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#76 13-04-2025 21:33

Yyr
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Re : Tolkien aux Bernardins 2025

Beruthiel a écrit :

- Pourquoi y a-t-il une étoile rouge dans le ciel lors de la rencontre entre Beleg et Findling/Gwindor (voir ici)  ? Un symbole de la « mauvaise étoile » de Túrin : la malédiction de Morgoth, ou cela fait-il référence à quelque chose de plus précis ?

En effet !
Outre le renvoi possible mentionné par Hyarion, quelqu'un a-t-il écouté le commentaire de Denis Bridoux associé à cette tapisserie ?
(je l'ai fait pour ma part mais ne me souviens pas d'un commentaire à ce sujet)

J’ai réservé pour la conférence Tolkien et le Mystère.

Super, à bientôt alors :)

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#77 14-04-2025 10:42

Elendil
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Re : Tolkien aux Bernardins 2025

ISENGAR a écrit :
Beruthiel a écrit :

- Quelle est cette montagne solitaire derrière le lac Mithrim ?

D'après Hammond et Scull (in Artiste et illustrateur, 1996 (trad. J. Georgel), p.50), qui citent un passage de L'Esquisse de la Mythologie, il pourrait s'agir de la plus haute cime du Thangorodrim (cf La Formation de la Terre du Milieu, 2007 (trad. Daniel Lauzon), p. 34).

I.

C'est même la seule explication plausible. Au demeurant, à cette distance, les trois cimes du Thangorodrim pourraient se confondre ou bien la première pourrait masquer les deux autres (quand bien même elles seraient de même hauteur).

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#78 14-04-2025 22:33

Beruthiel
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Re : Tolkien aux Bernardins 2025

Merci à tous pour vos réponses, que j'ai transmises à l'intéressé smile

Céline

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#79 17-04-2025 09:07

Yyr
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Re : Tolkien aux Bernardins 2025

Ce fuseau mérite bien de signaler la sortie du livre de Jean Le Dieu de Tolkien, sortie concomitante à l'événement des Bernardins dont il est par ailleurs le premier artisan.

Ma revue du livre dans cet autre fuseau.

De quoi encourager ceux qui le souhaitent à venir écouter la troisième conférence grand public sur Tolkien & le Mystère : ce sera pile dans une semaine :).
Le père Jean-Robert Armogathe interviendra avec à ses côté un autre membre éminent tant de ce forum que du conseil scientifique de l'événement : Sosryko lui-même :).

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#80 25-04-2025 22:48

Beruthiel
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Re : Tolkien aux Bernardins 2025

La troisième conférence s’est donc tenue hier soir. Il y avait dans l’assistance Leo Carruthers, Michaël Devaux, Moraldandil, Yyr (et ma très modeste personne ;-)). La conférence du Père Armogathe était intéressante mais Yyr et moi-même avons surtout été impressionnés par la prestation de Sosryko. Il nous a livré, entre autres, une belle analyse de la scène où Sam s’éveille en Ithilien après la défaite de Sauron.

Sosryko, depuis plus de 20 ans que je te lis sur ce forum, j’ai toujours été impressionnée par ce que tu partages avec nous. C’était un grand plaisir pour moi de t’écouter hier, merci encore !

Céline

PS : en proustophile, j’ai aussi appécié la citation du Temps Retrouvé...

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#81 26-04-2025 03:44

sosryko
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Re : Tolkien aux Bernardins 2025

Chère Beruthiel,

c'est bien à moi d'être reconnaissant pour ta présence mais aussi celle des amis que tu cites (vous avez été un précieux soutien) ainsi que celle de tous les nombreux auditeurs (près de 180, le grand auditorium était quasiment plein) dont plusieurs (confidence de Moraldandil) membres de Tolkiendil (j'aurai bien voulu remercier et rencontrer chacun d'entre eux, qu'ils le soient donc ici : qu'ils aient apprécié ou non la rencontre, je les remercie d'avoir fait le déplacement).   
Je n'aurais jamais cru, il y a 20 ans, pouvoir participer à une si grande entreprise que ces événements aux Bernardins (les conférences n'étant que l'apéritif avant le colloque à venir qui s'annonce beau et bon, dans un cadre magnifique [que je découvrais jeudi dernier]). Mais cette entreprise aurait été amoindrie et vaine si elle ne m'avait pas permis, 20 ans après nos premiers partages en ces lieux, de faire ta connaissance, chère Céline ; je garde une grande joie de nos trop courts échanges avant et après la conférence.

