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Divers fuseaux abordés ces derniers temps (Rêves et Télépathie, roue de feu, etc.) montre finalement qu'il est beaucoup de choses qui ne doivent rien au hasard mais bel et bien à une intervention divine (Eru, Aïnur ?).
Cette Providence est véhiculée par, comme l'on dit, un certain nombre d'"Instruments". Frodon en est, qui conduit l'Unique jusqu'à la Montagne du Destin. Gollum, par sa chute providentielle (c'est le cas de le dire), précipitant l'Anneau dans le Feu (c'est d'ailleurs la seule occasion, me semble-t-il, où le Feu ait joué un rôle "purificateur", lui qui est habituellement moyen de destruction - mais là n'est pas ma question principale).
On pourrait donc se demander si chacun des personnages principaux du Seigneur des Anneaux n'est pas un de ces instruments ?
- Gandalf évidemment, qui est l'envoyé des Aïnur,
- Boromir, dont les songes l'ont amenés au Conseil d'Elrond,
- etc.
Et dans quelle mesure la découverte de l'Anneau par Bilbo n'est pas la première d'une longue série d'interventions qui mènera à la destruction de l'Unique ? On pourra objecter qu'au moment d'écrire Bilbo le Hobbit, Tolkien n'avait aucune idée du devenir de cette découverte dans Le Seigneur des Anneaux. Mais Tolkien y revient précisément dans le prologue :
il arriva ainsi que Bilbon fut perdu pendant quelque temps dans les ténébreuses mines orques au plus profond de la montagne; et là, en tâtonnant vainement dans le noir, il posa la main sur un anneau qui gisait sur le sol d'une galerie. Il le mit dans sa poche. Cela ne lui sembla sur le moment qu'un simple hasard.SdA, éd. Pocket, tome 1, p. 24
Cédric.
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"On pourrait donc se demander si chacun des personnages principaux du Seigneur des Anneaux n'est pas un de ces instruments ?"
Avant de commencer à réfléchir sur le sujet, je signalerai que j'ai un petit problème avec ça. Le libre-arbitre a une grande importance; est-ce compatible avec l'idée d'"instrument" ? Ou alors Eru poursuivrait-il son dessein parce qu'il sait d'avance, selon les personnages, quel choix ils vont faire ("He who knows each and every soul", disait Tolkien) ? Cela veut-il dire que la personnalité était inscrite déjà et impliquait le choix, auquel cas la liberté ne serait qu'apparente ? Ou qu'Eru s'adapte en fonction des créatures qu'il rencontre ? Mais dans se cas se servir d'eux impliquerait qu'il les mette en face d'une situation dans laquelle leur choix ne fait pas de doute, ce qui ne revient pas exactement à dire qu'ils sont libres, bref, je ne m'en sors pas trop. Je vais essayer d'y réfléchir un peu mieux.
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arf, je sens qu'on va bien rigoler encore...
je crois Ylla que le problème de concilier le libre-arbitre et la "prédestination" est un sujet déjà abordé ailleurs et n'est pas au coeur de ce nouveau sujet (qui me semble-t-il tente plutôt de se concentrer sur le dénombrement des "hasards" significatifs d'une interventon d'Eru) ... mais ce qui te chagrine ne pourra pas être contourné tant c'est concerné par ce fuseau.
je te livre en résumé ma reflexion sur le sujet (ça m'a beaucoup agité les neurones depuis pas mal de temps) histoire je l'espère de débroussailler une fausse incompatibilité.
l'Ainulindale nous fait clairement penser que la Création est totalement connue d'Eru, dans ses moindres détails comme dans son aboutissement final (mais de lui seul, même pas des Ainur qui ont pourtant participé à la grande musique).
qu'il puisse se permettre de dire à Melkor qu'il n'a été que son instrument est le premier camouflet à l'idée que l'on se fait du libre arbitre.
maintenant, il y a un piège dans lequel il ne faut pas tomber, c'est de penser Eru d'un point de vue anthropomorphique.
