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Pour une raison qui m'échappe, l'information n'a pas également été diffusée ici par Elendil... Je me permets donc de citer ici son message de ce jour, posté sur le forum d'à côté.
Il y aura apparemment une assez vaste exposition consacrée à Tolkien en Italie, à la Galleria Nazionale di Roma, si l'on en croit cet article d'Artribune ou ce billet de I Musei di Roma. Cette exposition devrait être inaugurée le 15 novembre, mais n'est pas encore annoncée sur le site officiel de la Galleria Nazionale di Roma. Les commissaires de l'exposition sont Alessandro Nicosia et Oronzo Cilli. Ce dernier est bien connu dans le milieu tolkienien, notamment pour son ouvrage Tolkien's Library: An Annotated Checklist.
Incidemment, l'exposition doit être inaugurée par la première ministre italienne, Giorgia Meloni, qui se dit depuis longtemps admiratrice de l'œuvre de Tolkien. (Et pour remettre un peu de contexte sur la récupération politique de Tolkien par l'extrême-droite italienne ainsi que sur la politique culturelle actuelle de Meloni, on pourra lire cette tribune très critique de Jamie Mackay dans The Guardian.)
Peace and Love,
B.
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Pour les événements, j'avoue que j'ai tendance à considérer que les lecteurs de JRRVF passent suffisamment souvent sur Tolkiendil pour qu'il ne soit pas nécessaire de répéter ces informations ici (même si je tire mon chapeau à Isengar pour l'excellente tenue du fil d'actualité de JRRVF).
E.
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Je n'avais pas lu ce fuseau ni l'info sur Tolkiendil alors que j'écrivais ce matin en partie sur ce sujet ;-)
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la manière dont une certaine presse française en rend compte est consternant : voir cet article du huftington qui prend soin de sélectionner les "experts" Tolkien (1) et leurs arguments - je n'avais jamais entendu parler de cette collègue pour qui "Aragon, est moitié Elfe et moitié homme." -, la même (seule) citée par cet article de l'express. ou comment publier deux articles hors sol.
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Concernant l'exposition italienne consacrée à Tolkien à la Galleria Nazionale di Arte Moderna e Contemporanea de Rome, le traitement médiatique dont elle fait l'objet et les commentaires que tout cela suscite, il y aurait sans doute beaucoup à dire, mais je vais essayer d'être concis.
la manière dont une certaine presse française en rend compte est consternant : voir cet article du huftington qui prend soin de sélectionner les "experts" Tolkien (1) et leurs arguments - je n'avais jamais entendu parler de cette collègue pour qui "Aragon, est moitié Elfe et moitié homme." -, la même (seule) citée par cet article de l'express. ou comment publier deux articles hors sol.
S'agissant de « cette collègue » que tu mentionnes, Vincent, rappelons en ces lieux (même si cela a déjà été dit par d'autres sur le forum de Tolkiendil) qu'il s'agit de Marylin Maeso, dont nous avons pu lire les réponses à un entretien qu'elle a accordé l'année dernière pour le hors-série de Philosophie Magazine intitulé « Le Seigneur des Anneaux. Tolkien et son mythe » et qui a son fuseau dédié, fuseau dans lequel j'avais fait part de mon intérêt particulier pour cet entretien, notamment dans un message du 24 août 2022.
J'ai lu, Vincent, tes précisions du 16 novembre dernier sur le forum de Tolkiendil : « je voulais dire que cette personne est complètement en dehors du (grand et accueillant ) cercle des lecteurs et commentateurs - et que ne pas discuter avec ses pairs n'est jamais bon scientifiquement parlant ». Je comprends ce que tu veux dire, mais j'avoue que je ne sais pas si reprocher à des lecteurs de Tolkien de s'exprimer sur cet auteur bien qu'ayant une certaine notoriété médiatique pour des activités (leurs activités principales) sans rapport avec Tolkien, est forcément de nature à laisser penser que ce que j'appelle la planète Tolkien serait toujours très accueillante. Que des intervenants « extérieurs au cercle » puissent dire des choses approximatives voire fausses sur Tolkien, c'est une chose, mais laisser entendre qu'il faudrait en quelque sorte « consulter les experts » avant de parler d'un auteur que l'on a pris le temps de lire par soi-même et sur lequel on a tout de même acquis des connaissances (même si elles pourront toujours être jugées plus ou moins approfondies), à mon avis c'est autre chose. Bien entendu, un journaliste devant faire un papier sur Tolkien devrait toujours penser à consulter des spécialistes de l'écrivain (ou à lire leurs écrits), mais demander son avis à Marylin Maeso ne me choque pas, même si, à mon avis, s'agissant de tous les articles où on la cite, elle a très bien pu accepter de répondre à des questions simplement parce que les journalistes ont ses coordonnées dans leurs carnets d'adresses, et sans qu'elle ait cherché à se faire passer pour une experte de Tolkien, du moins à ce qu'il me semble. Aussi bien pourrait-on lui proposer d'en discuter un jour, comme avec Joann Sfar... Par ailleurs, le fait que Marylin Maeso soit une spécialiste d'Albert Camus me parait être un atout pour apporter un regard différent sur Tolkien que celui d'un médiéviste antimoderne ou d'un théologien, ce qu'avait bien montré l'entretien pour le hors-série de Philosophie Magazine.
Concernant le premier article que tu as signalé ici, celui du HuffPost daté du 15 novembre et intitulé « Italie : Giorgia Meloni inaugure une exposition sur Tolkien, et c’est loin d’être un détail », son principal défaut est qu'il ne parle pas de l'exposition en elle-même, sauf pour dire qu'elle est financée à hauteur de 250 000 euros par le ministère italien de la Culture ; le second article mentionné, celui de L'Express (« Races, Elfes noirs et famille : pourquoi "Le Seigneur des anneaux" passionne l'extrême-droite »), daté du 8 octobre de l'année dernière (2022) étant lui bien antérieur à l'annonce de l'ouverture de ladite exposition. Bien entendu, leur point commun est l'intérêt médiatique que suscite avant tout la récupération politique dont fait l'objet Tolkien par les représentants d'un certain nationalisme « post-fasciste » en Italie, nationalisme dont j'ai rappelé, ailleurs l'été dernier, que feu Berlusconi porte, avec d'autres dans ce pays, une lourde responsabilité dans sa banalisation au fil des décennies.
Pour essayer de s'en tenir à l'exposition, j'ai regardé les reportages, relayés sur le réseau d'Elon M. et signalés aussi sur Tolkiendil, du ministère italien de la Culture (https://twitter.com/MiC_Italia/status/1 … 2685888819) et de TG2, le journal télévisé de la Rai 2 (https://twitter.com/Terra2itter/status/ … 6422348230)... mais que dire ? Les images filmées ne montrent finalement que peu de choses de l'exposition, tandis que le petit personnage (politiquement parlant) qu'est l'actuel ministre de la Culture italien profite de l'occasion d'une inauguration d'expo médiatisée au niveau national pour essentiellement parler des vertus qu'il trouve aux "vraies valeurs", notamment de la bonne vieille Tradition. Posture assez classique du conservateur voulant suivre la "méthode Gramsci" en matière d'influence idéologique. De fait, c'est ce ministre, Gennaro Sangiuliano, qui a eu l'idée, parait-il, de cette exposition, laquelle ne pouvait que plaire à l'actuelle présidente du Conseil des ministres d'Italie dont la tolkienophilie est maintenant bien connue. Je note par ailleurs que visiblement Oronzo Cilli ne déteste pas faire visiter l'exposition à Giorgia Meloni, lors de cette inauguration du 15 novembre dernier, du moins à ce qu'il me semble, mais on se gardera cependant de surinterprétrer les images des caméras...
Toujours est-il que pour avoir enfin une idée du contenu de cette exposition, on pourra par exemple consulter un compte rendu de visite par Silvia Torrioli, mis en ligne dimanche dernier, 26 novembre, sur le site culturel italophone The Parallel Vision : https://theparallelvision.com/2023/11/2 … e-tolkien/
« Si lascia la galleria con un senso di amarezza e delusione » (« Vous quittez la galerie avec un sentiment d'amertume et de déception »), écrit notamment Silvia Torrioli.
Passons à autre chose, à présent... encore que cela ne soit pas vraiment le cas, car là aussi l'idéologie peut tendre à pointer le bout de son nez...
Elendil a écrit :Hyarion a écrit :Il se trouve, en tout cas, que ladite planète [Tolkien] a tout récemment été confronté[e] à la « question » [de la « guerre culturelle » entre conservateurs et progressistes], à l'occasion du tout récent séminaire estival de la Tolkien Society, précisément dédié au thème “Tolkien and Diversity”, séminaire en ligne très intéressant auquel j'ai pu assister le week-end dernier (malgré une connexion Internet instable), et dont je pourrai éventuellement partager quelques impressions ici, en passant, si jamais cela intéresse quelqu'un...
Je n'y ai pas assisté et je serais bien intéressé par un compte-rendu, si tu acceptes d'en écrire un.
Entendu, je partagerai ce que je peux ici, d'autant plus qu'il y a un rapport direct au moins en partie avec le contenu de nos échanges ici... mais bon, pas cette nuit : j'ai assez veillé ! ^^'
Le temps me manque, encore cette nuit, pour évoquer comme il se doit le dernier séminaire estival de la Tolkien Society... Je tâcherai de le faire dès que possible, d'autant plus que si le site de la TS propose heureusement, sur la page dédiée, des présentations et/ou résumés des interventions faites lors des deux jours de conférences, il se trouve que le résumé de l'une de ces interventions (celle de Christopher Vaccaro) est curieusement manquant, remplacé en fait par un texte n'ayant rien à voir avec le sujet exposé lors du séminaire...
P.S.: tout autre chose, au passage... en juillet dernier, dans le présent fuseau, j'avais écrit que je partagerai mes impressions concernant le séminaire estival en ligne de la Tolkien Society dédié au thème “Tolkien and Diversity”... Le temps a passé, et j'avoue que la motivation a fondu, comme pour bien d'autres choses, dans ce monde absurde... mais bon, sait-on jamais, j'y reviendrai peut-être, en marge de mes travaux d'écriture toujours en cours...
À défaut de véritable compte rendu, signalons au moins in fine la publication en recueil, réalisée en mai dernier chez Luna Press Publishing, des actes du séminaire d'été de 2021 de la Tolkien Society, sous le titre Tolkien and Diversity et éditée par Will Sherwood : https://www.tolkiensociety.org/store/to … diversity/
Toutes les interventions programmées lors de ce séminaire en ligne n'y figurent pas, en particulier celle de Christopher Vaccaro (“Pardoning Saruman?: The Queer in Tolkien’s The Lord of the Rings”) qui n'avait pas même fait l'objet d'un résumé correspondant au propos de l'auteur sur le site de la TS (comme je l'avais déjà signalé), et il manque aussi les commentaires ayant suivi les interventions à l'époque, commentaires assez révélateurs parfois d'une certaine effervescence idéologique (autour de ce que l'on a pu appeler le « wokisme », pour le dire vite) plus ou moins sous-jacente derrière la thématique générale.
Pour donner seulement une petite idée de l'approche de certaines des contributions (au contenu varié dans leur ensemble), je me permets de citer un passage de l'intervention de Nicolas Birns (“The Lossoth: Indigeneity, Identity, and Antiracism”, finalement publiée dans le recueil sous le titre “The Lossoth: Indigeneity, Representation, and Antiracism”), dans lequel l'auteur s'était permis de citer en référence (à la grande satisfaction, manifestée dans des commentaires en ligne, de certaines personnes du public) un intellectuel afro-américain, Ibram X. Kendi, qualifié de « prof d'antiracisme » en 2020 dans le journal Le Monde :
Rendering non-white people as visible in the sphere of whiteness without extreme or visible racism, as Tolkien did in representing the Lossoth, is an achievement. Is that enough? Not at all. Tolkien had no interest in the Lossoth other than in this particular scene [in Appendix A of The Lord of the Rings (RK, Appendix A, I, iii)]. The representation of the Lossoth still is inhabited by condescension and white privilege. Ibram X. Kendi has contented that racist postures are “detached” from ascribed identity ([Kendi, Ibram X, How To be An Antiracist] 2019, 200). Thus there are no racist or antiracist people, that “we can be a racist one minute and antiracist the next” ([Ibid.], 10). Therefore it might be plausible to say that it is the racism or antiracism inherent in the act of reading which is more relevant for us, than the racism or antiracism of the texts themselves. Texts, though, are not people. The most antiracist reading cannot make a racist text antiracist. But it can arguably problematize the racism within that text.
Nicolas Birns, “The Lossoth: Indigeneity, Representation, and Antiracism”, in Tolkien and Diversity: Peter Roe Series XXII, Luna Press Publishing, 2023, p. 162-163.
Considérant personnellement la « race » comme étant un faux-concept, et le débat intellectuel et politique aux États-Unis d'Amérique comme étant (pour de lourdes raisons historiques et politiques) malheureusement complètement empoisonné par ce faux-concept (faux-concept de « race » finalement aussi bien légitimé par les racistes que par ceux qui prétendent s'y opposer, le tout sur fond de définition finalement assez vague du racisme), j'avoue que j'avais trouvé, et que je trouve encore, assez déplacé de convoquer ce genre de référence, essentiellement militante... tout comme je peux trouver déplacé que l'on convoque des références militantes relevant, à l'autre bout du spectre politique, d'un certain conservatisme politico-religieux, quelles que puissent être par ailleurs les éventuelles correspondances de celui-ci avec les propres idées conservatrices de Tolkien en son temps.