Le lien entre les deux interventions, celle du père Armogathe (il est possible qu'elle soit mise en ligne ici, ou bien qu'elle figure, avec celle de Rémi Brague, dans une publication qui reste encore un objet de discussion) et la mienne, était celui de l'amour désintéressé en tant que moteur de l'histoire de la Terre du milieu et réponse à la puissance du mal qui y est à l'œuvre.
Ainsi, M. Armogathe terminait sa conférence sur une belle citation de Mortgoth's Ring

Ceux qui appellent la lumière de Varda appellent l'amour d'Eru pour Eä [...].
Cependant ce don Ilúvatar aux Valar contient un danger (peril) qui lui est propre, ainsi que chacun de ses dons gracieux : ce qui revient finalement rien moins à dire qu'ils jouent un rôle dans le Grand Conte afin qu'il puisse être achevé ; car sans le danger (peril) ils seraient sans pouvoir (power), et le don serait vain.

J.R.R. Tolkien, Morgoth's Ring, p. 380

tandis que j'ai enchainé avec une autre citation, tirée du commentaire des Eldar du fragment de la Conversation entre Eru et Manwë dans la traduction de Michaël Devaux :

Il pourrait bien arriver que […] quelque chose […] ait pour [son possesseur] une valeur qui ne réside pas dans la chose même ou dans son apparence, mais que lui, le possesseur, lui attribue : tel est, par exemple, le cadeau d’un être cher {litt. une personne qu’il a aimée = of one whom he loved}. De la contrefaçon (c’est-à-dire de la copie exacte), il ne pourra donc pas se satisfaire, disant que « ce n’est pas la même chose que celle qui est perdue ». Mais ce sera parce qu’il aimait l’histoire de la chose [history of the thing] plus que toute autre qualité qu’elle possédait : et parce que cette histoire était liée à une personne chérie, il lui attribuait une partie de cet amour. C’est un aspect du mystère de l’amour [the mystery of love], et du choix, par amour, d’une chose vraiment unique, dans sa particularité et son histoire propre, qui appartient à la nature de l’[être] incarné [the nature of the Incarnate].

JRR Tolkien, in : L’effigie des Elfes, La Feuille de la Compagnie no3, p. 123

Citation que j'ai effectivement mise en parallèle avec un extrait du Temps retrouvé

Certains esprits qui aiment le mystère veulent croire que les objets conservent quelque chose des yeux qui les regardèrent, que les monuments et les tableaux ne nous apparaissent que sous le voile sensible que leur ont tissé l’amour et la contemplation de tant d’adorateurs, pendant des siècles.

