "Terre du Milieu").
Cela reste compliqué de me préparer à visionner cette suite, surtout dans un contexte où les polémiques ressurgissent sur les réseaux, avec des messages dont je vous laisse apprécier la profondeur, comme : "Le Tolkien Estate valide donc c'est éminemment respectueux de l'œuvre de Tolkien, nah".
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Ca démarre ce soir.
Mairon, nous feras-tu un petit retour sur tes impressions ?
I.
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Un article mis en ligne ce jour sur le site du Figaro, article consacré à cette série Amazon et basé sur un entretien accordé à Constance Jamet par les deux "coureurs de spectacle" ou showrunners de ladite série, tend à confirmer le manque de modestie de la part des intéressés déjà constaté à l'époque de la première saison.
« Superviser une fiction de cette ampleur, c'est une sorte de Jeux olympiques », déclarent-ils notamment : l'allusion semble un brin opportuniste, même en songeant à la dimension esthétique comme à l'organisation des cérémonies d'ouverture et de clôture des Jeux olympiques (et paralympiques)...
[...] Tom Bombadil, l'homme des bois qui apparaît dans Le Hobbit [sic] et La Communauté de l'anneau n'était jamais apparu dans les trilogies de Peter Jackson. «Nous avons relu Tolkien et nous nous sommes demandé quelles créatures arpentaient la Terre du Milieu lors du Second âge ?», expliquent J. D. Payne et Patrick McKay.
Relire Tolkien, c'est bien, mais l'utilisation de Tom Bombadil apparait, surtout, opportune en tant que rare référence tolkienienne à la fois compatible avec la période fictive mise en scène et exploitable en matière de droits. La dimension singulière du personnage, qui en partant des textes de Tolkien, aurait pu (pourrait un jour ?) en soi faire l'objet audacieux d'un film ou d'une mini-série susceptible de m'intéresser, semble ici inévitablement secondaire.
Pour bâtir Les Anneaux de pouvoir, J. D. Payne et Patrick McKay ont dû s'immerger dans des milliers de pages, recélant des informations contradictoires. «Ce volume de sources était d'autant plus délicat à gérer que nous n'avions pas les droits sur tous les textes formant ce canon. Donc parfois nous n'avions à notre disposition qu'une version et pas une autre. Cela a été libérateur. Si même Tolkien avait des idées différentes sur la façon dont les événements se sont passés, rien ne nous interdit d'avoir une idée intermédiaire voire nouvelle à ce sujet. Un peu comme une partition de jazz. Cette entre-deux nous permet de continuer à étendre le ’legendairium’ [sic] comme Tolkien l'a fait lui-même», plaide le duo.
Et d'ajouter : «Notre travail consiste à être des experts sur ce canon, aussi insaisissable qu'il soit, et le rendre compréhensible pour les néophytes, qui n'ont jamais vu un film se déroulant sur la Terre du Milieu auparavant. Cette exigence de cohérence, c'est notre mission, mais le spectateur n'a pas à s'en soucier. [...] Tolkien, c'est l'océan, c'est la fosse des Mariannes, on peut toujours aller plus loin. [...]»
L'analogie avec une « partition de jazz » est curieuse : j'aime le jazz, mais je ne suis pas sûr que la matière artistique tolkienienne corresponde, en matière de création et d'interprétation, à ce genre musical, caractérisé notamment par l'usage de l'improvisation (au sens noble et éminemment jazzistique du terme).
Tout à coup, je repense à la musique de Debussy qui a été diversement reprise, avec talent, par des musiciens de jazz : faire la même chose avec la musique de Wagner me paraîtrait, a priori, moins naturel...
Enfin, si Tolkien « c'est la fosse des Mariannes », alors cela suppose des limites, chez Tolkien précisément, et cela suppose même de finir par toucher le fond... mais du coup, peut-être pas le fond de la fosse des Mariannes... disons, plus modestement, le fond de la piscine (*) ? Bref, l'altération de la réception de Tolkien est en marche, et on ne peut que le constater (sans que cela soit, bien sûr, une nouveauté en soi).
Cela reste compliqué de me préparer à visionner cette suite, surtout dans un contexte où les polémiques ressurgissent sur les réseaux, avec des messages dont je vous laisse apprécier la profondeur, comme : "Le Tolkien Estate valide donc c'est éminemment respectueux de l'œuvre de Tolkien, nah".
J'avoue ne pas avoir beaucoup vu les polémiques en question ces derniers temps, à la différence de l'époque de la diffusion de la première saison, mais qu'elles ressurgissent ne m'étonne pas, et sur le principe même, cela ne peut effectivement que parasiter le visionnage d'une suite.
Mairon, nous feras-tu un petit retour sur tes impressions ?
Que ne ferait-on pas dans l'intérêt du public ? ^^'
(J'écris cela sans me prendre pour Mairon, évidemment !)
Peace and Love,
B.
(*) : Pardon pour cette formule un peu facile, déjà employée ailleurs récemment du reste, mais je n'ai pas pu résister. À noter, ceci dit, que bien évidemment, sur ses sites de vente en ligne faisant actuellement la promotion de la série, Amazon vend aussi des piscines...
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Il m'est toujours aussi difficile d'aborder la série. Quand on est un lecteur assidu des œuvres de Tolkien, il faut adopter une posture aussi paradoxale que la série elle-même pour parler de The Rings of Power et essayer de distinguer les niveaux d'analyse et de critique. J'ajoute ceci : autant je suis assez exaspéré par le jeu de dupes des showrunners (ah, la traduction par Hyarion est tout à fait adaptée), autant j'éprouve parfois aussi une forme de compassion pour l'équipe de la série et les acteurs, qui se retrouvent dans cette sorte de paradoxe géant brassant au moins un milliard de dollars, si j'ai bien suivi.
Je me suis permis de petits tweets au sujet de l'interview des showrunners, parce que je trouve qu'il importe que le public ait bel et bien conscience du statut très particulier de cette série. Enfin, mon audience est très limitée, mais il est utile de relayer les discours des spécialistes (comme Vincent Ferré par exemple) sur ce point. Comme je l'ai écrit ailleurs, je pense que plus d'honnêteté de la part des showrunners n'aurait pas nui à la série, au contraire ! Ce serait aussi plus conforme au reste de leurs intentions...
La suite est forcément spoileresque et marquée par le divulgâchage à foison, attention.
Le premier épisode de cette nouvelle saison s'ouvre sur une analepse. Morgoth a été vaincu quelque temps plus tôt. Sauron, depuis une base nordique, veut s'imposer comme son successeur face aux orques. Nous avons ici la forme "originelle" du personnage-de-la-série, qui est assez conforme à une synthèse de l'imaginaire dérivé récent (fan arts) entourant Sauron/"Mairon". Préalablement, le flashback du prologue réutilisait la forme casquée et armurée popularisée par le prologue de la première trilogie de Jackson. La difficulté qui se présente, à mes yeux, c'est que le Sauron de la série n'a pas été présenté visuellement de façon un chouïa plus longue en situation de véritable puissance ou comme un agent direct de Morgoth : cet aspect n'a finalement été évoqué que dans deux discussions, une entre Sauron et Galadriel après sa "révélation", l'autre en saison 2 entre Adar et Sauron (alors qu'Adar croit qu'il s'adresse juste à "Halbrand", bien entendu). Même si le prologue, chez Peter Jackson, pêchait par un curieux mélange de surpuissance et de débilité sauronienne (ce qui aurait pu être atténue s'il y avait eu dans le montage un combat effective, même court, avec Gil-Galad et Elendil), il proposait du moins une présentation un peu moins brève et plus dynamique de son pouvoir. J'ajoute que la fin de la scène avec les orques présente le même paradoxe que dans le premier film de Peter Jackson : c'est lorsque Sauron est tué qu'on a vraiment l'impression qu'il est un être hors du commun, avec ce fameux procédé de "l'explosion" (poussé encore plus loin par la série puisque cette mort de Sauron glace tous les alentours).
J'avoue avoir bien ri en ayant l'impression que Sauron était aussi doué pour la pédagogie que moi face à mes élèves (vous sentirez ici l'anxiété d'un professeur qui vient de faire sa pré-rentrée, et se trouve soudainement confronté à la réalité du fait qu'il va devoir pour la première fois enseigner aussi à des collégiens). La différence, c'est que je ne propose pas à mes élèves de se sacrifier pour apprendre leurs déclinaisons latines, et que je ne les considère pas comme de la chair à canon ou de la chair à magie, évidemment !
Bon, que dire : la série est faite pour le public le plus large possible. Elle n'est donc pas subtile, tel est son cahier des charges. Cela vaut aussi pour la présentation de Sauron. J'ai trouvé que la scène manquait d'ambition et d'imagination. Apparemment, les passionnés de la série sur X/ex-Twitter sont d'un autre avis, mais j'ai parfois un léger doute sur l'authenticité de cette série de comptes intitulés d'après des bouts de personnages ou d'objets de la série (la besace d'Elendil, le pendentif de Sauron, ou autre) et publiant des messages souvent plus dithyrambiques que les anciens dithyrambes.
