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#1 27-05-2018 20:46

Vinyamar
Inscription : 2001
Messages : 1 813

L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

Salut à tous,

je m'offre un retour sur le forum après bien des années car ma voilà à la recherche d'une histoire que je suis sûr d'avoir lu, dans le Silmarillion, les CLI ou un HOME, mais dont je ne me souviens pas assez pour la retrouver.
Il s'agissait, à ce que je crois, d'une elfe dont l'amour n'a pu porter ses fruits et qui est partie s'allonger sous un arbre pour s'y endormir à jamais. Mais elle n'est jamais morte. Elle est juste là sous cet arbre pour l'éternité. Je crois même qu'il y a une sorte de protection autour d'elle.

Voilà, c'est un peu vague. Je penche pour une origine dans le Silmarillion, mais je ne me vois pas tout relire pour retrouver ce bref passage. Je pensais que c'était Luthien, mais je n'en retrouve pas de trace. Je crois que sa fin est liée au Valar des rêves (elle se coucherait en Lorien ?)

Je suis en fait en train de rechercher les pouvoirs des Elfes défient la mort, et leurs pouvoirs liés aux chants.
J'ai notamment en tête de chant de Luthien qui a permis à Beren de revenir à la vie, en échange de la mortalité de Luthien, mais je suis convaincu qu'il y en a d'autres (au-delà de leur capacité naturelle à résister à la mort et aux poisons).

Si quelqu'un a des réminiscences plus précises sur cette légende, je vous remercie d'avance.

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#2 28-05-2018 01:37

jean
Inscription : 2002
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Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

C'est un plaisir de te revoir parmi nous. Je ne me souviens pas de cette histoire. Celle qui me vient à l'esprit et qui s'en rapproche le plus est celle de Miriel, la mère de Feanor. Elle avait transmis à son fils une telle énergie vitale qu'elle ne se sentait plus la force de vivre et s'était endormie pour toujours dans la Lorien (celle de Valinor). Ce «suicide» d'une elfe immortelle en plein Valinor causera la chute des Noldors.

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#3 28-05-2018 05:18

Elendil
Lieu : Velaux
Inscription : 2008
Messages : 1 064
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Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

De fait, c'est Míriel, qui part « dormir » en Lórien. Le passage qui en parle de manière détaillée n'est pas dans le Silm., mais dans HoMe 10, sauf erreur.

E.

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#4 28-05-2018 12:22

Vinyamar
Inscription : 2001
Messages : 1 813

Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

Oui c'est ça !
Il y avait en effet une histoire d'énergie à plat  wink
Mais alors elle est morte ?

je vais aller relire ça, merci du tuyau.
Je ne sais pas pourquoi, j'avais en tête une histoire avec les Valars des rêves qui la recueillaient. A moins que je mélange 2 récits, mais je vais reprendre Home. Merci.

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#5 28-05-2018 13:10

jean
Inscription : 2002
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Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

Il y a bien un jugement des valar a son propos et sur la possibilité pour Finwe de se remarier.

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#6 02-06-2018 17:36

Vinyamar
Inscription : 2001
Messages : 1 813

Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

Merci pour vos aides, j'ai bien retrouvé le passage en question dans HOME X, et je n'étais pas si loin que cela de la vérité.

L'histoire, c'est effectivement celle de Miriel, épouse de Finwë et mère de Fëanor (=Kurufinwë).
Elle avait les cheveux d'argent et son chant était magnifique. Elle était aussi la plus talentueuse des Noldor en artcraft (jamais bien su traduire ce terme générique), et plus particulièrement en broderie.
Toute sa force, tant physique que spirituelle, a été absorbée par son fils Fëanor pendant qu'elle le portait, et elle est tombée en dépression après la naissance ("languissement"). Elle était si épuisée qu'elle voulait en fait cesser complètement d'exister (et non seulement mourir à la façon des Elfes et demeurer en Mandos. Christopher relève l'étrangeté de ce désir, contraire à la nature des Elfes, et le met en doute). Mais elle finira tout de même en Mandos, et plus précisément chez Vairë l'épouse de Mandos, brodeuse elle-aussi.
(Il sera dit plus tard par les Valar que cette anomalie était due au marrissement d'Arda, c'est à dire à la corruption apportée dans le monde par Melkor.)

Invitée par Finwë à trouver un remède à son mal en Valinor (qui guérit de tout), elle s'est rendue en forêt de Lorien et s'est allongée sous un arbre d'argent. Là son esprit a quitté son corps.
Et c'est là qu'il y a une mention intéressante :

"Les servantes d'Estë prirent soin de son corps gracieux de sorte qu'il ne flétrisse jamais ; mais elle ne revint pas"

"The maidens of Estë tended her fair body so that it remained unwithered, but she did not return"

Et Finwë vient souvent s'asseoir sous le saule d'argent auprès du corps "endormi" de son épouse pour l'appeler. Mais jamais elle ne revint. Alors Finwë, par décision des Valar, eut le droit de se remarier, considérant que ce genre de mort n'était pas prévu dans le dessein initial d'Iluvatar. Mais ça c'est une autre histoire.

Estë est l'épouse de Lorien, le Valar des rêves, et ce sont ses servantes ("maidens" : jeunes filles) qui vont prendre soin de son corps pour qu'il ne flétrisse jamais. Ce qui est contraire au devenir des corps des Elfes dans mon souvenir, dont le hröa s'efface lentement après la mort (je ne sais plus où j'ai lu ça).
Miriel bénéfice donc d'une protection qui prolonge l'état intact de son corps, dans l'espoir qu'elle y retourne un jour.

Mais au jugement de Mandos, on demande à Miriel si elle compte revenir un jour. Non, répond elle, jamais. Alors Finwë est autorisé à se remarier.


Du coup, sait-on ce qu'il est advenu de ce corps ? Est-il toujours endormi pour l'éternité dans un état immaculé ?
Selon vous, pourquoi Miriel a-t-elle bénéficié d'un tel traitement ?
(bon, elle était la toute première à mourir si j'ai bien compris ; ce qui contredit un peu les règles déjà établies que les âmes des elfes devaient demeurer à Mandos : pourquoi y aurait-il ces règles si la mort n'était pas prévue...)

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#7 03-06-2018 16:16

Vinyamar
Inscription : 2001
Messages : 1 813

Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

Bon
j'ai découvert cet essai d'Hiswelokë sur Tolkiendil qui répond en partie à mes questions : Miriel, ou la confrontation de la lune et du soleil.
L'article est très intéressant et démontre la symbolique (sinon l'allégorie) utilisée entre les deux épouses de Finwë, l'une pleinement lunaire, Miriel, l'autre, pleinement solaire, Indis.

J'y lis en passant que

Après le meurtre de Finwë, le couple se retrouva dans les halles de Mandos où séjournent les âmes des Elfes décédés par accident. Míriel reprit partiellement goût à la vie et fut autorisée à réintégrer son corps. Elle vint habiter chez Vairë, où elle entreprit de conserver la mémoire des actes des Noldor en Terre du Milieu sur de magnifiques tapisseries

(il me suffisait de poursuivre un peu la lecture pour tomber sur ce passage je suppose)

On peut donc bel et bien prétendre au final que Miriel s'est endormie sous un arbre (un saule d'argent) et que son corps y est resté préservé des siècles durant, grâce au soin des suivantes d'Estë, jusqu'à ce qu'elle "ressuscite" un jour (ce n'est pas ici une réincarnation, et je pense que ce seul hapax suffirait à promettre une belle étude de ce cas unique, mais avec très peu de matière, comme seul Didier sait le faire ;-) )

Je reprend l'histoire :

  • Miriel a abandonné son corps, préférant mourir

  • les suivantes d'Estë en prennent soin (dans l'attente que son esprit guérisse et qu'elle y revienne)

  • Miriel ne compte JAMAIS revenir, et l'entérine quand les Valar lui posent la question (dont la réponse permettra ou non à son époux Finwë de reprendre une épouse : mariage dissous par la mort )

  • Finwë se remarie, puis meurt à son tour (re mariage dissous ?)

  • n'ayant plus de conflit d'épouse, Miriel peut revenir à la vie...et elle le fait, la garce !

  • Elle réintègre son corps gardé intact et brode les événements du monde qu'elle a, en grande partie, provoqués.

Estë joue un rôle majeur dans cette histoire qui est complètement passé sous silence. Quelles sont vos interprétations ?

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#8 03-06-2018 20:07

Silmo
Inscription : 2002
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Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

interprétation n° 1 : je n'imaginais pas qu'on traite Miriel de "garce"

n° 2 : je ne fais pas partie de ceux qui se rejouissent de ton retour et de propos aussi moisis.

Silmo

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#9 03-06-2018 21:59

Vinyamar
Inscription : 2001
Messages : 1 813

Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?