Marcel Proust, Le temps retrouvé

L'applicabilité de ce passage de Tolkien est multiple. Alors que les Eldar parlent du lien indissoluble entre le fëa (esprit) et le hröa (corps) par le souvenir du second que conserve le premier chez un Elfe désincarné, j'ai souhaité rendre hommage à Christopher Tolkien.
C’est en effet l’amour qui sauve les œuvres de l’oubli, sur un mode mineur, comme sur un mode majeur.
Sur un mode majeur, ce que Tolkien appelle le mystère de l'amour du monde et des hommes (avec ses multiples manifestations : la joie, la reconnaissance, la subcréation, mais aussi et surtout le pardon et la pitié qui permettent à la Providence d'agir) constitue une réponse, la réponse, au mystère du mal.
Tandis que, sur un mode mineur, c’est effectivement l’amour de Christopher Tolkien pour son père et l’admiration qu’il portait à son œuvre littéraire qui a sauvé celle-ci aussi bien de l’oubli que de la méprise : il a utilisé le succès du Seigneur des Anneaux et du Hobbit pour non seulement publier des milliers de pages inédites sur l’Histoire de la Terre du Milieu, dont le désormais célèbre Silmarillion mais également sa correspondance et ses poèmes, ses dessins et ses aquarelles, ses essais et conférences. Parmi ces écrits en apparence sans rapport avec le légendaire tolkienien, nous connaissons, depuis leur édition en 1988 par Christopher Tolkien, le poème « Mytopoeia » et la conférence « Du Conte de fées » qui constituent en réalité deux manifestes littéraires de Tolkien.
Partant et revenant régulièrement à ce manifeste qu'est l'essai sur le Conte de fées, écrit pour une conférence données en 1939, donc entre la parution du Hobbit et alors que Le Seigneur des Anneaux est en chantier, j'ai voulu montrer ce que Tolkien entendait lorsqu'il affirmait qu'un bon conte de fées pouvait (mais pas nécessairement) être "un véhicule du Mystère" (mais même alors ponctuellement dans le surgissement même du Mystère au travers du récit, et "pas aussi aisément" qu'il apporte le recouvrement et l'évasion).
Mais cela ne pouvait se faire sans revenir au texte même de Tolkien, à la manière dont il tisse la trame du romance qu'est le Seigneur des Anneaux, avec le désir profond d'en faire un "bon conte de fées" au sens où il l'entendait.
C'est ainsi que j'ai endossé avec plaisir le rôle de Tom Bombadil, celui de "ramasseur de mousse", après que le p. Armogathe ait endossé celui de Galdalf, la "pierre vouée à rouler" dans un conférence ambitieuse qui arpentait toute l'histoire de la Terre du Milieu, depuis l'Ainulindalë jusqu'au salut de Frodo sur le Mont Orodruin, son échec personnel à assumer jusqu'au bout sa mission étant contré par les conséquences de la pitié exercée à l'égard de Gollum.
Il ne me restait qu'à me tourner, ainsi que Céline l'a dit, vers le réveil de Sam en Ihilien, pour commenter une des pages du Seigneur des Anneaux qui m'émeut le plus et qui s'avère travaillée avec un soin tout particulier (pour en faire une véhicule du mystère chrétien de la résurrection et de la rédemption, ce que j'ai essayé de mettre en lumière) :

« Eh bien, maitre Samsaget, comment vous sentez-vous ? » dit-il.
Mais Sam retomba sur l’oreiller et le regarda bouche bée, et pendant un moment, entre confusion et joie indicible, il fut incapable de répondre. Enfin, il dit d’une voix entrecoupée : « Gandalf ! Je vous croyais mort ! Mais d’un autre côté, je me croyais mort aussi. Est-ce que toutes les choses tristes vont se révéler fausses ? Qu’est-il arrive au monde ? »
« Une grande Ombre est partie », dit Gandalf, puis il rit, et ce son était comme de la musique, ou de l’eau dans un pays asséché ; et, l’écoutant, Sam se rendit compte qu’il n’avait pas entendu un rire, le son de l’absolue gaieté, depuis des jours et des jours sans nombre.

Le Retour du Roi, VI.4 « Le Champ de Cormallen »