Ce Sauron présente la même sorte de décalage que je ressens dans d'autres univers fictionnels qui dépeignent des personnages divins ou angéliques, mais sur un mode pour ainsi dire quelque peu dégradé, sans doute contaminé par l'air du temps, relativement "marvélisé". Tolkien envisageait les Valar et Maiar sous un angle "mythique", sur le mode classique qu'on connaît bien depuis l'Antiquité : même si les dieux grecs ont quantité de tares, et illustrent des comportements ô combien trop humains, il est pourtant clair que ce sont des dieux, lorsqu'on lit les Anciens. Dans un univers à la Marvel, où tout se mélange sans véritable cohérence autre qu'une sorte d'échelle des pouvoirs RPGisée, dieux, super-héros, héros, humains, aliens, n'ont guère plus de différences intrinsèques - et le mode utilisé pour traiter des dieux n'est pas fondamentalement différent de celui usité pour les autres catégories de personnages.
Pour constituer ce personnage de Sauron, les scénaristes se fondent finalement plus sur l'oeuvre de Milton que sur celle de Tolkien, paradoxalement - puisque là, il n'y a pas de questions de droits ! Mais bon, Satan dans Paradise Lost est Satan, mais le Satan d'un dérivé lointain, popularisé, amoindri, déversifié, de Paradise Lost, n'est plus forcément un Satan digne de ce nom. Visiblement, ceux qui disent que le "Sauron" de la série est bel et bien Sauron sont moins préoccupés que moi par cette question qui me semble pourtant essentielle. Mais une fois encore, le propos de la série n'est pas d'aller vers ce genre de sommet !
Pourtant, un point intéressant depuis la première saison, c'est que Adar, personnage inventé par la série, impossible chez Tolkien (même si les Orques peuvent provenir d'Elfes corrompus, il n'y a pas d'"ancêtre original des Orques" qui survive jusqu'à cette période, évidemment), semble finalement mieux traité et avoir un peu plus d'authenticité et de profondeur que les personnages repris à Tolkien. Mais cela reste discutable ! Néanmoins, la scène où Adar revient sur sa première rencontre avec Sauron est bien faite et est d'un meilleur niveau que d'autres passages qui peinent à donner l'impression d'une forme de profondeur.
En somme, il manque au moins un soupçon de grandeur pour que la divinité de Sauron soit perceptible. Les choix effectués font que Sauron ne va être actif au Deuxième âge que sur une période très courte, puisque la série ne se déroule manifestement que sur l'empan de la vie d'Isildur à peu près, hors analepses : on peut s'étonner de la rapidité qui découle de ce choix. La conséquence, c'est qu'une fois encore, on va avoir l'impression que Sauron ne sera vraiment puissant qu'après avoir forgé l'Anneau Unique : disons que le bond sera prodigieux à partir de là dans la série, puisque pour le moment Sauron n'a ni Mordor, ni Barad-Dûr, ni peuples humains ou autres sous son contrôle. La défaite d'Adar est nécessaire pour qu'il avance.
Ensuite, le personnage est présenté de façon plutôt horrifique comme devant se sustenter d'êtres vivants pour se reconstituer, sur le long terme, une forme physique anthropomorphe... avec peut-être un côté comique involontaire, d'humour noir ?
La psychologie du personnage est ensuite présentée rapidement jusqu'au moment de la rencontre avec Galadriel. Ce point reste donc marqué par un aspect fortuit ou par le coup du destin : les scénaristes auraient eu du mal à le justifier autrement, certes.
La scène suivante s'ouvre sur une petite course poursuite entre Galadriel et Elrond. Galadriel se fait évidemment distancer et doit désormais expliquer à Gil-Galad qui est véritablement Halbrand. La série évite donc une longue période incongrue de dissimulation par Galadriel. Mais elle force un conflit entre Elrond et les deux autres personnages en le dramatisant par une belle chute dans une cascade, seul moyen de justifier ensuite sa possibilité de garder les Anneaux et de les apporter à Círdan.
Bon, au moins, Ben Daniels se révèle très convainquant en Círdan, tandis que j'ai du mal avec la plupart des autres Elfes de la série - Benjamin Walker ne parvient pas à me faire croire qu'il est effectivement Gil-Galad, même si ce n'est pas un problème spécialement de jeu d'acteur (et que son chant est bon !) - c'est difficile à décrire.
Les scènes avec Gandalf me donnent toujours l'impression d'un ajout surnuméraire à l'histoire, ce qui ne trouvera vraiment son lien avec le reste que bien plus tard dans la série, puisque pour l'instant le personnage est loin à l'Est. Ah, et chouette, on suit les aventures de Frodine et Samette aussi : j'avais presque oublié !
Sauron parvient à convaincre Adar de le laisser partir et il règle le compte de Waldreg grâce à sa connaissance des wargs. Cela permet de compenser le mauvais traitement réservé plus tôt dans l'épisode à un rat, un mille-pattes et sans doute d'autres animaux. Finalement, pour le moment, Sauron n'est pas si méchant avec la nature : d'ailleurs, c'est Adar qui a fait exploser Orodruin, pas lui !
La grande scène suivante est celle de la révélation du pouvoir des Trois. Il convient ici de rappeler que les scénaristes ont profondément bouleversé plusieurs points fondamentaux : l'immortalité réelle des Elfes n'est pas évoquée (dans mon souvenir), le rapport à Valinor est différent, on ne comprend pas les différences entre les peuples elfes (point pourtant clair dans LoTR), la question de la fin de l'"âge des elfes" est simplifiée de façon complètement abusive pour dramatiser les enjeux et l'urgence... d'où des changements monumentaux aussi à propos des Anneaux.
Je continue de penser que ce sont là des bêtises. Le renversement de l'ordre de création des Anneaux est préjudiciable à l'histoire, et tout ce que je viens d'indiquer l'est aussi à sa manière, mais bon, de toute façon, vu le traitement de la chronologie, tout est chamboulé depuis longtemps.
Il faut comprendre la différence philosophique entre les motivations des Anneaux (notamment les Trois) entre l'oeuvre et la série. Dans la série, les Trois arrivent en premier et sont le produit d'une nécessité vitale. Sans eux, les Elfes sont "forcés de partir". La série propose bien entendu l'alternative entre l'utilisation des Trois et ce qui serait plus raisonnable : rentrer en Valinor. Mais elle fausse le jeu puisque plusieurs Elfes connaissent dès maintenant le risque : Sauron pourrait utiliser les Anneaux à son avantage. Cela transforme donc le questionnement philosophique : le problème n'est pas de s'intéresser au fait qu'il peut être douteux de vouloir transformer une partie du monde en Eden plutôt que de rejoindre l'Eden qui existe déjà et qui accueille les Elfes (mais pas les autres peuples), le problème, c'est que la survie des Elfes est désormais liée à un outil susceptible d'être contrôlé par Sauron - et en même temps seule l'utilisation des Anneaux permet aux Elfes de rester pour contrer Sauron. Bref, encore un point sur lequel le mythe est tout à fait transformé, en assimilant d'ailleurs l'affaire à une situation tout à fait postérieure (celle de l'époque de LoTR, où il y a de toute façon beaucoup moins d'Eldar en Terre du Milieu et où les Trois ont, justement, pu fonctionner durant des millénaires, pas durant cinq minutes).
La scène elle-même est bien faite du côté du spectaculaire, avec une bonne musique. Ce n'est évidemment pas "fin" mais on comprend ici facilement les enjeux de la visualisation de l'affaire, du pouvoir de ces Anneaux. Mais malgré ça, il n'en demeure pas moins qu'il semble incongru que les Trois aient été faits en premier, avec l'aide de Sauron, que les Anneaux mineurs n'existent pas, etc. Cela ouvre donc à la suite, où l'on voit que Sauron propose directement à Celebrimbor de faire des Anneaux pour les autres peuples, idée globalement incongrue chez Tolkien à moins de croire que Durin aurait effectivement eu droit à un Anneau de façon indépendante des "dons" ultérieurs de Sauron/Annatar.
Voilà pour ce premier épisode. Mon message n'est guère ordonné et sans doute peu fluide. Je préfère ne pas conclure, à ce stade. Il y a plus de matière à se mettre sous la dent qu'auparavant, malgré tout.
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Merci à tous les deux pour vos retour très complets (bien que, Hyarion, ôte-moi d'un doute, tu l'as bien visionnée ? tu n'en fais pas directement mention dans ton message).
je pense que plus d'honnêteté de la part des showrunners n'aurait pas nui à la série, au contraire !
