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#1 07-02-2002 23:31

Kampilosse
Inscription : 2001
Messages : 27

Dans la série 'poèmes en sindarin'...

Aiya ilquen lambendili !

Voyant que certains se mettent à écrire des poèmes en sindarin, que cela suscite des conversations où l'on - moi du moins - apprend plein de choses et parce que le sindarin est une langue où je n'excelle pas (joli euphémisme) je n'ai pu résister à la tentation de m'y essayer.

L'idée première de ce poème m'est venu par un étrange jeu de mot...

Nu° venel o ennorath
Sous le ciel des terres médianes
I° dhîs nallant nef Eglath
La femme criait parmi les Abandonnés (ou Eglath)
Ir na° vôr pennant calad
Quand dans la nuit descendait une lumière
O° venel, be elenath
(à partir) du ciel, comme d'innombrables étoiles.
He pennant an awarthad
Elle a chu par (à cause de) l'abandon
O i° dhîr ach° chant o° dhîn ;
De l'homme dans l'ombre du silence ;
A si° 'eryn eglan tîn.
Et cette dame était celle qu'il avait abandonnée.

J'espère qu'il n'y a pas trop de fautes ;-) Les hiatus attendront un peu.

Nildala,

Kampilossë.

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#2 10-02-2002 13:00

Toko
Inscription : 2000
Messages : 1 164

Re : Dans la série 'poèmes en sindarin'...

> Voyant que certains se mettent à écrire des poèmes en sindarin, que cela suscite des conversations où l'on - moi du moins - apprend plein de choses et parce que le sindarin est une langue où je n'excelle pas (joli euphémisme) je n'ai pu résister à la tentation de m'y essayer.

Une tentative très courageuse et assez joliment réussie, pour une langue où tu n'excelles pas ! ;-)

> L'idée première de ce poème m'est venu par un étrange jeu de mot...

Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai l'impression que tu fais allusion à la fin du dernier vers... ;-)

> Nu° venel o ennorath
> Sous le ciel des terres médianes

Je crois que l'article génitif en conviendrait mieux que o qui signifie "venant de" (il déclenche une mutation mixte, mais le mot suivant commence par une voyelle et reste donc inchangé).

Nu° venel en ennorath

> I° dhîs nallant nef Eglath
> La femme criait parmi les Abandonnés (ou Eglath)

Juste une précision au sujet de nalla- : ce verbe est glossé "to cry" et il peut donc signifier "crier" ou "pleurer" en français. Il semblerait qu'un verbe suivant son sujet, comme c'est le cas ici, doive être lénifié, mais dans le cas présent n- resterait inchangé. Nef ne signifie pas "parmi" mais "de ce côté de". Pour "parmi" on a le préfixe im- ("within"). Même si le mot suivant commence par une voyelle et resterait inchangé, je me demande si ce préfixe déclencherait une mutation de contact éventuelle, et si oui de quelle nature (je pencherais plutôt pour une mutation nasale).

I° dhîs nallant im-Eglath

> Ir na° vôr pennant calad
> Quand dans la nuit descendait une lumière

Je pense que ned ("en, dans") est peut-être plus approprié que na. Dans ce cas, la mutation déclenchée serait occlusive (> ne° môr). Le verbe penna- signifie "décliner", "tomber" est le verbe danna-.

Ir ne° môr dannant calad

> O° venel, be elenath
> (à partir) du ciel, comme d'innombrables étoiles.

Là le o est à sa place ("une lumière venant du ciel") ! L'utilisation de be comme équivalent du quenya ve est hypothétique.

> He pennant an awarthad
> Elle a chu par (à cause de) l'abandon

Comme pour le 3e vers, le verbe pour "tomber" est danna-, quoique le sens de penna- pourrait être approprié ici ("elle diminua par..."). Quoi qu'il en soit, le verbe doit, peut-être, subir une lénition (> He ° bennant ou He ° dhannant).

He ° bennant an awarthad (ou He ° dhannant an awarthad)

> O i° dhîr ach° chant o° dhîn ;
> De l'homme dans l'ombre du silence ;

Ici encore, l'article génitif en est sans doute préférable à o, article suivi d'une mutation mixte (> e°-dîr et e°-dîn). D'où vient le ach ? La seule possibilité pour un tel mot serait une forme de an ("pour") ayant subit une mutation nasale... Pour "dans" il serait sûrement préférable d'employer ned (avec la mutation occlusive : ne° chant).

E°-dîr ne° chant e°-dîn ;

> A si° 'eryn eglan tîn.
> Et cette dame était celle qu'il avait abandonnée.

