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Bonjour à tous!
Depuis que je me suis récemment inscrit à ce forum, j'ai eu envie de me replonger dans la lecture du SdA avec plaisir. Et là, je suis tombé sur un passage quelque peu intrigant que j'aimerais vous exposer.
C'est enfoncer des portes ouvertes que d'affirmer que l'oeuvre de Tolkien est éminemment masculine. La Terre du Milieu est un monde fait par et pour les hommes, humains ou non. Les femmes sont en effet loin d'être surnuméraires et d'avoir la part belle. Le Silmarillion comporte toutefois de grandes dames, commençant par les Valier, mais aussi de grandes elfes et humaines. Le SdA est plus avare en la matière. Quant au Hobbit, n'en parlons pas.
Sans revenir sur un débat stérile sur une quelconque misogynie de Tolkien (l'absence de rôles féminins dans un roman n'est pas obligatoirement un signe de reniement de la féminité, d'autant plus que chez Tolkien, celle-ci est magnifiquement rendue), on peut se poser la question sur la place active de la Femme dans le SdA. Bien sûr, Galadriel est puissante parmi les puissants, Arwen joue un rôle référent. Et Eowin n'est pas en reste.
Voilà pour la structure sociale "sexuée" des différents peuples.
Or je lis dans le passage que j'évoque plus haut (excusez la longue introduction, je suis parfois bavard), dans lequel Gandalf narre l'histoire de Gollum, originairement Smeagol, je cite:
"Il y avait parmi eux [petit peuple...apparenté aux pères des pères des Forts] une famille de grande réputation, car elle était nombreuse et plus fortunée que la plupart; elle était gouvernée par une grand-mère, sévère et versée dans ce qui restait dans la tradition ancienne."
et plus loin:
"Ce pourquoi on l'appela Gollum; on le maudit et on lui dit de s'en aller au loin; et sa grand-mère, désirant avoir la paix, le chassa de la famille et l'expulsa de son trou." (Tome 1, pp 85 et 87,Livre de poche)
Une famille hobbite, gouvernée par une femme. La structure familiale semble très matriarcale. Or rien de tel ne transparaît ailleurs chez les Hobbits. Certes, Lobelia Sacquet et Mme Magotte, chacune à sa manière, sont des personnalités fortes qui gèrent leur petit monde. Mais la tonalité matriarcale est moins explicite.
Alors qu'en est-il? La société hobbite est-elle fondamentalement matriarcale? Le peuple de Smeagol fait-il exception? Est-ce une ancienne tradition délitée au fil du temps?
Qu'en pensez vous?
Amicalement...
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Société matriarcale...je ne sais pas, société à tradition monarchique anglo saxonne plutot je m'explique: les traditions anglo saxonne du gouvernement divergent de l'idée que l'on se fait en France. En effet nous avons en France la loi de la masculinité (je fais comme si nous étions encore en monarchie pour que ce soit plus pratique)...en Angleterre (contrairement à la France) une femme peut devenir reine. Ainsi ce n'est ni une société matriarcale ni patriarcale, mais une société qui donne une place politique à chacun des deux sexes. Peut on appliquer cela à la société hobbite ou pré-hobbite? Sans doute, puisque Tolkien me semble t'il voyait dans la Comté, l'Angleterre...
D'ailleurs cette grand mère sévère me fait penser à une reine anglaise qui vécu à cheval sur le XIXe et le XXe siècle, et qui avait été souverain très rigide, et dont le nom commence par V...enfin voilà, c'est mon avis, non fondé sur des textes...
Jb
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Ne pas oublier aussi, pour les personnages hobbits féminins à fort caractère, une certaine riche grand-mère dans un fauteuil roulant... Mais Didier vous en parlera mieux que moi ;-)
Sinon, avant que le fuseau ne dérape, le moteur de recherche pourrait renvoyer à pas mal d'explication quant au rôle féminin en général.