Hihi ! Voilà qui nous renvoie 24 ans en arrière à propos de la promotion d'une certaine trilogie. Finalement, rien ne change
Mon message n'est guère ordonné et sans doute peu fluide. Je préfère ne pas conclure, à ce stade.
Pas de souci, on arrive à te suivre. De ce que j'ai lu ou écouté ici et là, tu n'es pas le seul à avoir du mal à ranger les choses, après cette première salve de trois épisodes.
A mon avis, la série elle-même ne permet sans doute pas, avec sa multiplicité de personnages creux, d'arcs désordonnés et de longueurs sans issue, d'aborder une analyse bien cadrée... Donc bravo pour cet effort
I.
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Hyarion, hôte moi d'un doute, tu l'as bien visionnée ? tu n'en fais pas directement mention dans ton message
La deuxième saison de la série ? Je ne l'ai pas visionnée, ce pourquoi en effet, je n'en ai pas directement fait mention : comme je l'avais signalé précédemment, je ne souhaite pas la regarder, a fortiori via un abonnement à Amazon Prime, et mon précédent message est simplement une réaction après lecture de l'article du Figaro dans lequel s'expriment les deux "coureurs de spectacle".
Du reste, à ce propos...
... showrunners (ah, la traduction par Hyarion est tout à fait adaptée)
Il convient ici de préciser que c'est notre ami JR qui, le premier et ici même en octobre 2022, a proposé cette traduction littérale, laquelle m'avait tout de suite convenu, au point d'en avoir fait plusieurs fois usage dans le présent fuseau, cet automne-là... En 2022, j'avais pris soin à chaque fois de créditer (par exemple ainsi, dans un ancien message : « "coureurs de spectacle" (©JR/Isengar) »), mais pas cette année : négligence coupable ! Bref, comme dirait Jésus, il faut rendre à César ce qui appartient à César.
N.B. : je fais ici allusion en image à un film (Asterix aux Jeux olympiques) que je n'ai jamais vu en dehors de quelques extraits, dont la séquence ultra-référentielle (un peu trop, même) avec Delon illustrée ici. Il se trouve qu'il en est de ce film comme de la série Amazon qui nous occupe ici : le visionnage de seulement quelques extraits choisis de la première saison m'aura suffi pour me faire une idée et pour ne pas avoir envie de pousser plus loin l'expérience...
Cela n'interdit pas toutefois, du moins à ce qu'il me semble, d'avoir notamment un avis sur le discours des showrunners, et d'ailleurs à ce propos :
...autant je suis assez exaspéré par le jeu de dupes des showrunners (ah, la traduction par Hyarion est tout à fait adaptée), autant j'éprouve parfois aussi une forme de compassion pour l'équipe de la série et les acteurs, qui se retrouvent dans cette sorte de paradoxe géant brassant au moins un milliard de dollars, si j'ai bien suivi.
Même sans avoir visionné la série (sauf quelques extraits de la première saison, disais-je), je suis assez d'accord avec cela : on sent bien, au fond, que tous ces gens sont coincés entre l'affichage jugé nécessaire pour « vendre du rêve », et l'implication réelle en matière de travail à effectuer avec plus ou moins de sincérité. À cette aune, je n'ai pas, moi non plus, envie de les accabler. Reste le constat d'une entreprise assurément destinée à une très large audience, avec tout le côté ambiguë que cela suppose, un peu comme dans une campagne électorale : un peu d'honnêteté quant aux intentions de fond, ainsi que tu l'as aussi écrit, Mairon, n'aurait effectivement sans doute pas nui à la réception générale de cette série.
Mairon a écrit :Mon message n'est guère ordonné et sans doute peu fluide. Je préfère ne pas conclure, à ce stade.
Pas de souci, on arrive à te suivre. De ce que j'ai lu ou écouté ici et là, tu n'es pas le seul à avoir du mal à ranger les choses, après cette première salve de trois épisodes.
Je confirme : on parvient bien à suivre ton propos, Mairon.
Je me suis permis de petits tweets au sujet de l'interview des showrunners, parce que je trouve qu'il importe que le public ait bel et bien conscience du statut très particulier de cette série. Enfin, mon audience est très limitée, mais il est utile de relayer les discours des spécialistes (comme Vincent Ferré par exemple) sur ce point.
Oui, je suis d'accord : ce genre de démarche est toujours utile, même si le réseau d'Elon M. (X, ex-Twitter) fonctionne de manière tellement « éclatée » que ce que l'on peut essayer d'y partager peut s'apparenter souvent, de mon point de vue, et quels que soient les sujets, à des messages dans des bouteilles que l'on envoie à la mer, avec des résultats (soumis au conditionnement algorithmique) forcément très aléatoires, a fortiori dans un contexte très propice à la polarisation entre communautés d'opinion et aux outrances que permettent l'anonymat.
À cette aune, les crispations plus spécifiquement idéologiques autour de la série Amazon font plutôt « ton sur ton » avec les affrontements politiques en général, qui font très largement partie du quotidien sur X. Pour le sujet qui nous occupe, je note que la dernière polémique en date sur ce réseau social concerne des intentions idéologiques, apparemment présumées « wokes » (?) par certains commentateurs, derrière la représentation (quelque part dans les premiers épisodes de cette deuxième saison de la série) d'une mère orque avec son jeune enfant, représentation qui suscite donc sur X des « discussions », lesdits commentateurs semblant apparemment ne pas supporter l'idée même d'une quelconque « humanisation » des orques tolkieniens, préférant peut-être, au-delà même de la question des intentions initiales de Tolkien quant à ses orques, leurs origines et leur reproduction, avoir affaire à des méchants absolus à haïr absolument... plus encore peut-être que Sauron, LE grand méchant (« post-Morgoth ») éventuellement seul digne dès lors d'une sorte de reconnaissance « humaine »... Mais en raison de quoi ? De son « intelligence », tout minable qu'il peut pourtant aussi apparaître, avec ses gadgets de nécromancien ? Les orques, eux, semblent en tout cas, dans l'esprit de ceux qui désapprouvent leur éventuelle « humanisation », être condamnés à n'être qu'un « pur » objet de haine, dont l'élimination est dès lors attendue peut-être plus encore que l'on attend celle des méchants (grands et petits) dans les films d'action divertissants de type James Bond ou John Wick, mais ici avec comme une sorte de « supplément d'âme », dans un contexte se voulant, si j'ose dire, « moralement tolkienien ».
Bref, la question de la fonction des orques, de Sauron, des « méchants » en général, dans l'univers de Tolkien est intéressante, notamment quant aux limites « humaines » de l'œuvre et au traitement desdites limites via des adaptations audio-visuelles à grand spectacle, mais le traitement d'une telle question sur X aura toujours de grandes chances de rester superficiel...
...j'ai parfois un léger doute sur l'authenticité de cette série de comptes intitulés d'après des bouts de personnages ou d'objets de la série (la besace d'Elendil, le pendentif de Sauron, ou autre) et publiant des messages souvent plus dithyrambiques que les anciens dithyrambes.
J'avoue me poser parfois aussi la question de l'authenticité, sur le réseau d'Elon M., des comptes semblant seulement exister pour chanter des louanges sur un sujet donné. On sait qu'il existe sur X des « bots » programmés à cet effet. Je me souviens, il y a quelques semaines, avoir ri en voyant dévoilée la supercherie d'un de ces faux comptes automatisés, dans le contexte politique par ailleurs fort pénible des dernières élections législatives en France : le compte en question envoyait des commentaires dithyrambiques de soutien particulier à un député (mélenchoniste) au bas des messages (tweets le plus souvent à caractère polémique) de l'intéressé, mais soudain « devenu fou » (ou plutôt mal réglé dans sa programmation), ledit compte s'était rapidement mis à envoyer les mêmes commentaires louangeurs de soutien au bas des messages (tweets) militants d'autres députés et activistes politiques du même camp (mélenchoniste), mais sans avoir changé la mention particulière du destinataire original... Effet comique garanti !
Bonne rentrée (autant que possible) par ailleurs, Mairon (en collège et ailleurs)... ^^'
Peace and Love,
B.
... qui tente de regarder jusqu'au bout (pour une fois) le film Le Jour et la Nuit de BHL ... (c'est difficile)...
P.S. : je voulais envoyer ce message le 31 août avant minuit, mais voila, à quelques secondes près, l'envoi est daté de 00h00, le 1er septembre... Donc, il va être mal daté au moment du changement d'heure sur le forum, évidemment... C'est injuste ! Mais la vie est injuste...
En ligne
Merci à vous, ISENGAR et Hyarion.