Pour finir, en revenant au recueil des actes du séminaire de façon plus générale, on ne peut que regretter que les textes ne soient pas accompagnées des illustrations présentées durant les interventions lors dudit séminaire, notamment par exemple s'agissant de l'intéressante intervention de Joel Merriner (“Hidden Visions: Iconographies of Alterity in Soviet Bloc Illustrations for The Lord of the Rings”).
Peace and Love,
B.
[EDIT (30/11/2023): correction de fautes et coquilles diverses, ajout d'une citation de Silvia Torrioli que j'avais oublié, ainsi que de la couverture du recueil Tolkien and Diversity.]
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Merci pour ce compte-rendu. Je dois dire que je reste dubitatif, pour le moins, à la lecture du passage que tu cites. J'espère quand même qu'il n'est pas représentatif de l'ensemble des conférences de ce colloque.
Pour ce qui est de l'exposition italienne, par-delà les questions politiques, j'attends d'en recevoir le catalogue, sans doute vers la mi-décembre. Je ne manquerai pas de signaler d'éventuelles pièces intéressantes dès que j'aurais le temps de le parcourir.
E.
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Hier s'est tenue à l'Université de Créteil la soutenance de la thèse de doctorat sur travaux en littérature comparée : Jacques Ellul, avec J.R.R. Tolkien : la puissance ou la liberté
Outre Vincent Ferré (directeur), le jury comprenait Christian Bassac, Leo Carruthers (rapporteurs), Florent Guénard, Isabelle Pantin & Yolaine Parisot.
Dans l'assistance, trois amis conspirateurs de longue date du doctorant : Moraldandil, Cirdan et Yyr.
Le doctorant se sentait un peu faible (j'ai besoin de potion magique Panoramix ...).
Il a reçu le grade, les félicitations du jury et des louanges répétées pour la générosité de son travail.
Tous se sont accordés à dire que le travail du doctorant dépassait en fait celui du doctorat et relevait davantage de l'habilitation à diriger des recherches.
& ont comparé plus d'une fois l'œuvre du doctorant lui-même à celles des deux auteurs.
(et il aurait eu besoin de potion magique en plus ?! ;))
« Le site jrrvf.com » a été cité plusieurs fois, précurseur d'une science partagée généreusement.
Entre autres par Vincent qui a également souligné avec émotion l'une des pointes de l'œuvre de Sosryko qui nous amène à nous demander, avec Tolkien : « qu'est-ce qu'un homme vivant ? »
Je vais voir pour mettre une note un peu plus fournie sur la page d'actualité du site ces prochains jours ...
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Félicitations au nouveau docteur !!!
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Bravo Sosryko !
« Le site jrrvf.com » a été cité plusieurs fois, précurseur d'une science partagée généreusement.
Farpaitement !
I.
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A mon tour de me joindre aux louanges et te féliciter Sosyrko.
Bravo pour le travail accompli, la somme de réflexions et le talent avec lesquels tu mets cela en œuvre.
Je vais voir pour mettre une note un peu plus fournie sur la page d'actualité du site ces prochains jours ...
Et comme Yyr n'a qu'une parole, cette "note" est en ligne, et c'est ici :
https://www.jrrvf.com/jacques-ellul-ave … a-liberte/
C.
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Chers amis,
un grand merci à vous :)
Ce fut pour le moins un périple, moins pour sa longueur réduite par rapport à une thèse classique (les travaux étant déjà publiés, une thèse sur travaux est réduite à une année pour rédiger le mémoire qui les introduit) que sa difficulté.
Le plus difficile étant de s'inscrire à un âge où le système actuel veut bien que vous vous formiez avec votre compte formation mais n'imagine pas que vous puissiez encore être étudiant :
Mais à chacune des difficultés, j'ai reçu le soutien sans faille de Vincent, véritable magicien rencontré sur ma Route, que je ne regrette pas d'avoir comparé à Gandalf lors de ma soutenance ! Encore merci Vincent pour ta générosité & tes conseils toujours avisés.
S.
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Merci pour ce compte-rendu [du séminaire estival de 2021 de la Tolkien Society]. Je dois dire que je reste dubitatif, pour le moins, à la lecture du passage que tu cites. J'espère quand même qu'il n'est pas représentatif de l'ensemble des conférences de ce colloque.
Non, clairement, cet extrait de l'intervention de Birns, reflétant une grille de lecture idéologique que j'avais trouvé très problématique dès sa présentation lors du séminaire, n'est pas représentatif de l'ensemble des conférences proposées lors de l'évènement (toutes listées dans une page du site de la TS sauvegardée par la Wayback Machine, pour mémoire). En dehors des interventions spécifiquement en rapport avec les questions de "race" (faux-concept, j'insiste) et de sexe/genre, il y a eu notamment plusieurs interventions relatives à la réception de l'œuvre de Tolkien au-delà de l'aire linguistico-culturelle anglo-américaine occidentale (Inde, Chine...), mais cela ne se retrouve que partiellement dans le recueil des actes, tous les textes des conférences, comme je l'ai dit précédemment, n'y figurant pas, comme le montre du reste la page du site de la TS détaillant le contenu du recueil.
Pour ce qui est de l'exposition italienne, par-delà les questions politiques, j'attends d'en recevoir le catalogue, sans doute vers la mi-décembre. Je ne manquerai pas de signaler d'éventuelles pièces intéressantes dès que j'aurais le temps de le parcourir.
Ce serait en effet intéressant. Le catalogue est édité par Skira, célèbre maison d'édition spécialisée dans les livres d'art et les catalogues d'expo, en Italie et aussi en France, mais il me faut, personnellement, désormais réduire la voilure en matière d'acquisitions de ce type...
Concernant cette exposition italienne consacrée à Tolkien à la Galleria Nazionale de Rome, je me permets de partager un lien vers le réseau de Mark Z., et plus précisément vers une page FB à thématique artistique gérée par un passionné italophone de l'œuvre peint d'Arnold Böcklin (une page dont je suis depuis longtemps les publications, surtout consacrées à la peinture occidentale du XIXe siècle [et au-delà] autour de Böcklin) qui propose quelques photos de l'exposition tolkienienne, prises lors d'une visite par le gestionnaire de ladite page FB : https://www.facebook.com/ArnoldBoecklin … c5n2xwm5xl
Amicalement,
B.
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bonsoir à tous,
je vais rester sobre dans ma contribution, et (avec l'accord du docteur) , partager avec vous une partie du texte de mon "discours de directeur". amicalement, vincent
Vincent Ferré se réjouit de voir advenir la soutenance d’une thèse exceptionnelle à plusieurs titres. Cette thèse sur travaux, tout d’abord, M. Qadri en a inventé les contours et le format (... )
Le sujet est très original, par la comparaison entre J.R.R. Tolkien et J. Ellul, sur la technique, la puissance et le rapport à la nature. La question méthodologique soulevée par la comparaison de deux auteurs entre lesquels il n’existe pas de « rapport de fait » est classique et d’illustres collègues comparatistes se sont demandé à quoi bon comparer. Vincent Ferré ne revient pas aujourd’hui sur cette question sur le plan général, mais constate l’effet sur notre compréhension de chacun des auteurs, dont M. Qadri ne cherche pas à atténuer les divergences – la conclusion, p. 220, est nuancée sur la convergence entre machine (Tolkien) et technique (Ellul) –, en particulier le genre de leurs publications : récits, essais, poèmes… le partage entre fiction et non fiction ( ... )
Le geste comparatiste permet d’éclairer autrement des versants que l’on pensait bien connus de leurs œuvres : Ellul, bien sûr, dont M. Qadri rappelle que « sa réception est avant tout, et jusqu’à ce jour, une succession d’incompréhensions et de rejets multiples » (p. 166) ; J.R.R. Tolkien, aussi, grâce à l’alliance de M. Qadri entre esprit de synthèse et capacité à exploiter quelques termes (« peut-être » ; l’expression « shut out the night », p. 242 ; voir aussi l’hypothèse sur Melkor p. 198, note 3 ou les ponts établis entre Bombadil et le conte d’Adanel, p. 244), qui rappelle la capacité de Tolkien lui-même à « extraire tout le suc d’une seule phrase ou d’approfondir les implications d’un seul mot » (Les Monstres et les critiques, p. 277-278 ; The Monsters and the Critics and Other Essays, p. 224). ( ... )
Ainsi, Vincent Ferré a particulièrement aimé la mise en relation entre les poèmes et les textes théoriques d’Ellul, ou l’éclairage (p. 255) sur les stoicheia et tel passage de l’épitre aux Romains. Les analyses portant sur la Bible se révèlent remarquables et ouvrent des pistes de révision des traductions publiées : voir la p. 236 (« Ce commentaire, écrit par Tolkien vers 1958, est surprenant parce qu’il emploie une expression commune aux évangiles de Marc (Mc 5, 30) et de Luc (Lc 8, 46) … »), les commentaires des paroles de Tom Bombadil (p 238) ( ... ). On pense ici à une lettre adressée à son éditeur en 1956, à propos de la traduction hollandaise du Seigneur des Anneaux, la première à paraître, où Tolkien souligne l’empan de l’érudition nécessaire : « je ne vois pas comment on peut mener [cette traduction] à bien sans être assisté de l’auteur » ; « un certain nombre de mots ne se trouvent pas dans les dictionnaires, ou demandent une connaissance de l’ancien anglais. Sur des questions comme celle-ci, et d’autres qui ne manqueraient pas d’être soulevées, l’auteur serait la source d’information la plus satisfaisante et la plus rapide. » (Lettre n°188).
Il y a peu de ‘vrais spécialistes’ de Tolkien en France ; et pour Ellul, leur nombre est encore plus réduit. Cela ajoute à l’importance et la légitimité scientifique d’une œuvre critique et éditoriale comme celle qui est présentée par M. Qadri, exceptionnelle par sa qualité et son engagement. La portée et (pour reprendre un terme cher à J.R.R. Tolkien) l’applicabilité de ces analyses appellent une publication rapide de l’essai inédit, qui montre – au-delà de leurs divergences, que « se révèlent des pensées sœurs, qui touchent au cœur de la condition humaine et sont autant de ressources pour travailler à être un “homme vivant”, c’est-à-dire en vie et porteur de vie, dans la société technicienne qui est la nôtre » (p. 279) – sans rappeler encore l’intérêt d’analyses portant sur le contexte le plus immédiat, comme les derniers développements de l’intelligence artificielle, en 2023 (p. 208). Toute la conclusion du mémoire apparait comme un appel à sortir de notre torpeur, de notre somnambulisme face à l’état du monde, de la part d’un candidat humaniste, en ce qu’il est attaché à décoder, sauvegarder, interpréter, des archives ; à partager cet accès privilégié… La générosité du chercheur se voit aussi dans l’assistance fournie à d’autres : ( ... ). Sur Tolkien, le livre collectif (Pour la gloire de ce monde…) publié en 2016 en lien avec une association à Toulouse reflète l’engagement de M. Qadri au sein de groupes de lecteurs devenus des critiques, engagement collectif ancien puisque ses premières interventions ont plus de vingt ans, sur le forum de discussion d’un site consacré à l’auteur britannique (jrrvf.com), où il a publié en ligne des essais entiers – bien avant le début de la « science ouverte ». L’inviter à rejoindre les contributeurs d’un volume collectif que V. Ferré a dirigé en 2004 pour les trente ans de la publication du Seigneur des Anneaux en français et de la disparition de J.R.R. Tolkien s’est imposé comme une évidence : c’est l’une des caractéristiques de cette œuvre que d’être longtemps restée en dehors des limites universitaires : cet auteur populaire, dans tous les sens du terme, est un auteur « démocratique », lui qui en France fait l’objet de discussions mêlant Université et société civile comme l’ont récemment rappelé les journées de conférences organisées à l’UPEC même, en octobre, par des membres de l’association Tolkiendil appartenant aux deux versants. Ouverture d’une parole validée par ces deux communautés, générosité des échanges : voici deux caractéristiques que l’on retrouve dans ce dossier d’un candidat soucieux de déterminer au mieux comment s'adresser à autrui pour faire passer le savoir, en écho à ce souci du prochain visible chez Tolkien et Ellul (p. 262). Il reste à V. Ferré à souhaiter à Jean-Philippe Qadri de poursuivre dans cette voie, sur cette route « sans fin ».
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Merci pour le partage, Vincent.
J'ai déjà eu l'occasion de féliciter Jean-Philippe en privé, mais encore une fois (et cette fois-ci en public), bravo à lui d'avoir pu/su profiter au mieux de la fenêtre de tir octroyée, compte tenu des difficultés pour s'inscrire comme étudiant et du délai finalement très limité pour rédiger le mémoire.
Amicalement,
B.
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Merci Vincent pour ce partage et ce commentaire.
Je crois que le premier message de Sosryko à propos de Ellul sur ce forum date de mai 2004 (https://www.jrrvf.com/fluxbb/viewtopic. … 274#p56274).
