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Le Silmarillon a été l’obsession de JRR Tolkien. Maintes fois écrit, réécrit, retouché, retravaillé (les deux tiers des HOME traitent du Silmarillon), il n’a jamais été publié du vivant de l’auteur.
Telle un arlésienne, pourtant, il a été annoncé à de nombreuses reprises comme nous l’indiquent les Lettres. Après le Hobbit, le professeur voulut le faire publier, et après-guerre, il demanda sa sortie à son éditeur au même moment que le Seigneur des Anneaux. Pourtant rien n’y fit.
Dès la publication du Seigneur des Anneaux, à lire le roman, il est clair que le Silmarillon existe. Le préambule du SdA précise que ce livre n’est qu’une partie d’une plus vaste œuvre littéraire et dans l’appendice A, Tolkien cite explicitement le Silmarillon et en donne même un bref résumé.
Toutefois, plus de 15 ans après la publication du SdA (déjà tardive vis-à-vis de l’essentiel de la composition du roman), les fans du professeur se languissaient toujours.
A look behind the Lord of the Ring, de Lin Carter, est le, ou l’un, des premiers livres consacré à l’étude du SdA, publié en 1969 du vivant de l’auteur. Si le contenu est très daté et peut prêter à sourire maintenant, on peut y lire une évocation du Silmarillon et plusieurs hypothèses sur son contenu envisagé comme une préquelle au Seigneur des Anneaux.
Si Christopher Tolkien n’avait pas publié le Silmarillon à la mort de son père, on aurait pu, tel Lin Carter en rester à des suppositions. Quoique …
A y regarder de plus près, oubliant tout ce qu’on sait de la lecture du Silmarillon et de tout ce qui a été publié de façon posthume, en se mettant dans la peau d’un lecteur américain des années 60 ou d’un lecteur anglais à la sortie du livre en 54-55, il y a moyen d’en savoir beaucoup plus. Il y a moyen de démentir cette phrase qui clôture l’introduction des chronologies : « au Quatrième Age, on dénommait Jours Anciens ces temps lointains : toutefois, ce terme désignait en propre l’époque qui avait précédé la défaite de Morgoth. On ne relatera pas ici les récits de ces temps ».
Le SdA, ou le Hobbit dans une moindre mesure, est imprégné de multiples références au Silmarillon, au point de pouvoir en reconstituer la trame et toute l’essence. C’est ce que je vais présenter.
Au moyen du seul SdA comme source, je présenterai d’abord la chronologie des Jours Anciens telle qu’on peut la reconstituer. Puis j’étudierai les témoignages de ces jours anciens, les témoins et la façon dont les récits du 1er Age sont retranscrits dans le SdA, pour finir par une comparaison entre les Jours Anciens tels qu’ils figurent dans le SdA et le Silmarillon publié.
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Chapitre 1 : chronologie des jours anciens
I- "Quand le monde était jeune"
Les récits les plus anciens de l'histoire de la Terre du Milieu nous viennent des témoignages de Tom Bombadil et de Fangorn, deux des personnages les plus vieux lors du récit du SdA.
A en croire Tom, la terre était jadis nue et il n'y avait rien (Tom était ici avant la rivière et les arbres; Tom se souvient de la première goutte de pluie et du premier gland - FdA p177).
Ils expliquent qu'au début, seuls les elfes étaient éveillés et il n'y avait pas de peur associée à la nuit. Les anciens elfes réveillèrent alors les ents et leur apprirent à parler. Ils avaient une soif de parole, d'enseignement et sans doute la fougue de la jeunesse à en croire Fangorn. (2T p 82 - Gandalf toutefois inverse l'arrivée des Elfes et des Ents précisant qu'ils parcourraient la terre avant que les elfes ne chantent)
Cette époque est marquée par les étoiles, Tom évoque avec plaisir le souvenir des étoiles de cette époque (FdA p 176 et 177), étoiles que l'on retrouve dans le chant des elfes de Gildor au début du roman (FdA p 110).
Le monde était couvert de vastes forêts (il fut un temps où un écureuil pouvait aller d'arbre en arbre de la Comté jusqu'en Dunlande - FdA p 339). Il était aussi plus vaste, notamment vers l'ouest, terres à présent sous les eaux (2T p 83)
Puis le premier malheur arrive avec l'arrivée de la "Grande Obscurité", l'arrivée du "Seigneur Sombre venant de l'Extérieur".