la plus grande difficulté est de concevoir qu'il est non seulement eternel, mais n'est tout simplement pas assujetti au cours du temps.
partant de là, il faut oublier toute notion d'antériorité. Eru ne PREvoit pas, il voit tout simplement (le futur, accompli).
une telle position par rapport au temps est tout simplement inhumaine, très difficilement concevable par nos petites cervelles totalement asujetties au flux du temps, et au final un peu déprimant quand à l'image que l'on se fait de l'Histoire...
bref, si l'on chausse les bottes d'Eru, l'humanité prend un côté dérisoire, et l'action individuelle une importance toute relative.
mais on n'est pas censé chausser de telles bottes.
ni ramener Eru a une dimension humainement compréhensible.
ce n'est pas un joueur d'échec qui anticipe les coups: il voit la passé le présent et le futur dans le même regard. on pourrait dire aussi que le "futur" n'existe pas pour lui, ou qu'il est aussi tangible que le présent.
c'est pourquoi il ne manifeste jamais aucune incertitude. y compris après la grande musique ou tout s'est barré en carabistouille mais où il commence à dévoiler partiellement aux ainurs ce qu'ils "ont fait" (passé) et qui est en fait le futur.
pour moi la seule chose qui permette au libre-arbitre d'exister dans cet univers, c'est que les créatures font des choix sans avoir vu la Création Achevée (Eru se garde bien de tout montrer aux valar). c'est de l'ignorance et de l'incertitude que naît la valeur du choix, et non pas la capacité à influer ou non sur le futur.
autrement dit: personne n'est maître de la situation où il se trouve, ni n'est jamais sûr de mener une action décisive par sa décision personnelle.
d'où le dénouement très complexe de la guerre de l'anneau, où des myriades de personnes doivent tenir leur rôles sans espoir de sauver le monde par eux-même, et où ce n'est même pas Frodo qui détruit l'anneau!... Eru (Eru-Tolkien) a composé un scénario dans lequel chaque "acteur" s'exprime effectivement librement et peut aller au bout de sa voie, mais sans comprendre l'histoire dont il fait partie.
Personne n'a forcé Gollum a se jeter sur Frodo à l'Orodruin -son intention est donc condamnable (bien qu'un jury moderne le déclarerait à coup sûr irresponsable ;-)- mais le maître de la Création, du Destin, le Grand Compositeur... c'était, c'est et ça reste Eru.
pour pousser plus loin que Cedric, je pense que toutes les créatures sont des "instruments" d'Eru. les bonnes comme les mauvaises, les petites comme les grandes.
idée dévalorisante? pas plus que celle d'une humanité créée par un Être Suprême.
reste a savoir en quoi consiste le titre d'"instrument".
en VO c'est "instrument" aussi, mais le sens anglais est plus orienté musical et moins "outil" que le mot français.
l'égo pourra se consoler de cette métaphore en pensant aux stradivarius ;-)
maintenant, y a-t-il des créatures qui ne sont pas des instruments d'Eru?
je ne vois pas pourquoi.
ou bien Eru considererait une Lobelia comme une "note" négligeable?
ça ne va pas trop dans le sens du Sda qui met bien en évidence que les grandes choses et le petit quotidien sont reliés.
j'introduisais l'idée plus tôt: l'instrumentalisation par Eru de ses créatures est en bonne partie comparable à celle de Tolkien avec ses personnages.
Certes Eru n'est pas censé (quant à lui) remanier son texte à l'envie et redéfinir untel ou untel... mais si Tolkien a du effacer, réécrire, changer... c'est tout simplement qu'il n'est pas Eru pour créer parfaitement du premier jet.
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Shnogul : "pour moi la seule chose qui permette au libre-arbitre d'exister dans cet univers, c'est que les créatures font des choix sans avoir vu la Création Achevée (Eru se garde bien de tout montrer aux valar). c'est de l'ignorance et de l'incertitude que naît la valeur du choix, et non pas la capacité à influer ou non sur le futur."