Qui aurait pu penser que cela aboutirait à une thèse près de 20 ans après ? Pas moi. Et probablement pas Sosryko non plus !
Encore bravo à notre nouveau Docteur pour ce très bel achèvement (sur ce sujet particulier, j'imagine que tu en as quantité d'autres - mais pour l'heure, tu peux te reposer un peu ).
Et merci également à toi Vincent qui est aussi à l'origine / le catalyseur et le compagnon de bien des choses qui ont été réalisées dans la sphère Tolkienienne française. Comme bien sûr un certain nombre de personnes qui se reconnaîtront. Bref, j'adresse un merci collectif (c'est nécessaire de le dire parfois)
Bon week-end à vous,
Cédric.
PS : Vincent, je me suis permis une petite remise en forme de ta contribution.
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PS : Vincent, je me suis permis une petite remise en forme de ta contribution.
Moi aussi ;)
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Je crois que le premier message de Sosryko à propos de Ellul sur ce forum date de mai 2004 (https://www.jrrvf.com/fluxbb/viewtopic. … 274#p56274).
Qui aurait pu penser que cela aboutirait à une thèse près de 20 ans après ? Pas moi. Et probablement pas Sosryko non plus ! :D
En fait, c'est un peu plus tôt encore, en avril 2004, dans le fuseau sur Le sens de l'Histoire ;-)
Assurément je n'aurais jamais pensé, en arrivant en 2002 sur JRRVF que cela nous conduirait à ce jour.
Rien n'a jamais été préparé ni planifié. Je ne marche qu'au plaisir du partage, à l'admiration & aux rencontres, les premières virtuelles, grâces à toi, Cédric, sur JRRVF (véritable catalyseur intellectuel pour moi ; merci Cédric !), puis d'autres en chair et en os, grâce à Silmo, qui avait organisé une rencontre inoubliable sur son île (merci Silmo !).
Et puis la confiance accordée par Vincent effectivement, avec la participation au Dictionnaire Tolkien ou au colloque Cerisy ; celle aussi de Michaël Devaux, avec l'immense place accordée à mon premier essai sur Tom Bombadil dans La Feuille de la Compagnie no3 (merci Eruvikë !); et enfin, celle de Didier, qui a accepté de lancer Le Dragon de Brume dans la folle aventure du recueil collectif que nous portions, Yyr et moi, pour prolonger autant de pistes ouvertes encore et toujours sur JRRVF (merci, merci Didier ! A ce jour, mes textes préférés demeurent certaines pages que j'ai écrites pour ce recueil, dont l'essai purement comparatiste sur le Joseph de Thomas Mann :)).
C'est d'ailleurs à l'occasion de la rédaction d'un des essais du recueil (« Les couleurs du monde ») que je renvoyais vers l'éthique ellulienne de la non-puissance pour prolonger les commentaires de différentes figures de la sagesse dans le Légendaire. Il fallait bien qu'un jour je revienne sur le sujet, de manière directe et non plus à la marge. Voilà qui est fait. Mais là encore, sans une proposition récente de Vincent, rien de serait advenu. Merci donc, encore une fois, Vincent ;-)
Il reste enfin à remercier les JRRVFiens mais aussi nombre de participants à Tolkiendil, dont l'immense érudition est source de joie et d'émulation : Isengar, Moraldandil, Círdan, Druss, Elendil, Hyarion, etc, etc. ; merci les amis de continuer à partager votre enthousiasme et vos découvertes. Je vous dédie ce proverbe biblique, que j'avais dédié en son temps à notre cher Fangorn, à qui je dois beaucoup ( merci Fangorn !) : "Tout comme le fer aiguise le fer, l'homme s'aiguise au contact de son prochain." (Pr 27, 17, trad. Segond 21) Souvent compris comme image de la colère de l'un qui produit la colère de l'autre; le texte laisse place à une autre interprétation : la pensée de chacun s'affine au contact de la pensée de l'autre. C'est cela JRRVF (et assurément aussi Tolkiendil) pour moi, encore aujourd'hui.
Enfin, le dernier merci à Yyr, compagnon de toutes ces aventures, de la première à la plus récente, et de celles qui suivront.
S.
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Et nous (avec Silmo), nous te disons mille mercis Sosryko ! :)
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Bonjour à vous,
J'ai été attiré par le titre d'un article ce jour : 9 livres de fantasy à offrir absolument en ce Noël 2023
Article disponible ici : https://www.numerama.com/pop-culture/15 … -2023.html
N'en ayant lu aucun - tout au plus ai-je entendu parlé de Les Dix mille portes de January, par Alix E. Harrow - est-ce que je peux faire confiance à cette liste ?
Me recommanderiez-vous quelques titres parmi ceux-là ?
Merci :)
Cédric.
PS : merci Sosryko :-)
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Pas entendu parler d'un seul d'entre eux. Ils doivent tous être récents. En tout cas, les résumés montrent qu'ils sont bien dans l'air du temps. (Et ce n'est évidemment pas un compliment.) Bref, à moins qu'une personne dont je respecte les goûts me disent qu'il y en a un dans le lot qui sera un classique, je ne compte pas du tout m'y plonger.
E.
(EDIT : je n'avais pas vu que la Cité diaphane était d'Anouck. C'est entendu, je vais peut-être bien faire une exception...)
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J'ai été attiré par le titre d'un article ce jour : 9 livres de fantasy à offrir absolument en ce Noël 2023
Article disponible ici : https://www.numerama.com/pop-culture/15 … -2023.htmlN'en ayant lu aucun - tout au plus ai-je entendu parlé de Les Dix mille portes de January, par Alix E. Harrow - est-ce que je peux faire confiance à cette liste ?
Me recommanderiez-vous quelques titres parmi ceux-là ?
À titre personnel, je ne connais vraiment qu'une seule des références citées : le roman La Cité diaphane, dont l'autrice, Anouck Faure, n'est autre qu'une artiste plasticienne par ailleurs (bien) connue de certains d'entre nous en ces lieux (même s'il y a bien longtemps maintenant que je ne l'ai pas revue, les aléas de la vie [et des chemins de fer !] faisant que...) : https://www.jrrvf.com/fluxbb/viewtopic. … 367#p88367
J'ai acheté un exemplaire de cet ouvrage pour une bibliothèque de lycée il y a quelques mois, mais j'avoue que je n'ai pas encore trouvé le temps de me plonger en profondeur dans la lecture de mon propre exemplaire du roman. Il faut dire que la première chose que j'ai d'abord eu la curiosité d'aller voir de près, ce sont les illustrations et la qualité de leur reproduction sur papier...
Car il est à noter qu'Anouck a non seulement réalisé elle-même les illustrations intérieures de son roman (la couverture, elle, étant illustrée par Xavier Collette), mais qu'elle a utilisé pour cela le procédé ancien de la gravure à l'eau-forte. À ce sujet, pour mémoire et comme j'avais déjà eu l'occasion de le signaler ailleurs en ces lieux, l'artiste a présenté elle-même, sur son blog en 2018, les techniques de la gravure sur bois et de la gravure à l'eau-forte :
- https://amaryan.fr/2018/05/24/gravure-sur-bois/
- https://amaryan.fr/2018/07/30/eau-forte-partie1/
- https://amaryan.fr/2018/08/01/eau-forte-partie2/
Décidément, Anouck n'est pas une magicienne, mais "seulement", et c'est bien meilleur à mes yeux, une artiste de talent et une artisane au savoir-faire désormais bien rodée (même si l'on apprend toute sa vie, n'est-ce-pas Anouck, si tu nous lis ?). ^^
Amicalement,
B.
[EDIT (31/12/2023):] P.S. : je suis content qu'Elendil, après avoir lu mon présent message et celui de JR/Isengar qui suit le mien, ait révisé son jugement exprimé plus haut. ^^
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Tout à fait en phase avec Hyarion.
Je suis en train de lire depuis le début de la semaine le roman d'Anouck (je l'ai acheté aussi il y a quelque mois, mais pour un usage personnel), et je suis très agréablement surpris par le fluidité du style et l'ambiance sombre, sobre et cohérente qui s'en dégage.
Quant aux illustrations, Hyarion a tout dit.
Elles font de ce livre - l'objet, j’entends - un petit trésor.
Dans le reste de la liste, il me semble que l'auteur Emmanuel Chastellière n'est autre que Gillossen, un des membres-fondateurs d'Elbakin.net (et il n'en est pas à son coup d'essai. Sa bibliographie s'étoffe d'année en année).
J'ai aussi entendu beaucoup de bien sur Celle qui devint le Soleil, de Shelley Parker-Chan (mais je ne l'ai pas lu).
La plupart des autres titres me semblent être de la young-fantasy (ce qui n'est pas péjoratif dans mon propos), et donc ciblés sur un public qui n'est sans doute pas celui de JRRVF
I.
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Vous m'avez tous deux devancé ;)
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> ... n'est pas une magicienne
Mais si, selon la définition qu'on donne au mot "magie"..
De même qu'au mot "art"...
La τέχνη n'est pas que technique... L'artisan n'est pas qu'un façonnier... Enfin j'crois... Ptêt. Je suis pas un expert du mot juste. Je le cherche encore et toujours... La note, en fait, qui fait l'accord parfait, peut-être tout aussi illusoire.
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Merci beaucoup pour vos retours ;-)
Je n'avais pas réalisé que Anouck était la Anouck. Illustratrice / artisane de grand talent que j'ai eu le plaisir de rencontrer.
Et ajoutée à cette rencontre, j'ai pu voir l'un de ses "masterpiece" en vrai. Un travail absolument bluffant...
J'ai donc un titre à acheter. Je file !
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Je ne suis pas, moi non plus, un expert du mot juste... mais pour essayer de se comprendre, sans doute faut-il au moins essayer de se parler. « La parole est d'argent et le silence est d'or », dit-on... mais cet adage est loin, bien loin, d'être toujours vrai.
J'attends un message depuis un mois, relatif à des choses essentielles, en des temps difficiles... J'espère qu'il ne tardera plus.
B.
P.S. : It is done.
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Des nouvelles du "Bird & Baby" ?
La dernière fois qu'on en a parlé, ça n'allait pas fort...
Eh bien, sachez qu'à peine installés au sud d'Oxford, les Américains du centre de recherche médical Ellison Institute of Technology, se lancent dans les oeuvres en rachetant le pub historique Eagle & Child, bien connu pour avoir servi de lieu de perdition à quelques intellectuels d'Oxford dans les années 30 et 40.
Le pub, un temps menacé de devenir un hôtel-restaurant puis fermé de longs mois pour cause de crise sanitaire, pesait bien lourd dans le budget de son ancien propriétaire, l'association du college St John, qui cherchait à s'en débarrasser.
Par ce rachat, l'Ellison Institute of Technology semble vouloir préserver le pub dans son intégrité. Et se faire aussi un peu de pub au passage (sans jeu de mot).
https://www.alumni.ox.ac.uk/article/ell … FE-o0V2-EQ
I.
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A propos de Tolkien chez Christian Bourgois (et inversement) :
https://actualitte.com/article/114468/e … _FkLSKAkbc
C.
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A propos de Tolkien chez Christian Bourgois (et inversement) :
https://actualitte.com/article/114468/e…_FkLSKAkbcC.
Merci pour le signalement, Cédric : même s'il n'y a pas de surprise, cet article d'ActuaLitté est éclairant sur la situation de la maison d'édition, notamment par rapport à ce qui a été abordé ces derniers mois et semaines dans un autre fuseau...
Amicalement,
B.
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Un article à propos du titre "Le droit dans la saga du Seigneur des Anneaux" :
Le Mordor est-il un État terroriste ?
++
C.
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Merci Cédric pour le signalement de cet article.
J'ai quand même de sérieux doutes en le lisant (rapidement pendant la pause déjeuner). Par exemple :
...En revanche, c’est sur les connaissances du Seigneur des anneaux qu’il faut être solide.
Vous allez naviguer entre diverses références : les trois romans du SdA, les trois films qui en sont tirés, et par ailleurs le livre du Hobbit, les trois films qui ont suivi,...
Je ne pense pas avoir les connaissances nécessaires parce que je connais un seul roman et non trois romans du SDA, je n'ai vu que le 1er film et pas les 5 autres.
Et un peu plus loin : En revanche, vous pourriez vous faire surprendre au détour d’une démonstration, quand il sera question de Gués de l’Isen, d’Eskenbrand,... Il faudra peut-être faire quelques allers-retours sur le net si un nom ne vous revient pas.
C'est vrai, je ne connais pas Eskenbrand, juste Erkenbrand.
Est-ce l'article qui n'est pas écrit par un "connaisseur" ou les articles du livre ? Il faudrait qu'un jrrvfien quelqu'un se dévoue pour le lire.
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Hello Eva,
Je signalais le lien, je ne le cautionnais pas ;-)
Mais il est vrai que ce titre est assez intriguant de part le sujet qu'il traite.
J'ai peut-être mal cherché mais je n'ai pas trouvé de critique sur le web. Donc, oui, il va falloir se dévouer. Eva, je t'en prie, ne te gêne pas
C.
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Des nouvelles du "Bird & Baby" ?
Pour évoquer un autre pub, imaginaire celui-là (quoique ?), un article qui tend à montrer que "The Prancing Poney" est inspiré d'un pub, le "The Bell Inn Moreton-in-Marsh".