II - La "Grande Obscurité"
Première période de malheur où les Elfes fuient à l'ouest, au-delà de la mer ou se cachent dans de lointaines vallées.
Cette période correspond à l'arrivée du "Seigneur Sombre" ou "Grand Ennemi". L'origine et la cause de cette grande obscurité restent hypothétiques.
On apprend que ce seigneur sombre vient de l'"extérieur". Pour ce qui est de cet "extérieur", on sait que Sauron lui-même n'est pas originaire de la Terre du Milieu : il s'agit soit d'une autre partie du monde (sans doute pas les terres occidentales qu'on dit peuplées d'elfes), soit encore d'au-delà du monde, avec peut-être un lien avec le séjour des morts (cf. le destin de Beren et Luthien, FdA p 255).
Qui est ce « Grand ennemi » ? Pas Sauron qui n’en était qu’un serviteur, mais son maître. Morgoth se nomme-t-il, nous apprend Legolas.
Il fit sa résidence au nord de la TdM, dans une grande forteresse, appelée Angband ou Thangorodrim, forteresse dont la chute déterminera la fin des Jours Anciens selon l’une des annexes au SdA.
Morgoth corrompit Sauron et le mit à son service (même Sauron n’était pas mauvais au début), ainsi que les Balrogs (un Balrog de Morgoth).
Cette « Grande Obscurité » peut se résumer par une haine du vivant, dont on trouve des traces dans les sombres recoins de la forêt de Fangorn ou dans des arbres au cœur pourri, tel le vieil homme saule.
Cette arrivée eut de nombreuses conséquence : une perte de l’innocence et de la jeunesse et l’arrivée du sentiment de peur pour les habitants de la Terre du Milieu (l’obscurité était sans appréhension (auparavant) selon Tom), ainsi que la fuite des Elfes.
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A vrai dire, cette question est partiellement traitée — principalement sous l'angle linguistique — dans An Introduction to Elvish and to Other Tongues, Proper Names and Writing Systems of the Third Age of the Western Lands of Middle-Earth as Set Forth in the Published Writings of Professor John Ronald Reuel Tolkien de Jim Allan et al., compilé peu de temps avant la parution du Silm. et paru immédiatement après sans tenir compte des nouvelles données contenues dans le Silm.
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III- L'Ouest
A l’arrivée de la Grande Obscurité, il y a une première séparation parmi les Elfes, qui prendront alors un destin différent.
Une partie s’enfuit dans de lointaines vallées et se réfugie dans la nostalgie de leur jeunesse (et ils se sont cachés, chantant des jours qui ne seraient jamais plus – 2T p 82).
Les autres Elfes passèrent au-delà de la mer.
Pour les premiers, on n'en reparlera plus dans l’évocation des jours anciens (Enfuis dans de lointaines vallées et réfugiés dans la nostalgie de leur jeunesse nous dit Fangorn).C'est pourtant dans ce même état d’esprit que seront devenus tous les elfes du 3e âge présentés dans le récit du SdA : coupés volontairement du monde, réfugiés dans le passé, que ce soit par nostalgie ou même physiquement si l’on songe à la Lórien. S’agit-il de ces premiers elfes-là, j’en doute, car on apprendra que les elfes du 3e âge sont des exilés et ont le languir de la mer et de l’ouest, choses que n’ont pas connus ceux-là.
Pour les autres Elfes, autant qu'on l'imagine la grande majorité, leur destin sera tout autre, grandiose. Ils passèrent au-delà de la mer.
On en apprend un peu sur cette autre terre à l’ouest au-delà de la mer, appelée Eldamar, Valinor ou le royaume béni. Quelques bribes de géographie avec aux moins deux terres ou îles distinctes, Eressëa et Eldamar. Et au sein de cette dernière des noms de lieux et de ville, tels la colline d'Ilmarin, Tirion ou le Calacirion, ainsi qu'une ou des hautes montagnes escarpées.
Certains détails sont évoqués plusieurs fois dans le SdA, ce qui signifierait qu'ils ont eu une certaine importance dans le récit des jours anciens. Tirion, sans doute une ville ou la capitale, et deux arbres, Telperion et Laurelin.