Concernant les comptes sur X : je trouve qu'il y a une particularité dans les messages que je vois passer sur mon fil à propos de la série (pas parce que je suis abonné, mais en raison de l'assimilation des hashtags liés à la série à ceux liés à Tolkien, forcément) : par rapport aux réactions d'amateurs et de passionnés d'autres univers, c'est beaucoup plus hyperbolique. De là à déterminer la part d'artifice et d'honnêteté dans les comptes ou dans les messages, ce n'est pas si facile. Certains "fans" peuvent aussi être intéressés par le studio à travers des invitations aux premières, entre autres choses - et ce qui a émergé, par rapport aux temps les plus anciens de Twitter, c'est la monétisation de ce réseau social, dans les deux sens. Les youtubeurs (entre autres) qui attaquent violemment la série, avec souvent une intention politique assumée ou cachée, sont aussi, bien entendu, liés à ce genre de choses. En politique, il y a clairement des dizaines et des dizaines de milliers de bots, ce qui pose un vrai problème (notamment lorsque les fermes à bots parviennent effectivement à donner une forme de profondeur aux comptes créés, sur des mois et des mois) - mais mes interactions les plus troublantes ont été avec des militants bien "réels" mais réagissant avec l'humanité de bots.
Je peux aussi écrire que la différence, par exemple entre les messages qui apparaissaient sur mon fil en ce qui concerne la deuxième saison de House of the Dragon et ceux concernant The Rings of Power, c'est qu'il y avait beaucoup plus de réflexivité et d'esprit critique, voire de critique tout court, du côté de la première série évoquée : une vraie différence entre des spectateurs passionnés d'un côté et des groupies de l'autre.
Concernant le deuxième épisode, je vais être plus synthétique :
C'est une bonne idée que de dramatiser les enjeux du côté des Nains, avec une scène plutôt réussie qui montre les conséquences de la lointaine éruption en Mordor sur Khazad-Dûm, avec un séisme. J'ai l'impression que la série a moins de mal à représenter les Nains que les Elfes, la scène suivante avec les Elfes étant moins crédible. Au fond, les Nains relèvent davantage à la fois de l'inspiration du Hobbit et de LoTR, tandis que le spectateur s'attend, concernant les Elfes, à quelque chose de plus lié à LoTR seul voire à l'esprit du Silmarillion, je suppose.
L'énorme contraction de la chronologie à l'œuvre dans la série, et la révélation faite par Galadriel, produisent cet effet que les Elfes, bien informés par ailleurs, savent déjà que Sauron va retourner en Eregion pour manipuler Celebrimbor. Une fois encore, la série verse dans le phénomène paradoxal que j'ai déjà évoqué : par nécessité scénaristique, un acteur de l'action se retrouve simultanément avec trop et pas assez de pouvoir, et agit d'une façon bizarre. Les Elfes ont des espions dans le Sud et ils savent que Sauron est retourné au Mordor. Mais alors qu'il savent que c'est Sauron, ils dépêchent seulement deux messagers quelconques pour aller prévenir Celebrimbor en Eregion. Évidemment, ces pauvres hérauts vont être massacrés peu après par Sauron. Il faut bien qu'il ait le temps de forger avec Celebrimbor les autres Anneaux, même si ça prend juste quelques semaines dans la série... Eh bien, le résultat, c'est encore une fois l'impression bizarre qu'on pouvait ressentir, jadis, en regardant la saison 5 et les suivantes de Game of Thrones : une rupture entre un certain horizon d'attente (on est dans un monde vaguement tiré de Tolkien, après tout) et le côté bizarre, bête et simpliste des décisions politiques ou militaires - et tout simplement du scénario. Tout cela parce que la série a voulu se cimenter autour du combat Sauron/Galadriel, avec une révélation avant l'heure qui empêche l'ambiguïté du côté d'Annatar, qui a été troquée pour celle d'Halbrand en saison 1 - un troc bien discutable.
Pendant ce temps, Sauron attend aux portes de la ville que Celebrimbor veuille bien changer d'avis à son sujet. Rien de suspicieux évidemment derrière cette longue attente. Bon, la série n'est pas subtile, encore une fois !
Dans l'Est, nous découvrons un mauvais mage, responsable semble-t-elle de l'envoi des trois sorcières de la saison 1. Le décor est vite planté, le mage semble gouverner la zone en tyran, en s'appuyant sur une malédiction qui rend malades les hommes du coin, en tout cas ses chasseurs, forcés de porter des casques. On a donc le nouveau méchant et Gandalf devra lui régler son compte cette saison. De nouveau, curieusement, comme dans le cas d'Adar, c'est un personnage qui détient ce qu'on a enlevé au Sauron de la série (un pouvoir direct actuel sur des sujets et un territoire). Autre problème : puisque le mage va s'opposer à Gandalf, le risque est présent que ça représente une sorte de duplication du conflit Saruman/Gandalf qui a lieu bien plus tard. Vu les tendances scénaristiques communes dans les préquelles, de nos jours, c'est une crainte légitime. Le scénario semble tracé : Gandalf va découvrir son identité lors de cette quête secondaire ("je suis un Istar, je suis Olórin, je viens de l'Ouest") et récupérer son bâton (voire son chapeau ?) durant la saison. Tom Bombadil va constituer l'intermédiaire qui va motiver Gandalf, qui va bien sûr douter de ses capacités et de sa quête. Gandalf va peut-être même se choisir son surnom (ou se le voir attribuer par ses compagnonnes) dès cette saison. Quant au méchant mage, reste la possibilité que ce soit un futur Nazgûl, mais dans ce cas, cela signifie que Gandalf ne va pas le vaincre complètement.
La scène entre Círdan et Elrond offre un moyen à la série de compléter la présentation des pouvoirs des Anneaux, des Trois, mais avec encore une fois des modifications par rapport à l'œuvre qu'on peut regretter. C'est un nouvel effet de l'inversion de la chronologie (les Trois sont les premiers et les autres suivent leur modèle, au lieu de l'inverse, où les Trois sont les derniers - avant l'Unique - et sont particuliers), et la série simplifie l'affaire, au risque de rendre l'Anneau unique moins... unique (c'est lui qui offre un pouvoir de domination sur les autres êtres).
Je passe sur les péripéties de Gandalf et de ses deux amies. Ah, Celebrimbor change d'avis et accueille ce "pauvre Halbrand" dans sa tour... et révèle sa forme d'Annatar, avec un grand renfort d'effets pyrotechniques. L'image convoquée a ceci d'intéressant que Sauron ne parvient pas à renvoyer de lui-même la lumière : il reste dans l'ombre tandis que la lueur l'entoure, ce qui est bien entendu le signe de la supercherie. Ce Celebrimbor étant d'une naïveté confondante, après tout, ça passe. Mais on en revient à ma question originelle concernant cette série : pourquoi raconter cette histoire, mythique pour beaucoup, d'une façon aussi dégradée et déformée, incapable de s'appuyer directement sur la plupart des textes, avec autant d'invention tendance fantasy standard ? Au moins, la musique de Bear McCreary parvient à dépasser l'impression de "ah, c'est juste ça" que me donne cette série. Les scènes finales annoncent la suite : Galadriel doit accepter un rôle un peu plus secondaire, et les Nains vont bientôt rencontrer Annatar, chouette.
In fine, que dire ? L'épisode plaira sans doute à des spectateurs qui se sont habitués à cet univers-de-la-série et à es ambitions - ou manques d'ambition. La trame concernant Gandalf reste toujours aussi périphérique qu'auparavant, pour le moment. Les passages avec les Nains ne sont pas désagréables. Ceux avec les Elfes m'ont plutôt irrité : toujours cette impression qu'on plaque des noms et quelques références à Tolkien sur des êtres qui sont plutôt des Elfes de fantasy lambda. Concernant l'intrigue autour d'Annatar, je doute qu'elle satisfera les passionnés qui ont brodé dans leur imagination les facettes de cette relation Celebrimbor/Annatar séculaire chez Tolkien. L'absence de Númenor pour le moment rappelle qu'il était tout à fait possible de s'en passer à ce stade de l'intrigue, je crois !
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J'ai eu du mal à vraiment saisir le personnage et le jeu de l'acteur ainsi... Mais je dois dire que j'ai regardé distraitement.
Mes propos sur Charlie Vickers ont pour but de souligner une opportunité manquée, il faudrait en effet une disposition extrêmement charitable (restons gentils) pour interpréter l'histoire de Rings of Power sous cet angle.
J'ai visionné les épisodes mais je n'ai rien de pertinent à partager... Bon, j'ai tout de même bien rigolé quand un aigle de Manwë arrive à la bourre pour encenser le règne de Tar-Míriel, et se retrouve à légitimer le coup d'Etat d'Ar-Pharazôn bien malgré lui. Bravo aux artistes CGI, les expressions faciales de l'aigle (et ses petits cris) retranscrivent bien la détresse et l'outrage du noble rapace.