Pourquoi sin (pl.) au lieu de sen pour "cette" ? Et pourquoi la mutation (je n'ai pas entendu parlé d'une éventuelle mutation déclenchée par sen, sin) ? Si j'ai bien compris, le sens littéral de la phrase est donc : "Et cette dame abandonnée (était) sienne".

A sen heryn eglan tîn.

Résumé :

Nu° venel en ennorath
i° dhîs nallant im-Eglath
ir ne° môr dannant calad
o° venel, be elenath.

He ° dhannant an awarthad
e°-dîr ne° chant e°-dîn ;
a sen heryn eglan tîn.

Namárië !

Toko

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#3 10-02-2002 15:41

Moraldandil
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Re : Dans la série 'poèmes en sindarin'...

> Aiya ilquen lambendili !

L’exemple « Aiya Eärendil Elenion Ancalima » (SdA 2/IV ch. 9), traduit « Hail Eärendil brightest of the stars », semble montrer que « aiya » ne se construit pas avec le datif en Quenya Exilien, mais plutôt avec le nominatif.

> Nu venel o ennorath

« O » peut certes se traduire « de » dans certains cas… mais son sens précis est « depuis », « from » en anglais ; la relation exprimée est de type ablatif. Certes, Tolkien interprète « Celebrimbor o Eregion » par « Celebrimbor of Hollin », et non « from Hollin », mais 1) il s’agit d’un cas où les emplois de type génitif et ablatif se recouvrent plus ou moins 2) Tolkien traduit souvent ses textes elfiques assez librement : il donne la version qui serait la plus naturelle en anglais, mais elle ne correspond pas forcément à la construction  elfique (sindarine, en l’occurrence).
Comme Toko, j’éviterais donc « o » ici… mais personnellement, je n’utiliserais pas d’article devant ennorath : il s’agit d’un collectif déjà défini par lui-même (cf. « o galadhremmin ennorath » dans A Elbereth Gilthoniel), mais simplement la juxtaposition. Evidemment, le vers en prend un coup…

Plus généralement, « de » est peut-être bien, avec « à », la préposition la plus employée de la langue française… autrement dit, il a X fonctions différentes, qui ne se traduiront pas forcément de la même façon.

> I dhîs nallant nef Eglath

« Dîs » fait partie de ces mots anciennement en ND- qui mutent de façon spéciale : la lénition (après l’article singulier, par ex) donne « i °nîs ». Par ailleurs, dîs signifie plutôt (angl.)« bride », donc à peu près « fiancée, promise, (jeune) mariée ». Pour femme, nous avons un terme ancien, « dî » (mot problématique quant à sa mutation, voir plus bas), le terme courant étant « bess » (plutôt « épouse » à l’origine, mais le sens s’est élargi). Il y a aussi dess « jeune femme » (autre mot en ND-, d’ailleurs apparenté à dîs et dî). Voir plus bas.

Comme l’a dit Toko, im « between, within – entre, à l’intérieur de » est probablement ce que nous avons de mieux pour traduire « parmi – among ». Il provient de *imbi > *imbe > im. Am < *amba déclenche la lénition ; je serais tenté de supposer, par analogie, qu’il en est de même pour im, s’il n’y avait l’exemple Taur-im-Duinath dans le Silm. Pas de mutation du tout ? Ou encore un cas de « résistance à la mutation » ? Je pense qu’il serait intéressant d’analyser les composés où cet élément apparaît. Heureusement, ici, il n’y a pas de problème, puisque « Eglath » commence par une voyelle…

Une autre possibilité serait peut-être d’utiliser ah / a « avec » ?

L’omission de l’article devant Eglath me semble judicieuse, puisqu’il s’agit d’un collectif.

> Ir na vôr pennant calad

« Ir «  pour « quand » est hypothétique, mais faute de mieux… D’accord avec Toko pour l’emploi de ned. Je pense que l’omission de l’article est judicieuse ici – apparemment il ne s’agit pas d’une nuit particulière, mais de « la nuit » de façon générale ? Pour penna- / danna-, cela dépend du sens voulu, dirais-je.

> o venel, be elenath

« o menel », comme dans A Elbereth Gilthoniel (mutation occlusive).