On décrit ces deux arbres brillants, sans doute bien plus majestueux que l'arbre blanc de Minas Tirith dont ce dernier est un descendant (par Telperion). Mais on les décrit surtout au passé et avec nostalgie et tristesse.
Ce qui m'a frappé dans le SdA au sujet de ces deux arbres, ce sont les deux personnages qui nous en parlent, Galadriel et Gandalf, excusez du peu, des meneurs d'hommes, les deux rocs les plus solides du roman. Et pourtant, c'est à l'évocation de ces arbres qu'on les voit, pour la seule et unique fois, émus, sans doute pleurant intérieurement. Gandalf, de plus, était prêt de faillir à sa mission et à se servir du Palantir pour son propre compte pour revoir la jeunesse des arbres. Les deux arbres ne sont que très vaguement évoqués dans le SdA, cependant, par ces réactions, je pense qu'il a dû se passer un des événements les plus tragiques des jours anciens au sujet de ces arbres.
Les elfes ont acquis une grande technique à l'Ouest. Ils ont créé les Palantir par exemple. On évoque le nom de Fëanor, comme celui d'un grand artisan, un lettré également (cf. la porte de la Moria). Ils ont sans doute appris à créer des armes et à se battre, car on quitte des pères des Elfes contemplatifs, éveillant les arbres, créant les mots et adeptes du verbe pour retrouver des elfes guerriers à leur retour en Terre du Milieu (cf. le descriptif d'Aragorn de la guerre des joyaux et descriptif d’Elrond sur la Grande bataille).
D'où ou de qui ont-ils tiré cette technique? Rien n'est dit à ce sujet.
Les nains ? Sans doute pas, rien n’indique qu’un seul nain, avant Gimli, ait passé à l’Ouest.
Sauron ou son maître, tel que Sauron a enseigné aux elfes de l'Eregion pour la confection des anneaux ? Pourtant on nous décrit un noir ennemi arrivant en Terre du Milieu et des elfes fuyant à l'ouest en conséquence. Je ne les vois pas accueillir celui-là même qu'ils ont fui.
D'autres êtres alors ? Peut-être ceux que les elfes louent dans leurs chants, Elbereth, les Valar ... Rien n'est dit là-dessus ni sur la nature de ces derniers. Ils sont évoqués dans des prières (Puisse le valar détourner l’oliphant supplie Damrod), Gandalf évoque les trônes des Valar au couronnement d’Aragorn, Bilbo dans le poème d’Eärendil évoque un « roi ancien » sur la montagne escarpée, et la chevauchée de Theoden devant Minas Tirith est comparée à « Oromë le grand à la bataille des Valar ». On évoque là des êtres puissants, régnant, mais physiquement absents dans le récit du SdA. Sans doute des dieux ou bien des ancêtres déifiés. Mais sur ce dernier point nous sont décrits de nombreux héros (Tuor, Húrin, Eärendil …) présentés explicitement comme des hommes ou des elfes, leur nature doit donc être différente.
IV- Les nains et les hommes
Et pendant ce temps-là ?
Nous n’avons pas encore parlé des nains ou des hommes.
Pour les nains, rien de mieux qu’un autre nain pour en parler.
Gimli nous parle de leur origine, avec l’éveil de Durin. Une génération spontanée donc. Leur origine est ancienne, « la lune était sans tache et aucun mot n’était posé sur les rivières et les pierres ».
Aucun mot ? Les nains seraient apparus avant les elfes, dont on dit plus haut qu’ils sont à l’origine du langage ? J’ai peine à y croire. J’y vois ici une erreur chronologique volontaire.
Gimli évoque dans la suite de son poème des villes, dont Gondolin que l’on sait habitée par des elfes (les lames de Thorin, Gandalf et Bilbo ont été créées par les elfes de Gondolin nous apprend le Hobbit).
Bref, on apprend donc que les nains sont apparus aux Jours Anciens et en Terre du Milieu. Quant à la suite de leur histoire, pas grand-chose, si ce n’est la rencontre malheureuse avec un Balrog et un conflit récurrent avec les orques.
Les hommes.