Edit (après avoir pu me rendormir et récupérer) : Il faut aussi dire un mot des questions de l'auditoire qui ont suivi, qui étaient toutes intéressantes, bien vues, et permettaient d'approfondir. Un moment très fort. Nous avons fait au mieux pour y répondre, toujours à deux voix qui se voulaient complémentaires, selon les sujets. Comme d'habitude, le lendemain, on se dit qu'on aurait dû aussi dire plus ou mieux sur un point ou sur un autre, mais il me semble que souvent, même imparfaites, de bonne réponses ont été apportées, avec même, j'ose le croire, quelques interprétations nouvelles ;-).
Entre autres questions qui m'ont marqué :
- comment Tolkien, avec les Istari présentés comme des Mages, assume-t-il sans contradiction avec sa foi la condamnation biblique de la sorcellerie et de la magie ?
- Peut-on dire qu'il y a chez Tolkien une pensée pré-écologique ?
- Quelle est la place de l'hubris grecque dans le rapport au mystère du mal dans le monde de Tolkien ?
- évidemment, la question (qui a fait sourire et rire Michaël, Yyr, Céline et d'autres qui savaient à qui elle était posée) : Mais pour vous, qui est Tom Bombadil ?
- Et enfin, une question de la part du p. Armogathe lui-même, qui se souvenait d'échanges préparatoires que nous avions eu : Est-ce qu'Eru est présent dans le Seigneur des Anneaux ?
Pour répondre en quelques minutes à cette dernière, dans un premier temps, j'ai rappelé qu'Eru était bien présent dans les appendices, à deux reprises sous le nom de l'Unique, nom qui, rétroactivement vient s'opposer à l'Unique du romance, qui est le Grand Anneau, de la même manière que, dans le Conte d'Arda Melkor s'affirme Lord of All, usurpant le titre que les Valar et Elfes attribuent à Eru seul : deux analogies du choix devant lequel Jésus place ses disciples entre servir Dieu ou Mammon, deux maîtres irréconciliables et deux services inconciliables. Ce qui m'a conduit ensuite à rapprocher deux extraits éloignés du SdA dont un qui se trouve dans la maison de Tom Bombadil, pour établir l'agir voilé d'Eru dans le corps même du romance mais pas du tout pour établir ce que vous pensez probablement vous qui lisez ces lignes et qui n'étiez pas dans l'auditoire : je n'ai pas montré que TB serait Eru !! C'eût été ridicule non seulement après la réponse que j'avais faite à la question précédente, mais aussi et surtout après avoir passé une soirée à rappeler qu'un conte de fées n'est pas une allégorie mais que c'est l'analogie qui travaille la pâte d'un conte eucatastrophique.
Ce temps de questions/réponses fut un troisième temps important de cette rencontre qui, je l'espère, aura donné envie à certaines personnes présentes de s'inscrire pour le colloque à venir.

S

PS : ayant pu lire de nombreux extraits de Tolkien, j'ai pu me consoler (un peu, un tout petit peu) de mon absence à la lecture intégrale du Silmarillion et autres textes du Tolkien Reading Day sous les voûtes des Bernardins la nuit du 22 mars dernier. Dans les moment de partage qui ont suivi, ceux qui étaient présents et qui y avaient participé (Michaël, Jules, Moraldandil, Yyr, etc.) éprouvaient encore le bonheur de cette merveilleuse expérience.

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#82 26-04-2025 13:02

Yyr
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Re : Tolkien aux Bernardins 2025

Merci infiniment pour ce très beau compte-rendu Sosryko :)
Et pour ta générosité car, dans cette affaire, tu as énormément œuvré, bien davantage que la conférence le laisse voir. Mais sois heureux, cela porte déjà des fruits :).

J'ai bien aimé, dans la conférence du père Armogathe, son invitation à réfléchir (à la suite de Sosryko qui le soulignait à Cerisy en 2012) sur le distinguo entre CS Lewis et JRR Tolkien : le premier davantage symbolique, le second davantage analogique. Non pas dans un sens strict car tout artiste est nécessairement symbolique. Mais dans la mesure où le premier est davantage « allégorique » au sens où les images du monde secondaire font signe de façon plus univoque vers les réalités du monde primaire, à l'inverse du second, dont les images sont moins directives, moins déterminées : au sens où elles se font véhicule, précisément, et non simple transposition. À ce sujet, certains ont attiré l'attention sur la différence entre un auteur protestant et un auteur catholique. Pour ma part, j'y vois plutôt la marque d'un esprit plus philosophique chez l'un et plus artistique chez l'autre (c'est le propre de la raison de rechercher la vérité par l'univocité et la précision des termes, celui de l'art de la rechercher par  la sensibilité et l'émotion des images).