Ceci dit, ta remarque, Corbeillon, est très interessante. D'un point de vue externe, j'effleurerai juste le fait que les civilisations 'primitives' agricoles (environ 7e millénaire avant notre ère, civilisation néolithique) vénéraient principalement une déesse-mère, et étaient probablement organisées de façon matriarcale. Plus tard, les Indo-Européens ont ammené une civilisation guerrière et patriarcale. Le lien civilisation agricole/matriarcale, civilisation guerrière/patriarcale fonctionne-t-il en TdM ? En ce cas, il est probable que les points que tu as relevé en soien une survivance...
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Bonjour à tous aussi!
En voila un sujet : "du matriarcat chez Tolkien"! Lui que l'on disait misogyne.
Pour répondre à Laegalad :
Hmm... C'est une théorie, née au 19e s., remise à l'honneur par les travaux de Marija Gimbutas dans le dernier quart du 20e s., et surtout popularisée par le mouvement féministe américcain. Sans entrer dans les détails, elle se base exclusivement sur le très grand nombre de représentation féminines découvert sur les sites néolithiques et leur répartition sur presque tout le terroire de l'Europe et du Proche-Orient. Vu qu'aucun autre fait objectif ne vient l'appuyer, cela reste une théorie, séduisante certes, mais contestée et non prouvée. A titre de contre exemple : le culte marial est fortement développé dans tous les pays de tradition catholique, soit la moitié de l'Europe, presque toute l'Amérique latine, et plusieurs régions d'Afrique et d'Asie. Les représentations de la Vierge y son innombrables. Si dans, mettons 300 ans, toute trace de notre écriture a disparu, les archéologues du futur pourront-ils en conclure que ces sociétés étaient matriarcales?
Pour en revenir à Tolkien, je vois ici un fameux argument contre sa prétendue misogynie. Il admet le pouvoir féminin, sans doute, comme le dit bien Cynewulf, sous l'influence de l'ère victorienne et des coutumes monarchiques anglaises. Dans le Silmarillion, il parle aussi de Haleth qui, après la mort de son père et de son frère, a pris la tête de son peuple. (Il y a aussi trois reines de Numenor, mais si je me rappelle bien, aucune n'est particulièrement sympathique ni efficace dans son rôle).
Dans l'esprit de Tolkien, la grand-mère de Smeagol devait être la veuve d'un homme important, ou d'un chef de clan. Autoritaire et déterminée, - et peut-être mais là je m'avance un peu, en l'absence d'homme capable ou en âge de le faire, - elle aura pris la tête de la famille, et avec succès semble-t-il, puisque Tolkien la décrit prospère et nombreuse.
Et au fait, dans cet aperçu de l'ancienne organisation sociale hobbitte, plutôt qu'un matriarcat, on voit clairement un structure clanique : une famille élargie, rassemblée sous l'autorité d'un ancêtre commun : ici, la vieille dame. Ce qui concorde avec les sources d'inspirations de Tolkien qui décrivaient bien des sociétés (celtiques, germaniques et finnoises, à l'âge du fer et durant le haut Moyen-âge) organisées sur le modèle clanique.
Voilà Corbeillon, ta curiosité est-elle satisfaite?
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On peut préciser également que dans le chapitre 2 du livre I, Frodo est appelé "'the' Mr Baggins of Bag End" ; le 'the', en anglais, désigne justement un chef de clan, ce qui montre que la société des hobbits s'inspire bien des sociétés claniques. Cependant je ne suis pas tout à fait d'accord avec l'idée de l'infuence de l'ère victorienne. C'est sans doute plus simple que cela : en Ecosse, quoique la société soit incontestablement patriarcale, il est depuis toujours tout à fait possible à une femme d'être chef de clan, pour peu qu'aucun héritier mâle ne soit disponible (évidemment la chose était rare, mais il est arrivé plus d'une fois que les femmes succèdent sans que cela déclenche une guerre de cent ans ;-)). La grand-mère de Sméagol pourrait bien être dans ce cas. Cela dit, on peut toujours se demander si le choix d'un personnage féminin en l'occurence a une signification quelconque.