Les hommes dormaient encore quand sont arrivés les elfes. Aragorn évoque les enfants des hommes avant les années sombres comme joyeux, chantant beaucoup de chansons (cf. p 36 2T). Si ces « années sombres » correspondent à la « grand obscurité », les hommes seraient donc apparus aux jours anciens, juste avant l’arrivée de Morgoth.
Pour la suite, ce sont des années de malheur pour certains hommes (cf. les Druadan, p85, RdR) ou des années de guerre contre l’Ennemi avec de nombreuses descriptions d’actes héroïques. Trois maisons d’homme ont combattu au côté des elfes aux Jours Anciens, Faramir y fait référence lors qu’il parle des Rohirim. On a un récit détaillé des exploits de Beren, face à Sauron, Morgoth ou Ungoliant, l’ancêtre d’Arachne. De même pour Eärendil ou par allusion Tuor ou Turin.
Il est intéressant d’ailleurs de signaler que les récits des exploits du premier âge soient presque uniquement ceux d’hommes (pas d'elfe ou de nain). Exploits individuels pour une défaite collective des peuples libres.
V- La guerre
A l'origine de ces années de guerre, Aragorn nous apprend que les elfes (ou des elfes) reviennent en Terre du Milieu pour reprendre un bijou à Morgoth. La suite chronologique est une série de batailles, de défaites, chutes de cités, Nargothrond, Gondolin et toutes les terres citées par Fangorn.
Enfin, l’on apprend que finalement Morgoth fut vaincu, par une armée elfe en bannières blanches et que sa forteresse du Thangorodrim fut mise à bas. Mais peu d’éléments nous sont indiqués sur ce revirement de situation et sur cette réapparition soudaine des elfes en majesté, ni sur ce qu’ils sont devenus.
Elrond décrit ces elfes victorieux comme la plus grande armée qu’il y ait eu, belle et puissante. Et pourtant, les terres du Beleriand sombrèrent et l’on ne retrouve plus trace ensuite, dans le descriptif des 2e et 3e âge d’un royaume elfe tout puissant. Tout au plus, quelques principautés locales en Eregion, aux Havres Gris, chez Elrond ou en Lórien, mais pas de trace de cette puissance décrite par Elrond pour cette guerre de la grande colère. Ces elfes sont sans doute repartis, vers l’Ouest assurément.
Ainsi se terminent les Jours Anciens.
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Chapitre 2 : qui parle ?
I- Ceux qui parlent
Ces témoignages des jours anciens proviennent de deux sources : les témoins de cette époque et les maîtres en tradition.
Ces témoins sont Tom, Fangorn, Gandalf et dans une moindre mesure Elrond et Galadriel.
Ces trois premiers ont pour point commun d’être restés fidèles à eux-mêmes. Ils nous parlent essentiellement de leur jeunesse en mettant en parallèle leurs souvenirs et leur point de vue sur le fonctionnement et l’évolution du monde actuel avec beaucoup de nostalgie dans l’évocation de leur passé.
Pour Elrond et Galadriel, les évocations sont beaucoup plus lacunaires, le récit d’une bataille pour Elrond et quelques vagues allusion à Valinor, ainsi que le fait qu’elle ait passé les montagnes il y a longtemps pour Galadriel, mais aucun point de vue personnel sur l’évolution du monde.
Les autres sources nous viennent des maîtres en tradition, Aragorn, Faramir, Bilbo, Frodo et Sam, et Gimli pour ce qui concerne les nains. A cela, rajoutons le narrateur, c’est-à-dire Bilbo, Frodo et Sam. On a de leur part un récit, des chroniques, surtout des faits d’armes ou des exploits héroïques, jamais de point de vue personnel. Leurs sources viennent probablement d’Elrond pour Aragorn et les hobbits et des traditions issues de Númenor pour Faramir.
On a droit à des récits ponctuels sur une action ou un exploit particulier de la part de ces derniers, tandis que les récits des témoins des jours anciens sont une évocation beaucoup plus large, une sorte de Genèse résumée en quelques lignes : d’où venons-nous ?, où allons-nous ? d’où vient le Monde ? comment a-t-il été créé ?
Ces réponses à des questions fondamentales viennent dès les premiers échanges avec Tom et Fangorn.