J'ai été enchanté par la lecture et relecture du Réveil (Relèvement) en Ithilien par Sosryko. Je ne sais plus si c'était avec Beruthiel ou avec Étienne (un autre auditeur), nous nous faisions la réflexion : prendre le temps de lire, prendre le temps de digérer, de se sustenter d'un texte ! Je n'avais encore jamais entendu toute la profondeur de ce cri du cœur de Sam : « Est-ce que toutes les choses tristes vont se révéler fausses ? Qu’est-il arrivé au monde ? » On ne saurait mieux exprimer ce que veut dire le mot Rédemption (en veillant à ne pas séparer cette parole de l'émotion et de la joie). Cf. l'émotion vécue par Tolkien suite à la guérison du petit garçon de retour de Lourdes (« Lettre n°89, à Christopher Tolkien (1944) », Lettres, p.148 = Letters, p.100 = expLetters, p.142).
Incidemment, quand je lis à la suite : « puis il rit, et ce son était comme de la musique, ou de l’eau dans un pays asséché », je ne puis m'empêcher de reconnaître un lien avec : « Je tends les mains vers toi, me voici devant toi comme une terre assoiffée » (Psaume 142 (hébr. 143) v. 6). Non pas que ce lien soit univoque. De toute façon, la question n'est pas tant la coïncidence des images que de ce qu'elles signifient : en dernière analyse (comme pour tout le reste, dirait Tolkien) notre mortalité. C'est-à-dire nos limites, nos blessures, et notre besoin d'être secourus, complétés ... sauvés. Le point est, sous un certain aspect, entièrement humain, sous un autre aspect, entièrement chrétien, et ces deux aspects sont véridiques (& c'est bien pourquoi la foi chrétienne est celle de l'Incarnation). Ainsi le lien quoique non explicite n'en est-il pas moins certain.

Ce sera justement mon sujet lors du colloque (dont le traitement te doit beaucoup, tu le sais, Sosryko), celui du rapport entre imagination et rédemption chez Tolkien, c'est-à-dire entre art et salut, et donc entre ce qui est très humain et ce qui est très chrétien. J'aime beaucoup la question du paradoxe religieux chez Tolkien (paradoxe d'une œuvre chrétienne privée de références chrétiennes pour le dire brièvement) tant elle nous invite à réfléchir. Dans cette interview de 1962, Tolkien donne trois raisons à l'absence d'explicite chrétienne à son œuvre : « There is no religion in the book for reasons which are partly aesthetic, partly auctorial, and partly ... the history ». Contrairement à ce qui est souvent mis en avant par la critique (et ce qui du reste l'était souvent aussi par Tolkien lui-même), la raison chronologique n'est pas première. Les deux premières sont relatives à la façon dont Tolkien conçoit l'art. Et d'une, et c'est ce que JR Armogathe et Sosryko ont abordé dans cette conférence, « l'élément religieux est absorbé dans l'histoire et dans le symbolisme » (« Lettre n°142, à Robert Murray (1953) », Lettres, p.246 = Letters, p.172 = expLetters, p.257). Et de deux, et c'est ce que j'aborderai dans ma conférence lors du colloque, l'auteur n'est que subcréateur. La dimension chronologique, elle, fera l'objet d'un autre travail, il faut nous en laisser pour les 20 prochaines années ;).

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#83 Hier 23:57

Hyarion
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Re : Tolkien aux Bernardins 2025

Tant mieux si tout s'est bien passé et s'il y a eu du monde : cette troisième conférence avait l'air très intéressante.
Merci beaucoup, en tout cas, pour ces évocations détaillées du contenu de la soirée de jeudi dernier : de nouveau de passage à Paris ce jour-là, je ne pouvais pas rester pour assister à cette conférence-dialogue, comme je ne pouvais pas être présent aux derniers concerts du soir du 5 avril dernier, lors du festival des Heures musicales.

Je me permets de revenir aux deux concerts de l'après-midi du même 5 avril, auxquels j'ai pu donc assister, avec Beruthiel pour le premier à 15h (Yyr n'était pas loin de nous cependant), puis Beruthiel ayant dû repartir, avec Yyr et Moraldandil pour le deuxième à 16h30. Elendil, pour sa part, était chargé de la présentation du programme avant chacun des dits concerts.

Le concert de 15h, « Voyage en Terre du Milieu », avec l'Orchestre symphonique de la Garde républicaine dirigé par le colonel Sébastien Billard, a eu pour programme, par ordre d'exécution des œuvres (je cite de mémoire) :

  • Ouverture d'Obéron ou The Elf King's Oath (1826) de Carl Maria von Weber ;

  • Ouverture The Hobbit (1967) de Corey Blyton ;

  • A Lord of the Rings Suite (2000-2004) de Howard Shore ;

  • Symphonie n°7, op. 71, The Dream of Gandalf (1996) de Aulis Sallinen ;

  • L'Apprenti sorcier (1897) de Paul Dukas.