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Le modèle écossais : très juste, Ylla, bien vu.
A-t-il une signification? Appel à tous les tolkienologues érudits, aui ont lu et relu HoME et les Letters en VO. Tolkien en parle-t-il quelque part?
En attendant, petit essai d'interprétation tout à fait personnel et purement spéculatif:
Si je me souviens bien (Il y a longtemps que j'ai lu Bilbo et le SdA, pardon si ma mémoire joue les passoires), la grand-mère de Smeagol est évoquée dans Bilbo, lors de l'épisode des énigmes. Il me semble qu'à ce moment, elle n'est qu'un procédé littéraire qui permet d'expliquer comment Gollum, présenté d'abord comme une créature ayant toujours vécu dans l'obscurité au fond de la grotte, peut résoudre les énigmes posées par Bilbo et connaître les oeufs ou le soleil. Pourquoi une grand-mère et pas un père ou une mère? Bilbo s'adresse à un public enfantin : une grand-mère, normalement, évoque des souvenirs de tendresse indulgente, de gâteries. (Dans cet épisode, elle n'est pas décrite comme "sévère"). Tolkien voulait-il rassurer son jeune public? Ou l'émouvoir sur le sort du pauvre Gollum, vivant dans le noir et le froid après une enfance heureuse?
Ayant ainsi introduit la grand-mère dans Le Hobbit, Tolkien l'a donc réutilisée dans le SdA, mais cette fois le personnage cesse d'être un procécé et prend vie : une vieille femme chef de famille, "sévère et versée dans ce qui restait dans la tradition ancienne." Une famille prospère et nombreuse.
Première constatation, Smeagol n'est donc pas comme l'interprète I. Smadja, un "homme du peuple", un "lumpen" : c'est - c'était du moins - un fils de bonne famille, éduqué dans le respect des anciens et des traditions par une grand-mère énergique et érudite.
... Houlà, ça nous mène loin et voilà que l'heure tourne. Je poste et je reviens dès que j'ai le temps. A bientôt tout le monde.
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Merci à tous pour ces interventions fort intéressantes.
Je reste peu convaincu d'une possible référence à la structure sociale victorienne, même si l'idée est séduisante assez pour que l'on veuille y voir un lien. Bien sûr, le peuple hobbit est, dans l'imagerie tolkiennienne, celui qui se rapprocherait le plus de la société anglaise du XIXe siècle, mais je doute que l'auteur ait poussé l'analogie à ce point.
De même que l'opposition d'un modèle anglo-saxon à la filiation salique, soit "française", n'expliquerait pas l'assise d'un pouvoir ou plus simplement d'une autorité féminine sur la famille (famille dans son acception clanique), d'autant plus que les Saliens étaient davantage "apparentés" aux anglo-saxons qu'aux "Latins".
Le modèle du clan me semble donc plus pertinent (et vérifiable chez Tolkien). J'avais repéré aussi dans ce sens la fonction qu'assume Haleth sur son peuple. Il semblerait donc que l'autorité usée par les femmes n'est pas contestée, encore moins illégitime, mais tout de même accidentelle (Haleth survivant aux hommes de sa famille, la grand-mère de Smeagol, succédant à son mari). L'autorité au féminin n'est donc pas d'emblée.
La question reste ouverte, même si de bons éléments de réponse ont été donnés. Pourquoi Tolkien a-t-il choisi ici une grand-mère? Pour reprendre le personnage évoqué dans Bilbo, comme tu l'avances, Melilot? C'est très bien vu! D'ailleurs, à relire le passage de la narration par Gandalf, la grand-mère fait plus figure de garante de la cohésion clanique que de véritable cheffe de clan; véritablement le personnage générique de la famille sans pour autant incarner le pouvoir à proprement parler.