Je ne connaissais pas cette théorie, elle est exposée ici :
https://thirdeyetraveller.com/tolkien-t … -in-marsh/
C.
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Article très complet. Merci beaucoup pour le partage
A titre personnel, je ne suis pas tout à fait convaincu. Certains des arguments mis en avant par le "smial" de Moreton-in-March (depuis 2006) sont tout à fait valables, mais d'autres sont tirés par les cheveux.
Malheureusement, rien n'est vraiment vérifiable. L'autrice de l'article fait bien de préciser que
Although there is no evidence or records from Tolkien to suggest that The Bell Inn inspired The Prancing Pony.
J'en parlais un peu il y a... argh ! 10 ans, déjà ! Dans la deuxième promenade au Pays de Bree.
L'ex-pub "The Lamb and the Flag" d'Oxford, situé juste en face du "Bird & Baby" fait un candidat tout à fait valable. Et comme je le disais dans la promenade à Bree :
Toutefois, l’auberge l’Agneau et le Drapeau (the Lamb and the Flag) à Oxford, répond aussi, en grande partie, à cette description. Elle conserve l’avantage d’avoir été assidûment fréquentée par Tolkien et ses camarades des Inklings pendant de nombreuses années
J'ai évoqué le sujet aussi dans le post sur les pubs d'oxford : https://www.jrrvf.com/fluxbb/viewtopic. … 983#p89983
Je vous laisse vous faire votre opinion. "Bell Inn" ou "Lamb & Flag" ?
I.
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Hello Eva,
Je signalais le lien, je ne le cautionnais pas ;-)
Mais il est vrai que ce titre est assez intriguant de part le sujet qu'il traite.
J'ai peut-être mal cherché mais je n'ai pas trouvé de critique sur le web. Donc, oui, il va falloir se dévouer. Eva, je t'en prie, ne te gêne pasC.
Désolée Cédric mais je te remerciais simplement pour le signalement.
En me relisant, je me rends compte que j'étais quand même bien énervée, ce qui n'est pas bien du tout. Il faudrait vraiment que j'écoute Sylvebarbe/Barbebois "Pas de précipitation" !
Et s'il n'y a pas (ou pas facilement accessible) de critique, c'est peut-être parce que personne n'est vraiment intéressé. Appliquer le droit actuel à un livre publié il y a 70 ans, c'est plutôt tiré par les cheveux mais quand il s'agit de "fantasy", c'est plutôt absurde. Ou alors à traiter dans un mode humoristique.
J'essaierai d'aller à la librairie pour voir si ce livre est disponible pour en lire quelques pages.
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Article très complet. Merci beaucoup pour le partage
Je t'en prie ;-)
Et merci pour ton commentaire et le rappel des liens. Tu es décidemment le spécialiste des pubs (virtuellement, bien sûr )
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Dans le Télérama de cette semaine (n°3865) , il y a un article sur les liens entre l’œuvre de Tolkien et Giorgia Meloni, dont il a déjà été question dans ce fuseau. L’article reprend l’histoire à partir de la parution de la traduction en italien du Seigneur des Anneaux avec une préface « d’un philosophe réactionnaire, Elémire Zolla, présentant la fresque de J.R.R. Tolkien comme un rejet du monde moderne, au profit de la religion et de la pureté chrétiennes ». L’article donne aussi la parole à un membre de l’Association italienne d’études tolkieniennes qui lutte contre cette récupération.
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Dans le Télérama de cette semaine (n°3865) , il y a un article sur les liens entre l’œuvre de Tolkien et Giorgia Meloni, dont il a déjà été question dans ce fuseau.
Plus exactement, il en a été effectivement question, l'année dernière, dans les dernières pages du fuseau « Revue de presse V », qui a précédé celui-ci. :-)
Merci d'avoir signalé cet article de Télérama.
Concernant la préface et le préfacier de la première édition italienne du SdA, je me souviens que cela avait été mentionné en 2006 dans la J.R.R. Tolkien Encyclopedia de Drout (plus ou moins l'équivalent anglophone du Dictionnaire Tolkien dirigé par notre ami Vincent), mais c'est un fait largement méconnu... et il me semble donc utile de le rappeler, car cela me parait avoir son importance pour comprendre le contexte dans lequel a eu lieu initialement la réception de Tolkien en Italie, ou du moins une partie de cette réception.
Amicalement,
B.
[PS : lien hypertexte devenu obsolète, suite à la fusion de l'ensemble des fuseaux « Revue de presse »]
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L'actualité continue de charrier son flot de nouvelles plus ou moins déprimantes, mises à part quelques rares bonnes nouvelles pouvant encore ponctuellement me mettre en joie (Sarkozy condamné en appel le 14 février dernier à un an de prison, dont six mois avec sursis, dans l'affaire Bygmalion, par exemple). Or dans ledit flot de nouvelles, il y a cet entretien qu'a accordé, au Figaro, l'écrivain et essayiste français Iegor Gran, né en 1964 à Moscou et fils du dissident soviétique Andreï Siniavski, à l'occasion d'un texte qu'il a publié dans la revue Kometa. L'entretien a été mis en ligne sur le site du Figaro il y a un peu plus d'une semaine, samedi 24 février, et je me permets d'en citer ici une partie, où il est question de l'usage qui est fait de l'œuvre de Tolkien en Ukraine et en Russie, dans le contexte de la guerre actuelle. Je précise que je n'aurai pas vu passer cet entretien si Elendil n'avait pas manifesté un intérêt pour son contenu, il y a quelques jours sur le forum d'à côté.
Le Figaro : Dans le dernier numéro de Kometa, vous avez écrit un texte, Mordor, qui parle de la « capillarité littéraire d'une œuvre de fiction vers la vie réelle » . Cette œuvre, c'est le Seigneur des anneaux, de J.R.R. Tolkien. Comment les Ukrainiens se sont-ils approprié l'imaginaire de cette œuvre fantastique [sic] publiée en 1954 ?
Iegor Gran : Cela remonte à 2014 : dès l'occupation de la Crimée, l'armée russe est décrite comme une armée d'orques, la Russie est appelée « Mordor », et Vladimir Poutine est Sauron. On retrouve ces « memes » un peu partout sur internet. En cherchant « orques russes », vous tombez sur pléthore de parodies où les orques du film de Peter Jackson portent le « Z » des troupes russes. En 2014, ils étaient affublés du ruban noir et orange de Saint George, devenu sous Poutine le symbole de l'impérialisme russe.
Le Figaro : Pourquoi, d’après vous, est-ce le Seigneur des anneaux qui prédomine ? Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a également fait plusieurs références à Star Wars...
Iegor Gran : C'est lié à une certaine esthétique propre au Seigneur des anneaux. Les méchants dans Star Wars, les « stormtroopers » ou Dark Vador, ont été dessinés après une mûre réflexion sur l'esthétique militaire, on dirait presque que c'est Hugo Boss (qui a dessiné à l'époque l'uniforme des SS) qui est revenu pour créer leur design ! C'est propre, net, effrayant de discipline. Au contraire, les troupes russes sont habillées un peu n'importe comment, leur équipement est fait de bric et de broc. Quand on observe les lettres Z barbouillées sur les chars russes, on remarque qu'il n'y a aucune méthode pour les peindre, on les tartine au petit bonheur la chance. À l'inverse de la précision et des codes militaires habituels, l'armée russe est anti-esthétique, anti-rigoureuse, et fait plutôt penser au chaos. D'où la comparaison avec le film Le Seigneur des anneaux, quand on voit déferler les hordes d'orques. Il y a une marée de laideur, un fleuve de viande qui avance, c'est brutal et ça sent mauvais.
Le Figaro : Est-ce que cette appropriation vise à motiver les troupes en faisant appel à une référence connue ou plutôt à déshumaniser l'adversaire en les traitant d'orques ?
Iegor Gran : « Déshumaniser l'ennemi »... Les Russes le font très bien eux-mêmes en commettant des crimes de guerre chaque jour. Il n'y a vraiment pas besoin de les déshumaniser. Je dirais même que, paradoxalement, l'association entre Russes et orques les humanise par rapport à ce qu'ils fabriquent sur le terrain. Il y a même une parodie où l'on peut voir un orque tiré du film qui se plaint d'être comparé aux Russes !
Il ne faut pas non plus oublier qu'à la fin du Seigneur des anneaux, le Bien triomphe. Et les forces du Mal, quelles que soient leur supériorité et leur volonté morbide, sont vaincues. On a besoin, quand on est agressé, d'avoir un espoir. Donc je pense que c'est bien davantage pour se donner du cœur au combat et à la résistance que pour déshumaniser un ennemi qui finalement l'est déjà par ses actes.
Le Figaro : Mais vous notez que la Russie semble, elle aussi, avoir accepté d'être le « Mordor » de notre monde...
Iegor Gran : C'est un phénomène nouveau, et déconcertant. D'habitude on s'identifie aux forces du bien, et on aurait pu penser que les Russes s'identifieraient eux aussi aux gentils. Pourtant ils jouent le jeu d'assumer pleinement ce rôle du méchant agressif. C'est assez troublant parce qu'il y a une sorte de défi lancé à la figure du monde : on sent chez eux une jouissance à venir parader en « Mordor ». Toujours avec l'idée qu'en mettant sur soi le masque du mal, on méprise et on fait peur à son ennemi, un peu comme dans ces combats de catch, ces vastes pièces de théâtre où il y a un bon et un méchant, et le méchant surjoue son côté maléfique.
J'ajoute que certains Russes vont encore plus loin : non seulement ils assument d'être des orques, mais ils réécrivent la fiction de Tolkien en désignant le « Mordor » comme le continent du Bien, freiné dans son épanouissement par le « Gondor » ou les Hobbits. Sans ces « dégénérés », le « Mordor » serait le centre de l'innovation technologique et de l'exploration des sous-sols, un peu comme la Russie est l'endroit où l'on produit du pétrole à foison. Dès lors, pour que le « Mordor » s'épanouisse pleinement, il doit réduire en poussière ses voisins...
[...]
Iegor Gran, « « On sent chez les Russes une jouissance à parader en Mordor » : quand la guerre en Ukraine et l'univers de Tolkien se rejoignent », entretien avec Ségolène Le Stradic, publié le 24 février 2024 sur le site du journal Le Figaro.
Le contenu de l'ensemble de l'entretien est instructif s'agissant des représentations à l'œuvre dans le contexte de la guerre en Ukraine, mais s'agissant du volet plus spécifiquement tolkienien, celui-ci laisse aussi l'impression d'une sorte de nivellement par le bas, avec un univers littéraire basiquement utilisé comme une sorte de hochet idéologique... Cependant, s'agissant des Ukrainiens, il ne s'agit pas de juger les personnes qui subissent cette horrible guerre : nous ne sommes pas à leur place, et nous ne pouvons avoir (pour le moment) qu'une idée (encore) lointaine de leurs souffrances, et de tout ce qui peut motiver de facto l'« orquisation » d'un ennemi...
Et pourtant, sur le principe, quel triste « succès » que ce genre de réception pour un auteur... Et je ne parlerai même pas de la « jouissance » russe « à parader en Mordor » dont parle Gran...
De façon plus générale, j'avoue être, la plupart du temps, gêné par les usages politiques qui sont faits de Tolkien, et ce quelles que soient les orientations idéologiques qui apparaissent derrière ces usages. Non pas que je considère l'œuvre de Tolkien comme devant en soi être à tout prix sanctuarisée : Tolkien avait un regard critique et critiquable sur le monde, regard qui transparait à des degrés divers dans ses écrits, et il n'est donc pas surprenant de le voir utilisé, récupéré, invoqué de diverses façons, y compris donc sur le terrain politique ou politico-religieux. Le problème, à mes yeux, réside plutôt dans le côté presque toujours facile et/ou abusif de ces usages. La figure maléfique de l'orque, à cette aune, me parait être devenue très galvaudée, comme l'est la figure maléfique du nazi, dans un registre censé être plus historique.
Tolkien lui-même s'est laissé aller, en son temps, à utiliser cette figure de l'orque, ou celle de Saruman, pour désigner tout ce qui ne lui plaisait pas dans le monde et dans la société, de son propre point de vue politico-religieux (notamment anti-socialiste) : la nouvelle édition augmentée (fort tardivement) de sa correspondance a confirmé cette tendance de l'auteur déjà connue précédemment (voir la lettre 194a, par exemple, dans laquelle Tolkien se plaint notamment, en 1956, du « libéralisme dépourvu de religion » et d'un « gouvernement socialiste » (travailliste) qui lui prendrait son argent, parlant à cette aune d'une « marée montante de l'« orquerie » » [“rising tide of ‘orquerie’”]).