Si j’ai bien compris ce que tu veux dire (et je préfère le reformuler pour être sûr d’avoir bien saisi ton argumentaire) tout est écrit à l’avance, chacun a son rôle à jouer dans le dessein d’Eru et chaque action est déjà connue du Créateur avant même qu’elle ne soit envisagée. Mais comme nous ne connaissons pas ce qui doit être, nos choix se font librement ; personne ne nous pousse à choisir telle ou telle option même si ce choix est déjà connu de tout temps par Eru.
Mais si Eru a voulu que le libre arbitre soit tributaire de notre ignorance du futur, comment lire le fameux passage de la roue de feu ? Si c’est Eru qui s’exprime à travers cette roue, Il prive de facto Gollum de sa capacité de faire un choix car Il lui dévoile son avenir. Gollum n’est plus alors un instrument, il est devenu une marionnette. J’y vois une certaine contradiction.
A te lire ;-)
Vinch’
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Dieu omniscient et libre arbitre demeure pour moi effectivement difficilement compatible !
Si le libre arbitre est la possibilité de choisir entre le Bien et le mal, c’est aussi la possibilité de suivre ou de repousser le dessein d’Eru.
Ainsi de Melkor qui exprima sa liberté en optant pour la discorde de préférence à l’harmonie.
D’ailleurs Eru n’a-t-il pas jugé opportun, suite à sa dissidence, d ‘ajouter de nouveaux thèmes à sa Musique.(à mon avis l’orgueil de Melkor n’était pas au programme !)
Donc je penserais plutôt qu’omniscient signifierait qu’il prévoit simultanément toutes les conséquences des alternatives qui s’offrent à ses « enfants », tous les possibles , formidable projection en toile d’araignée qui échappe effectivement à notre imagination mais où l’accomplissement demeure hypothétique.
Mais c’est seulement dans cette idée que sa bonté résiste à l’analyse, au contraire d’un futur prévu à l’avance où la responsabilité des erreurs ou des chutes de ses créatures ne pourraient que lui être imputées.
Dans cette hypothèse où le futur est multiple, rien n’empêche Eru d’apporter de temps en temps une aide significative par des interventions « providentielles.
Cette idée me semble en outre convenir à la tapisserie de Vairé qui ne tisse les fils qu’au fur et à mesure de l’accomplissement des destins.
Mj
Mon idée pêche peut être en plusieurs points et notamment (Melkor jouissait-il du libre arbitre et Vairé tisse-t-elle le destin des hommes ou seulement celui des elfes ?)
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Shnogul a, à mon sens, parfaitement bien exprimé cette difficile omniscience de Dieu. Je le rejoint parfaitement dans ce qu'il a tenté d'expliquer, pour y avoir beaucoup réfléchi et en avoir beaucoup discuter.
Je me permet de rappeler certaines de ses phrases clef:
"maintenant, il y a un piège dans lequel il ne faut pas tomber, c'est de penser Eru d'un point de vue anthropomorphique.
la plus grande difficulté est de concevoir qu'il est non seulement eternel, mais n'est tout simplement pas assujetti au cours du temps.
(...) partant de là, il faut oublier toute notion d'antériorité. Eru ne PREvoit pas, il voit tout simplement (le futur, accompli).
(...) il voit la passé le présent et le futur dans le même regard. on pourrait dire aussi que le "futur" n'existe pas pour lui, ou qu'il est aussi tangible que le présent. "
JE ne suis donc pas d'accord avec le "tout est écrit à l'avance" que tu utilises pour traduire sa pensée. C'est trop réducteur dans un esprit d'aujourd'hui. Tout est écrit à l'avance, si tu veux, mais c'est moi qui ai tout écrit ( et pas à l'avance). Chacun de mes choix est fait librement, mais Dieu qui est hors du temps embrasse à la fois le temps présent et le temps passé... et le temps futur. Il voit à l'avance les choix que je prendrai quand le futur deviendra présent. Pourtant je suis libre de les avoir pris.