En ce qui concerne l'ouverture d'Obéron, que j'ai trouvé fort bien interprétée par l'orchestre avec ce qu'il faut d'expressivité et d'enthousiasme, j'essaierai de l'évoquer plus en détail ailleurs en ces lieux, dans le cadre d'une évocation plus générale de la musique symphonique et concertante de Carl Maria von Weber (1786-1826), évocation prévue de longue date et qui sera partagée dès que possible dans le fuseau adéquat.

Je ne connaissais pas l'ouverture de concert The Hobbit de Corey Blyton, composée avec l'autorisation de J. R. R. Tolkien : elle m'a paru sonner comme une musique de film telle que l'on pouvait en composer à la fin des années 1960, semblant même, par certains aspects, annoncer ce que composera John Williams une dizaine d'années plus tard pour le premier film de Star Wars. A Lord of the Rings Suite de Howard Shore est une suite orchestrale mettant particulièrement en valeur la flûte soliste, et plus exactement la flûte traversière s'agissant de l'interprétation par l'orchestre lors du concert, avec de facto une couleur sonore différente de celle de la musique originale de la première trilogie de PJ, marquée notamment par l'utilisation de la flûte irlandaise. Cette petite suite est d'une toute autre dimension que les six mouvements de la Lord of the Rings Symphony pour orchestre et chœur qu'Howard Shore a également composées à partir de son travail sur les films : d'une durée d'exécution se situant entre 5 et 10 minutes, ladite suite réunit plusieurs thèmes principalement issus du premier film de la première trilogie, mais aussi un peu du troisième, tous ces thèmes ayant pour point commun d'être associés aux hobbits. J'ignore si cette suite a éventuellement fait l'objet d'enregistrements au disque à l'instar de la symphonie en six mouvements...

La Symphonie n°7 The Dream of Gandalf du compositeur finlandais Aulis Sallinen, composée en 1995-1996 sur commande de l'Orchestre symphonique de Göteborg, est une œuvre que je connaissais déjà, à travers une interprétation de l'Orchestre philharmonique de Rhénanie-Palatinat dirigé par Ari Rasilainen, enregistrée en 2002 avec d'autres œuvres symphoniques de Sallinen, et éditée en CD chez CPO (Classic Produktion Osnabrück) l'année suivante. L'enregistrement de 2002 a la particularité de se terminer mystérieusement avec une quinzaine de secondes de silence suivant les dernières du percussionniste jouant seul du célesta. Le concert a été l'occasion pour moi de vérifier que c'est bien avec le célesta que se termine cette symphonie en un seul mouvement d'un bloc, une symphonie par ailleurs riche en motifs aux accents variés, rappelant parfois les couleurs orchestrales finlandaises de Jean Sibelius, parfois même aussi quelque mélodie provençale, et qui dans l'ensemble paraissent évoquer un sommeil paradoxal de Gandalf trahissant beaucoup de préoccupations... Mais de quel Gandalf s'agit-il au juste, celui du Hobbit ou celui du SdA ? Ce n'est qu'un détail, mais sur ce point, le livret du CD de 2003 mentionne deux points de vue un peu contradictoires : pour le commentateur Martin Anderson, Sallinen a eu l'idée de sa Septième Symphonie suite à un projet de ballet inspiré par le Seigneur des Anneaux, tandis que selon les remarques du compositeur figurant également dans le livret, le matériau sur lequel repose la symphonie avait été conçu à l'origine pour un projet de ballet basé sur le Hobbit, projet qui ne pu aboutir sous sa forme originale pour des questions de droits, ce qui n'empêcha pas plus tard qu'un ballet inspiré du Hobbit soit finalement créé à l'Opéra national finlandais avec la Symphonie n°7 de Sallinen comme élément musical central. Toujours est-il que la symphonie renvoie à un rêve d'un personnage commun à deux romans de Tolkien...