Je n'aime pas l'usage politique que faisait Tolkien de ses propres notions, personnages et concepts, mais au moins était-il légitime, sur le fond comme sur la forme, pour en faire ce que bon lui semblait, quitte à courir le risque d'orienter la portée de son œuvre, ce qu'il a du reste plutôt eu tendance à éviter en réservant le plus souvent ses opinions à la sphère privée. Tout autre chose me parait être l'usage politique que font nos contemporains de Tolkien, y compris ceux qui pensent se sentir en phase avec lui d'un point de vue « humain » se voulant moralement « élevé », mais qui est en fait simplement un point de vue idéologique plongé comme les autres dans l'arène politique des conflits d'idéaux. Chacun est évidemment libre d'utiliser une référence littéraire, ou plus largement culturelle, pour exprimer une opinion, mais je ne pense pas que faire référence à Tolkien soit forcément toujours en soi un gage de qualité dans l'expression d'une idée, même et surtout quand cette idée relèverait d'un prétendu « bon sens hobbit », d'une prétendue « vertu elfique », ou de quelque-chose d'approchant. Voir le monde dit « primaire » à travers une fiction, même si cela peut aider à « faire passer la pilule » pour certains, a ses limites... Quant à prétendre se réclamer des idées de Tolkien lui-même, la démarche pourra paraître plus recherchée que de faire des emprunts superficiels à son œuvre littéraire et aux adaptations audiovisuelles de celle-ci, mais le résultat sera généralement le même : peu convaincant, et faussement « élevé » », du moins à mes yeux, et même s'il arrive parfois qu'une référence à Tolkien puisse éventuellement tomber juste.
Prenons un exemple de sujet d'actualité clivant, au moins autant (sur le principe) que celui de la guerre en Ukraine : même si l'on pourra toujours être d'un avis différent, que ce soit vu de France ou d'ailleurs, je trouve personnellement positif que l'Assemblée Nationale et le Sénat, réunis en Congrès à Versailles demain lundi 4 mars, adopte à cette occasion la révision constitutionnelle permettant l'inscription dans la Constitution de la liberté pour les femmes de recourir à l'IVG, la France devenant dès lors prochainement le premier pays au monde à garantir cette liberté pour les femmes dans sa constitution. Et je trouve cela d'autant plus positif qu'une telle décision, obtenue (pour une fois !) par consensus et en accord avec une très large majorité de l'opinion publique, soit prise malgré le niveau « intellectuel », à mon humble avis, très faible du « débat » public dans ce pays, et a fortiori à l'Assemblée nationale durant l'actuelle législature. Et pourtant, je ne doute pas qu'il pourra toujours se trouver des personnes qui, pouvant se réclamer de Tolkien et de ses propres opinions politico-religieuses conservatrices, assimileront négativement cette décision (comme toute autre qui serait également jugée trop « moderne ») à quelque « orquerie » jugée aux antipodes de je-ne-sais quel idéal « elfique »...
Même s'il me faut bien faire avec, j'avoue qu'il m'est pénible de savoir que de telles lectures plus ou moins tolkieniennes du monde existent, fut-ce de façon anecdotique selon les cas : au bout de toutes ces années, lorsqu'il m'arrive de tomber dessus, en vérité je les trouve banales, faciles, tristes, désespérantes, et même pas dignes du message de Jésus si elles émanent de gens se disant chrétiens... Cet avis n'engage que moi, évidemment, sachant que c'est de l'usage de Tolkien dont il est avant tout question ici. Et ceci étant dit, je précise bien qu'il en est à mes yeux de même pour pratiquement tous les usages politiques qui sont fait de Tolkien : ils sont presque tous tristes et faciles en se croyant pourtant souvent « spirituels » ou « cultivés », que les points de vue soient plus ou moins « vertueusement conservateurs », « vertueusement progressistes » ou prétendument « prudemment apolitiques ». L'abus finit ainsi par être général (en étant tous « l'orque » ou « le Saruman » de quelqu'un in fine, par exemple), tandis que la littérature, elle, finit par passer complètement à la trappe. Quant à l'humour dont certains prétendent faire preuve dans leurs usages politiques de Tolkien, c'est souvent de l'humour à la G. K. Chesterton, le rieur étant dès lors trop souvent incapable de rire de sa propre option (ou non-option) idéologique. Il est loin, le temps des parodies qui, dans le sillage de la première trilogie de Peter Jackson, pouvaient parfois être amusantes... Toutes ces lectures politiques/idéologiques me confirment, en tout cas, à quel point Tolkien ne saurait être, à mes yeux, un maître à penser, y compris dans un sens qui se voudrait « progressiste », ou même « humaniste » dans le sens trop flou qu'a parfois trop tendance à avoir pris cette notion de nos jours.
Et dans le cas d'une guerre comme celle qui continue de souiller actuellement l'Ukraine, c'est sans doute encore pire, puisque l'on mélange tout : les orques de Tolkien, ceux de Peter Jackson, la culture littéraire, la culture de masse, le tout dans une bouillie informe vis-à-vis de laquelle chacun pourra toujours voir midi à sa porte, le plus souvent derrière des écrans déshumanisants... À force de confondre culture et intelligence, il me semble que l'on finit par verser dans la nullité la plus totale... le réel, lui, restant ce qu'il est.
Si j'avais un message général à faire passer, je dirais : si c'est pour en faire ce que l'on en fait politiquement, qu'on laisse donc Tolkien tranquille... et non pas tant seulement pour lui-même et son œuvre que finalement pour tout le monde...
Mais bon, ce n'est là que mon point de vue.
Peace and Love,
B.
P.S.: j'ai donné mon avis (qui vaut ce qu'il vaut) en passant, mais n'en dirai pas plus (si cela peut rassurer), a fortiori avec tout ce que j'ai à faire...
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Peu d'informations encore, mais vu le "pedigree" des deux compères, on peut s'attendre à quelque chose de plus qu'intéressant (dans leur style)
- bientôt un nouveau livre de Hammond & Scull ?
C.
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Une lettre de Tolkien mise aux enchères bientôt.
Au-delà de l'objet, le contenu est, je dois dire, assez émouvant :
https://hansonsauctioneers.co.uk/hobbit … on-battle/
C.
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Oh superbe, et assez émouvant en effet :)
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Très touchant effectivement !!
J’ai montré et lu la lettre à mon fils. Bon, du coup, il est revenu à la charge pour une lecture du SdA…
@ Hyarion : alors que je parcourais le forum avec mon fils sur les genoux, il a vu ta grive qui lui a bien plu !
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@ Hyarion : alors que je parcourais le forum avec mon fils sur les genoux, il a vu ta grive qui lui a bien plu !
Merci pour elle. ^^
Amicalement,
B.
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Quelque temps plus tard...
Quelques mots concernant le projet de la Pléiade...
Le 26 août 2021, Cédric a écrit :En 2018, Hyarion a écrit :J. R. R. Tolkien devrait entrer prochainement dans la prestigieuse collection des éditions de la Pléiade.
A ce propos, est-ce qu'une personne bien informée parmi vous aurait des nouvelles de ce projet ?
Merci :)
J'ai bien entendu Vincent (F.) évoquer ce projet lors de certaines interventions publiques en ligne ces derniers mois, mais seulement pour rappeler qu'il existe toujours sur le principe, sans plus.
Personnellement, je ne serais pas surpris que l'on veuille, à ce propos, éventuellement créer l'évènement à l'occasion du cinquantenaire de la mort de l'auteur, en 2023.
L'année prochaine, ce sera le cinquantenaire de la mort de Tolkien.
[...]
Peut-être aussi enfin l'introduction officielle de Tolkien dans la Pléiade ?
Finalement, rien ne n'est passé en 2023, et en fait, depuis l'annonce de ce projet de parution en novembre 2018, entre autres par Le Figaro, et alors évoquée ici, rien de véritablement « concret » n'aura été à signaler... jusqu'au début de ce mois-ci, avec ce témoignage, d'après une source chez Gallimard, partagé sur le forum d'à côté :
On m'a expliqué en interne que le nombre de publications, de republications, de reliés, de brochés, de collectors, de souples, de durs j'en passe et des meilleurs chez Bourgois rendait le projet assez illisible en terme de communication pour la collection et que de fait le projet était loin d'être à l'ordre du jour, pour ne pas dire mis entre parenthèses.
Pour ce qui est de la presse proprement dite, j'ai entendu dire que le journal Le 1, connu pour paraître de manière hebdomadaire et sur une seule feuille dépliable traitant à chaque fois d'un seul sujet, devrait consacrer à Tolkien un numéro hors-série à paraître pour cet été 2024.
Notre ami Vincent est censé avoir participé à ce numéro du 1, mais je n'en sais pas plus pour l'instant.
Peace and Love,
B.
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Je me permets de reproduire ici un message mis en ligne conjointement ce mercredi soir sur le réseau de Mark Z., avant d'évoquer ensuite, spécifiquement pour le présent fuseau, un article consacré à la publication d'un livre évoquant les usages politiques des fictions relevant, entre autres, de la fantasy. À la question « Pourquoi ? », on peut parfois être simplement tenté de répondre « Pourquoi pas ? »...
(Illustration de Franz von Stuck pour la couverture de la revue allemande Pan, n°1, avril 1895)
« Il faut chanter un chant pastoral, invoquer Pan, dieu du vent d'été. »
Ainsi commence la première des Chansons de Bilitis... Des Chansons que je préférerai, en ces temps persistants de deuil me concernant, pouvoir relire au calme avec, entre autres, Daphnis et Chloé de Longus, les Métamorphoses d'Ovide et celles d'Apulée, sans avoir à subir la lourdeur du climat politique actuel...
Or en ces temps de « panique » politico-médiatique et d'incitation à une certaine pensée moutonnière, j'aimerai bien parfois que le dieu Pan, comme dérangé en plein midi, vienne une bonne fois, surgissant d'un coin de nature, « flanquer la frousse » à tout le monde, et susciter une peur qui anéantirait toutes les autres peurs, celles des uns et des autres, des uns vis-à-vis des autres, de telle manière que tous en viennent notamment à se rappeler ou à se rendre compte combien leurs vies en France, tout compte fait et même avec tous leurs problèmes, sont souvent bien plus confortables que bien des existences ailleurs, ou aux frontières de l'inconnu.
Rien que de dire cela expose au jugement, et il n'y a, trop souvent aujourd'hui, que des coups à prendre lorsque l'on ose exprimer un avis, fut-il conçu comme modéré et nuancé. Mais puisque je vois que tout le monde a tendance à s'exprimer, sur les réseaux sociaux ou ailleurs, d'une manière ou d'une autre, quant à la situation actuelle, après mûre réflexion, voila mes deux centimes apportés au « débat ». Comme d'habitude, cela vaut ce que ça vaut : ne cherchant pas à plaire, ni à donner des leçons, je dis simplement ce que je pense. Un avis parmi des millions d'autres.
L'autre jour, ailleurs, pour mémoire, j'écrivais ceci :
...comme j'ai pu le dire sur le réseau de Mark Z. ce dimanche soir [9 juin], j'espérais naïvement que durant ce qui est sans doute la pire période de ma vie, la politique me laisserait un peu en paix, au moins cette année une fois les élections européennes passées... mais non...
J'avoue douter, cette nuit, que le résultat des prochaines législatives anticipées aboutisse à un relèvement significatif du niveau intellectuel en matière de « débat » public et parlementaire en France (nous sommes tombés extrêmement bas durant l'actuelle dernière législature, XVIe de la Ve République), mais bon, à l'occasion de cette dissolution de l'Assemblée Nationale (la première depuis 1997), nous verrons bien à quel point, et dans quelle mesure, nous avons la vie politique que nous méritons...
Eh bien, trois jours après le premier tour, constatons le désastre déjà général ainsi que la responsabilité collective qui va avec...
Qui osera toutefois vraiment tirer les conséquences de tout cela, qu'il s'agisse des politiciens, des électeurs et des commentateurs de tout poil ? Quelques personnes au moins, sans doute, mais pas grand monde, en l'état, je le crains... prisonniers que nous sommes, trop souvent et maintenant depuis des années, de l'entre-soi des communautés d'opinion, cet entre-soi qui favorise, notamment via les réseaux sociaux, l'incompréhension et (finalement) le rejet de l'autre, celui qui a le gros défaut de ne pas penser comme soi, a fortiori si l'on préfère voir le monde de façon binaire, en noir et blanc, du haut de ses certitudes... et d'où le fait que, dans le « débat » public actuel, on ne cherche dès lors même plus à avoir raison, mais à avoir raison de l'autre (comme j'ai déjà souvent pu le dire, mais tant pis si je me répète)...
Le nationalisme ne sort pas de nulle part, et le communautarisme non plus : au-delà des réflexes socio-culturels variablement « ethno-centriques », les deux se développent dans des contextes, marqués notamment par la frustration et le mécontentement, qui les favorisent. Or il se trouvera toujours des politiciens clientélistes et des idéologues « cultivés » pour essayer de tirer profit de tout cela, entre autres électoralement, en jouant avec démagogie sur les colères, les peurs et les sentiments particuliers d'injustice sur fond d'assignations identitaires. Ce faisant, ils agissent ainsi au détriment de l'intérêt général, particulièrement dans un pays comme la France, qui depuis la Révolution française a fait historiquement et collectivement le choix, singulier en Europe, d'un certain universalisme républicain issu des Lumières. Un tel choix rend la France, tel qu'elle est ou est censé être, à mon sens, incompatible avec lesdits nationalisme et communautarisme, lesquels ne peuvent, à mes yeux, tôt ou tard, que pervertir puis détruire ce pays et sa société, ce qui arrangerait bien du reste certains gouvernements étrangers, souvent dictatoriaux.