Tu cite maintenant l'exemple de son intervention dans un de mes choix. Comme déjà dit, il voit tout à l'avance, et savais donc, au moment même de créer le monde, quels choix je ne serai pas enclin à faire au moment ou il faudrait pourtant les faire. Sans violer ma liberté, il a alors inclu son intervention à ce moment du temps, quelle qu'en soit la forme, dans son projet. Son intervention pèsera sur ma décision, m'aidera à m'y retrouver (ou parfois m'y contraindra... cela arrive mais alors je n'ai pris aucune décision (comme de rencontrer telle personne ou de perdre tel ami). (attention, je ne dis pas que le moindre événement a pour cause Dieu, ce n'est qu'un exemple qui peut arriver).
Jje ne crois en aucun cas que c'est Eru qui intervient lors de la roue de feu. Mais la nuance est que, tout comme lorsque quelqu'un va voir madame Irma, Gollum ne SAIT pas que c'est le futur. Ce n'est pour lui (tout comme pour le lecteur) qu'une menace, rien ne prouve qu'elle sera réelle, et rien de toute façon n'empêche Gollum de poursuivre son destin, si c'est réellement son destin.
Si on te dit: si tu roule à contresens sur l'autoroute à 180 tu va mourir, rien ne t'empêche de le faire quand même. Même si tu meurs effectivement, tu es resté libre
1- parce que tu aurais pu ne pas le faire (Gollum aurait pu s'éloigner de l'Anneau)
2- parce que tu ne saura jamais si cette menace avait valeur absolue ou non. Tu aura voulu la vérifier, par exemple, en toute liberté.
Enfin, c'est un peu dialectique non tono intervention ?
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oups, Mj je m'adressais à Vinchmor
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Pour te répondre, MJ (et mon post précédent devais déjà y contribuer),
je dirai que si, la rebellion de Melkor était pré-vue au programme.
(si on estime que les Valar vivent dans une forme de temps, ce qui semble le cas).
Au moment où il les engendra de sa pensée, comme il est dit dansle Silmarillon, il voyait déjà tout ce qu'ils deviendraient. Mais même s'il pouvait, avant leur création, envisager comme tu le dis tous les possibles, seuls les choix des valar ont tendus brusquement au moment de la création une seule des cordes de la toile, celui de leur avenir, car les choix on alors été fait, ou le seront dans les fait.
A ce même moment, Eru encore en création pouvait totu à fait savoir qu'il interviendrait alors à tel moment du choix de tel individu pour l'aider, mais que cet individu refuserait, et qu'il tendrait une autre main, qui serait à nouveau repoussé.
Il ne s'agit pas là de possible (les possible il les savaient aussi avant la création), mais de fait librement choisi, même si dans la fenêtre du temps ils ne sont pas encore au point où l'on est posé.
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Celà reste très obscur pour moi !Eru sait tout ce qui sera ; Il sait les choix qui seront faits en toute liberté(apparente)
Mais c'est lui qui compose la musique.Il est donc l'origine des choix que les hommes s'imagineront exercer"nul ne peux changer la musique malgré moi. Celui qui le tente n'est que mon instrument"
Ou serait donc la responsabilité de l'homme et en quoi serait-il punissable? puisque le mal contribue au bien selon la volonté d'Iluvatar et que tout est et sera tel qu'il l'a conçu.
Mais il est vrai que dans le Silmarillion je n'ai pas lu d'allusion à l'Enfer ou à la damnation!Ma vision est peut-être faussée par quelque assimilation.:-))(:-)) = sourire si je n'ai pas oublié!)
Car si l'on suspend la notion du bien et du mal telle que nous en avons l'habitude et de là, l'idée de sanction tout devient plus clair et acceptable:
Le mal contribuant au bien selon le dessein d'Iluvatar l'homme choisit librement l'un ou l'autre comme on choisit une direction, à droite ou à gauche, ou une couleur, le blanc ou le noir. Il exerce son libre arbitre Peu importe que ce ne soit qu'un leurre. A la fin il y aura plus ou moins de blanc ou de noir Eru l'a voulu ainsi! ( peut-etre une grande plage grise !)