Laegalad d'ailleurs a suggéré une opposition intéressante entre civilisation agricole / matriarcale, civilisation guerrière / patriarcale, même si la véracité historique n'est pas attestée. Les Hobbits sont plus agrestes, liés à la nature cyclique et nourricière. Ils sont loin d'être des guerriers, même s'ils savent se défendre et faire preuve de tenacité. Mais une telle grand-mère serait-elle seulement envisageable chez les nains, plus industrieux, telluriques et guerriers?
Alors justement, il y a dans la présence active de mère-grand quelque chose de plus significatif qu'il n'y paraît je crois...
Bien à vous tous.
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Si l'on s'en tient au texte de Tolkien, une opposition société agricole-matriarcale/société guerrière patriarcale n'apparaît nulle part. Les sociétés naines sont présentées avant tout comme des sociétés d'artisans, de mineurs et de marchands, la guerre n'est pas leur occupation première, mais leur force physique et leur caractère intransigeant et susceptible les prédispose à la bagarre. Les sociétés humaines paraissent à première vue plus patriarcales et guerrières : les rohirrims sont décrits comme guerriers tout autant qu'éleveurs, puisque les hommes répondent en masse à la levée des troupes, abandonnant champs et troupeaux. Les gondoriens sont organisés de façon plus classiquement hiérarchisée, un peu sur le modèle féodal européen : une caste de guerriers, de rang élevé, chez qui sont à l'honneur des valeurs militaires : force, vaillance, loyauté, - protégeant et règnant sur une population de paysans et d'artisans. Les Elfes de la fin du Troisième Age apparaissent comme pacifiques - peut-être assagis par des millénaires de guerre, car ce n'était pas le cas autrefois -, soucieux avant tout de préserver les restes de leur art de vivre condamné à terme.
Quant aux hobbits, effectivement, ils nous sont montrés comme une société agricole, plutôt fermée sur elle-même, et foncièrement pacifique (Quoique, en cas d'urgence, et si vraiment il n'y a plus moyen d'y échapper...!).
Mais où est le rapport patriarcat/matriarcat?
Chez les Rohirrims, si Eowyn revendique un rôle de vierge-guerrière plutôt que de princesse-consorte, c'est - sous-entendu - que ce statut existe bien chez eux, et que d'autres femmes ont pu participer aux combats. C'est son rang qui l'en empèche, plutôt que son sexe.
Le Gondor semble mieux correspondre au patriarcat traditionnel, on n'y connait ni reine, ni intendante, ni même de régente. Mais ils descendent des numénoréens qui ont connu des reines.
Chez les Elfes, Galadriel apparait bien plus que Celeborn, comme une souveraine régnante, mais son peuple est sur pied de guerre. A l'opposé, c'est Elrond et Cirdan, deux mâles, qui représentent le pacifisme chez les Elfes. L'un a fait d'Imladris un hâvre de paix. L'autre reste à l'écart des combats.
Et chez nos Hobbits, agriculteurs et paisibles? Même si les femmes y ont leur mot à dire, et sont dotées de fortes personnalités, l'autorité y reste exercée par des hommes : les chefs des clans Brandybuck et Took sont des hommes, les ancêtres remarquables aussi.
La fameuse grand-mère de Smeagol fait donc exception. D'autant plus exception, que si l'on relit les passages où Gandalf l'évoque (merci, Moteur de Recherche!), elle apparaît réellement comme chef de clan, elle détient bien l'autorité. Il suffit de s'en tenir aux termes utilisés :
Gandalf nous apprend que la famille était "gouvernée" par une grand-mère "sévère".
Plus loin, il nous dit que c'est la grand-mère qui prend la décision de chasser Smeagol, après seulement qu'il se soit rendu odieux à tout le monde. (ce qui, soit dit en passant, trahit de sa part une certaine indulgence pour le voyou. Piste à creuser ou ... euh...cul-de-sac??? ;-P). En tout cas, c'est bien elle qui le chasse, pas un autre membre, mâle ou femelle, de la famille.