On ne peut pas se contenter de dénoncer ces formes de stade anal de la pensée que sont les racismes, l'antisémitisme et la xénophobie, sans examiner avec attention ce qu'il y a précisément derrière la haine et la tentation (hélas récurrente) du repli identitaire. Au-delà même de la question du rejet de l'autre, sur laquelle il peut être assez facile de se focaliser, avec une certaine bonne conscience quand on se prétend « humaniste » (noble terme malheureusement fort galvaudé aujourd'hui), je pense que l'électorat du RN ex-FN serait peut-être déjà moins important s'il n'y avait pas ce sentiment général, et largement partagé, de ras-le-bol total à l'égard des acteurs de la vie politique de ce pays, la sociologie électorale du vote RN étant aujourd'hui bien plus large qu'avant, et cela sans que le programme inconsistant du parti en question y soit forcément pour grand chose. Voila pourquoi j'ai parlé de responsabilité collective, qui ne se limite donc pas à celle d'un individu comme Macron, à celle de médias propagandistes du groupe Bolloré, ou à celle des trolls du Kremlin qui passent leur temps à polluer en ligne la vie démocratique française : ces responsabilités-là existent, ne peuvent être niées ni sous-estimées, mais elles ne sont que certaines parties d'un tout ayant engendré le désastre. Bien des fautes ont sans doute été commises, depuis des années, par beaucoup de gens, à tous les niveaux, et de tous les bords politiques, y compris donc « à gauche ». On peut toujours se raconter des histoires, en partant du principe que, lorsque l'on s'oppose à l'extrême droite, on fait partie d'un « camp du Bien » qui n'aurait pas à se poser de questions, que le monde se diviserait ainsi simplement entre « gentils humanistes progressistes » et « méchants fachos », mais ce faisant, je le crains, on se paye de mots, au risque de ne voir la réalité que de façon partielle et partiale, sans se confronter pertinemment aux problèmes qu'elle pose. Dans une tribune publiée le 12 juin dernier par le quotidien Libération, Ariane Mnouchkine a eu la franchise de mettre de bonnes questions sur la table, « Qu'est-ce qu'on n'a pas fait ? Ou fait que nous n'aurions pas dû faire ? », en constatant, s'agissant des acteurs du monde de la culture, souvent marqués « à gauche » et perçus à tort ou à raison comme représentant une élite, qu'une « une partie de nos concitoyens en ont marre de nous : marre de notre impuissance, de nos peurs, de notre narcissisme, de notre sectarisme, de nos dénis ». Encore une fois, à mon humble avis, tout le monde est responsable, et tout le monde devrait donc réfléchir, évidemment bien au-delà des enjeux électoraux immédiats.
Et du reste, si certains persistent encore aujourd'hui à l'employer publiquement comme par réflexe, la bonne vieille rhétorique « antifasciste », à l'évidence, n'est plus efficace pour contrer la montée de quelque extrémisme que ce soit. Depuis l'Italie qu'elle gouverne, Giorgia Meloni n'a pu que se réjouir, au lendemain du premier tour des élections législatives en France, du fait que la « diabolisation » de l'extrême droite ne fonctionne plus. Mais l'affaire n'est pas nouvelle. Pier Paolo Pasolini l'écrivait déjà dans les années 1970 : « Il existe aujourd'hui une forme d'antifascisme archéologique qui est en somme un bon prétexte pour se décerner un brevet d'antifascisme réel. Il s'agit d'un antifascisme facile, qui a pour objet et objectif un fascisme archaïque qui n'existe plus et qui n'existera plus jamais. » Je ne sais pas si l'on peut dire que la société de consommation est un nouveau fascisme comme le pensait Pasolini, mais les brevets d'antifascisme que l'on (se) décerne (mutuellement), avec la conscience tranquille, force complaisance et dans un théâtre d'ombres, eux existent bien, encore de nos jours et notamment ces jours-ci, en France. Or, à mon sens, parler même, fut-ce avec gravité, de fascisme et d'antifascisme aujourd'hui est aussi limité, et superficiel, que d'invoquer émotionnellement les souvenirs idéalisés du Front populaire (l'original), ceux de l'épouvantable guerre d'Espagne (« ¡No pasarán! ») et ceux sinistres du régime de Vichy. Nous ne sommes plus en 1936. Ni en 1940, bien heureusement. Et du reste, contrairement à la situation de 1940, ainsi que l'a notamment rappelé tout récemment l'historien Henry Rousso, les Français n'ont pas « l'excuse » de la débâcle face au IIIe Reich qui a permis à Pétain de mettre fin à la IIIe République : les électeurs appelés aux urnes ont cette fois-ci le destin de leur pays en main, dans un contexte dangereux mais différent en ce sens qu'ils seront grandement responsables du résultat. Voila notamment pourquoi il me parait excessif, superficiel et surtout vain de pratiquer des analogies historiques qui finissent par empêcher de voir notre présent tel qu'il est, dans sa spécificité. Le nationalisme et le communautarisme (sous toutes leurs formes), avec les risques de violence politique qui les accompagnent, sont eux des réalités, loin d'être nouvelles mais toujours présentes, et qui même historiquement dépassent largement les mémoires du XXe siècle, souvenirs dont tant de beaux discours et de postures morales restent aujourd'hui parés. Or, tant que l'on persistera à se payer de mots, à se raconter des histoires, à se contenter d'un registre émotionnel supposé sincère, pour mieux nier le réel complexe qui s'impose à nous, pour mieux refuser de voir le monde et la société tels qu'ils sont, véritablement, et tels qu'ils ont évolué, jusqu'à maintenant, et pour mieux rejeter le moindre point de vue divergeant de son propre credo, nous ne nous en sortirons pas, de cette spirale infernale et cette médiocrité intellectuelle de plus en plus généralisée. Car si je persiste à croire que “Peace and Love” est un bon slogan sur la forme comme sur le fond, et que nous avons besoin, sans doute, d'apaisement et de réconfort, il me semble que nous avons aussi, voire même surtout, besoin de penser. Et de délibérer, ensuite. On ne s'occupe pas de la politique avec sa raison seulement, mais ne s'en occupe pas non plus avec seulement ses émotions. Du moins est-ce mon point de vue.
Bien que je sois désabusé depuis longtemps, vis-à-vis du cirque politico-médiatique dont je suis les péripéties depuis le courant des années 1990, je reste convaincu que le nationalisme n'a jamais rien apporté, et n'apportera jamais rien de positif à la France. Toutefois, contrairement à certains, je n'ai pas de recommandation ou de « consigne » de vote à donner pour dimanche prochain. À mes yeux, en effet, chacun est supposé être assez « grand » pour, suivant les fameux mots de Tolkien dans Le Seigneur des Anneaux, « décider [...] quoi faire du temps qui nous est imparti » (“to decide [...] what to do with the time that is given us”), et plus précisément en l'occurrence quoi faire quand il sera dans l'isoloir, s'il veut bien se rendre à son bureau de vote (s'il en a un), et si le processus électoral démocratique a encore du sens pour lui (pour ma part, je participe à toutes les élections politiques organisées par les pouvoirs publics depuis que je suis en âge de voter, mais je ne juge pas autrui). Quant à l'avenir au-delà de cette échéance, il faudra bien, à mon sens, essayer d'ouvrir un autre chemin (de liberté dans la justice) que ceux proposés jusqu'ici, notamment « à gauche » pour ce qui concerne ma tendance politique (n'en déplaise aux puristes sectaires détestant les « socialistes modérés » comme moi), mais je ne vois pas encore comment, les divers acteurs du lepénisme, du sarko-macronisme et du mélenchonisme, chacun à leur façon, ayant pour l'heure tout saccagé...
« On ne lutte pas contre les nécessités de l'histoire », écrivait Léon Blum, en septembre 1900. Il parlait alors (dans ses Nouvelles conversations de Goethe avec Eckermann) de la réunion jugée incontournable des socialistes français, du temps de Jean Jaurès et de Jules Guesde. C'était évidemment une autre époque, que je n'idéalise pas, pas plus que celle, à peine plus récente, du Front populaire des années 1936-1938. Mais la formule de Blum peut avoir un sens bien plus général. Ce que l'histoire impose, comme nécessités, à mon sens, si l'on veut influer sur elle dans une direction souhaitable, pour un pays supposé être démocratique et pour sa société, c'est d'abord de s'efforcer de s'entendre, autant que possible, quant à savoir d'où nous venons, ce que nous sommes et où nous voulons aller (collectivement), sans se contenter de voir le monde en noir et blanc, sans nous prendre pour des héros imaginaires, sans invocation simpliste du passé, en faisant les choses sérieusement sans se prendre au sérieux, et surtout en nous voyant lucidement tels que nous sommes fondamentalement, toutes et tous, derrières nos identités multiples et nos préjugés envers autrui : a priori moins que rien à l'échelle du cosmos, et à notre petite échelle terrestre, seulement des êtres humains, curieux et sociables, faillibles et imparfaits.
À chaque fois que je termine d'écrire ce genre de long texte, j'ai l'impression de l'avoir rédigé pour rien, un peu comme si je parlais à des murs, mais bon... c'est fait.
« Il faut chanter un chant pastoral, invoquer Pan, dieu du vent d'été. »
Peace and Love.
Or donc, en attendant la suite, évoquons un peu la presse, en gardant le lien avec la littérature, puisque nous sommes sur un forum littéraire.
Le site du journal Mediapart ayant été exceptionnellement en accès libre le week-end dernier à l'occasion du premier tour des élections législatives, il est possible, grâce à la Wayback Machine, d'accéder à un article de Joseph Confavreux, mis en ligne il y a certes déjà plus de trois ans, consacré à la parution d'un livre d'Anne (Besson) et à son sujet, à savoir les usages politiques contemporains des fictions relevant de l'imaginaire. L'ouvrage en question, intéressant, comme toujours avec Anne, s'intitule Les pouvoirs de l'enchantement. Usages politiques de la fantasy et de la science-fiction. Cet essai, dans lequel l'autrice ne cache pas un certain parti pris progressiste, a été publié aux éditions Vendémiaire, et j'avais d'ailleurs songé à en parler ici à sa sortie en janvier 2021, mais finalement, cela ne s'est pas fait. L'illustration de couverture renvoie à la série télévisée américaine The Handmaid's Tale : La Servante écarlate, diffusée depuis 2017 et adaptée du célèbre roman de science-fiction dystopique de Margaret Atwood paru en 1985.
L'article de Mediapart s'apparente en fait à un compte rendu de lecture, la dimension sociale et politique du sujet du livre étant vraisemblablement ce qui était le plus susceptible d'intéresser un tel journal, lequel s'occupe généralement assez peu de littérature, d'art, de culture, du moins comme on peut le faire ailleurs dans la presse et d'autres médias. À cette aune, Tolkien est évoqué, à travers son fameux essai « Du conte de fées » (On Fairy-Stories) dans lequel il conteste la dimension péjorative que l'on attribue à l'évasion à travers la fiction. L'auteur de l'article note qu'Anne Besson propose une hypothèse originale pour expliquer les usages politiques des fictions « en ce qu'elle lie ces usages politiques à l'implication croissante des lecteurs et récepteurs, et à leur capacité nouvelle de contester l'autorité de l'auteur ». Ainsi les publics procéderaient à une appropriation des fictions de l'imaginaire d'une part pour agir politiquement et d'autre part pour remettre en cause le rôle prescripteur des auteurs quant à définir la vérité du contenu desdites fictions. Je ne suis pas sûr que, sur le principe même, Tolkien apprécierait cette nouvelle tendance, pas plus que bien d'autres écrivains devenus aujourd'hui des références « classiques ». Toujours est-il que des auteurs et autrices contemporains ont effectivement déjà eu notoirement affaire à ce phénomène, notamment J. K. Rowling.
« Les œuvres de «fantasy», nouveaux outils politiques de contestation du monde », Joseph Confavreux, Mediapart, 20 février 2021 :
https://web.archive.org/web/20240629184 … n-du-monde
Je voulais aussi parler d'une autre parution récente dans la presse, cette fois-ci dans le domaine historique, mais on verra plus tard, car j'ai assez écrit pour aujourd'hui...
Peace and Love,
B.
[EDIT (04/07/2024): corrections de fautes diverses et ajout d'un lien hypertexte, pour information, vers le propos de l'historien Henry Rousso auquel j'ai fait allusion.]
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En ce qui concerne la politique, nous verrons demain soir si nous pouvons dire comme Gandalf : « It might be worse, and then again it might be a good deal better » ou même pas...
Merci pour lien vers l’article de Mediapart, un compte rendu intéressant, le livre d’Anne Besson doit l’être encore plus.
Personnellement, je ne comprends pas qu’un lecteur, ou même un grand groupe de lecteurs se donne le droit de contester ce qu’un auteur fait de son œuvre. On peut ne pas aimer, on peut penser que c’est raté, mais l’œuvre appartient à son auteur, c’est sa vision, il en fait ce qu’il veut...
Céline
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En ce qui concerne la politique, nous verrons demain soir si nous pouvons dire comme Gandalf : « It might be worse, and then again it might be a good deal better » ou même pas...
Au lendemain de ce second tour des élections législatives en France, il y aurait eu sans doute encore des choses à dire... mais j'ai déjà assez parlé l'autre jour, et un dessin de presse de Xavier Gorce, diffusé par l'auteur sur le réseau d'Elon M. ce lundi matin, et que j'ai aussi partagé ce même lundi matin sur le réseau de Mark Z., résume finalement assez bien, à mes yeux, ce que l'on peut penser, pour l'heure, de tout cela.