Pas très satisfaisant ! je crois que ça me dépasse !
Je me demande si Ylla progresse ?
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Merci Vinyamar; apparement, je suis tombé dans le piège énoncé par Shnogul. Je vais encore y cogiter ;-)
Une intervention dialectique? Ma foi, si j'en suis la définition du Larousse Universel je dirais que oui: méthode de raisonnement qui consiste à analyser la réalité en mettant en évidence les contradiction de celle-ci et à chercher à les dépasser. ;-)
Vinch'
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Tout cela est bien intéressant...Providence ou Destin ? Volonté dirigée ou libre arbitre ? Et puis d'abord qu'appelle t'on libre arbitre ? Est ce de faire ce que je veux indépendemment de toute autorité ou est ce que c'est de choisir le bien...j'ai là dessus quelques références...mais je gage qu'elles ne plairont pas à tout le monde...
Jb
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Pour répondre à tout le monde, j'ai le sentiment qu'il y a un Destin manifeste. C'est vrai qu'une chaîne de "coincidences" sont troublantes. D'ailleurs, Gandalf dit bie qu'il sent que Gollum a encore un rôle à jouer en bien ou en mal. Sauron sent aussi qu'il y a quelque chose à l'oeuvre quand les vents de la mer dispersent ses nuages sombres. On pourrait presque parler de "mektoub". Il est clair qu'Eru est à l'oeuvre tel un joueur d'echec.
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je t'accorde le jeu d'échec.
mais la différence c'est qu'au lieu de manipuler ses pions, il le suggère le coup qu'il a préparé pour lui. Le pion ensuite consent on non. S'il refuse, Eru joue autre chose, avec un autre pion. S'il accepte, ce n'est pas de Destin qu'il s'agit, mais d'un plan Divin.
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j'aurais aimé faire long mais j'ai pas le temps.
alors juste pour ramener un truc dans la discussion:
le domaine d'Eru est "timeless".
l'absence de temporalité, donc d'antériorité, de postériorité et de "subséquencialité" (français ça?), pour difficile et inhumain que c'est à concevoir doit présider à tout raisonnement.
dans les derniers posts, j'ai relevé un certain nombre de termes qui sont un non-sens appliqués à Eru et faussent la reflexion.
déjà, parler de ses actions en les conjuguant au temps passé, présent ou futur est une erreur. c'est le ramener dans l'inexorable flux temporel alors qu'il en est plus que libre: il peut carrément le nier (timeless).
ensuite, toutes les locutions anodines comme: ensuite, après, à ce moment,... etc. sont inaplicables concernant Eru. toujours pour la même raison: hors du temps, y a pas d'avant ni d'après.
c'est pour ça que je réfute l'image du joueur d'échec. Eru ne réagit pas à une situation, il agit/a agit/agira UNE fois.
c'est ça la Création!
alors que les ainur sortent à peine de la grande musique, Eru voit déjà la création achevée, y compris les touches qui ne viennent pas d'eux ni de leur champs temporel de connaissance.
pour illustrer ça de manière simple, je dirais que l'Histoire est un maelstrom pour ceux qui sont soumis au temps, alors que pour Eru c'est comme un tableau figé(image antropomorphisée, donc bancale). ce qui fait qu'il inter-agit sans jamais ré-agir.
quant à la roue de feu et Gollum...
Vinyamar je ne comprends pas où se situe notre divergence sur ce point... à moins que...