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Oh, oui, il y a, heureusement (notamment vu le budget), quand même certaines choses qui sont pas mal faites. J'ai éprouvé beaucoup de compassion pour ce pauvre aigle.
Si je reprends un point de vue surplombant, ce qui me gêne, dans cette série, c'est aussi que le cahier des charges est presque transparent. Alors, bien entendu, quand on est habitué à l'analyse narratologique (entre autres choses), on n'a pas le regard du téléspectateur lambda. Mais je trouve vraiment que la construction saute excessivement aux yeux. L'épisode 4 en est un assez bon exemple. Je continue à me demander ce qui "cloche", exactement. Par exemple, comment peut-on à la fois mettre en place des barrow-wights plutôt bien faits, et rendre la scène complètement anti-climactique et dénuée de véritable tension ? Le problème est plus évident à la fin de l'épisode, puisqu'on a le coup classique d'un personnage qui se "sacrifie" pour que les autres puissent s'enfuir, mais évidemment, au bout d'une vingtaine de mètres, il faut qu'ils se retournent pour contempler le courage de leur amie, sans aucun sentiment d'urgence réelle.
Je me passionne aussi pour comprendre l'acceptabilité par les "fans" de ces petites références, de ces petits détails tirés de l'œuvre, voire issus, exceptionnellement, d'autres sources normalement en dehors des droits d'adaptation... tandis que tout le reste est chamboulé et "impossible" à rapprocher de l'œuvre originelle bien sérieusement. Je concède cependant que certains aspects peuvent être - enfin ! - un peu plus tolkieniens, comme les Ents, ou quelques secondes où on se dit "Ah, ça pourrait être Tom Bombadil, pourquoi pas". Mais on est bien dans une stratégie : donner des gages qui permettent de faire croire que ce serait lié à Tolkien (""""vraiment"""), de brefs aperçus, mais quant au reste, c'est autre chose. Ici, l'idée était très claire : hop, on prend les barrow-wights qui étaient absents des films de Jackson, on prend Tom Bombadil, on fait un épisode autour, et les gens seront contents ou n'y verront que du feu.
J'ai tout de même l'impression qu'on nage dans une période où, peut-être en partie par sur-consommation de produits culturels (séries, films sur plate-forme, notamment), et par sur-production évidemment aussi, on finit par "accepter" davantage qu'avant, notamment sous l'angle scénaristique, et sous l'angle des easter eggs/clins d'œil/références, des ficelles bien plus grosses qu'auparavant.
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J'ai tout de même l'impression qu'on nage dans une période où, peut-être en partie par sur-consommation de produits culturels (séries, films sur plate-forme, notamment), et par sur-production évidemment aussi, on finit par "accepter" davantage qu'avant, notamment sous l'angle scénaristique, et sous l'angle des easter eggs/clins d'œil/références, des ficelles bien plus grosses qu'auparavant.
On était pourtant prévenus...
Play it again Jack, and then rewind the tape
And then play it again and again and again
Until ya mind is locked in.
Believin' all the lies that they're tellin' ya
Buyin' all the products that they're sellin' ya
They say jump, and ya say how high?
Ya braindead, ya gotta f***in' bullet in ya head !
Zack de la Rocha, 1992
I.
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Oh, oui, il y a, heureusement (notamment vu le budget), quand même certaines choses qui sont pas mal faites. J'ai éprouvé beaucoup de compassion pour ce pauvre aigle.
Si je reprends un point de vue surplombant, ce qui me gêne, dans cette série, c'est aussi que le cahier des charges est presque transparent. Alors, bien entendu, quand on est habitué à l'analyse narratologique (entre autres choses), on n'a pas le regard du téléspectateur lambda. Mais je trouve vraiment que la construction saute excessivement aux yeux. L'épisode 4 en est un assez bon exemple. Je continue à me demander ce qui "cloche", exactement. Par exemple, comment peut-on à la fois mettre en place des barrow-wights plutôt bien faits, et rendre la scène complètement anti-climactique et dénuée de véritable tension ? Le problème est plus évident à la fin de l'épisode, puisqu'on a le coup classique d'un personnage qui se "sacrifie" pour que les autres puissent s'enfuir, mais évidemment, au bout d'une vingtaine de mètres, il faut qu'ils se retournent pour contempler le courage de leur amie, sans aucun sentiment d'urgence réelle.
Je me passionne aussi pour comprendre l'acceptabilité par les "fans" de ces petites références, de ces petits détails tirés de l'œuvre, voire issus, exceptionnellement, d'autres sources normalement en dehors des droits d'adaptation... tandis que tout le reste est chamboulé et "impossible" à rapprocher de l'œuvre originelle bien sérieusement. Je concède cependant que certains aspects peuvent être - enfin ! - un peu plus tolkieniens, comme les Ents, ou quelques secondes où on se dit "Ah, ça pourrait être Tom Bombadil, pourquoi pas". Mais on est bien dans une stratégie : donner des gages qui permettent de faire croire que ce serait lié à Tolkien (""""vraiment"""), de brefs aperçus, mais quant au reste, c'est autre chose. Ici, l'idée était très claire : hop, on prend les barrow-wights qui étaient absents des films de Jackson, on prend Tom Bombadil, on fait un épisode autour, et les gens seront contents ou n'y verront que du feu.
J'ai tout de même l'impression qu'on nage dans une période où, peut-être en partie par sur-consommation de produits culturels (séries, films sur plate-forme, notamment), et par sur-production évidemment aussi, on finit par "accepter" davantage qu'avant, notamment sous l'angle scénaristique, et sous l'angle des easter eggs/clins d'œil/références, des ficelles bien plus grosses qu'auparavant.
Même pour le peu que j'ai vu, mes impressions tendent à rejoindre les tiennes : de mon point de vue, on est et on reste dans une forme de “fan service”, sans prise de risque, cherchant à plaire à la plus large audience malgré les contraintes évidentes vis-à-vis des droits d'adaptation. D'où le cahier des charges en général et les petits “easter eggs” en particulier.
Hier soir, samedi, sur X ex-Twitter, je suis tombé sur une courte vidéo en “split screen” (diffusée par le compte officiel @TheRingsofPower) de la séquence, du quatrième épisode de cette saison 2, montrant la rencontre entre Tom Bombadil et le personnage supposé être Gandalf en quête d'identité :
https://x.com/TheRingsofPower/status/18 … 2030166283
Saucissonnée en trois petits morceaux pour les besoins du tweet, la séquence se conclue par cet échange entre les deux personnages, remonté au plus court :
« — Who are you ?
— Bombadil. Tom Bombadil. »
Ce qui m'a fait naturellement penser à une célèbre réplique du cinéma d'espionnage :
« — Bond. James Bond. »
Sur le moment, je me suis dit que c'était moi qui faisait une association d'idées personnelle, mêlant littérature et cinéma, J. R. R. Tolkien et Ian Fleming... pourquoi pas ? Cela m'est déjà arrivé... Mais bon, la réalité derrière ma perception est sans doute plus « simple », plus « téléphonée » si j'ose dire, puisque je me suis rendu compte ensuite que l'acteur britannique jouant Tom Bombadil, Rory Kinnear, a également joué, au cinéma, le chef d'état-major du supérieur de 007 dans les quatre derniers films en date de James Bond (période Daniel Craig, donc) : pour les fans à la fois de séries télé sur plate-forme et de culture pop, « ça fait sens », je suppose.
J'ai toutefois visionné ensuite la séquence en entier, a priori dans son montage original, mise en ligne sur YouTube. Gandalf, errant sans chapeau ni bâton, se fait prendre au piège par un vieil arbre isolé, qui le capture et l'enferme dans son tronc. Tom arrive rapidement et sauve Gandalf comme il est censé sauver « plus tard », dans le SdA, les Hobbits prisonniers du Vieil Homme-Saule (Old Man Willow) : là, l'allusion est très claire, et sans surprise. L'échange qui suit entre les deux personnages est un peu plus étoffé que ce qu'en laissait voir et entendre la vidéo de @TheRingsofPower sur X, mais la conclusion « bondienne » par Tom reste la même, étant donc simplement soulignée comme telle sur le réseau d'Elon M., probablement pour que l'on comprenne bien le clin d'œil... Remarquez, ça marche, puisque ma curiosité a été piquée, et avec une telle référence, déjà assez ancienne (puisque remontant aux années 1960, pour ce qui est des débuts de James Bond 007 au cinéma incarné par Sean Connery) mais restant actuelle, on ne peut pas trop se tromper pour ce qui est de parler au plus grand nombre.