Ceux qui les interrogent sont toujours des hobbits. On savait leur curiosité et leur passion sur la généalogie, on en a un témoignage très clair.
Que demandent-ils à Tom ? : comment ça va ?, quel temps fait-il chez vous ? Non, les premières questions sont : qui es-tu ?, d’où viens-tu ? d’où vient le Monde ?
Pippin récidive avec Gandalf et lui demande toute l’histoire de la Terre du Milieu, des Hauts firmaments et des mers séparatrices.
Ils sont sans doute très persuasifs pour obtenir toutes ces réponses dès les premières lignes des conversations avec ces grands anciens.
Les seuls à se taire sont les elfes.
II- Ceux qui ne parlent pas
Ce n’est pas faute au pouvoir de persuasion des hobbits qui ont réussi à vaincre la carapace de Gandalf. Pourtant, tous les elfes rencontrés restent pratiquement muet sur le 1er âge.
Tout juste quelques allusions à leur exil pour Gildor, à son passage à l’est des montagnes pour Galadriel ou la dernière bataille victorieuse pour Elrond. Rien sur tout le reste, leur naissance, l’arrivée de Morgoth, leur passage dans l’ouest, leur retour, la guerre des joyaux, rien.
Pourquoi ?
Cette omerta n’est pas neutre, on rencontre plusieurs témoins elfes dans le récit qui restent tout autant muets. Pourquoi les elfes sont revenus en Terre du Milieu, quel est donc cet exil dont parle Gildor, pourquoi les elfes, malgré leur puissance, se sont fait balayer par l’ennemi, là où un homme seul, Beren, parvient à vaincre Morgoth ?
Quel pêché originel a pu se produire pour qu’aucune information sur l’action et le rôle des elfes au 1er âge ne filtre dans le roman ?
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chapitre 3 : comparaison avec le Silmarillon publié et conclusion
La comparaison avec le Silmarillon publié montre une chronologie globalement similaire : « naissance » des elfes, puis des nains et des hommes, départ des elfes, retour, batailles contre Morgoth, destins particuliers de Beren et Eärendil, grande bataille et chute de Morgoth.
Les principales différences sont l’absence de ce qui se passe avant la naissance des elfes et ce qui se passe à Valinor.
Rien d’étonnant à cela, la description des jours anciens dans le SdA provient des récits des témoins de cette époque ou de descendants de héros du 1er âge. Nulle trace donc des absents. Le SdA est surtout un récit écrit par les hobbits et présente donc l’histoire du point de vue des hobbits. Par ailleurs, les récits des jours anciens issus des traditions elfiques présentés par Bilbo et Aragorn ont peut-être été édulcorés du rôle trouble des Noldor.
Pas de trace donc de la création du monde, des Valar, de Valinor, des Arbres, ni quasiment rien des batailles des elfes ou des malheurs de Turin.
Rien sur Turin, ni sur Feänor ou ses fils. Rien sur ceux qui sentent le soufre. On reste sur une version malheureusement édulcorée des jours anciens.
Le SdA donne une version juste et détaillée des jours anciens, mais sans sa mythologie, ni ses tragédies. La lecture du Silmarillon reste indispensable pour en saisir tout le sel.
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Salut Gilles, merci pour ce partage et bravo pour avoir été jusqu'au bout de ce projet
Effectivement, tout ceci met en lumière la profondeur du récit du Seigneur des Anneaux, grâce en partie à cet arrière plan mytho-historique, dont seule une partie - et une partie à l'avantage des Eldar et des Edain - n'est dévoilée par les protagonistes maîtres du savoir.
Outre le Silmarillion, il y a un foisonnement d'allusions relatives à des périodes historiques plus récentes, dont les événements ont été compilés dans les Contes et Légendes Inachevés.
Tu te sens assez chaud de poursuivre l'exploration ?
Elendil > Comme celui de Lin Carter, le bouquin de Jim Allan doit être bien "daté", mais c'est surement intéressant et éclairant d'avoir le point de vue à un temps donné d'auteurs qui enquêtent sur le fond mythique du SdA, mais sans avoir toutes les clés. Une situation à laquelle a pu être confronté Francis Ledoux, en tant que traducteur
I.