à moins que ce qui te pose problème c'est d'imaginer Eru prévenir Gollum tout en sachant qu'il n'en tiendra pas compte, et que ça te paraisse trop impitoyable pour un démiurge basé sur le Yahvé judéo-chrétien. auquel cas se serait discutable, mais de toutes façons il y a autre chose à envisager: l'ultime avertissement donné à Smeagol est fait pour éclaircir la situation morale pour les générations qui suivantes (et le lecteur en étant prosaïque).
pour Eru qui sait le futur, proposer des choix "inutiles" peut permettre de révéler du sens, à la vie, à la création, à l'histoire.
mince je voulais faire court...
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Mj : "Je me demande si Ylla progresse ?"
Hélas, vu le peu de temps que j'ai pour aller sur Internet en ce moment, je n'ai toujours pas pu trouver les autres fuseaux consacrés au libre-arbitre, j'ai peur de n epas avoir tous les éléments... On va essayer quand même !
Shnogul, tout à fait d'accord avec ce que tu dis de la création déjà effectuée sur un plan intemporel, notre fameux "timeless void". Seulement, quand tu dis : "pour moi la seule chose qui permette au libre-arbitre d'exister dans cet univers, c'est que les créatures font des choix sans avoir vu la Création Achevée (Eru se garde bien de tout montrer aux valar). c'est de l'ignorance et de l'incertitude que naît la valeur du choix, et non pas la capacité à influer ou non sur le futur.", ça ne me paraît pas si évident. Tu sous-entend que pour toutes les créatures d'Arda le destin est déjà scellé, ce qui en un sens est vrai si on quitte le plan temporel, mais qui pose un autre problème : quelle différence faire dans ce cas entre le destin des Elfes et celui des Hommes ? La différence principale entre eux est censée être que les Elfes sont déjà déterminés dans la Musique, alors que les Hommes ont le pouvoir de façonner leurs vies (je reviendrai sur ce que cela donnerait vu depuis le "timeless void"). Or les Elfes ne sont pas au courant de la Musique non plus, si je ne me trompe. A quel niveau situer la différence alors ? Désolée si la question est déjà sortie trente fois, comme je l'ai dit je n'ai pas trop le temps de faire des recherches. Il est vrai aussi que le post initial confond la situation de Gandalf (un Maia) et Boromir (un homme). Bref, si je suis en train d'enfoncer des portes déjà ouvertes, prévenez moi.
En fait je vois plutôt une autre manière d'envisager la chose. Pour cela je proposerais la métaphore du kaléidoscope. Mettons que la création soit un kaléidoscope qu'Eru aurait construit, puis qu'il aurait secoué avant de regarder devant. C'est Eru qui aurait décidé des matériaux et qui serait cause de l'apparition de l'image, n'empêche qu'il n'aurait pas ordonné les motifs un par un. Il aurait causé l'ensemble, mais pas le détail. Je poursuivrais alors l'analogie en disant que le mouvement des bouts de verre à l'intérieur du kaléidoscope est causé par la volonté des créatures, mais qu'Eru n'influe pas sur chaque volonté ; celles-ci interviennent néanmoins dans le processus global de mise en forme de la création. On se situe toujours hors du temps, et tu vois, ça n'oblige plus à considérer que chaque créature est dirigée par Eru. Evidemment on tombe rarement sur l'analogie parfaite, en l'occurence on imagine mal que les bouts de verre dans un kaléidoscope aient leur volonté propre... J'espère que vous saisissez tout de même l'idée ?
En fait ceci pose surtout le problème de l'individu, de la manière dont cet individu est maniable, et c'est un problème qui se complique encore quand on prend en compte les différences fondamentales entre Elfes, Hommes, Maiar... Je crois qu'il faut être extrêmement prudent et faire attention avant de les mettre tous dans le même sac. Voilà pourquoi, Cédric, je ne te suis pas tout à fait quand tu alignes Gandalf et Boromir. Pour moi, l'intervention de Gandalf peut s'apparenter aux interventions des anges dans la Bible (j'ai développé dans "Monothéisme et théogonie : synthèse", il me semble). Pour le rêve de Boromir, c'est plus délicat, surtout que, les rêves étant le domaine de Lorien, je ne vois pas pourquoi il faudrait faire intervenir Eru pour celui-ci.