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  • Aulis Sallinen (né en 1935), Symphonie n°7 (op. 71) The Dream of Gandalf, Staatsphilharmonie Rheinland-Pfalz (Orchestre philharmonique de Rhénanie-Palatinat), dir. Ari Rasilainen :
    https://youtube.com/watch?v=0peAgxr6lJ4

Le concert de l'Orchestre symphonique de la Garde républicaine s'est brillamment terminé avec l'interprétation du célèbre poème symphonique L'Apprenti sorcier de Paul Dukas, composé en 1897 d'après la ballade Der Zauberlehrling de Goethe. Cette œuvre française a la particularité de compléter le programme de l'album contenant principalement un enregistrement de la Symphonie n°1 The Lord of the Rings de Johan de Meij, dans la très belle version arrangée pour orchestre symphonique (avec cordes) de Henk de Vlieger, enregistrement réalisé en 2001 avec le London Symphony Orchestra (LSO) dirigé par David Warble et édité en CD chez Madacy l'année suivante, avec donc en supplément une interprétation de L'Apprenti sorcier de Dukas par la même formation.

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Le concert de 16h30, « Le Conte des Puissances du Silmarillion », avec le pianiste Alexandre Launay, a eu pour programme Valaquenta (2009) et Valaquenta II (2020), deux suites pour piano de Martin Romberg, compositeur norvégien installé en France, à propos duquel j'ai appris récemment que non seulement Tolkien mais aussi Lovecraft et Robert E. Howard font partie de ses inspirations artistiques. Je connais surtout sa première suite Valaquenta, enregistré avec le pianiste Aimo Pagin et édité en CD chez Lawo en 2011, avec un enregistrement d'une autre suite pour piano de Romberg, Tableaux Fantastiques (2008), inspirée de dix tableaux du peintre polonais Jacek Yerka. Chaque pièce des suites Valaquenta renvoie à un personnage du Silmarillion, en l'occurrence les Valar masculins Manwë, Ulmo, Aulë, Oromë, Mandos, Lòrien (Irmo) et Tulkas pour ce qui est de la première suite. En complément de celle-ci, la seconde suite, Valaquenta II, qui a fait l'objet d'un enregistrement tout récemment mais qui, je suppose, ne sera hélas probablement pas édité en CD, est consacrée aux Valar féminins Elbereth, Yavanna, Nienna, Estë, Varië, Vána et Nessa.

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Comme il avait notamment été précisé, dans le programme diffusé en ligne, que les cinq concerts donnés les 4 et 5 avril le seraient dans la grande nef du Collège des Bernardins, Yyr et moi-même, quoique heureusement attentifs à l'heure qui tournait tandis que nous étions restés assis dans ladite nef, sommes arrivés un peu en retard au deuxième concert, qui avait en fait lieu au grand auditorium du Collège, deux étages au dessus. Rien de bien grave finalement, même si Jean a tenu à s'excuser pour ce malentendu, et nous sommes arrivés au moment où le pianiste venait de commencer à interpréter « Ulmo », ma pièce préférée de la première suite Valaquenta. Le style de Romberg est héritier du romantisme du XIXe siècle mais aussi d'un certain impressionnisme musical de la fin du XIXe siècle et du début du XXe, et cela constitue un heureux mélange dans sa production pourtant toute contemporaine. Sa pièce « Ulmo » fait, à cette aune, beaucoup penser à Claude Debussy et à Maurice Ravel, tout comme sa pièce « Mandos » évoquera plutôt Frédéric Chopin (j'en ai convenu avec Moraldandil) ainsi que les dernières œuvres pour piano de Franz Liszt. J'ai trouvé ce concert bien mené, dans une ambiance généralement contemplative, à laquelle se prêtait la présence, derrière le piano, d'une rosace du XIIIe siècle baignée de lumière naturelle en cet après-midi ensoleillé. Le pianiste a joué les pièces de façon soignée, en prenant le temps de présenter chacune d'entre elles, apparemment dans une logique consistant à former des couples ou des duos de Valar, quitte à mélanger l'ordre d'exécution du contenu des deux suites Valaquenta I et II, le concert s'étant terminé, de mémoire, par la dernière pièce de la première suite. Si quelqu'un a gardé une trace du programme détaillé d'exécution de ce concert, cela pourrait du reste être intéressant de la partager ici.

Voila pour mes quelques impressions concernant ces deux concerts, que j'ai bien appréciés... et j'arrête-là, car il est tard...   

Bonne nuit, à toutes et à tous.

Amicalement,

B.

P.S. : j'avais entendu dire que Martin Romberg lui-même pourrait être présent au concert du pianiste Alexandre Launay... Est-ce que cela a finalement été le cas ?

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