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#10 05-06-2018 08:17

Cédric
Lieu : Près de Lille
Inscription : 1999
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Webmestre de JRRVF
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Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

Je supprimerai le mention et les deux messages qui suivent. Vinyamar, nous ne sommes dans l'espace libre, tâchons de rester dans un ton qui sied à l'esprit de ce forum...

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#11 05-06-2018 10:09

Vinyamar
Inscription : 2001
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Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

Ca va, c'est pas une religion non plus ! On parle de personnages fictif, et c'est de l'humour hein !
J'ai déjà lu des commentaires plus sarcastiques sur des personnages, et même de Silmo j'en suis sûr.

Un personnage qui fait intervenir les dieux sur son cas, qui par ses décisions condamne son mari, au sujet duquel de nouvelles lois doivent être établies, à qui on demande si elle est vraiment sûre et certaine de ne jamais vouloir revenir dans son corps, qui jure que non jamais, et qui au final le fait quand même, oui, il y a de l'abus, et on peut gentiment la traiter de garce.
Ulmo et Mandos je crois sont encore plus sévères à son endroit !!

Alors on se calme, ce n'est que de la littérature.

En vrai je trouve infiniment plus violent l'accueil que me fait ici Silmo. Je tombe de haut, je ne croyais pas susciter tant de haine.
Est-ce à cause de mon dérapage un jour sur la mention de "normalie" pour lequel j'ai cru faire amende honorable ? Est-ce parce que je n'ai pas participé au concert de louange envers Daniel Lauzon et sa nouvelle traduction à laquelle je reprochais d'avoir systématiquement remplacé tous les noms propres ?
je ne sais pas
mais sans déconner, Silmo, c'est trash ton intervention !

… des "propos moisis", carrément !?

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#12 05-06-2018 21:43

ISENGAR
Lieu : Tuckborough près de Chartres
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Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

Cédric a écrit :

tâchons de rester dans un ton qui sied à l'esprit de ce forum...

Bonsoir Vinyamar,

L'utilisation du terme "garce", fort peu flatteur s'il en est, même sur un ton humoristique - même gentiment - me paraît à moi aussi très très déplacé, dans le cas d'une femme imaginaire à qui un projet littéraire accorde le droit de revenir sur des choix passés, à l'éclairage de nouvelles données qui n’étaient pas prises en compte auparavant.
Une femme pas si imaginaire que ça, en fin de compte.

Et alors quoi ; toutes celles, fictives ou réelles, qui seraient amenées à changer d'avis au cours de leur existence, avec le lot de conséquences que ça pourrait entraîner, seraient des garces ?
Ne conviens-tu pas que c'est un drôle de message, et qu'on n'a pas tellement envie de lire ce genre de choses au détour d'un fuseau - au demeurant plutôt agréable et instructif - sur JRRVF ?

Tu fais allusion à des "commentaires plus sarcastiques" lus ici ou là. Certes, il y en a eu, et je suis bien placé pour le savoir.
Mais certains termes peuvent être perçus comme ayant franchi la frontière fragile entre sarcasme et mépris. Frontière que j'ai eu à cœur, personnellement, de ne jamais franchir - du moins je l'espère.

Mais je crois sincèrement que "garce", et la violence sous-jacente de sa signification usuelle, fait partie de ces termes.
Il faut en tenir compte.

C'est à cette violence sous-jacente que notre ami Silmo a réagi (de façon tout à fait épidermique, j'en conviens), et c'est à cette violence sous-jacente que je réagis également ce soir, à mon tour.

Amicalement

I.

PS pour Cédric : si tu souhaites en fin de compte modérer et supprimer les derniers messages du fuseau, comme tu l'as évoqué, celui-ci peut bien évidemment faire partie du lot.

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#13 05-06-2018 22:08

Cédric
Lieu : Près de Lille
Inscription : 1999
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Webmestre de JRRVF
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Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

Le message de Vinyamar et la réaction à chaud de Silmo sont dommageables, et je le regrette.
Ne soyons pas dans une réaction d'escalade, il y a bien des choses plus intéressantes à faire et à dire que de nous "interpeller" en ces lieux. Nous sommes adultes, sûrement responsables alors le peu de temps que j'ai, j'aimerai le consacrer à des choses utiles et qui correspondent à l'objet du site, et pas à devoir réagir à des messages déplacés ou autres altercations.
Je laisse les messages mais je vous demande de ne plus épiloguer sur ce fuseau. Si besoin, je suis disponible à l'adresse mail habituelle...

Merci à vous.

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#14 05-06-2018 23:50

Vinyamar
Inscription : 2001
Messages : 1 813

Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

"•n'ayant plus de conflit d'épouse, Miriel peut revenir à la vie...et elle le fait, l'inconstante !"

Ca ira si je met ça ?

On ne va peut-être pas commencer à jauger de la façon dont je considère les femme à l'aune d'un trait d'humour qui manifestement passe aussi mal qu'une blague de Tex à un congrès de féministes (Ce qui en fait en dit plus long sur le public que sur moi, mais bon…)
J'ai peut-être mal choisi mon mot d'humour (moisi hein ?)

Sinon, des gens ont-ils de commentaires à faire sur ce "miracle" de résurrection accordé à Miriel et sur le fait que son corps ait continué à être préservé même après qu'elle ait expressément refusé à jamais de revenir à la vie ?
Et même sur l'origine de cette élection par Estë ?

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#15 06-06-2018 13:59

jean
Inscription : 2002
Messages : 893

Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

Tout ceci me fait l'effet d'une tempête dans un verre d'eau et il me semble que tout le monde sur-réagit un petit peu et je propose «d'oublier» les derniers échanges. Il n'en demeure pas moins que la question posée me semble pertinente et mérite mieux que d'être fermée pour de mauvaises raisons. Après tout, à quand remonte la dernière question de fond sur le légendaire?
Je suis entre deux aéroports et je n'ai pas le tempse de donner mes idées sur la question posée, même si j'aimerais vraiment. En tout cas je suis friand de lire vos réflexions a vous

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#16 06-06-2018 16:38

Silmo
Inscription : 2002
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Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

Je m'excuse auprès de Cédric sad
Il sait que je suis, hélas, soupe au lait sur des sujets épidermiques ...
C'est de moins en moins souvent que j'interviens mais quand un propos me hérisse, mon caractère de vieil Huorn se réveille.

Je ne retire rien de mon indignation quant au mot "garce" ... le vocabulaire n'est jamais anodin, mais oublions cela puisqu'il s'agissait d'un trait d'humour inapproprié. Dont acte. Fermons le banc.

Sur mon second commentaire, j'aurais dû l'éviter sans faire mauvais accueil à l'auteur.
M'abstenir d'exposer mon opinion aurait été plus conforme à la tempérance, vertu qui me guide d'ordinaire sauf quand je fulmine.

Pour en revenir à Miriel, commençons par souligner que le texte  été publié dans HoME X, donc d'une certaine manière apocryphe. L'histoire est superbe mais devait poser problème à Tolkien père (merci à Christopher de nous y avoir donné accès).
Miriel donne naissance à un héros / un monstre (selon comment on considère Féanor) et cet enfantement l'épuise au point qu'elle dépérit. Son esprit va chez Mandos où son corps est conservé par les servantes d'Estë. Son mari demande aux Valar l'autorisation de se remarier alors que son épouse est toujours sous comas artificiel. On lui accorde au bout de dix ans. Bravo la fidélité, mais tant mieux pour la naissance de ses 4 nouveaux enfants.
Miriel ne revient à la vie (elle au moins est plus fidèle) qu'après la mort de son époux et se consacre ensuite à la tapisserie d'évènements  qu'elle n'a en rien provoqués (sauf à croire qu'une mère est responsable des malheurs venus de l’orgueil de son fils).

Bref, même dans un conte initialement bien ficelé - avec plein de rebondissements dignes des sagas et mythologies antiques -  ça faisait pour Tolkien beaucoup de couleuvres incompatibles au fur et à mesure que le Légendaire s'appuyait sur des fondements catholiques,  non?

Pas étonnant qu'il ait laissé tomber ce chapitre sans le reprendre.

S.

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#17 06-06-2018 17:29

jean
Inscription : 2002
Messages : 893

Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

Dans une lettre à Rhona Beare (lettre n°212) Tolkien écrit que “ Míriel [...] provoqua la chute des grands Elfes ». Dans l'esprit de Tolkien donc Muriel a bien été la cause, ou au moins une des causes de la chute de Feanor et des Noldor

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#18 06-06-2018 17:55

Silmo
Inscription : 2002
Messages : 4 040

Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

D'où le malaise  cher Jean...
je me demande en quoi Miriel aurait "provoqué" quoi que ce soit.
Elle enfante puis s'éteint.
Si accoucher est une faute, waow.

Est-ce un problème de traduction ou la volonté de Tolkien de rendre Miriel (la femme) responsable des désastres de son fils (le mâle) ?? J'ai peine à y croire.