Enfin, pour commenter une autre remarque de Shnogul : "pour pousser plus loin que Cedric, je pense que toutes les créatures sont des "instruments" d'Eru. les bonnes comme les mauvaises, les petites comme les grandes.
idée dévalorisante? pas plus que celle d'une humanité créée par un Être Suprême.
reste a savoir en quoi consiste le titre d'"instrument".
en VO c'est "instrument" aussi, mais le sens anglais est plus orienté musical et moins "outil" que le mot français.
l'égo pourra se consoler de cette métaphore en pensant aux stradivarius ;-)"
Je crois qu'on peut même le prendre au premier degré : les créatures d'Eru sont les "instruments" qui jouent sa musique. Cela dit, difficile d'affirmer que ces instruments sont tous manipulés par quelqu'un, qu'ils ne jouent pas selon leur propre volonté. Au moins il ne serait pas invraisemblable de penser que cela peut être le cas pour les hommes, si le thème qui leur correspond est aussi désuni et discordant ;-). Les instruments auraient été donnés par Eru, d'où le fait que tout ce qu'ils jouent prend sa source en lui. Mais j'ai du mal à voir comment on peut affirmer qu'Eru les manipule un par un. Il affirme avoir un dessein, certes. Ce dessein n'aurait-il pas pu être simplement de l'ordre de secouer un kaléidoscope et d'en tirer une belle image ? ;-)
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Bonjour à tous!
Cela fait bien deux-trois mois que je suis avec attention les divers sujets du site et les participants dont certains me sont devenus familiers à force de les lire volontiers. J'ai progressé du début pour "grimper" jusqu'à ce sujet-ci, et je suis surpris de tomber précisément sur un thème qui me travaille depuis ma rencontre avec l'univers de Tolkien.
Depuis une bonne vingtaine d'années que j'ai commencé par Bilbo pour enchaîner avec le SdA (vers 13/14 ans), j'ai été intrigué par la part de déterminisme qui sous-tendait l'oeuvre en général. Aux assertions mises ici, j'aimerais apporté ma réflexion.
Il m'a semblé au fil des pages diverses qu'il se profilait une trame logique et, justement, déterminée de l'histoire. En quoi est-elle providentielle ou fruit d'un déliement d'Iluvatar, quelle part au libre arbitre de ses enfants, quelle mesure à un quelconque interventionnisme de sa part? Le sujet a une dimension théologique, profondément philosophique comme l'ont bien démontré mes prédécesseurs.
Je vois les différentes races, célestes, immortelles, mortelles, et les objets (les anneaux et l'anneau de Mordor) répondrent aux Possibles d'Eru. La part du libre arbitre n'est pas mise à mal, au contraire, elle reste entière, même si elle se met, finalement, au service d'une nécessité plus grande. Le choix est réel, même s'il est fondé par telle ou telle circonstance conditionnée dès la première Note. Le choix de Melkor, celui des fils de Fëanor, de Saroumane, des Ents etc. est ponctuel et motivé par l'action du moment. En outre, il participe d'un canevas plus grand, nécessaire, "prédestiné".
On peut concevoir Eru créer la Musique, diriger en chef d'orchestre une oeuvre qui forme un tout, de l'ouverture au final. Cela n'annihile pas la trame musicale personnelle et chaque accord joué par tel personnage, en bien ou en mal, d'autant plus si les désaccords ou le semblant de cacophonie sont eux-mêmes sinon prévus en tout cas envisagés (de l'ordre du possible qu'est Eru).
Le meilleur exemple qui me vienne à l'esprit est la fugue. La succession des thèmes musicaux, avec reprises, écarts et reprises à l'envi. Et pour rester dans les exemples ludiques, Eru ne jouerait-il pas aux dés (truqués)? Les dés pipés ne sont-ils pas eux-mêmes la condition du jeu?