Enfin Gandalf en parlant de la grand-mère, utilise les termes mêmes de "matriarcal" et de "puissant".
(Réf. d'après le moteur de recherche : T I, chap. II, pp 79 et 84 si je ne me goure).
Cette brave vieille dame est donc bien exceptionnelle, dans tous les sens du terme, et c'est en effet une bonne raison pour y chercher une intention de Tolkien.
Vingtdiou que ça m'intrigue! Quelqu'un aura-t-il une intuition géniale?
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Bon matin à tous!
Petite précision suite à mon post d'hier soir : c'est à la seule GRAND-MERE que Gandalf attribue l'adjectif "matriarcal", par allusion à son pouvoir et à sa personnalité, PAS à la société hobbitte!
A bientôt.
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Rien à redire!
En revanche, comme le suggère ton éloquent vingtdiou final, la question reste ouverte: pourquoi une grand-mère? Qu'avait Tolkien derrière la tête? Réminiscence d'une grand-mère à lui qui aurait servi de modèle en aparté?
Et si la société hobbite (structure sociale) est effectivement gouvernée par des hommes, ce que personne ne conteste, Gandalf parle en l'occurence de cette grand-mère là car le contexte narratif s'y prête. Il ne précise pas le caractère exceptionnel de cet état de fait. Rien n'indique donc que cela soit unique dans l'histoire hobbite (je ne parle pas de l'autorité naturelle, voire le charisme d'une femme qui lui ait naturellement donné un rôle clé au sein d'une famille, mais bien d'une autorité consensuelle et plébiscitée au sein d'un clan). Qui peut nier, source à l'appui, qu'il n'y ait pas eu d'autres exemples de ce type dans tel clan à telle époque, d'autant plus que Gandalf, dans le fil de sa narration, ne semble pas en souligner le caractère insolite et extraordinaire, et la réaction (plutôt la non réaction) de Frodo sous-entend implicitement qu'il n'est pas étonné outre mesure qu'une femme puisse jouir d'une telle autorité. Bon, là c'est sûrement s'avancer par trop dans l'analyse focale du texte, mais le point mérite d'être soulevé tellement il est, vingtdiou, intrigant!!!
(Quant à l'opposition féminité/masculinité (principes anima/animus repris par les nouvelles écoles de psychanalyse), il y aurait des choses à dire mais ce serait, à défaut d'être hors sujet, trop connexe ici. Peut-être dans un nouveau fuseau...)
Je ne dispose que du Hobbit, du Silmarillion et du SdA. Qu'en disent les autres ouvrages et que savons-nous d'une éventuelle aïeule de Tolkien qui eût pu faire référence?
Amicalement.
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Une partie de la solution pourrait peut-être se trouver dans le 1er chapitre du SDA quand Tolkien évoque l’origine des Hobbits.
J’ai sur le sujet une théorie « fumeuse » comme diraient certains mais qui est loin d’être au point Je doute aussi de son originalité malgré mes recherches sur les différents fuseaux mais je n’ai hélas pas tout lu et surtout pas « les lettres » !!!
En bref et à développer si le sujet n’est pas épuisé et s’il présente un intérêt :
On s’accorde généralement pour dire que les Hobbits représentent le peuple anglais, anglo-saxon de préférence, comme je crois le montre l’organisation administrative, civile, politique, et même militaire de la Comté. Mais ses origines sont multiples autant que les différentes ethnies qui ont peuplé l’Angleterre au cours de ses invasions successives :Ibères ?, Celtes, Nordiques, Germains (jutes et anglo-saxons)avec trois branches principales les celtes les nordiques et les germains correspondant selon moi et dans le désordre pour le moment, aux Pales, Aux forts et aux Pieds Velus.
Il est probable que certaines de ces cultures étaient sinon matriarcales mais suffisamment égalitaires pour reconnaître l’autorité d’une femme au moins de la même nature que celle dont jouissait la Grand’mère de Sméagol (la reine Boadicéa par exemple).
j'espère que les historiens ne seront pas trop choqués de ma témérité!