Mis à part cela, j'ai trouvé la séquence esthétiquement et musicalement réussie, efficace au niveau des effets spéciaux mais sans excès, et la prestation des deux acteurs m'a paru correcte, mais c'est surtout le contexte de ladite séquence qui m'a interpellé : le décor, tout en extérieur, m'a semblé assez méditerranéen, et le vieil arbre isolé au centre de l'action me semble être, d'après son feuillage et son tronc épais, une sorte d'olivier centenaire... J'ai trouvé cette ambiance méridionale plutôt plaisante, en vérité, puisqu'il se trouve que par ailleurs, et on le sait ici, j'ai tendance à voir en Tom Bombadil une sorte de Pan victorien. Mais là, pour le coup, on en restera plutôt à une association d'idées personnelle, car je doute que cette série aille en quoi que ce soit dans la direction, disons « antiquisante » pour faire simple, que me suggèrent les quelques images de cette séquence visionnée isolément... Tom Bombadil n'est pas censé, du reste, être un personnage central de la série, donc tant pis. Je me demande un peu, par contre, où précisément en Terre du Milieu est censée se passer l'action de cette séquence, mais bon, j'avoue je n'irai pas jusqu'à prendre un abonnement à Amazon Prime pour savoir cela. ^^'
Peace and Love,
B.
P.S. : j'ai vu un photogramme, vraisemblablement extrait du même épisode 4 de cette saison 2, montrant Tom, sans doute dans son logis (rustique), en compagnie semble-t-il d'un chevreau ou d'une chevrette... Si c'est le cas, ce serait un détail qui renforcerait le croisement avec ma lecture « antiquisante » et plus précisément « panique » du personnage de Tom. Mais bon, je rêve encore peut-être (tel un faune mallarméen, bercé par la musique de Debussy, songeant aux nymphes...)...
[EDIT: correction de fautes et ajouts de liens hypertexte]
En ligne
Quelques semaines plus tard...
La deuxième saison de la série Amazon vient de se terminer (je n'en ai vu que quelques petits extraits), et l'on observe, notamment sur le réseau d'Elon M. (X, ex-Twitter), les mêmes prises de tête entre « fans » de Tolkien et « fans » d'univers « étendus » au-delà du domaine littéraire, quoique de façon moins fournie et moins médiatisée que lors de la première saison. Le fait est que l'on assiste simplement à la poursuite d'une inévitable altération de la réception de l'œuvre d'un écrivain, à l'aune des tendances générationnelles transmédiatiques du moment. Aux tolkienophiles qui se désoleraient de ce nouvel état des choses (déjà pourtant à l'œuvre du temps des trilogies de Peter Jackson, mais de façon initialement plus limitée : cela s'est certes fortement aggravé avec la deuxième trilogie), on rappellera une fois de plus que l'œuvre de fantasy de Howard a déjà subi pareil traitement il y a déjà une quarantaine d'années... avec peut-être simplement cette nuance que les « adaptateurs » en audiovisuel de Tolkien feignent un souci ambitieux de fidélité à l'univers d'un écrivain (malgré de grandes contraintes de fond en matière de droits d'exploitation), quand les « adaptateurs » de Howard des années 1980 et 1990, ne prenaient même pas vraiment cette peine, en finissant de fait par proposer à l'écran (au cinéma puis à la télévision) un Conan de parc d'attraction... Eh oui, mine de rien Conan the Destroyer de Richard Fleischer fête ses quarante ans cette année (et on pourra a minima en retenir une bonne musique de Basil Poledouris, mais pour le reste... hum...)...
Bref, nihil novi sub sole...
Quelques mots supplémentaires, cependant, concernant la part des choses à faire entre source littéraire et variation audiovisuelle...
Je sais que la série Amazon, qui me parait avoir des qualités esthétiques indéniables même pour le peu que j'en ai vu, peut plaire à un public qui n'est pas au fait du contenu du Silmarillion et qui est simplement amateur de séries liées à l'imaginaire : au fond, que ce public en profite donc, cela ne me dérange pas en soi, a fortiori si l'objectif est seulement de se divertir.
De toute façon, qui veut vraiment savoir ce qu'il en est, au juste, vis-à-vis des écrits de Tolkien, n'est pas obligé de venir voir ce qui se dit dans les cercles spécialisés. J'ai vu, par exemple, passer dernièrement un article du magazine Télé-Loisirs qui fait assez bien le point concernant la véracité, vis-à-vis des textes de Tolkien, d'une potentielle “love affair” entre Galadriel et Sauron à partir de laquelle brodent les showrunners de la série : https://www.programme-tv.net/news/serie … r-tolkien/
Mais est-ce là ce qui intéresse vraiment une large part du public visé ? Jouer avec le potentiel supposé, ici sentimental, des personnages offre sans doute plus de possibilités pour susciter un intérêt qui dépasse la question d'une fidélité scrupuleuse à un univers créé il y a plusieurs décennies, dans un autre contexte en matière de mœurs, a fortiori si l'on ne dispose pas de tous les droits d'adaptation concernant ledit univers, ce qui finalement peut aussi constituer une excuse...
Excuse que n'avaient pas les scénaristes de la deuxième trilogie de PJ lorsqu'ils ont notamment imaginé le rôle de Tauriel. Il était tout-à-fait possible d'introduire autrement une présence féminine (souhaitable) dans le récit du Hobbit porté à l'écran, en évitant au passage d'en faire une trilogie étirant démesurément l'intrigue originale sans en respecter le ton : évoquer la mère de Bilbo aurait pu suivre l'esprit du texte, et mettre en scène, quelque part dans le récit, Goldberry avec Tom Bombadil n'aurait pas paru incongru, en même temps que cela aurait pu constituer un « rattrapage » par rapport à l'absence de ces deux personnages dans la première trilogie... Mais les priorités étaient ailleurs, notamment sans doute dans une volonté de plaire à un public jeune potentiellement féru d'histoires d'amour plus ou moins initiatiques et surtout contrariées, dont on retrouve souvent le modèle dans bien des productions fictionnelles d'aujourd'hui, à l'écrit comme à l'écran.
Une petite anecdote, pour finir...
Ces dernières semaines, dans le cadre de mon travail en bibliothèque scolaire, au milieu de jeunes lecteurs de 6e lisant surtout des mangas et des bandes dessinées destinées à la jeunesse, j'ai semble-t-il incité un d'entre-eux à lire le SdA, faute de disponibilité du Hobbit en rayon pour cause d'exemplaire perdu (j'en ai recommandé un, mais il n'est pas encore arrivé). Point de prosélytisme de ma part : j'ai simplement évoqué l'exemple de Tolkien (qui m'est tout de même pour le moins familier) lors d'une initiation à propos de ce qu'est la fiction et où on peut la trouver dans la bibliothèque, avec la part des choses à faire entre les romans et les productions audiovisuelles. Un élève donc a été curieux d'en savoir plus, y compris donc par lui-même en demandant à lire du Tolkien. Demain, en principe, il devrait me rendre le volume des Deux Tours et emprunter celui du Retour du Roi. Il ne connait pas vraiment les films, ni la série, et c'est un bon lecteur. Il passera peut-être à autre chose quand il aura fini... Qui sait si j'aurai le temps et l'occasion de lui reparler du Hobbit...
« Tout coule » ou « tout passe », pour reprendre les mots d'Héraclite...
B.
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On peut effectivement trouver des rappels sur le caractère très fan-fictionnel de la série.
Ce que je vois moins, dans tous les discours qui concernent la série, c'est une réflexion plus fondamentale sur les différences essentielles de nature, par exemple, entre ce que propose Tolkien en matière de rapport à la fiction / à un monde imaginaire / au merveilleux (etc.) et ce que propose, par exemple, cette série.
Concernant Tauriel, à mon avis, la priorité était en effet le cahier des charges d'un point de vue industriel : il fallait cocher la case de la relation amoureuse pour attirer ou retenir telle partie du public. De la même façon, Alfred a dû être ajouté pour remplir le rôle d'opposant ridicule/de comic relief, mi-Gríma, mi-Jar Jar Binks, considéré peut-être par certains comme "nécessaire" dans ce type de film - ce dont on peut douter.
Pour moi, la relation Galadriel/Halbrand reprend des marqueurs de la pop culture actuelle et de la new romance en vogue, plus sur le mode de la possibilité que de l'actualisation complète (l'idée est de favoriser le shipping des personnages dans le scénario même puis de laisser les "fans" utiliser leur imagination pour travailler sur des scénarios alternatifs). Ce sont des moyens de cultiver l'engagement. Mais lorsqu'un scénario ou l'élaboration des personnages repose excessivement sur ce genre de motivation, cela finit par se sentir dans l'œuvre.
Le cas de Galadriel est aussi intéressant à analyser dans la mesure où il témoigne d'écarts volontairement conçus par rapport à l'œuvre originale pour permettre l'effet : pour que Galadriel puisse tomber amoureuse de Sauron, voire pour qu'on puisse aussi mettre en place quelque chose de potentiellement ambigu avec Elrond, il faut que Galadriel ne soit pas mariée, ou plutôt que Celeborn soit absent et que Celebrían n'existe pas encore.