Merci pour lien vers l’article de Mediapart, un compte rendu intéressant, le livre d’Anne Besson doit l’être encore plus.
You're welcome. :-)
Et le livre d'Anne est effectivement encore plus intéressant, du moins dans mon souvenir, car je n'ai pas eu l'occasion de relire mon exemplaire récemment.
Tant que j'y suis, avant d'essayer de revenir plus tard sur le sujet historique auquel j'ai fait allusion précédemment et que je souhaiterai évoquer dès que possible, je signale un article de Stéphane Hilarion, paru samedi dernier sur le site de Franceinfo, relatif l'exposition, actuellement proposée par la Cité internationale de la tapisserie d'Aubusson (au Centre Culturel Jean Lurçat du 28 juin au 30 septembre 2024), de l'ensemble des tapisseries et tapis réalisés ces dernières années d'après des illustrations de Tolkien (dans un cadre d'un projet au long cours évoqué par ailleurs en ces lieux, depuis 2017, dans un fuseau dédié) :
« Après 7 ans de travail, les 16 œuvres tissées d’après l’univers de Tolkien exposées ensemble pour la première fois à Aubusson » :
https://www.francetvinfo.fr/culture/art … 49860.html
Peace and Love,
B.
[EDIT (09/07/2024): corrections diverses et ajout d'informations concernant l'exposition à Aubusson]
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https://upload.wikimedia.org/wikipedia/ … 1_logo.svg
Pour ce qui est de la presse proprement dite, j'ai entendu dire que le journal Le 1, connu pour paraître de manière hebdomadaire et sur une seule feuille dépliable traitant à chaque fois d'un seul sujet, devrait consacrer à Tolkien un numéro hors-série à paraître pour cet été 2024.
Notre ami Vincent est censé avoir participé à ce numéro du 1, mais je n'en sais pas plus pour l'instant.
Peace and Love,
B.
Venant de recevoir mon exemplaire d'auteur, je peux enfin répondre à la question de Hyarion. Le numéro 509 du 1 sera un numéro hors-série "2 en 1" qui paraîtra le 14 août.
Au sommaire :
1er cahier : Penser avec le Seigneur des Anneaux
Zakouski : Méfions-nous des rêveurs ! (Maxence Collin)
La Valeur du mythe, recension du SdA parue le 22/10/1955 (C.S. Lewis)
Une terre à explorer, synthèse graphique (Simon Bailly)
Entretien avec Anne Besson (Maxence Collin)
Le Roman des langues (Damien Bador)
Poster de l'Ouest de la Terre du Milieu (Pauline Baynes)
2e cahier : La Forge du mythe
Des marges de l'histoire à la marche de l'Histoire (Vincent Ferré)
La Figure du mal : Quelque chose de pourri en Terre du Milieu (Marylin Maeso)
L'Attente du roi : Tolkien et la question politique (Maxence Collin)
Réenchanter le monde à l'âge de la technique (Marguerite Mouton)
Illustration de la Communauté de l'Anneau à Fendeval (Kilian Eng)
E.
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Venant de recevoir mon exemplaire d'auteur, je peux enfin répondre à la question de Hyarion. Le numéro 509 du 1 sera un numéro hors-série "2 en 1" qui paraîtra le 14 août.
[...]
Merci pour ces précisions, Elendil. Je commençais à me demander quand est-ce que l'on finirait par en parler, même si je me doutais que la parution officielle serait pour le mois d'août prochain.
La couverture de ce numéro a été rendu publique peu de temps après la mise en ligne de ton message, et il a finalement été annoncé hier, 18 juillet, une disponibilité à la commande sur la boutique en ligne du journal dès ces jours-ci, ainsi qu'en librairie, la possibilité d'achat en kiosque étant elle prévue, semble-t-il, à partir du 31 juillet.
2e cahier : La Forge du mythe
Des marges de l'histoire à la marche de l'Histoire (Vincent Ferré)
La Figure du mal : Quelque chose de pourri en Terre du Milieu (Marylin Maeso)
[...]
Le monde est petit, et j'avoue que découvrir dans le même sommaire notre ami Vincent et Marylin Maeso m'a interpellé, compte tenu de ce qui a pu être écrit, ici même, l'année dernière (j'avais moi-même réagi au propos de Vincent)... ;-)
Il se trouve que je continue de suivre, tant bien que mal ces derniers temps, les quelques interventions des intéressés, chacun de leur côté, sur le réseau d'Elon M., en cette période restant par ailleurs lourdement chargée politiquement (le réseau X, ex-Twitter, servant actuellement de théâtre en ligne pour une tragi-comédie post-électorale de plus en plus pitoyable, tous acteurs et actrices politico-médiatiques confondus : pauvre France... même en sachant que la situation, encore pré-électorale elle, est pire aux États-Unis) : n'y ayant pas vu d'échanges entre eux deux comme il y a pu en avoir, il y a quelque temps, entre Vincent et Joann Sfar, je ne peux qu'espérer qu'il y aura éventuellement eu du dialogue dans le contexte constructif de la préparation de ce hors-série du journal Le 1 dédié à Tolkien.
Ceci dit, je note que Marylin Maeso, sur le réseau d'Elon M., a précisé hier mercredi qu'elle interroge, pour sa part, la question du mal non seulement dans l'univers de Tolkien, mais aussi dans ceux de Star Wars et de Harry Potter, univers auxquels sont également spécifiquement consacrés deux numéro hors-série « 2 en 1 » du 1, à savoir les n°508 et 509 paraissant ce mois-ci : sa participation au n°509 consacré à Tolkien n'est donc pas isolée mais conjointe avec celles aux deux autres numéros, même si je suppose que chaque article pour chaque numéro se suffit à lui-même.
Une petite partie du contenu est accessible en ligne sur le site du journal. Maxence Collin termine ainsi son papier « zakouski » (soit son éditorial), « Méfions-nous des rêveurs ! » : « Nourri par d’abondantes parutions posthumes et des retraductions vivifiantes, l’intérêt pour cette œuvre [c.-à-d. celle de Tolkien] ne semble pas près d'être démenti, même s'il est parfois quelque peu malmené, entre les sursollicitations idéologiques – la Première ministre italienne Giorgia Meloni déclarant récemment y voir « un programme » – et un certain reformatage par les majors du divertissement. En témoigne encore cette année la sortie du second volet des Anneaux de pouvoir. La série, très libre, d'Amazon rend-elle justice à la hauteur de vue de Tolkien et aux questionnements que son univers adresse au nôtre ? Aux amoureux de l'œuvre de s'en faire une idée. Une chose est sûre : on ferait bien de se méfier de ces rêveurs ; sait-on jusqu'où l'espoir, le courage et le sens du devoir rapportés de la Terre du Milieu peuvent les mener ? » Cet appel à la méfiance se veut sans doute positif, mais quand je vois ce que les êtres humains sont capables de faire, au nom de ce qu'ils perçoivent de la réalité à travers leur imagination, je me dis que la tolkienophilie, comme n'importe quel centre d'intérêt lorsqu'il finit par relever d'une passion excessive, comme toute idéologie politique ou religieuse avec laquelle on meuble psychologiquement sa vie sans mesure, peut fort bien mener à tout et n'importe quoi. À chacun de juger, à cette aune, jusqu'à quel point l'œuvre de Tolkien peut éventuellement « aider à vivre (ensemble) » comme notre ami Vincent l'a affirmé, le mois dernier, sur le réseau d'Elon M. : pour ma part, vu comment les choses paraissent évoluer dans le monde comme il va, j'avoue être dans le doute. Disons simplement que si les « vieux livres » peuvent encore apporter, de nos jours, quelque-chose de stimulant pour la pensée, pour nos esprits saturés d'informations urgentes et d'images superficielles, ce sera déjà bien.
Amicalement,
B.
P. S. (19/07/2024, 14h39) : toujours sur le réseau d'Elon M., Vincent a dit ce matin être curieux de découvrir les autres textes du numéro 509. Je suppose donc que chaque auteur d'article aura été sollicité individuellement, et aura travaillé sans échanges avec les autres en amont. Mais tant mieux si cela reste une occasion, fut-ce après coup, de mieux connaître le regard d'autrui. ^^
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Ayant finalement trouvé un exemplaire de ce numéro en deux feuilles du magazine Le 1 ce mardi 30 juillet, je l'ai lu et sans surprise le contenu m'a semblé de bonne tenue.
Dans l'entretien qu'elle a accordé, Anne (Besson) continue de rappeler, toujours à juste titre, que la fantasy s'est constituée sur la base des écrits de J. R. R. Tolkien et de Robert E. Howard, mais j'avoue que si elle n'était pas là pour le rappeler, je me demande qui le ferait, tant les discours sur Tolkien et la fantasy persistent à avoir généralement tendance à plus ou moins ignorer ce fait...
« Simple » journaliste, quoique passé par un institut d'études politiques, Maxime Collin, dans son article « L'Attente du roi : Tolkien et la question politique », semble témoigner, sur le sujet, d'une bonne réflexion, fut-elle possiblement nourrie de certaines lectures de textes dédiées à la question.
Le texte « La Valeur du mythe », traduction partielle par Julien Bisson de la recension du SdA par C. S. Lewis en 1955, est intéressant comme document, de même que la reproduction, en assez grand format, de la carte de la Terre du Milieu de 1969 par Pauline Baynes.
Pour le reste, rien de bien nouveau pour qui connait déjà les auteurs et les a déjà lu ailleurs (c'est mon cas), mais la qualité est là.
Même si ce que j'appelle la « planète Tolkien » n'en est pas le sujet (mais pourrait l'être, notamment dans le sillage de la thèse de notre amie Forfirith, dédiée aux lecteurs de Tolkien pré-internet et soutenue en 2020), je signale par ailleurs au passage, et puisque, apparemment, l'on n'en parle pas même dans la presse et autres médias spécialisés, la parution, sous la direction de notre ami Vincent, d'actes d'un colloque universitaire francilien de novembre 2021 consacré aux communautés interprétatives des textes littéraires : Communautés interprétatives. Autour de Stanley Fish (dir. Vincent Ferré), paraissant chez Brill ce jeudi 1er août 2024, dans la série des Cahiers de recherche des instituts néerlandais de langue et de littérature française.
La publication est ainsi présentée : « Ce volume interroge les conditions de l'interprétation des textes littéraires, à la lumière des propositions de Stanley Fish sur L'autorité des communautés interprétatives (1980) : leurs présupposés, leurs compétences et croyances, conditionnent l'activité herméneutique, interrogée ici par des spécialistes de littérature française, espagnole ou comparée. Réfléchir au fonctionnement concret de telles communautés – création, renouvellement, adhésion, dissidence, relation concurrentielle entre communautés, volonté d'imposer une interprétation… –, amène à envisager des implications en termes de libre arbitre et d'individualité essentielles pour nos disciplines, et à repenser les relations entre texte, auteur et lecteurs, parfois en opposant des objections nouvelles aux postulats de Fish, parfois en proposant des alternatives. »
Le prix du volume est hélas prohibitif, mais une partie du contenu est accessible en ligne sur le site de l'éditeur, dont l'introduction par notre ami Vincent, laquelle, il est vrai, était déjà aussi accessible sur Academia depuis quelque temps (« Introduction : « Dis-moi comment tu lis, et je te dirai qui tu es ». D'une communauté à une autre ») :
https://brill.com/display/title/69869
Il y aurait sans doute, à cette aune, bien des choses à dire concernant les communautés interprétatives tolkieniennes (au-delà donc de l'aire linguistico-culturelle anglo-américaine, fut-elle dominante : on ne saurait dès lors forcément parler d'une seule communauté interprétative) et leur rapport aux textes de Tolkien, notamment depuis le début de ce siècle, sachant que l'on a affaire de plus en plus à ce que Anne appelle, justement dans son entretien paru dans Le 1 précédemment évoqué, « l'expansion de l'univers tolkiénien » via le « côté transmédiatique » de la fantasy telle qu'elle est de nos jours exploitée par l'industrie culturelle.
Amicalement,
B.
P. S. (01/08/2024) : la parution des actes du colloque a finalement bien été signalée sur le site de Fabula :
https://www.fabula.org/actualites/12196 … -fish.html
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Signalée cet après-midi par Vincent sur le réseau d'Elon M., une série d'articles (« Tolkien et les paysages ») mis en ligne ce matin sur le site du média The Conversation, série consacrée aux paysages de la Terre du Milieu, par Blandine Gourcerol, ingénieur(e) chercheuse et chef de projet au BRGM (Bureau de Recherches Géologiques et Minières) :
Montagnes et volcans :
https://theconversation.com/tolkien-et- … ieu-235440
Vallées, rivières et lacs :
https://theconversation.com/tolkien-et- … ieu-234293
Métaux précieux, trésors cachés :
https://theconversation.com/tolkien-et- … ieu-232664
Peace and Love,
B.
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Merci Hyarion pour ces derniers messages et cette belle collection de liens !