Qu'on considère Féanor comme un fada ou un glorieux guerrier, je ne saisis pas pourquoi sa génitrice serait responsable de la suite... et je présume que cela explique "dans l'esprit de Tolkien" l'abandon d'un thème bien trop tortueux.

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#19 06-06-2018 19:49

Laegalad
Lieu : Strasbourg
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Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

Pour moi c'est une dépression post-partum qu'elle fait. Et c'est assez moderne de la part de Tolkien d'en parler - même surprenant de la part d'un catholique aussi pratiquant, même s'il a bien prouvé qu'il n'était pas bouché ^^ - parce que même de nos jours dans un pays comme le nôtre, c'est quelque chose dont on ne parle pas trop et qui n'est pas très bien vu (parce que la grossesse c'est sensé être trop mêrveilleux et l'accouchement un plaisir et les suites de couches aussi légères qu'un pet-de-nonne). Mais ça me semble tout à fait une description métaphorique d'une dépression post-partum.

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#20 06-06-2018 20:10

Hyarion
Inscription : 2004
Messages : 2 375

Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

ISENGAR a écrit :

L'utilisation du terme "garce", fort peu flatteur s'il en est, même sur un ton humoristique - même gentiment - me paraît à moi aussi très très déplacé, dans le cas d'une femme imaginaire à qui un projet littéraire accorde le droit de revenir sur des choix passés, à l'éclairage de nouvelles données qui n’étaient pas prises en compte auparavant.
Une femme pas si imaginaire que ça, en fin de compte.

Il est vrai que le terme peut être porteur en lui-même d'une certaine misogynie, quelle que soit la volonté humoristique qu'il peut y avoir derrière son emploi...

Vinyamar a écrit :

On ne va peut-être pas commencer à jauger de la façon dont je considère les femme à l'aune d'un trait d'humour qui manifestement passe aussi mal qu'une blague de Tex à un congrès de féministes (Ce qui en fait en dit plus long sur le public que sur moi, mais bon…)

Sans doute tout cela est-il révélateur des degrés de tolérance variable des uns et des autres concernant les échanges sur, comme par hasard, les questions clivantes relatives aux relations hommes/femmes, à la sexualité, au mariage, etc. Mais est-ce surprenant, au regard notamment du passé que certains échanges sur le présent forum laissent encore entrevoir ?

En tout cas, décidément, sur la planète Tolkien, HoME X est peut-être l'équivalent du Necronomicon, ou de la boîte de Pandore qu'il vaudrait mieux laisser fermée... tant son contenu reste une source potentielle d'affichage de désaccords profonds sur fond de questions "sociétales"... Mais sans doute est-ce incontournable, alors autant essayer d'en prendre son parti, même si cela peut être difficile...

Je me souviens encore de ma consternation le jour où j'ai lu le parallèle fait par Yyr entre l'éthique sexuelle des Eldar, telle que décrite précisément dans HoME X, et celle des prétendus "vrais chrétiens" intervenant dans le débat public depuis quelques années (ce n'était pas dit exactement comme ça, mais ça n'en était pas moins très clair) : c'était une lecture beaucoup trop orientée à mon goût (elle le reste encore aujourd'hui), s'appuyant sur des convictions qui ne sont pas du tout les miennes, mais... elle avait le mérite de mettre le doigt sur une possible lecture "chrétienne" du propos de Tolkien, quoique pas plus valable qu'une autre, ceci dit (et contrairement à ce que d'autres pourraient éventuellement penser, dans le sillage de Pearce et de ses suiveurs). Alors, quitte à mettre un peu les pieds dans le plat pour essayer d'apporter des éléments de réponse à la question de Vinyamar, on peut effectivement se demander si une lecture théologique du texte de Tolkien ne peut pas in fine aider à éclaircir les choses, qui sait ? Silmo souligne lui-même que le texte en question s'inscrit dans une période d'écriture tolkienienne où les fondements catholiques deviennent de plus en plus prégnants en matière de subcréation...

Si l'esprit et le corps de Míriel se sont consumés lors de la grossesse et de l'accouchement ayant donné naissance à Fëanor, peut-être que l'existence physique de ce personnage féminin perd une bonne part de son sens "interne", puisque l'on sait, justement par d'autres propos ailleurs dans HoME X, combien l'enfantement est quelque-chose de central dans la vie des Elfes tolkieniens, d'où d'ailleurs le parallèle fait par Yyr avec une conception chrétienne de la vie de couple. Or, si le corps ne sert plus à rien, alors pourquoi ne pas le "débrancher" au lieu de laisser les servantes d'Estë en prendre soin ? Même si le militantisme dogmatique "pro-Vie" des prétendus "vrais chrétiens" précédemment évoqués n'est pas du tout ma tasse de thé, on peut ici songer à ce qui l'anime, à savoir non seulement l'opposition au droit à l'avortement et la défense d'une certaine "hétéronormativité", mais aussi la condamnation de l'euthanasie, et plus largement du suicide ainsi que du choix de donner la mort lorsque l'esprit ne peut plus animer un corps. Si l'on se base sur les conceptions du catholique conservateur qu'était Tolkien, en constatant le fait que le corps de Míriel reste intact dans les jardins de Lórien et le fait que ladite Míriel réintègre son enveloppe physique à la mort de son époux Finwë, on peut éventuellement observer une certaine compatibilité - fût-elle tortueuse dans sa formulation - avec les valeurs de l'auteur, supposées partagées avec un certain lectorat chrétien, tant en ce qui concerne le mariage que l'enfantement ou la préservation de la "Vie" à tout prix en général... Quant à "la Femme" comme source de "la Chute", je vous laisse deviner à quoi cela peut renvoyer, sachant que l'on peut noter qu'une autre occurrence de ce genre se trouve dans La Chute d'Arthur avec un personnage de Guenièvre source de malheur conçu dans le sillage direct d'un certain victorianisme... Encore un texte que Tolkien a laissé inachevé, du reste...

Concernant la lettre 212 citée par Jean, voici ce qu'elle dit en VO (p. 286) :

In the Elvish legends there is record of a strange case of an Elf (Míriel mother of Fëanor) that tried to die, which had disastrous results, leading to the ‘Fall’ of the High-elves.

Peut-être que Tolkien trouvait "étrange" la dépression post-partum dont parle Laegalad, auquel cas je ne suis pas sûr que cette évocation soit particulièrement un gage de "modernité" de la part de l'auteur, surtout si ça engendre une "Chute" avec majuscule, mais bon, qui sait ? ;-)

Tout cela est évidemment un peu "vite dit", en forçant volontairement le trait pour éviter de tourner autour du pot, et cela mériterait sans doute des recherches plus poussées, en essayant de faire abstraction de nos opinions (est-ce cependant possible ?), mais je laisse volontiers cela aux spécialistes de ces questions. À noter que le personnage de Míriel n'est évidemment pas réductible à ce genre de lecture théologique que je n'ai fait plus haut qu'esquisser : ses talents en matière d'artisanat d'art et sa liberté de faire des choix me font notamment penser au personnage (moderne à bien des égards) de Birdalone dans Le Lac aux Îles Enchantées de William Morris, mais c'est une autre histoire...

Peace and Love anyway, en espérant être resté autant que faire se peut dans le ton qui sied au présent forum. ^^

Amicalement,

Hyarion.

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#21 06-06-2018 20:57

Laegalad
Lieu : Strasbourg
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Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

(Ce que je trouvais moderne, c'est qu'il en connaisse l'existence... pas le reste. Mais bon on s'appuie sur un texte jamais publié et une lettre jamais envoyée alors On peut lui laisser le bénéfice du doute et espérer qu'il a finalement eu l'élégance de ne pas juger smile )

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#22 06-06-2018 21:01

Hyarion
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Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

(Je suis d'accord ^^)

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#23 06-06-2018 22:26

Elendil
Lieu : Velaux
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Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

Silmo a écrit :

Pour en revenir à Miriel, commençons par souligner que le texte  été publié dans HoME X, donc d'une certaine manière apocryphe. L'histoire est superbe mais devait poser problème à Tolkien père (merci à Christopher de nous y avoir donné accès).

Plutôt posthume qu'apocryphe : rien ne dit que Tolkien n'ait pas, au moins à un moment, envisagé d'intégrer le Namna comme appendice de son Silm. en gestation. Compte tenu de son désir clairement exprimé de le faire pour l'Athrabeth, cela semble au moins plausible.

Silmo a écrit :

Son esprit va chez Mandos où son corps est conservé par les servantes d'Estë. Son mari demande aux Valar l'autorisation de se remarier alors que son épouse est toujours sous comas artificiel. On lui accorde au bout de dix ans. Bravo la fidélité, mais tant mieux pour la naissance de ses 4 nouveaux enfants.
Miriel ne revient à la vie (elle au moins est plus fidèle) qu'après la mort de son époux et se consacre ensuite à la tapisserie d'évènements  qu'elle n'a en rien provoqués (sauf à croire qu'une mère est responsable des malheurs venus de l’orgueil de son fils).