Je ne dis pas qu'il n'y a pas de bonnes choses dans cette série, notamment en ce qui concerne les images (c'est souvent le cas des productions actuelles, à tel point que je ressens un profond sentiment de disparité entre des visuels et des bandes originales parfois grandioses, un scénario complètement brinquebalant, et des procédés et des intentions qui reposent de plus en plus fréquemment sur des facilités (easter eggs, exploitation abusive de la nostalgie de premier degré* par rapport à des œuvres-sources, etc.).
* Je veux dire par là que dans le cadre des sagas, le niveau d'auto-références et de métatextualité ne cesse d'augmenter, mais en contrepartie, on se retrouve avec des œuvres qui peuvent présenter un degré de "dérivation" jusqu'alors jamais atteint. Je prenais sur un autre forum l'exemple d'Alien: Romulus, à mon avis assez efficace, à comparer avec Aliens et Alien 3 : ce n'est plus du tout le même genre d'approche que les suites directes, dérivées mais à mon avis pas "dérivatives".
On trouve cet aspect dans The Rings of Power notamment du côté de l'intrigue concernant Gandalf, avec les citations extraites de LoTR (plus par l'intermédiaire des films que par celui des livres, parfois) placées dans la bouche de Gandalf voire de Tom Bombadil.
Concernant les lectures des jeunes : c'est un âge où il est encore possible de jouer sur les pratiques, il me semble, notamment par rapport à des enfants qui ne sont pas dans des familles gagnées par l'omniprésence des écrans...
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Signalé par Druss sur Tolkiendil, un débat intéressant, au ton plutôt juste, sur BFMTV.com (en présence d'Anne Besson) :
https://www.bfmtv.com/tech/replay-emiss … 90689.html
I.
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Signalé par Druss sur Tolkiendil, un débat intéressant, au ton plutôt juste, sur BFMTV.com (en présence d'Anne Besson) :
https://www.bfmtv.com/tech/replay-emiss … 90689.html
Merci pour le lien, JR. :-)
La discussion est intéressante effectivement.
Rappeler, comme cela est fait d'emblée, que cette série Amazon est, pour l'heure, la plus chère de l'histoire (avec son coût de plus d'un milliard de dollars US), n'est pas inutile pour ne pas oublier l'ambition énorme supposée animer ce projet, censé durer cinq saisons...
Les moments de “fan service” parsemant les épisodes n'ont pas manqué d'être soulignés, et à cette aune, je note qu'Anne n'a pas aimé ni l'introduction de Tom Bombadil dans l'histoire, ni le traitement du personnage dans cette série. ;-) En revanche, elle trouve positif la présentation qui est faite des orques comme n'étant pas qu'une masse de « méchants » indistincte, mais comme étant au contraire un peuple ayant une autonomie d'existence et de choix, ce qui tend à constituer une liberté prise par rapport à la vision originelle de Tolkien : question intéressante en soi, dont j'avais dit quelques mots ici précédemment.
En tout cas, entre “fan service” et création inédite (contrainte par les limites des droits d'exploitation) pour attirer le maximum de spectateurs et leur plaire, je constate que ce qui est reproché aux auteurs de la série, c'est de cultiver un entre-deux difficile à bien gérer, pour reprendre les mots d'Anne, et donc au fond de vouloir faire... du « En même temps » à la Macron ! ;-)
Ce qui est sûr, et il est toujours utile de le rappeler comme cela a été fait, par Anne là encore, c'est que les tolkienophiles des forums/fora où l'on décortique les textes de l'écrivain ne sont pas la base du public visé...
Je note que les remarques faites, dans cette émission, à propos de références tolkieniennes ou jacksoniennes présentes dans la série, semblent rejoindre plus ou moins le constat fait par Mairon en matière de « dérivation » :
On trouve cet aspect dans The Rings of Power notamment du côté de l'intrigue concernant Gandalf, avec les citations extraites de LoTR (plus par l'intermédiaire des films que par celui des livres, parfois) placées dans la bouche de Gandalf voire de Tom Bombadil.
On peut effectivement trouver des rappels sur le caractère très fan-fictionnel de la série.
Ce que je vois moins, dans tous les discours qui concernent la série, c'est une réflexion plus fondamentale sur les différences essentielles de nature, par exemple, entre ce que propose Tolkien en matière de rapport à la fiction / à un monde imaginaire / au merveilleux (etc.) et ce que propose, par exemple, cette série.
Une réflexion concernant la Faërie telle que conçue par Tolkien, par exemple, vis-à-vis de l'imaginaire promu par les showrunners ? Effectivement, cela ne court pas les rues, mais sans doute n'est-ce pas nouveau et à cette aune, quelque part, on en revient, comme cela a déjà pu être dit, à une situation qui existait en fait déjà à l'époque des trilogies de PJ...
Concernant les lectures des jeunes : c'est un âge où il est encore possible de jouer sur les pratiques, il me semble, notamment par rapport à des enfants qui ne sont pas dans des familles gagnées par l'omniprésence des écrans...
Oui, en effet.
Les enfants commencent par imiter : s'il y a des livres à la maison, et qu'ils voient des adultes les lire, c'est une incitation à pratiquer eux-mêmes la lecture et à réclamer des livres. Le collégien de 6e dont j'ai parlé précédemment m'a demandé lundi dernier, comme escompté, le Retour du Roi pour finir sa lecture du SdA, et plus généralement, je me retrouve, ces jours-ci, à parler régulièrement aux élèves de livres de fiction et de leurs adaptations audiovisuelles, dans le contexte d'initiation documentaire que j'ai évoqué : au-delà même du cadre enseignant, c'est un sujet qu'ils aiment bien aborder, et même si Tolkien est loin d'être la seule référence citée, je n'ai pas de difficulté à le mentionner régulièrement dans les échanges, car l'univers de la Terre du Milieu est à peu près aussi connu que ceux d'Harry Potter, d'Hunger Games, d'Eragon, ou de mangas à succès comme One Piece, autant de références – qui pourtant commencent toutes à dater un peu, mine de rien, quant à leur création initiale – que les jeunes évoquent très facilement, qu'il s'agissent des livres ou des productions audiovisuelles qui en découlent. Une élève de 4e m'a dit ce jeudi qu'elle avait lu le Hobbit en CM2, et qu'elle avait vu plus tard la deuxième trilogie de PJ, avant de revenir au roman pour se rappeler de ce qu'elle avait lu tant les différences étaient grandes : elle est d'accord avec moi pour dire que le livre est meilleur que les films... ;-)
Pour moi, la relation Galadriel/Halbrand reprend des marqueurs de la pop culture actuelle et de la new romance en vogue, plus sur le mode de la possibilité que de l'actualisation complète (l'idée est de favoriser le shipping des personnages dans le scénario même puis de laisser les "fans" utiliser leur imagination pour travailler sur des scénarios alternatifs).
Oui, le genre dit de la new romance est en effet assez représentatif de la tendance actuelle en matière de goûts fictionnels. J'ai parlé précédemment de collégiens pour ce qui concerne le présent, mais il y a un an, c'était à un public de lycéens que j'avais affaire, et il était notamment demandeur de ce genre de littérature, dont les origines sont notamment numériques et fan-fictionnelles – on oublie parfois que Cinquante nuances de Grey fut à l'origine une « simple » fan-fiction dérivée de Twilight ! –, un genre représenté notamment en France par des autrices comme Morgane Moncomble, dont parle cet article de Franceinfo :
https://www.francetvinfo.fr/culture/liv … 67226.html
Dans le cas de la série Amazon, on en reste effectivement à la simple possibilité amoureuse entre Galadriel et Sauron (moyennant un aménagement scénaristique s'émancipant largement de Tolkien), d'une part sans doute pour mieux faire gamberger le public, mais peut-être aussi parce que la Terre du Milieu ne semble pas forcément apparaître, spontanément en soi, comme le terrain de jeu tout indiqué pour une intrigue amoureuse « BDSM ultra-soft » de type Cinquante nuances..., du moins pour la plus large part du public visé. Bon, je reconnais prendre là un exemple assez particulier, qui bien qu'en partie fondateur n'est pas en soi et à lui seul représentatif de l'ensemble du genre new romance... ;-) Mais bref, la recette est en tout cas adaptée au type de récit (ici de fantasy tolkienienne), avec une prise de risque minimale, et toujours un souci de coller au mieux à l'air du temps.
Peace and Love,
B. (qui n'a pas encore « fini ses devoirs » concernant un certain fuseau musical... mais ça avance...)
En ligne
Merci pour ton message, Hyarion. Attention, je traite de points liés à la fin de la saison 2 dans ce qui suit !