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Le livre d'Allan est daté, certes, mais c'est justement son intérêt : il donne une vision exhaustive des langues inventées ou utilisées par Tolkien en utilisant uniquement les données publiées de son vivant.
Petite précision : il n'est rien dit des malheurs de Túrin dans le SdA, mais le rôle ambivalent de Fëanor est abondamment expliqué dans l'Appendice A du SdA, section « Númenor » :
Fëanor was the greatest of the Eldar in arts and lore, but also the proudest and most selfwilled. He wrought the Three Jewels, the Silmarilli, and filled them with the radiance of the Two Trees, Telperion and Laurelin, that gave light to the land of the Valar. The Jewels were coveted by Morgoth the Enemy, who stole them and, after destroying the Trees, took them to Middle-earth, and guarded them in his great fortress of Thangorodrim. Against the will of the Valar Fëanor forsook the Blessed Realm and went in exile to Middle-earth, leading with him a great part of his people; for in his pride he purposed to recover the Jewels from Morgoth by force. Thereafter followed the hopeless war of the Eldar and the Edain against Thangorodrim, in which they were at last utterly defeated. [...] Earendil wedded Elwing, and with the power of the silmaril passed the Shadows and came to the Uttermost West, and speaking as ambassador of both Elves and Men obtained the help by which Morgoth was overthrown.
On peut donc rajouter l'opposition de Fëanor à la volonté des Valar, un bref résumé des guerres des Joyaux, le rôle crucial d'Eärendil comme intercesseur et l'intervention (sous-entendue) des Valar pour renverser Morgoth, sans parler d'un résumé plus complet encore de l'Akallabêth. Bref, le synopsis correspond précisément au Silm. publié, exception faite de l'Ainulindalë et du Valaquenta. Seuls certains personnages majeurs, mais sans influence sur les Âges futurs, sont entièrement omis, tels Fingolfin.
Elendil
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Grand merci cher Tar Palantir
voici un angle de vue tout à fait original et intéressant. Bravo.
J'aurais plutôt considéré Galadriel parmi les témoins d'époque et Elrond seul parmi les maitres de tradition (éventuellement avec les archivistes du Gondor)
Saroumane pourrait aussi faire partie des témoins des temps anciens.
Enfin, que dirais-tu d'un petit chapitre sur les artefacts des temps anciens ? Tu as cité les épées forgées en Gondolin, mais il y a aussi l'anneau de Barahir, la pierre d'Erech, l'Elessar et les Palantiri, voire la Fiole de Galadriel (qui contient la lumière de l'étoile d'Eärendil)
Silmo
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Pour répondre à Elendil, l’appendice A donne un résumé du rôle de Fëanor dans le Silmarillon. Mais ni l’appendice A, ni l’ensemble du Seigneur des Anneaux ne précisent l’élément déclencheur à l’origine de la guerre des joyaux.
Pourquoi les Silmarils ? Quelle importance ont les Silmarils ? Rien n’apparaît à ce sujet dans le SdA.
Pour moi l’élément central du Silmarillon est la lumière des Deux Arbres, que je qualifierai de « feu divin ».
A Valinor, toute était fonction des Deux Arbres, le décompte des années, le cycle jour-nuit et ce qui s’apparente à une religion avec les cultes rendus aux Arbres.
A la mort des Arbres, ce feu s’est éteint et par là les Valar eux-mêmes se sont éteints. Ils ne se battront plus contre Morgoth, ils n’agiront plus et ils disparaissent en tant qu’acteurs dans le Silmarillon à partir de ce moment.
Les Silmarils seront le dernier refuge de ce feu divin, feu qui va détruire tous ceux qui vont les convoiter.
Fëanor meurt littéralement consumé.
Morgoth lui-même sera défiguré lors qu’il s’empare des Silmarils.
La Terre du Milieu sera le lieu d’une guerre sans fin jusqu’à la submersion d’une partie des terres.
Gondolin, Nargothrond … périront sous les flammes.
Et l’ensemble des elfes se consumera peu à peu. Leur fougue, leur jeunesse va s’effacer pour devenir des êtres contemplatifs et effacés du monde.
Il aurait été intéressant de présenter les jours anciens sous l’angle de ce feu divin, comment les dieux l’ont perdu, comment le monde s’est brûlé et s’est perdu à vouloir s’en emparer.
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