J'ai sur deux points que tu mentionnes une vue moins manichéenne de ce qu'écrit Tolkien, pour qui les deux personnages sont particulièrement nuancés : Finwë retombe amoureux, ce qui peut arriver à n'importe qui, surtout sous l'effet de l'éloignement et du rejet — et l'on sait que Míriel rejette très vivement toutes les tentatives de la convaincre de revenir à la vie (et pour les opinions de Tolkien au sujet du désir amoureux, voir la Lettre n° 43, très explicite). De plus, les Valar reconnaissent que sa situation est susceptible de perdurer éternellement, ce qui ne correspond pas à la nature elfique telle qu'ils la comprennent (cf. MR, p. 258–260).

Par ailleurs, il semble difficile de supposer que Míriel soit plus fidèle : d'abord parce qu'elle est tenue par sa promesse de ne plus revenir à la vie si Finwë se remarie, ensuite parce qu'après la mort de Finwë elle finit malgré tout par changer d'avis et que c'est Finwë qui accepte volontairement de prendre sa place en Mandos jusqu'à la fin des temps pour qu'elle puisse revivre. Tolkien s'arrête là et ne juge pas les deux personnages.

Cela dit, pour ma part, le refus initial de Míriel suivi de son changement d'avis après la mort de Finwë m'a toujours fait pensé qu'en réalité, c'était son époux que Míriel ne supportait plus et qu'elle fit tout pour éviter de rester avec lui, dans un royaume où le divorce est interdit par décret divin. Mais ce n'est évidement qu'une opinion personnelle éminemment critiquable, d'autant que je ne prétendrais pas prétendre à la clairvoyance en matière de psyché féminine et encore moins de dépression post-partum, domaine où mon expérience est fort proche du néant.

Silmo a écrit :

D'où le malaise  cher Jean...
je me demande en quoi Miriel aurait "provoqué" quoi que ce soit.
Elle enfante puis s'éteint.
Si accoucher est une faute, waow.

Est-ce un problème de traduction ou la volonté de Tolkien de rendre Miriel (la femme) responsable des désastres de son fils (le mâle) ?? J'ai peine à y croire.

Peut-être ne faut-il pas trop charger la signification de leading, surtout dans ce qui n'est que le brouillon d'une lettre. La décision de Míriel est effectivement un maillon d'une chaîne de causes qui ont mené à la Chute des Ñoldor, maillon qui découle certes d'une décision consciente et considérée comme erronée, mais qui ne pouvait en aucun cas anticiper les développements ultérieurs. Si responsabilité il y avait, dans l'esprit de Tolkien, ce ne pouvait être qu'une responsabilité inconsciente, analogue à celle de Finwë et infiniment plus faible que celle de Fëanor ou même de Fingolfin, pour ne parler que des Elfes.

On est assez loin de la Genèse, où l'acte est rapide, irréversible, brisant volontairement un commandement divin et menant à une Chute presque instantanée : s'il devait y avoir analogie, c'est plutôt le massacre d'Alqualondë et la décision de Fëanor de passer outre l'avertissement de Mandos qui en tiendraient lieu.

E.

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#24 06-06-2018 23:03

Vinyamar
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Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

Silmo a écrit :

d'évènements  qu'elle n'a en rien provoqués (sauf à croire qu'une mère est responsable des malheurs venus de l’orgueil de son fils).

C'est pourtant bien le jugement que portent les Valar eux-mêmes.
Tu résumes un peu trop vite quand tu dis qu'épuisée par n'enfantement elle est passée chez Mandos.
Non.
La guérison lui était proposée, mais elle a refusé. Selon les Valar, elle a manqué d'Espérance, et c'est là le premier péché qui est entré dans le monde des Elfes (à vérifier si c'est le premier, mais il semblerait bien) et qui lui est reproché par les Valar.
Car elle aurait pu s'en remettre (et d'ailleurs, elle le fait au final).

Quant à Finwë, Christopher insiste lourdement dans ses notes que ce n'est pas par désir d'amour qu'il se remarie, mais par désir d'enfanter. Il est "trahi" par Miriel qui lui refuse à jamais d'enfanter d'autres enfant, et c'est sur ce point que les Valar tranchent, en lui permettant le remariage dans cette unique espérance. Et à condition ! A condition que Miriel entériné son départ éternel, avec une période probatoire de 10 ans donnée non pas à Finwë mais à Miriel dans l'espoir qu'elle change peut-être d'avis.
Ne changeant pas d'avis, alors on permet à Finwë de se trouver une autre épouse pour avoir d'autres enfants, ce qui est la vocation des enfants d'Iluvatar.

Tout est très clair à ce sujet dans le Home, je vous sors les citation dès que possible
(mais on sortdu sujet)

Hyarion
Oulà.
Si on me traite de mysogine d'après la forme féminine de garçon utilisée pour qualifier une inconstance, qu'est-ce qu'on devrait dire à ce réquisitoire à charge

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#25 06-06-2018 23:32

Vinyamar
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Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

L'histoire (p.259) commence quand Finwë se plaint à Manwë de ne plus pouvoir avoir d'enfants ("c'est pas juste, surtout que Olwë et Ingwë en ont plein, eux!").
Manwë a pitié de lui, mais se rend compte que c'est un sujet assez sérieux et qu'il va falloir faire ça prudemment avec tous les Valar. Ils se rendent compte au passage que leur tâche de "guarder" Valinor va être plus compliquée que prévue, à cause du mal que Melkor a fait à "la substance d'Arda" (ils  ne le perçoivent que maintenant), qui fait que tous les êtres incarnés qui tirent leur subsistance d'Arda Marred (corrompue) seront toujours capable de désordres ou de souffrir de choses non naturelles à Arda Unmarred (incorrompue).
pardonnez-moi de ne pas relire tout l'article de la Feuille de la Compagnie 3 pour savoir quel traduction préférer)

Les Valar ont conscience des souffrances que les "Enfants" vont dès lors apporter dans le monde (excusez-moi si je me trompe, mais en gros c'est le début du bordel)

And the Valar were greatly concerned to   see that all their labour for the guarding of Valinor was of no   avail, to keep out evil and the shadow of Melkor, if any thing,   living or unliving, was brought thither out of Middle-earth and   left free or unguarded; and they perceived at last how great was   the power of Melkor in Arda, in the making of which as it was his part was such that all things, save in Aman alone, had an inclination to evil and to perversion from their right forms and courses. Wherefore those whose being began in Arda, and who
moreover were by nature a union of spirit and body, drawing the sustenance of the latter from Arda Marred, must ever be, in  some degree, liable to grief, to do or to suffer things unnatural; and though dwelling in Aman might be a guard against this evil, it was not a full cure, unless in long ages. And with this thought a shadow passed over the hearts of the Valar, even in the noon-tide of the Blessed Realm, presage of the sorrows which the Children should bring into the world.

Là c'est juste pour rappeler que dès le contexte initial, on a la révélation que la situation dans laquelle on se trouve est le premier signe de la présence du Mal sur Terre (rien de moins !)

Puis Mandos rappelle que l'ordre donné par Iluvatar à ses enfants est que leur vie ne cesse jamais, qu'ils n'aient qu'une seule épouse durant leur vie (tant que dure Arda), mais que cette règle ne prenait pas en compte l'irruption de la Mort (Miriel est la première vivante à mourir comme le relève Christopher plus loin !) Il donne ensuite un décret permettant le remariage si l'ancienne union est dissoute "pour toujours". Il définit ensuite : Comment un mariage est-il terminé pour toujours ? Par la volonté du Mort ou de Mandos (Finwë n'a donc pas son mot à dire). Mandos se réserve le droit de refuser à un mort de revenir (étrange). Le mariage est terminé dans Arda s'il ne peut perdurer dans Arda (logique).
Mandos ajoute très clairement :

"Nous disons ‘par la volonté des Morts’ car il serait injuste que les Vivant puisse pour leur propres motivations confiner les Morts en Mandos, leur refusant l’espoir du retour. Il est aussi injuste que les Morts, en refusant la vie, contraigne les Vivants à demeurer solitaire jusqu’à la Fin ; et ainsi nous avons déclaré que dans un cas pareil les Vivants puissent prendre une autre épouse. Mais comprenez bien que si cela est fait, alors le refus des Morts est irrévocable, et qu’ils ne pourront jamais à nouveau reprendre vie dans leur corps. Car nul parmi les Quendi ne devrait avoir deux épouses au même moment éveillée et vivante »

Vairë en remet une couche plus loin en disant :

L'esprit de Miriel repose avec moi, et je le sais. Il est petit, mais il est fort et inflexible : un de ceux qui, après avoir dit 'ainsi je ferai’, font de leurs paroles une loi irrévocable pour eux-mêmes. Sauf sous la contrainte, elle ne retournera pas à la vie, ni à Finwë, ni ne souhaite-t-elle patienter jusqu'au vieillissement du monde

Mandos en remet encore une couche à Miriel, pour qu'elle soit bien sûre de sûre de sûre :

En Mandos tu demeureras. Mais prend garde ! Tu es une Quendi, et même si tu refuses ton corps, tu devras rester en Arda et dans le temps de son histoire. Les Eldar ne sont pas comme les Valar. Leurs esprits sont moins forts à endurer que tu ne l'estimes. Ne t’étonne pas alors si ta volonté change avec le temps, et si le destin (doom) dont tu te charges te devient une peine. A toi, et à de nombreux autres !