Mj(ce soir sans complexes)
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La question du pouvoir féminin dans l'univers tolkienien a semble-t-il été déjà amplement débattue.
Par contre, le personnage lui-même de la grand-mère est intéressant à un autre titre : il peut nous apporter un nouvel éclairage sur la personnalité de Smeagol, avant l'anneau, avant qu'il ne devienne Gollum. Le lecteur ne se le représente généralement que comme il apparaît dans le SdA, une créature dégradée, dégoûtante, corrompue et misérable. On a toujours fait l'impasse sur son passé. Tolkien en effet ne l'évoque qu'en quelques lignes et la seule chose que l'on retient généralement de ces quelques lignes est qu'il commence sa carrière par un meutre. Or, ce meurtre ne fonde pas le personnage, c'est le premier acte qu'il commet sous l'influence de l'anneau. Bilbo lui, est tenté également par le désir de tuer Gollum dans la grotte. Même Frodo, lorsqu'il retrouve son vieil oncle, pourtant aimé, à Rivendell, maîtrise difficilement l'envie de le frapper. Pourquoi ces deux-là arrivent-ils à réfréner leur pulsion, et pas Smeagol?
Gollum était, avant l'anneau, un hobbit, comme les deux Sacquet/Baggins. Nous avons vu qu'il appartenait à une famille fortunée, en vue, qu'il a été élevé par une grand-mère qui a du être une personnalité remarquable. Tolkien nous parle de sa curiosité insatiable. Un lecteur distrait et rapide interprète ça comme un défaut : "il s'intéresse aux sales choses qui grouillent". Pour moi, non, AVANT l'anneau, il est mû par un intérêt que l'on pourrait appeler scientifique, il s'intéresse aux plantes, aux racines, aux insectes, oui, mais (par comparaison avec notre monde) de nombreux scientifiques de renom et respectés aussi! C'est APRES l'anneau, que cet intérêt et cette curiosité jusque là sains et preuves d'intelligence, sont dévoyés en curiosité malsaine, espionnage des voisins, fouille de poubelles, etc.
Il me semble que le personnage de la grand-mère est une piste qui devrait nous permettre de "réhabiliter" Smeagol, l'ancien Smeagol.
Pas le temps de creuser maintenant, mais je vais y revenir dès que possible.
A+
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Même si la question du pouvoir féminin a été amplement débattue, je me permets de rajouter un petit quelque chose. :-)
On trouve des éléments dans la lettre 214, ou Tolkien écrit justement à son correspondant : “you should feel inclined to enquire further about Sméagol's 'grandmother'” Cette lettre est une vraie mine d’or en ce qui concerne le pouvoir des femmes chez les hobbits.
Selon Tolkien, le “family arrangement” des Hobbits est plus patrilinéaire que patriarcal. Quand le chef de famille (homme) meurt, sa place n’est pas prise par son fils mais par sa femme, jusqu’à sa mort, sauf si elle abandonne volontairement sa position de chef de famille/clan… Donc les Hobbits reconnaissent sans problème l’autorité d’une femme.