> He pennant an awarthad
> O i dhîr ach chant o dhîn

Le pronom personnel sujet ne semble s’employer que pour insister ; est-ce vraiment le cas ? À moins qu’il ne soit là que pour le vers ? Pour la lénition qu’il entraînerait, cf. note de Toko.
Par ailleurs, j’utiliserais plutôt la préposition : na « par, avec[moyen]… » dans les deux premiers cas (si j’ai bien compris, la dame a été abandonnée PAR son amant ?). J’éviterais « o » pour exprimer le génitif (cf. 1er vers), et j’emploierais plutôt l’article défini génitif ici.
Pour « dîr », voir plus bas.
Pour ombre, nous ne manquons pas de termes… mais « cant » signifie « forme » ! Je choisirais assez volontiers « gwath », qui a un double sens de « ombre «  et de « tache, souillure »… nous sommes bien dans un cas de femme séduite et abandonnée ? ;-)
« An » me semble tout à fait convenable ici : il possède un sens spatial de « to, towards », soit « vers ». Je tendrais à penser que le sens datif en est dérivé.

Soit au final quelque chose comme « pennant na awarthad / nan [mixte]benn an [nasale]gwath e-[mixte]dîn » - (elle) a-chu par abandon / par-l’ homme vers ombre du silence.

> A si ‘eryn eglan tîn.

La version proposée par Toko me semble bonne. Néanmoins, je crois que je placerais l’adjectif démonstratif après le nom, ce qui entraînerait sa lénition ; soit « a heryn °hen eglan tîn ».
Par ailleurs, heryn signifie « dame » dans le sens de « seigneur féminin / femme du seigneur » - est-ce le cas ? H- ne peut muter qu’en ch-.

Note sur les mots « dîs », « dî », « dess » et « dîr » : ces mots me semblent… problématiques quant à leurs mutations. Dans les Etymologies, « dîs » est issue de la racine NDIS ; il fait donc partie des mots à mutations « spéciales ». De même pour « dess ». Tolkien fait dériver « dîr » d’une racine DER, donc les mutations sont a priori « normales » (*i dhîr)… mais il existe des composés où dîr se manifeste sous la forme -nir (dagnir). Influence de la racine « renforcée » NDER ? « dî » est un développement anormal de la racine NÎ sous l’influence de dîr. Comment ce mot muterait-il ?
Des Etymologies, il ressort donc que l’histoire de cette famille de mots est compliquée et implique des influences mutuelles (c’est aussi le cas en quenya). Pour tous ces mots, le Dictionnaire Sindarin de Didier Willis – qui repose sur une analyse complète des données disponibles, et pas seulement sur les Etym - propose des étymologies en ND-, qui impliquent qu’ils seraient soumis aux mutations « spéciales ».
J’utiliserais ce système si j’avais à employer ces mots. Mais personnellement, j’éviterais ces formes – d’ailleurs signalées comme archaïques - et utiliserais plutôt « bess » et « benn », qui ne posent pas de problèmes particuliers.

Note sur les collectifs : ce que j’ai écrit plus haut ne signifie pas que je n’emploierais jamais d’article avec un mot affecté du suffixe –ath. Il me semble simplement que dans les cas qui se présentent ici, les mots ont un sens collectif fort ; ils sont « auto-définis » et ne nécessitent donc pas l’article. Je peux très bien me tromper !

Note sur la syntaxe : comme nous avons très peu de textes sindarins, bien des points de syntaxe restent obscurs. Néanmoins, il existe des arguments qui me semblent valables selon lesquels le Sindarin serait une langue VSO – c’est à dire que l’ordre préférentiel serait Verbe – Sujet – Objet (messages sur Elfling, n° 6374 et suivants, Octobre 2001). Préférentiel, pas obligatoire : dans l’inscription des portes de la Moria, nous avons SOV et SVO ; mais selon cette « théorie VSO », ces phrases mettraient l’accent sur le sujet. Il serait donc peut-être plus naturel, ou plutôt plus neutre, d’écrire ici au vers 2 : « Nallant i nîs im Eglath ». Au risque de me répéter, tout ceci est hypothétique.

Toutes mes remarques, d’ailleurs, sont à prendre avec les réserves d’usage : ceci est une interprétation (plus ou moins) personnelle !

Nai Anar caluva tielmanna !

Moraldandil

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#4 10-02-2002 15:46

Moraldandil
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Re : Dans la série 'poèmes en sindarin'...

> Comme Toko, j’éviterais donc « o » ici… mais personnellement, je n’utiliserais pas d’article devant ennorath : il s’agit d’un collectif déjà défini par lui-même (cf. « o galadhremmin ennorath » dans A Elbereth Gilthoniel), mais simplement la juxtaposition.

C'est déjà passablement compliqué... mais là, ça devient franchement incompréhensible !

Lire : Comme Toko, j’éviterais donc « o » ici… mais personnellement, je n’utiliserais pas d’article devant ennorath : il s’agit d’un collectif déjà défini par lui-même (cf. « o galadhremmin ennorath » dans A Elbereth Gilthoniel). J'emploierais simplement la juxtaposition.

Nai Anar caluva tielmanna !

Moraldandil

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