Miriel adhère en demeurant silencieuse (dans la première version elle déclare explicitement fait qu'elle ne reviendra jamais). Mandos décide d'ajouter une période de 12 ans pour être absolument certain que le mort ne change pas d'avis (dans les notes, c'est 10 ans dans le Silmarillon) Et Finwë met trois ans après la permission à trouver une nouvelle épouse (p.237).

Et pourtant... Miriel changera d'avis et reprendra vie en son corps (certes une fois le conflit d'époux terminé…)
... à moins que Finwë et Indis ne se réincarnent également. (là ce serait un peu la cata, mais Tolkien n'a pas dû penser si loin).
D'ailleurs, en relisant les notes, je crois comprendre que Tolkien a mis une note en marge sur le retour de Miriel. Alors qu'il est très explicite sur le fait qu'elle réintègre son corps, dans les Laws & customs la note indique seulement que Miriel est retournée à la maison de Vairë (pas forcément avec son corps donc, puisqu'il note que personne normalement ne peut entrer chez Vairë avec son corps)…

Mais Manwë met sérieusement en garde Finwë :

Mais ceci est une permission, non un conseil. Car la séparation provient de la corruption d'Arda; et ceux qui acceptent cette permission acceptent la corruption; alors que ceux qui gardent le deuil et demeurent fermes appartiennent en esprit et volonté à Arda incorrompue. Ceci est un grave sujet duquel dépendront le destin de beaucoup. N'ai pas de hâte !"

(quelque part se dessine ici le péché originel, de la femme et de l'homme, l'une en perdant espoir, l'autre en refusant d'attendre et de veiller (cela rejoint un thème que j'aimerais travailler depuis 15 ans maintenant sur le péché originel de Numénor très similaire aux tentations du Christ)

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#26 06-06-2018 23:58

Hyarion
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Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

Elendil a écrit :

On est assez loin de la Genèse, où l'acte est rapide, irréversible, brisant volontairement un commandement divin et menant à une Chute presque instantanée : s'il devait y avoir analogie, c'est plutôt le massacre d'Alqualondë et la décision de Fëanor de passer outre l'avertissement de Mandos qui en tiendraient lieu.

Une des particularités de la fiction de Tolkien est précisément d'avoir tendance à éviter toute analogie un peu trop évidente avec la narration de la Genèse, au contraire notamment de la fiction de son ami Lewis avec un roman comme Perelandra ou Voyage à Vénus, que Tolkien avait apprécié tout en se gardant bien de l'imiter...

En tout cas, d'une manière ou d'une autre, il est bien toujours question d'une "Chute", avec majuscule, avec dans le tableau un élément féminin, en lien avec l'amour et la sexualité : c'est un postulat aux limites en soi assez larges, j'en conviens, mais il est assez récurrent chez Tolkien, quoique resté littérairement inabouti à travers un texte achevé. Difficile de ne pas voir de lien avec sa croyance en un "monde déchu" marquée du sceau du "Péché" (et exprimée, entre autres, dans sa fameuse lettre n° 43), même si je suis d'accord pour interpréter avec prudence tout texte de Tolkien n'ayant pas eu en l'état vocation à être publié ou à être envoyé à un correspondant.

Vinyamar a écrit :

Si on me traite de mysogine d'après la forme féminine de garçon utilisée pour qualifier une inconstance, qu'est-ce qu'on devrait dire à ce réquisitoire à charge

Tu sais bien que "garce" n'a pas le même sens usuel que "garçon", Vinyamar, surtout de nos jours... mais de toute façon, je n'ai pas dit que tu étais misogyne (je n'en sais rien, même si j'espère bien que non), j'ai dit que l'emploi d'un tel terme pouvait avoir une connotation misogyne (ce fut apparemment aussi le cas dans l'exemple médiatique de mauvaise blague ayant malheureusement causé un licenciement que tu as toi-même mentionné) : point de réquisitoire, donc, mais disons un constat suivant lequel il valait mieux éviter l'emploi d'un tel mot... sachant que nous sommes tous des êtres humains, faillibles et imparfaits, et que la bêtise, elle, n'est pas sexiste (ni raciste d'ailleurs) ! Le mot "inconstante", dans le sens de ton propos, apparait effectivement bien mieux indiqué par rapport à ce que tu as voulu dire, et tu auras donc corrigé de toi-même : fin de l'histoire de mon point de vue !

Vinyamar a écrit :

(excusez-moi si je me trompe, mais en gros c'est le début du bordel)

Ah tiens, encore une occasion de parler de prostitution, comme l'autre jour avec TB (je plaisante)... ;-)

Vinyamar a écrit :

Et pourtant Miriel changera d'avis et reprendra vie en son corps (certes une fois le conflit d'époux terminé… à moins que Finwë et Indis ne se réincarnent également.)

Il y a effectivement contradiction avec ce qu'édicte Mandos et Vairë... On a peut-être là un bel exemple du réel contredisant l'idéal, même si ce n'était peut-être pas en soi voulu par Tolkien ! Le caractère tortueux de l'histoire impliquant Míriel semble bien décidément, comme l'a déjà écrit Silmo, laisser apparaître les difficultés qu'a eu l'auteur à articuler son univers de fiction avec les valeurs auxquelles il cherchait de plus en plus à se conformer comme subcréateur...

Vinyamar a écrit :

(quelque part se dessine ici le péché originel, de la femme et de l'homme, l'une en perdant espoir, l'autre en refusant d'attendre et de veiller (cela rejoint un thème que j'aimerais travailler depuis 15 ans maintenant sur le péché originel de Numénor très similaire aux tentations du Christ)

Tu n'avais pas écrit cela dans la première version de ton message, mais je vois qu'on en revient bien, in fine, à la même matière théologique...

Amicalement à tous,

Hyarion.

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#27 07-06-2018 00:26

Vinyamar
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Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

Ah ben vl'a t'y pas que le forum, si calme d'habitude, réagit plus vite que je n'écris. Je n'en étais qu'à l'introduction (postée pour ne pas perdre le texte puis modifiée régulièrement, je pensais être peinard :-D )

Non, le sujet ici est beaucoup plus profond qu'un simple problème de Tolkien à rallier sa foi à son univers fictif (même si c'est effectivement ce qui transparait dans tout Home X).
Le sujet ici est clairement celui du péché originel réécrit chez les Elfes, dont Miriel serait Eve et Finwë Adam.
La lettre 212 citée en note le redit explicitement :

Dans les légendes Elfes il y a des archives d'un cas étrange d'un Elfe (Miriel mère de Fëanor) qui a tenté de mourir, ce qui a eu des résultats désastreux, conduisant à la 'Chute' des Haut-Elfes. Les Elfes n'étaient pas sujet aux maladies, mais pouvaient être 'tués' (slain).

Tolkien résume la mort temporaire des Elfes avant renaissance à l'identique, et ajoute :

Mais Miriel a souhaité abandonner son existence, et a refusé la renaissance

Christopher est choqué par cette mention ("this is a dark saying"). Il s'en étonne car nulle part ailleurs on ne trouve mention d'une chose aussi grave et sombre que le désir d'annihilation totale. Il cite alors Laws & Customs :

Quelques fëar en peine ou sous le fardeau ont abandonné tout espoir, et tournant le dos à la vie ont délaissé leurs corps, alors même qu'ils pouvaient être guéris ou étaient même sans blessure. Peu d'entre eux désirèrent la renaissance, du moins pas avant d'être longtemps demeuré en "attente". Quelques uns ne revinrent jamais.

Suit une note pour comprendre si oui ou non Miriel est la toute première des Eldar à mourir dans l'esprit de Tolkien (il semble que oui, par l'intermédiaire de Mandos qui reprend FËanor lorsqu'il se prétendrait le premier Enfant d'Eru à mourir si on lui brisait ses Silmarils).

On est ici face à un sujet bien plus grave, lourd (et passionnant) qu'une dépression post-partem. On est face à l'irruption de la Mort dans Arda Marred, et au péché originelqui l'a introduit (car Miriel pouvait guérir) : le manque d'espérance. On est en plein cœur du sujet phare de Tolkien !