La lettre donne également un certain nombre d’exemples de femmes ayant en quelque sorte dirigé des clans ou des familles de Hobbits : Laura Baggins, Lalia le Grande (ou la Grosse)
Par ailleurs, je traduis ici grossièrement la fin de la lettre, qui s’intéresse tout particulièrement au peuple de Sméagol :
”Il n’y a pas de raison de penser que les Forts des terres sauvages aient développé un système matriarcal strict. Aucun trace d’une telle chose ne peut être trouvé parmi les Forts du quartier Est et du pays de Bouc, bien qu’ils maintiennent des lois et des traditions différentes. L’utilisation par Gandalf du terme “matriarcal” n’avait pas un sens “anthropologique” mais désignait simplement une femme qui dirigeait de fait le clan. Sans doute parcequ’elle avait enterré (vous excuserez la traduction pour outlived :-) )son mari et parcequ’elle était une femme de fort caractère. Il est vraisemblable que dans le pays décadent des Forts dans les Terres sauvages, les femmes (comme cela s’observe souvent dans de telles conditions [– à quoi Tolkien fait-il allusion ici? Des éléments historiques des pays nordiques? Peut-on y rattacher ce que nous dit MJ sur les différentes cultures européennes? ]) avaient tendance à préserver une meilleure condition physique et mentale, et donc devenaient plus importantes. Mais il n’y a pas lieu de croire qu’ […] une société matriarcal ou polyandrique se soit développée (même si cela pourrait expliquer l’absence de référence au père de Sméagol.)”
Et en anglais :
“There is no reason to suppose that the Stoors of Wilderland had developed a strictly 'matriarchal' system, properly so called. No trace of any such thing was to be found among the Stoor-element in the Eastfarthing and Buckland, though they maintained various differences of custom and law. Gandalf's use (or rather his reporter and translator's use) of the word 'matriarch' was not 'anthropological', but meant simply a woman who in fact ruled the clan. No doubt because she had outlived her husband, and was a woman of dominant character.
It is likely enough that, in the recessive and decadent Stoor-country of Wilderland, the women-folk (as is often to be observed in such conditions) tended to preserve better the physical and mental character of the past, and so became of special importance. But it is not (I think) to be supposed that any fundamental change in their marriage-customs had taken place, or any sort of matriarchal or polyandrous society developed (even though this might explain the absence of any reference whatever to Sméagol-Gollum's father).”
Tout ceci dit très brièvement - mais il y a sans doute beaucoup à extraire de cette lettre, et je suis sûr qu'elle intéresserait MJ et d'autres au plus haut point :-)
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Aaaah, hé bien voilàààà!
Voici qui répond à une bonne partie de ma question initiale, merci à Gurth.
(D'ailleurs,je trouve très bien la traduction de "had outlived" par "avait enterré", inutile de s'excuser...;-)
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Evidemment que cette lettre 214 me fait grandement défaut ! encore une ! Merci Gurth !
Dans un vieux livre d’un historien allemand, contemporain de Tolkien,(Rudolf Pötler) « la Saga des Vikings »on trouve une description féminine qui me semble assez compatible avec l’extrait donné par Gurth :
« Jusque dans le haut Moyen Age la littérature nordique dépeint de préférence la paysanne qui se tient à coté de son mari, fidèle travailleuse et sure unie à lui dans une communauté de destin indissoluble. Voilà qui éclaire singulièrement la compagne des fatigues et des dangers chantée par Tacite ».
Et plus loin :
« Accomplissant la plus grande partie du travail elle était indispensable .Au moins pendant les fréquentes absences des hommes elle était la maitresse incontestée du domaine. Elle devait faire cultiver les champs et rentrer les récoltes, soigner le bétail, mettre les enfants au monde, commander les esclaves, batailler avec les voisins jaloux. Bref, tenir les rênes d’une main de fer ».
Et encore
« Ce n’était pas un vie facile…..elle faisait des caractères durs intraitables et renfermés ».
Voici une belle grand-mère pour Sméagol ?
On peut bien sur penser que cette image n’est pas très exceptionnelle mais à ma connaissance même dans un contexte similaire celtes et germains ne se montrent pas si égalitaires. Même en l’absence du chef de famille ou après sa disparition ,la direction du domaine soit échoit aux héritiers males soit est confiée au clan qui décide de sa redistribution.
Cette tradition peu habituelle dans les sociétés du haut Moyen Age ne peut venir que de peuples où l’absence totale d’hommes au village est fréquente du fait des guerres ou de la nécessité de longs déplacements constants comme il en va des marchands, seconde activité essentielle des vikings. (L’activité commerciale expliquant peut-être aussi le fait qu’ « ils craignaient moins les hommes »que les autres branches Hobbites)
Les « Forts » seraient-ils l’héritage viking des Hhobbits ?