Concernant le fan service, je trouve qu'il n'est pas inintéressant de s'arrêter sur cette notion, qui verse en réalité parfois dans le fan disservice : la réception des procédés qu'on inclut dans ce concept est loin d'être univoque. Parfois, ce sont des éléments qui plaisent plutôt au grand public mais qui irritent les passionnés. Il est vrai, du reste, qu'il n'existe pas qu'une sorte de passionnés. Si je pense à un autre univers de fiction, celui de Star Wars, il y a bel et bien des gens qui se pâment devant des easter eggs, sans trop saisir à quel point le caractère dérivatif (scénaristiquement parlant) de l'épisode VII par exemple peut en réalité nuire à la saga (ne parlons pas de l'épisode IX, la cerise sur le gâteau en matière de destruction de l'aspect relativement vraisemblable de cet univers vu l'évolution du scénario), mais il y en d'autres qui réprouvent ces facilités.
Je trouve que la série a essayé de faire quelque chose des orques, même si elle semble être allée un peu trop loin par rapport à ce qu'on pouvait trouver chez Tolkien dans LoTR : l'état normal des orques, en l'absence d'un Seigneur des ténèbres, c'est le clanisme et la division, mais l'existence d'Adar dans la série empêche cette possibilité et crée une situation assez baroque. On a donc une sorte de nation orquienne qui voudrait être indépendante de Sauron, mais qui révère Adar comme une sorte de chef, avec tout de même de l'ambivalence qui est présentée en ce qui concerne leurs réactions aux sacrifices qu'il leur demande de faire pour vaincre Sauron en saison 2. Mais à partir de là, il y a plusieurs problèmes : les deux facettes des orques, celle attendue (l'orque sans pitié et belliqueux qui tue le cheval d'Elrond, les actions des orques durant le siège, etc.) et celle que la série veut mettre en place (des orques qui veulent protéger leurs familles, qui font des funérailles pour leurs morts), paraissent difficilement conciliables à l'écran. On rencontre le même problème de cohérence sur la durée en ce qui concerne le personnage d'Adar et ses actions, et la façon dont Galadriel traite son ennemi-allié de circonstance : tout cela n'a de sens que dans le feu de l'action (et encore), mais dès lors qu'on y réfléchit un peu, ça ne tient pas la route. C'est lié au choix fondamental du scénario concernant Annatar/Sauron, qui ne doit pas être découvert avant tel moment par Celebrimbor. D'où cette scène qui m'a fait rire, où les Elfes découvrent, peu avant le siège, l'un des leurs tué aux abords de la cité, avec un message écrit sur son pauvre corps : "où est-il ?". Adar sait que Sauron est dans la ville, qu'il va assiéger pour cette raison, mais le scénario interdit qu'il désigne nommément Sauron, sinon les Elfes seraient au courant que le méchant est parmi eux : on a ainsi une situation assez comique et inouïe où la nécessité narrative rend impossible toute forme de raisonnement et chez les envahisseurs (qui devraient avoir envoyé le message "Livrez-nous Sauron ou on vous extermine !"), et chez les assiégés (à la rigueur, ça peut se comprendre puisqu'ils ont parmi eux un maître de l'illusion, qui a peut-être usé de son pouvoir pour masquer le fait que les orques ont campé à 2 kilomètres de la ville pendant un certain temps avant le siège - je préfère voir les choses ainsi). Pour revenir à Galadriel et Adar, l'idée est compréhensible et optimiste : il pourrait y avoir une paix en décidant de laisser les orques gagner le Mordor et y rester, et paf, Sauron surgit, qui détruit cette possibilité pacifique. Mais entendre ce discours alors qu'Adar vient de détruire la ville et que Galadriel elle-même se présente comme une pourfendeuse d'orques... cela n'est guère vraisemblable.
J'ai trouvé les intervenants de l'émission sur BFMTV presque un peu gentils dans leurs jugements, même si Anne Besson a terminé, si mon souvenir est bon, par rappeler qu'il faudrait que le scénario s'améliore. Je suis d'accord avec certaines bonnes impressions : par exemple, celle de la vitalité de la scène du marché nain à Khazad-Dûm. Mais aussi gêné que les intervenants par rapport à l'impression de manque de figurants et de vide, et surpris par cette situation vu le budget de la série. En discutant sur un tout autre forum de cet aspect, j'ai utilisé l'image de la bataille climatérique... qui ressemble en réalité à une baston entre quelques dizaines de personnes venant de villages rivaux. C'était le cas dans la première saison, où l'enjeu de la bataille des Southlands (si mal nommées...) était le contrôle de quelques petits villages isolés. Mais voir cet aspect aussi dans le cadre de la bataille de l'Eregion m'a semblé surprenant : Adar évoquant des "légions" d'orques alors qu'il n'y a jamais à l'écran l'équivalent d'une seule légion romaine en termes d'effectifs, c'est assez cocasse. Les défenseurs de la ville eux-mêmes ne semblaient guère dépasser la centaine de soldats, et si l'on montrait des civils désemparés (tournoyant frénétiquement pendant des heures dans la ville alors qu'ils auraient pu se réfugier dans les hauteurs non visées par les trébuchets !), ils n'étaient jamais guère nombreux... d'où l'impression de ridicule et d'écart lors de la dernière scène de l'épisode, dans mon expérience : il ne reste que quelques dizaines de survivants de l'Eregion, à l'écran, mais ce n'est pas l'impression que donne la musique épique de Bear McCreary. De la même façon (cela a été souligné dans l'émission, je suis bien content de voir que je ne suis pas le seul à l'avoir perçu), dans la saison 1, Bear McCreary accompagnait de façon parfaitement épique le départ non pas d'une flotte, mais de trois navires numénóréens vers la Terre du milieu...
Si je devais résumer l'affaire, je dirais que pour quelqu'un comme moi, la série verse involontairement presque dans l'héroï-comique, vu l'écart qui est produit par rapport à mes attentes liées à une représentation, même contrariée et chimérique, de la Terre du Milieu à l'écran. Certains aspects échappent heureusement à l'affaire, mais c'est quand même relativement généralisé. L'impression est renforcée dans la mesure où il y a un changement complet de l'inspiration et de la "nature profonde" de l'opération, au-delà des références à Tolkien. J'en ai déjà parlé, ici ou sur un autre forum tolkienien, en ce qui concerne la manière de concevoir les personnages de Galadriel et Sauron. Elendil est celui qui échappe le plus à ce genre de détournement dans la série, à mes yeux.
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J'ai vu deux épisodes de cette deuxième saison. C'est toujours aussi mal écrit et peu inspiré, voire plus que dans la saison 1 - avec trop d'arcs narratifs, trop de personnages, trop de niaiserie, sans point de vue général sur l'histoire, sans véritable metteur en scène derrière l'ensemble. Les épisodes sont en même temps ennuyeux par leur longueur et précipités dans leur résolution en raison du nombre déraisonnable d'histoires parallèles dont il faut nouer les fils. De plus, le seul horizon visuel de la série est celui des films de Jackson, cités plusieurs fois. Tolkien n'est qu'un point de départ, un argument marketing. Il s'agissait de faire entrer un maximum de choses dans une boite où tout se retrouve comprimé et sens dessus-dessous, dans une juxtaposition confuse des temporalités et des mentalités. La seule chose qui me parait réussie, ce sont les nains et Khazad-dûm.
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bonjour,
j'ai fini cette série pas si indigeste si on est bienveillant, encore une fois la qualité de production est là, mais l'écriture comme tout le monde le dit et l'écrit, est médiocre.
le scénario est invraisemblable sur tant de choses, et s'éparpille sur des arcs inintéressants (celui de gandalf à l'est n'a aucun interêt) où on sent qu'à ce jour les scénaristes ne savent pas où ils vont.
vu le peu d'intérêt (versus game of throne) je pense que amazon va tailler dans le vif et la qualité s'en ressentira.
pour ceux qui le souhaitent vous pouvez regarder les résumés de captain popcorn sur youtube, cela vous permettra de vous faire un apercu assez complet de la série. Lui est bienveillant avec la série et il est assez cultivé sur le monde de la terre du milieu. il est aussi critique sur les invraisemblances manifeste.
J'ai apprécié par la confrontation entre celebrimbor et Sauron, elle m'a semblé assez fidèle à l'oeuvre par son approche et son évolution.
En ce qui me concerne, le retour télévisuel dans cet univers me donne envie de me replonger dans les CLI, et c'est tant mieux!!!
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pour ceux qui le souhaitent vous pouvez regarder les résumés de captain popcorn sur youtube
Hello,
Captain Popcorn, je confirme. C'est effectivement très intéressant, plutôt bien équilibré, et avec une connaissance de fond de très bon niveau, contrairement à de nombreuses autres vidéos sur le sujet.
Voici un lien vers la chaîne : https://www.youtube.com/@CaptainPopcorn/videos
I.
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