Christopher cite toujours la même lettre 212 où Tolien explique en gros que

[la différence fondamentale entre la "mythologie chrétienne" de la Chute et son Mythe serait que] la Chute de l'homme est subséquente et une conséquence de la "Chute des Anges" : une révolte du libre-arbitre de créatures à un niveau supérieur aux hommes. Mais il ne peut être tenu clairement que cela ait affecté le "Monde" dans sa nature ! le mal a été apporté de l'extérieur, par Satan.
Dans ce Mythe (celui de Tolkien), la révolte du libre-arbitre de créatures précède la création du Monde (Eä). Eä a déjà, par subcréation, introduit le mal, la rébellion, et les éléments discordants à sa propre nature au moment où le "Que cela soit" est prononcé. La Chute ou la corruption de toute chose était ainsi en elle une potentialité, sinon une chose inévitable.

Je cherche les passages où les Valar eux-mêmes sont sévères envers Miriel.
Ah j'ai trouvé, c'est dans les Laws & Customs. Ca déménage un peu plus…

Le mariage y est défini de façon beaucoup plus précise (et théologique) (p.226), mais ce n'est pas notre sujet, sinon que "sa première opération est l'engendrement du corps d'enfants, bien qu'il ait bien d'autres opérations", ce qui rend la demande de Finwë de pouvoir enfanter encore plus compréhensible du point de vue des Valar. (point de vue du mariage du corps avant de parler du mariage de l'esprit qui ne peut jamais être rompu).

p.240, après avoir rappelé que le statut de Miriel n'est pas la meilleure voie mais la plus basse, qui entérine la corruption d'Arda, au lieu de garder le regard vers Arda incorrompue (opposant Justice et Guérison, l'un étant pour Arda Marred, l'autre pour Arda Unmarred)
les Valar se disputent au sujet de la responsabilité de Miriel dans l'introduction de la Mort en Arda.
Certains estiment que son fardeau était trop lourd à porter, et que le mal vient de la Corruption d'Arda, d'autres estiment que Miriel a manqué d'espérance :

  • Aulë : que porter un enfant puisse faire à ce point souffrir provient d'en dehors d'Arda

  • Ulmo : la mort des Elfes provient de la corruption d'Arda, et non de l'extérieur (car Eru est le Seigneur de Tout) et les Ombres de Melkor vont continuer à s'étendre

  • Yavanna : Aulë, tu te trompes en croyant que Miriel et Finwë sont libres et immaculé de toute ombre. L'ombre a marqué les esprits et les corps de tous. Si Miriel est morte, c'est à cause de la Corrpution d'Arda.

  • Nienna : Il faut ajouter la Pitié à la justice. Vous êtes forts vous les Valars, mais pas les Eldars. Miriel est morte par nécessité du corps. Elle est innocente sinon à glorifier, elle n'a pas reçu la force de résister. Et Eru a un dessein bénéfique dans cette mort. Et le pauvre Finwë n'avait aucune raison de comprendre ce que la mort signifiait.

  • Ulmo : Non ! Il y a eu faute des créatures. Si non coupables, il y a néanmoins une faillite à tenir l'Espérance attendue. Tenir bon dans la route du haut était certainement ce dessein bénéfique dont tu parles. Que Miriel veuille partir est compréhensible, mais qu'elle ne veuille jamais revenir est sa faute. Car cette volonté n'était pas sous pression irrésistible, mais une défaillance d'espérance de guérison. Et sa faute n'est pas d'avoir seulement abandonné son propre corps, mais aussi son époux, et de là avoir entraîné sa corruption. La justification de Miriel est insuffisante, car l'objectif du mariage n'est pas seulement de donner des enfants. Elle prive aussi Feänor d'une mère. D'autant plus qu'en renaissant, elle aurait un nouveau corps tout guéri.
    Mais Finwë n'est pas en reste, car ne voyant pas revenir son épouse, il est tombé en désespoir en quelques années seulement. Lui aussi commet une faute contre l'Espérance. Et réclamant des enfants il a considéré ses propres désirs comme supérieurs à la souffrance de sa femme, et a commis une seconde faute contre l'Amour. Son impatience à rappeler Miriel a aussi endurci son cœur et lui a fermé les porte de son retour possible. Ceci est la plus grande faute.

  • Vairë : Non  Car Miriel est fière et entêtée, et Finwë le sait très bien. Il sait donc que quand elle dit qu'elle ne reviendra pas, c'est pour toujours. nous devons donc juger de la faute des deux avec discernement.

  • Manwë : la mort est un sujet nouveau dont nous devons discerner les conséquence. Et ne pas confondre la mort corrompue  qui vient d'Arda et celle qui vient d'Eru, destinée à un bien immédiat et facilement guérissable. Mais c'est Ulmo qui a raison, car les Enfants doivent percevoir l'incorrompu dans Arda corrompue, si leur regard n'est pas troublé, et qu'ils le veulent. Et c'est le support de toute Espérance. Sans quitter de vue Arda incorrompu telle qu'elle devrait être, avec Arda Guérie, qui est l'Espérance entretenue. La voie que nous prenons prend donc acte de la Corruption et n'est pas la meilleure.

  • Mandos : oui nous devons conserver le chemin vers Arda incorrompue,  mais nous ne pouvons obliger personne à l'arpenter. Nous devons donc donner justice. Demander le sacrifice personnel (vertueux seulement si libre) n'est pas la justice. Puis il donne son statut

Sacrée charge de la part d'Ulmo !

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#28 07-06-2018 01:18

Hyarion
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Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

Vinyamar a écrit :

Le sujet ici est clairement celui du péché originel réécrit chez les Elfes, dont Miriel serait Eve et Finwë Adam.

Oui, oui, j'ai bien compris où tu voulais en venir (cf. mon message précédent, complété à la suite du tien) !
Et la lettre 212 a déjà été citée, quoique moins complètement que tu ne l'as fait...

Je ne sais pas si le "Péché originel" est "un sujet bien plus grave, lourd (et passionnant)" qu'une dépression post-partum, qui plus est en littérature : question de point de vue... Je pense en tout cas effectivement également qu'il peut y avoir un rapport avec la Genèse, dont le propos serait en quelque sorte "dilué" ou "refondu" dans plusieurs textes de Tolkien, en particulier dans HoME X, mais attention à ne pas négliger le "problème de Tolkien à rallier sa foi à son univers fictif" que tu sembles considérer comme moins important : il me parait au contraire assez central, a fortiori compte tenu des ambitions dignes d'un John Milton que tu sembles prêter à l'auteur... De mon point de vue, le résultat du travail me parait aussi important que le travail lui-même ou l'objectif de départ... Sans quoi nous en serions encore à des considérations sur la "mythologie pour l'Angleterre", pas moins étroites selon moi que les considérations beaucoup trop orientées dans un sens religieux auxquelles j'ai fait allusion plus haut...
Question d'équilibre, de mon point de vue (eh oui, j'y reviens toujours, à ce fameux souci d'équilibre !)...

Bonne nuit !

Hyarion.

EDIT: correction d'une faute d'orthographe.

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#29 07-06-2018 02:06

Vinyamar
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Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

Je ne dis pas que c'est moins important en général (c'est même passionnant)
Je pense que sur l'histoire particulière de Miriel, on est dans un autre récit du péché originel, qui en soit pose moins de problème de "rallier" son univers à sa foi. Il y est directement relié par essence.
(contrairement à d'autres sujets comme l'origine des orques, la compassion à exercer ou la substance des Valar)

Donc Miriel a fauté (et Finwë aussi), comme Adam et Eve, contre l'Espérance (car que veulent Adam et Eve sinon devenir comme des Dieux par désobéissance, et cesser donc de faire confiance à Dieu). De là la Chute de tous les Eldar. Et il est en effet caustique que Miriel revienne finalement dans son corps pour redessiner le récits de toutes ces douloureuses aventures dont elle est la cause (surtout qu'elle brodait déjà chez Vairë même sans son corps…)

N'êmpêche qu'on a continué à préserver son corps même quand elle a prétendu qu'elle ne reviendrait jamais, jamais, jamais.

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#30 07-06-2018 19:10

Elendil
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Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

Vinyamar a écrit :

Et pourtant... Miriel changera d'avis et reprendra vie en son corps (certes une fois le conflit d'époux terminé…)
... à moins que Finwë et Indis ne se réincarnent également. (là ce serait un peu la cata, mais Tolkien n'a pas dû penser si loin).

Bien sûr que si, car c'était une conséquence évidente. D'une part, Indis n'est pas morte. De l'autre, Finwë fait le voeu de ne plus se réincarner et de remplacer Miriel en Mandos, comme je l'ai déjà signalé :

[Finwë said:] Behold! I instead will abide with Mandos for ever, and so make amends. For surely, if I remain unhoused, and forgo life in Arda, then his Doom will be inviolate.
[...]
But when Mandos was approached he said to Finwe: 'It is well that thou desirest not to return, for this I should have forbidden, until the present griefs are long passed. But it is better still that thou hast made this offer, to deprive thyself, of thy free will, and out of pity for another. This is a counsel of healing, out of which good may grow.'