Ce qui me gêne c’est le peu de rapport entretenu par les »Forts » avec les Nains ;or la mythologie nordique fait une bonne place aux Nains ?
Mj
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Oh oui! Merci Gurth! Comme quoi ça aide un max de posséder ou d'avoir lu les Letters et autres HoME! On devrait tous, ... mais bon!
Et merci MJ! C'est vrai qu'on peut facilement se représenter les femmes hobbittes comme de rudes gaillardes, costaudes, travailleuses, débrouillardes et dures à l'ouvrage. Mais leur caractère est sans doute plus joyeux et bon vivant que celui des tes nordiques intraitables et renfermées. Par contre, je ne me rappelle pas que les Hobbits aient été décrits par Tolkien comme une société marchande. D'après mes souvenirs, mais je peux me tromper, ils commercent entre eux, ils sont plutôt casaniers et lorsqu'ils voyagent pour affaire, c'est au maximum jusqu'à Bree. Si des marchandises en provenance de la Comté ont été découvertes parmi les ruines de l'Isengard, au grand étonnement des deux hobbits présents d'ailleurs, c'est que les sbires de Saroumane avaient déjà mis le pays en coupe réglée.
Les Hobbits n'étant pas non plus des guerriers, ce n'est donc pas forcées par l'absence de leurs hommes que les femmes prennent une part active à la vie sociale et à la gestion des biens, c'est à leurs côtés, de plein accord des deux parties si j'ose dire. Voilà qui devrait te plaire!
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Melilot : tu sais ma théorie est loin d’être au point !!!et je n’en voudrai à personne de la trouver « farfelue » !
Pourtant je m’efforce de la défendre : caractère dur intraitable et renfermé me semble convenir à celui de la grand’mère de Sméagol, n’a-elle pas de sa seule autorité chassé celui dont l’acte criminel pouvait nuire à l’honneur de la famille sans en référer à une quelconque autorité supérieure et sans recours possible pour le fautif banni du domaine(du clan) et condamné à errer sans ressources dans des terres hostiles ou le seul refuge sera ces sombres grottes ou Gollum demeurera 500ans malgré la possession de l’Anneau
Ce que nous connaissons du caractère joyeux des Hobbits est celui qu’on observe dans une Comté, où la prospérité et la paix règnent depuis de nombreuses années : « ils étaient, du temps de leur paix et de leur prospérité, de joyeuses gens».
Mais on sait que le passé des Hobbits n’a pas toujours été aussi serein. 5 siècles avant notre irruption dans la vie de Bilbon les caractères pouvaient être sensiblement différents et montrer davantage de ressemblance avec leurs origines diverses.
Je ne cache pas que cette phrase me gène beaucoup : « Jamais les Hobbits d’aucune sorte n’avaient été belliqueux et ils ne s’étaient jamais battus entre eux »
Mais je n’ai pas l’intention de prétendre que Tolkien a voulu transposer dans les origines des Hobbits l’histoire de l’Angleterre ; je n’espère trouver que des clins d’œil, la reprise de thèmes qui lui étaient chers comme sa préférence pour les origines anglo-saxonnes du peuple anglais et dans certaines limites également sa filiation aux celtes.
Je ne peux pas imaginer qu’un chapitre aussi détaillé que le premier du SDA qui a du supporter de multiples relectures, n’ait pas une vocation particulière dans l’œuvre.
Si l’on retient sa volonté initiale de construire une mythologie pour son pays, idée à laquelle il n’a probablement renoncé que par réalisme et non sentimentalement, il me paraît logique qu’il ait éprouvé le besoin d’ancrer son œuvre à une population dans laquelle transparaissent des traits spécifiquement anglais.
Maintenant je me permets d’aborder le problème sous un angle ludique car mes connaissances et mes matériaux sont hélas basiques !
Mj
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