Une phrase du premier Tome du SdA m'a toujours interpelé en ce sens:
"...Ç'a été l'événement le plus étrange jusqu'à présent dans toute l'histoire de l'Anneau; cette arrivée de Bilbon JUSTE à ce moment et la façon dont il a posé la main dessus, à l'AVEUGLETTE, dans le noir.
Il y avait PLUS D'UN pouvoir à l'oeuvre, Frodon. L'Anneau cherchait à revenir à son maître (...) pour être ramassé par la personne LA MOINS vraisemblable: Bilbo de la Comté!
Derrière cela, il y avait quelque chose d'autre à l'oeuvre, EN DEHORS DE TOUT DESSEIN du créateur de l'Anneau. Je ne puis le faire comprendre plus clairement qu'en disant que Bilbon était destiné à trouver l'Anneau, et pas par la volonté de celui qui l'avait créé. Et c'est peut-être là une pensée encourageante." (SdA, tome 1, p. 90 Livre de poche; les capitales sont de moi)
Ainsi, il ne pouvait pas en être autrement, sauf qu'Eru est la seule Instance à savoir, mieux! à créer cela. Car il est cela. C'EST la Musique! Les solistes jouent chacun à sa manière, mais Un seul donne le ton.
Merci à toutes et tous pour la qualité de ce site, chapeau aux hôtes et bonne route.
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Bienvenue à toi, Corbeillon!!
merci pour tes remarques qui nous rappelle que nombre sont les petits mots utilisés par Tolkien comme des petits cailloux blancs destinés à luire dans la Nuit ;-)
et... au grand plaisir de te lire très souvent (c)Cédric, 2003 :-))
Sosryko
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Bonjour Corbeillon,
mae govannen* :-) dit Silmo qui se met à citer des langues inventées auxquelles il n'entend pourtant rien.....mais à défaut d'entendre, ce qu'il aime bien écouter de temps à autre, c'est "l'Art de la fugue" (c'est aussi le titre d'un bon bouquin mais rien à voir ni avec JRRT ni avec JSB) et la comparaison que tu proposes est très intéressante.
A propos de "il y avait plus d'un pouvoir à l'oeuvre", il y avait sûrement celui de l'Anneau qui abandonne volontairement Gollum (Eru est-il derrière cela?)et puis un magicien qui, quelques temps plus tôt avait, contre toute attente, embarqué un petit hobbit tranquille dans une aventure impossible avec une bande de nains (et là je dis: Eru est vraisemblablement derrière cela!).
Silmo
* Heureuse rencontre (il parait que ce serait du Sindarin)
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A propos du libre-arbitre, il en avait déjà été question dans le fuseau Ainulindale fait la nique a la genese de la bible dans lequel Cathy (Szpako) avait aussi signalé que le thème était abordé dans les fuseaux suivants: Destinée, sort et tout ça..., Neutralité , luvatar est-il omniscient? (Archives), et Le Manichéisme du SdA et du Silm
Bonne lecture
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Je remonte ce fuseau parce que Shnogul y avait développé une intéressante image de la non-applicabilité du temps envers Eru. En vadrouillant sur Internet, j'ai trouvé un résumé d'une pensée de Saint Augustin sur le sujet. Je ne sais si ce texte est fidèle à l'idée de son auteur aussi je vous la livre stricto senso:
Dans Les Confessions, Saint Augustin développe une intéressante conception du temps. S'opposant à la conception classique, qui faisait du temps une dimension des choses, Saint Augustin montre que le temps n'a pas d'être puisque le passé n'est plus, l'avenir n'est pas encore et le présent est cet instant infinitésimal immédiatement retourné au néant. Ainsi le temps n'a pas d'autre réalité que la réalité subjective que lui confère ma conscience, par ma mémoire (passé), mon attente (avenir) ou mon attention (présent). Il n'est nulle part ailleurs que dans l'esprit des hommes. Ce qui distingue le temps de l'éternité divine est que cette dernière échappe à la succession.
Vinch'
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