Therefore when Nienna came to him and renewed her prayer for Miriel, he consented, accepting the abnegation of Finwe as her ransom. Then the fea of Miriel was released and came before Manwe and received his blessing; and she went then to Lorien and re-entered her body, and awoke again, as one that cometh out of a deep sleep; and she arose and her body was refreshed.

MR, p. 248-249

Par ailleurs :

Vinyamar a écrit :

Suit une note pour comprendre si oui ou non Miriel est la toute première des Eldar à mourir dans l'esprit de Tolkien (il semble que oui, par l'intermédiaire de Mandos qui reprend FËanor lorsqu'il se prétendrait le premier Enfant d'Eru à mourir si on lui brisait ses Silmarils).

Ce n'est pas la première fois que je vois une incompréhension totale de la réponse de Mandos à Fëanor chez un Français. C'est un gros problème de traduction imputable à Alien :

It may be that I can unlock my jewels, but never again shall I make their like; and if I must break them, I shall break my heart, and I shall be slain; first of all the Eldar in Aman.’

‘Not the first,’ said Mandos, but they did not understand his word; and again there was silence, while Fëanor brooded in the dark.

Fëanor parle d'être tué en Aman (ou de se tuer, selon la façon dont on interprète la phrase). Mandos lui rétorque qu'il ne serait pas le premier et personne ne comprend. Il ne s'agit évidemment pas de Miriel, sans quoi ç'aurait été évident. Il s'agit de Finwë, qui à ce moment même a déjà été tué par Melkor, et Mandos le sait, car il sait visiblement tout ce qui se passe dans son domaine.

Vinyamar a écrit :

Je cherche les passages où les Valar eux-mêmes sont sévères envers Miriel.
Ah j'ai trouvé, c'est dans les Laws & Customs. Ca déménage un peu plus…

De fait, Ulmo est plutôt sévère. Toutefois, je note que Mandos juge Miriel innocente dans un passage du même texte, peu avant la section que tu cites :

Then Mandos adjudged her innocent, deeming that she had died under a necessity too great for her to withstand.

MR, p. 237

E.

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#31 07-06-2018 21:15

Vinyamar
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Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

Salut Elendil,

alors je ne l'ai peut-être pas rendu assez clair, mais je lis dans Home X, pas dans le Silmarillion, et s'il y a pb de traduction Alien n'y est pour rien (bien que je n'ai aucune sympathie pour sa traduction, pataude en bien des endroits, contrairement à celle somptueuse de Ledoux) Il n'y a cependant de ma part aucune incompréhension sur la différence entre slain et die puisque justement Christopher fait un gros sujet sur la variante qu'il y a eu à ce sujet. Tolkien a changé "first to die" en "first to be slain" justement pour, qu'étant repris par Mandos, il n'y ait pas d'équivoque. Finwë est le "first to be slain" et Miriel "the first to die". C'est écrit en toute lettre et c'est parce que Tolkien en est très conscient qu'il modifie les mots de Feänor.

En revanche, ton éclaircissement sur la condition de libération de Miriel est très intéressant. Je ne suis pas tombé dessus dans mes lectures.
Finalement, Finwë se rachète en agissant exactement comme les Valar auraient voulu qu'il agisse : il choisi librement et de lui-même de se livrer à la mort définitive en lieu et place de Miriel. Ce faisant il guérit ses 3 fautes majeures : celle contre l'espérance en attandant justement la fin du monde, celle contre l'Amour en libérant Miriel, et celle contre l'impatience en prenant patience.
Mandos accepte son don comme une rançon (ce qui montre que la libération de Miriel était tout sauf une évidence, elle a choisi et s'est entêtée dans son refus définitif de revenir à la vie).
C'est une très belle rédemption pour Finwë.

Quant aux Valars qui déclarent les deux Elfes innocents, c'est justement un débat. Les Elfes sont jugés non coupables formellement, à cause de la Corruption, mais non innocents totalement. Ils ont choisi la route du bas et non la route du haut. Cela leur est reproché, bien qu'on ne puisse les  obliger à prendre la route du haut.
La conclusion est écrite en toute lettre p.222 :

(Though the griefs might be great and wholly unmerited, and death  (or rather the abandonment of life) might be, therefore, understandable and innocent, it was held that the refusal to return to life, after  repose in Mandos, was a fault, showing a weakness or lack of courage  in the fea.)

Il y a bien faute.

Ce qui de plus est nécessaire dans la mythologie de Tolkien pour évoquer la Chute des Elfes en corrélation avec la Chute des hommes (qui arrivera plus tard à Numenor).

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#32 07-06-2018 22:13

Elendil
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Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

D'accord avec toi sauf à un détail près, puisqu'en fin de compte il y a deux Chutes des Hommes chez Tolkien : la première, hors-champ, lorsque les Hommes acceptent apparemment d'adorer Morgoth comme dieu, qui est narrée avec moult ellipses et réticences dans l'Athrabeth, et la deuxième qui est celle de Númenor, laquelle vient annuler les dons compensatoires consentis aux Edain suite à leur participation à la guerre des Joyaux.

(NB : je me doute que tu connais ce point, mais je préfère le signaler ici pour qui lirait le fuseau sans avoir une connaissance exhaustive des  écrits tolkieniens.)

E.

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#33 07-06-2018 23:05

Vinyamar
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Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

Oui, j'ai vaguement en tête qu'il y a une chute des hommes antérieure à Numenor, tu viens le confirmer.
Mais seule celle de Numenor m'intéresse car, de mémoire, la façon dont Sauron séduit les hommes est très similaire aux tentations du Christ par Satan, et que je rêve depuis longtemps d'en faire un petit essai… Vœu pieux..

Reste le fait étrange que le corps de Miriel a été conservé même après son vœu définitif de ne jamais y retourner. Estë voyait-elle plus loin que les autres ? Quel pouvoir lui permet d'ailleurs d'empêcher un hröa sans son fëa de s'effacer ?

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#34 09-06-2018 03:52

Hyarion
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Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

Peut-être qu'un hröa, même sans son fëa, ne peut être "effacé" ou "débranché", si j'ose dire, pour reprendre le terme que j'ai précédemment employé à ce propos. On peut supposer que cette éventualité n'était pas évidente pour Tolkien en tout cas, puisque dans HoME X, je ne sais plus où, il est mentionné que hröa et fëa sont les éléments constitutifs conjoints d'un être incarné.
Mais j'ai l'impression qu'on ne s'intéresse surtout ici qu'à une perspective assez étroitement "interne" dans la mesure où, comme cela a déjà été dit, on parle d'un bout de subcréation apparaissant dans « un texte jamais publié et une lettre jamais envoyée », c'est-à-dire aux limites mêmes d'un processus créatif d'un auteur qui n'a pu vraiment, semble-t-il, mettre un point final à ce point particulier comme à beaucoup d'autres, peut-être pour les raisons spirituelles "externes" que j'ai déjà évoquées... Pour reprendre une formule du Dragon Didier, nous sommes à mon avis, « à l'exacte lisière entre interne et externe »...
J'avoue par ailleurs avoir un peu de mal à suivre des échanges lorsqu'ils se font avec des messages que l'on peut sans cesse rééditer (je suis content que ce nouveau droit nous permette de corriger nos fautes, mais j'avoue rester assez habitué à des échanges suivant le rythme de la conversation, si j'ose dire, quitte à compléter son propre propos avec un message supplémentaire à la suite du dernier qui a parlé... mais il est vrai que l'on n'est plus forcément très habitué aux discussions continues dans nôtre entique forum)... ^^'

Bonne nuit à toutes et à tous !

Hyarion.

EDIT: correction de fautes.

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#35 09-06-2018 11:03

Vinyamar
Inscription : 2001
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Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

Il me semblait avoir lu qu'après la mort d'un Elfe, son hröa s'effaçait lentement (il n'y a donc jamais aucun ossement d'Elfe qui puisse être retrouvé).
(Ce qui permet sans doute sa réincarnation ultérieure)

désolé pour la méthode de publier un texte en travail et de le modifier, c'était une technique pour éviter de tout perdre en cas de crash… je ne le ferai plus

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#36 14-03-2020 00:31

Yyr
Lieu : Reims
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Re : L'histoire d'une elfe endormie sous un arbre ?

Vinyamar a écrit :

pardonnez-moi de ne pas relire tout l'article de la Feuille de la Compagnie 3 pour savoir quel traduction préférer

Au risque de me mettre en avant, mon ami, cela t'aurait peut-être fait gagner du temps ;). Non seulement en terme de traductions mais aussi de réponses, car tout ce que tu abordes ici l'a été dans « le Marrissement d'Arda : fil et traduction de la catastrophe du Conte » (cf. notamment le § II.B.5 sur la différence opérée par Tolkien entre Marrissement et Corruption ... le cas de Míriel à l'appui !) de la Feuille 3, et sa suite : « Estel Eruhínion : de la Chute et de l'Espérance dans le Conte d'Arda » publié dans Pour la gloire de ce monde. Où l'on voit que la « Chute » ne commence pas avec la défaillance (commune et conjugale) de Míriel et Finwë. La Chute au sens fort du terme ne s'applique dans le Légendaire qu'au Marrissement d'Arda ... et des Hommes. Les Eldar n'ont pas chuté « en tant que peuple ». Ce qui n'empêche pas de parler de chute des uns et des autres et même des Ñoldor, par analogie avec (ou participation à) La Chute.

Elendil a déjà apporté quelques éléments. Je me permets de compléter.
Je me contenterai de donner ici quelques uns des passages traduits (par ma pomme) et publiés dans les articles mentionnés supra.

Un passage (parmi d'autres) pour décrire le Marrissement d'Arda :

Et les Valar […] percevaient finalement l’ampleur du pouvoir de Melkor en Arda. Sa part était telle dans sa composition que toutes les choses, à l’unique exception de leur cours en Aman, avaient une inclination au mal et à la perversion de leurs justes formes et voies. C’est pourquoi ceux dont l’existence commençait en Arda, et dont la nature, en plus, consistait en l’union d’un esprit et d’un corps, tirant la nourriture du dernier d’Arda Marrie, devaient à jamais être sujets, dans une certaine mesure, à la peine, et à faire ou souffrir des choses anormales.

HoMe X, pp.254-255

Les paroles de Manwë à ses frères qui, inquiets, voyaient bien que leur Arrêt ne pourrait guérir le mal en question :

En cette affaire vous devez ne point oublier que vous traitez d’Arda Marrie – d’où vous avez amené les Eldar. Non plus ne devez oublier qu’en Arda Marrie la Justice n’est point la Guérison. La Guérison ne vient que par la souffrance et la patience, et n’exige rien, point même la Justice. La Justice ne travaille qu’à l’intérieur des limites des choses telles qu’elles sont, acceptant le marrissement d’Arda, et pour cette raison, bien que la Justice soit bonne en elle-même et ne désire point davantage de mal, elle peut néanmoins perpétuer le mal existant et se révèle incapable d’en tarir l’affliction. Ainsi l’Arrêt fut-il juste, mais il accepta la Mort et la séparation de Finwë et Míriel, une chose anormale en Arda Immarrie, et ainsi fut-il, par rapport à Arda Immarrie, anormal et complice de la Mort. La liberté qu’il concéda fut un plus bas chemin qui, s’il ne mena point encore plus bas, ne pouvait plus s’élever de nouveau. Mais la Guérison doit toujours garder en vue le dessein d’Arda Immarrie, et si elle ne peut s’élever, doit endurer dans la patience. Ceci est l’Espérance qui, à ce qu’il me semble, est entre toutes la vertu la plus belle des Enfants d’Eru. [, mais dont on ne peut forcer la venue dans le besoin : la patience doit souvent l’attendre longuement.]

[...] Et la mort pour les Eldar est un mal, c’est-à-dire une chose anormale en Arda Immarrie, qui doit par conséquent procéder du marrissement. Car s’il en allait autrement de la mort de Míriel, si elle venait d’au-delà d’Arda (comme chose nouvelle ne trouvant aucune origine dans le passé), elle n’apporterait point le chagrin ou le doute. Car Eru est Seigneur de Tout, et meut toutes les voies de ses créatures, même la malice du Marrisseur, en ses ultimes desseins, mais de par son impulsion originelle il ne leur impose point l’affliction. Mais la mort de Míriel a apporté le chagrin en Aman. La venue de Feänáro doit certainement procéder de la volonté d’Eru ; mais j’estime que le marrissement de sa naissance vient de l’Ombre, et présage de maux à venir.

HoMe X, pp.239-241

Le cœur du discernement d'Ulmo :

La venue de Feänáro doit certainement procéder de la volonté d’Eru ; mais j’estime que le marrissement de sa naissance vient de l’Ombre, et présage de maux à venir. […] Car le fëa de Míriel est peut-être parti par nécessité, mais il est parti dans la volonté de ne pas revenir. Là précisément était sa faute, car cette volonté n’était pas le fait d’une compulsion irrésistible ; c’était un manque d’espérance de la part du fëa, l’acceptation de la lassitude et de la faiblesse du corps, comme étant au-delà de toute guérison, et qui par conséquent ne furent pas guéries.

HoMe X, p.243

Et la conclusion de Manwë :

Aulë et Niënna se trompent, à ce que je juge ; car ce que dit chacun de manière différente revient à dire : que la Mort qui vient du Marrisseur serait une chose, et la Mort comme un instrument d'Eru en serait une autre, pouvant être discernée : l'une faite de malice, et donc seulement mauvaise et inévitablement douloureuse ; l'autre, faite de bienveillance, projetant un bien particulier et immédiat, point mauvaise donc, soit qu'elle n'apporte point d'affliction soit qu'elle puisse être aisément et rapidement guérie. Car le mal et la gravité de la mort sont dans la simple séparation et rupture de nature, qui est la même dans les deux cas (ou la mort n'est pas leur nom) ; et les deux ne surviennent qu'en Arda Marrie, et s'accordent avec ses processus.

Par conséquent j’estime que nous devrions suivre Ulmo, affirmant qu’Eru n'a point le besoin et ne saurait désirer comme un instrument particulier de sa bienveillance une chose qui est mauvaise. Pourquoi, en vérité, devrait-il introduire la mort comme une “nouvelle chose” au sein d’un monde qui en souffre déjà ? Cependant, Eru est Seigneur de Tout, et il usera comme instruments de ses desseins finaux, qui sont bons, tout ce que chacune de ses créatures, [fût-elle] grande ou petite, pourra faire ou imaginer, à son encontre comme à son service. Mais nous devons retenir que telle est bien sa volonté que ceux des Eldar qui le servent ne soient point découragés par la douleur et les maux qu’ils affrontent en Arda Marrie ; mais qu’ils s’élevent jusqu’à une force et une sagesse qu’ils n’auraient point atteintes autrement : que les Enfants d’Eru grandissent pour devenir des filles et des fils.

HoMe X, p.245

Au passage, une petite critique et la seule, Vinyamar, dans cette belle discussion que tu as initiée, concerne tes traductions, un peu ... heu ... approximatives :) et parfois génératrices de contresens, comme ici :

Manwë : la mort est un sujet nouveau dont nous devons discerner les conséquence. Et ne pas confondre la mort corrompue  qui vient d'Arda et celle qui vient d'Eru, destinée à un bien immédiat et facilement guérissable. [...]

Manwë dit le contraire ;).

Sur la mort, et comment elle peut être entendue comme toujours un mal et néanmoins un don (fait aux Hommes), je renvoie à nouveau à mon travail (cf. « Estel Eruhínion », § I.3).

Sur la défaillance du hröa des Eldar au fur et à mesure du temps :

Car [les Eldar] soutiennent que l’impuissance de leur hröa à perdurer aussi longtemps que leur fëa sans perdre leur vitalité — un processus qui ne fut pas observé avant les derniers âges — est due au Marrissement d'Arda, et vient de l’Ombre, et de la souillure par Melkor de toute la matière (ou hröa) d’Arda, sinon en vérité d’Ëa tout entier.

HoMe X, p.428

Enfin, concernant la supposée difficulté pour Tolkien à concilier le Légendaire avec sa foi, et les textes de HoMe X qui seraient difficiles à concilier avec le reste, il peut y avoir plusieurs « obstacles » à percevoir la cohérence de l'ensemble :
- la connaissance de la nature de la foi chrétienne (je n'entrerai pas dans les détails ici : c'est un sujet à part entière auquel je me consacrerai peut-être ailleurs (ou pas)) ;
- la compréhension de la nature de la mythopoésie tolkienienne, qui renvoie à « l'élucidation de la Vérité » au moyen d'une autre histoire, d'une autre narration (j'ai abordé ce problème dans l'article des « Correspondances mythopoétiques » qui suit « Estel Eruhínion ») ;
- le registre des textes de HoMe X, qui se fait théologique ; ce faisant, ces textes ne heurtent pas ce que disent les autres textes ; ils le disent différemment.
Lorsque ces obstacles sont dépassés, la succession des thèmes et des registres dans le Conte d'Arda manifeste le déploiement de la même histoire, chaque étape assimilant et approfondissant la précédente sans l'annuler (depuis la Chute de Gondolin jusqu'à l'Athrabeth).

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