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oui, merci beaucoup !
pour être précis : j'ai beaucoup échangé avec Maxence Collin, proposé des plumes pour deux articles ,joué aux chaises musicales (et échangé un article avec celui que j'ai écrit) et discuté avec lui de ses propres textes - il connait bien les oeuvres des Tolkien et c'était très agréable. Pour le reste : je n'ai pas au accès aux textes en dehors de ceux de Damien Bador & Marguerite Mouton. il devait aussi y a voir un texte d'Alice Zeniter, je l'attendais avec intérêt
amicalemet
v
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oui, merci beaucoup !
pour être précis : j'ai beaucoup échangé avec Maxence Collin, proposé des plumes pour deux articles ,joué aux chaises musicales (et échangé un article avec celui que j'ai écrit) et discuté avec lui de ses propres textes - il connait bien les oeuvres des Tolkien et c'était très agréable. Pour le reste : je n'ai pas au accès aux textes en dehors de ceux de Damien Bador & Marguerite Mouton. il devait aussi y a voir un texte d'Alice Zeniter, je l'attendais avec intérêt
Merci à toi pour ces précisions, cher Vincent.
Merci Hyarion pour ces derniers messages et cette belle collection de liens !
You're welcome, cher Cédric.
Cela fait plusieurs jours, et même plusieurs semaines maintenant, que j'ai prévu de partager d'autres choses en ces lieux, mais outre le fait qu'écrire en juillet-août est devenu difficile depuis quelques étés, cette année c'est pire que tout... Ceci dit, j'espère encore arriver à quelque-chose dans les prochains jours...
Amicalement (à tous les deux),
B.
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Pas vraiment dans la presse mais un petit article plutôt intéressant :
https://libraryofbabel2.substack.com/p/ … ways-about
C.
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La maison d'édition Christian Bourgois Éditeur vient de faire l'objet d'un accord de rachat par le groupe d'édition Madrigall, groupe présidé par Antoine Gallimard, lequel a conclu l'accord de rachat avec Olivier Mitterrand. Ce dernier, en tant que dirigeant du fonds d'investissement de la famille Mitterrand, avait pris le contrôle de Christian Bourgois Éditeur en janvier 2019. Pour mémoire, c'est dans ce contexte que son frère, Frédéric Mitterrand, avait temporairement dirigé la maison d'édition Bourgois, ce dont on avait alors un peu parlé en ces lieux :
https://www.jrrvf.com/fluxbb/viewtopic. … 506#p87506
Frédéric Mitterrand, décédé le 21 mars dernier, avait en fait simplement assuré, pendant quelques mois, du printemps à la fin de l'été de l'année 2019, la transition de la direction éditoriale de la maison Bourgois, entre le départ de Dominique Bourgois et l'arrivée de Clément Ribes, lequel a lui-même quitté depuis ladite maison (en 2021).
Bourgois faisant désormais partie de l'empire de l'édition de Gallimard, on verra bien si la situation, devenue assez peu glorieuse ces dernières années, de la maison d'édition historique de Tolkien en France s'en trouvera éventuellement améliorée...
Peace and Love,
B.
P.S. : Je persiste à penser, comme je l'avais écrit à l'époque, que Frédéric Mitterrand était un bon documentariste et écrivain. Pour qui ne connaitrait pas et serait curieux, je recommande Les Aigles foudroyés, qui est à la fois une série documentaire diffusée à la télé en 1997 et un livre paru également en 1997 (réédité en 2016), le tout consacré à la décadence et la chute des empires et dynasties des Habsbourg, des Romanov et des Hohenzollern, durant le dernier quart du XIXe siècle (à peu près) et le premier quart du XXe siècle (une partie du propos est aussi consacré à d'autres souverains européens de la période, notamment au roi britannique francophile Édouard VII, oncle du kaiser Guillaume II et de l'épouse du tsar Nicolas II, Alix de Hesse). C'est bien raconté, et bien écrit : mes bons souvenirs en ce sens remontaient à loin (j'avais découvert la série de Mitterrand à l'époque de sa première diffusion télévisée, puis son livre assez peu de temps après, lors de sa première parution en format de poche, vers 1998), mais ils ont été ravivés durant cet été, par le re-visionnage (malgré la très modeste qualité des images des vidéos sur YouTube, repiquées de vieilles cassettes VHS) et par la replongée dans l'écrit (je suis tombé sur la nouvelle édition de 2016 du livre en poche, chez une bouquiniste en juillet dernier), et ce malgré la morosité générale...
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Je voulais aussi parler d'une autre parution récente dans la presse, cette fois-ci dans le domaine historique, mais on verra plus tard, car j'ai assez écrit pour aujourd'hui...
Suite à un clin d'œil de notre ami JR/Isengar dans un autre fuseau, je trouve le courage d'aborder enfin ce point, après avoir longtemps reporté (comme pour plein d'autres choses...).
Voila ce dont il s'agit : la publication récente d'un numéro thématique de la série « Collection » (n°103, avril-juin 2024) du magazine L'Histoire consacré à l'Espagne de Franco. La parution de ce numéro trimestriel coïncide avec l'organisation d'une exposition, « Anatomie du franquisme », présentée à Toulouse du 4 avril au 22 septembre 2024 au Musée départemental de la Résistance & de la Déportation de la Haute-Garonne, première exposition générale en Europe sur le sujet.
L'Histoire « Collection », n°103, avril-juin 2024.
Ce numéro thématique trimestriel a été assez récemment précédé, vers la fin de l'année 2022, par la parution, dans un numéro mensuel habituel de L'Histoire (n°502, daté de décembre 2022), d'un entretien (p. 12-22) avec l'historien François Godicheau à propos des enjeux mémoriels autour de Franco, suite à la parution en français d'un ouvrage espagnol révisionniste (anti-républicain) concernant la guerre d'Espagne.
L'Histoire, n°502, décembre 2022.
François Godicheau fut ATER en histoire contemporaine à l'Université Toulouse II-Le Mirail dans la première moitié des années 2000, du temps où j'étais moi-même étudiant en histoire dans cette université, devenue aujourd'hui l'Université Toulouse II-Jean Jaurès et où ledit Godicheau est maintenant, depuis 2015, professeur d'histoire contemporaine (et membre du laboratoire de recherche FRAMESPA, que j'ai fréquenté dans le temps...). Spécialiste de l'histoire de l'Espagne contemporaine, auteur notamment de La guerre d'Espagne : de la démocratie à la dictature, paru dans la collection « Découvertes » de Gallimard en 2006, il est le coordonnateur du projet de cycle scientifique et mémoriel sur le franquisme auquel appartient l'exposition présentée actuellement à Toulouse (pour encore quelques jours), exposition dont il est aussi le commissaire général.
Le numéro mensuel de L'Histoire de décembre 2022 avait proposé un entretien avec Godicheau pour analyser la controverse autour de l'ouvrage très polémique de l'essayiste Pío Moa, Les mythes de la Guerre d'Espagne (Los orígenes de la guerra civil), publié il y a plus de vingt ans en Espagne où il a connu un grand succès de librairie mais publié en français seulement en mars 2022. Ancien marxiste-léniniste et maoïste repenti, Moa est devenu un polémiste très conservateur, cherchant à réhabiliter Franco et à faire du camp républicain le responsable du déclenchement de la guerre civile en 1936, guerre civile pourtant notoirement provoquée par la tentative de coup d'État de généraux nationalistes (dont Franco) contre le gouvernement légitime de la IIe République espagnole. La démarche de Moa n'est pas celle d'un historien, puisqu'il ne retient des documents et faits historiques que ce qui lui est utile pour appuyer sa thèse antéposée. Cela n'avait pas empêché notamment Le Figaro de faire la promotion du livre lors de la parution de sa traduction en français, en particulier en publiant en juillet 2022 dans Le Figaro Histoire un entretien avec Pío Moa, ce pourquoi le magazine L'Histoire avait notamment réagi en publiant dès le mois d'août une critique du livre par Benoît Pellistrandi, puis donc un entretien avec François Godicheau dans son numéro 502 de décembre 2022 susmentionné.
L'entretien accordé par Godicheau à L'Histoire en 2022 était accompagné – comme toujours dans ce magazine auquel je suis abonné depuis maintenant presque un quart de siècle –, d'une riche iconographie, ainsi que d'une infographie consacrée au bilan des victimes de la guerre civile espagnole et de la dictature franquiste qui lui a succédé, pour rétablir l'exactitude des chiffres face aux affirmations de Pío Moa.
Une bonne partie de l'entretien allait au-delà de la polémique autour du livre de Moa, et à cette occasion Godicheau a évoqué notamment la question de la nature du franquisme. Je me permets de reproduire un extrait de l'entretien, qui expose bien les données du problème :
[...]
L'Histoire : Le franquisme est-il un fascisme ?
François Godicheau : Un historien espagnol expliquait de façon humoristique que parler du franquisme comme fascisme était un peu comme « prononcer les mots qui allaient ouvrir les sept sceaux » du livre de l'Apocalypse(*). Le débat existe, tout à fait sérieusement, et se développe sur la base de très nombreux travaux, avec des arguments raffinés.
Un des principaux problèmes posé par le franquisme pour une définition est sa longue durée, de 1936 à 1977 et les premières élections libres. Le régime s'est adapté dans le cadre de la défaite de l'Axe en 1945, puis de la guerre froide : une adaptation volontaire, consciente, motivée par la survie, et qui s'est traduite par un véritable succès. Cette longévité et les différences importantes entre ses premières et ses dernières années font qu'il est difficile de qualifier sa nature à partir d'une unique catégorie. Ce défi pourrait pourtant être envisagé comme une chance, une occasion de réfléchir sur les continuités de l'histoire contemporaine : comment un régime parfaitement analysable comme faisant partie du mouvement international de réaction fasciste de l'entre-deux-guerres a pu, tout en maintenant de fortes permanences, donner lieu, sans rupture, à une monarchie parlementaire démocratique ? Il y a un potentiel très dérangeant dans cette question qui devrait être un stimulus pour la recherche interdisciplinaire.
En laissant de côté cette question de la durée et en se concentrant sur les quinze ou vingt premières années, on peut néanmoins affirmer que le degré de violence politique déployée, son caractère systématique et les objectifs de transformation sociale et de régénération nationale servis par cette violence constituent un argument en faveur d'un fascisme espagnol. En effet, le franquisme, né pendant la guerre, est en même temps le résultat de cette guerre : une guerre d'extermination de l'adversaire politique qui s'est traduite par une mobilisation sans précédent dans l'histoire du pays et par un amalgame ultranationaliste original. La terreur franquiste pendant la guerre et l'après-guerre présente un bilan terrible : près de 200 000 morts, dont des dizaines de milliers d'exécutions après la fin officielle de la guerre civile ; un nombre de prisonniers effarant, sans doute proche du million au plus fort de la période, pendant les années 1940 ; près de 300 camps de concentration ; les bataillons de travail ; la pratique généralisée de la torture et les mauvais traitements de toutes sortes.
Pendant des années après 1939, l'Espagne fut, pour reprendre le titre d'un livre important, une « immense prison »(**). Il faut en effet considérer celles et ceux qui étaient enfermés dans les divers lieux de réclusion, mais aussi leurs familles, au-dehors, qui étaient sous une surveillance constante. L'attitude des prisonniers vis-à-vis de l'entreprise visant à les (re)convertir au catholicisme national pouvait avoir des conséquences directes et terribles sur leurs femme et enfants, dans les villages. Inversement, l'attitude de ceux-ci déterminait les conditions d'incarcération des individus enfermés. L'ensemble était contrôlé à travers un système de fichage généralisé et de surveillance dont les bases furent posées de manière systématique dès les premiers mois de la guerre, comme l'a bien montré l'historien madrilène Gutmaro Gómez Bravo(***).
L'objectif était d'abord d'éradiquer « l'anti-Espagne », c'est-à-dire toutes les personnes, organisations, idées et pratiques qui ne correspondaient pas à la conception intégriste de la société espagnole née dans le feu de la « croisade ». Il s'agissait également d'un véritable projet de conversion générale, de purification, une terreur de longue durée, pensée et exécutée comme telle, que l'on peut analyser en termes d'ingénierie sociale. Pour finir, si l'on a traditionnellement considéré que ce projet était régressif, regardait vers le passé de l'Espagne, ce qui en ferait un projet réactionnaire plutôt que fasciste à proprement parler, des recherches récentes prennent au sérieux l'idée de régénération et montrent la continuité de cet objectif chez les idéologues franquistes tout au long de la dictature(****).
Au total, toute l'historiographie du franquisme montre que ce régime fut beaucoup plus sanglant que le fascisme mussolinien. Son étiquetage comme fasciste est une autre question, sans doute plus politique, qui engage à préciser ce qu'on entend par fascisme. Si l'on aborde le fascisme dans sa dimension internationale, et même dans une perspective résolument transnationale, l'attention se concentre sur les phénomènes de violence d'État et les fascismes tendent à être analysés comme une réponse multiforme à une crise généralisée des régimes parlementaires européens après la Première Guerre mondiale, comme une tentative contre-révolutionnaire de soutien à l'ordre social, que rejoint le projet franquiste.
À l'inverse, la place restreinte du parti unique (la Phalange) dans la mobilisation, le caractère inadéquat de l'idée de révolution fasciste ou la place centrale occupée par l'Église catholique sont quelques-uns des arguments qui conduiraient à ne pas l'inclure dans les fascismes.
[...]
(*) Cf. J. Rodrigo, « La naturaleza del franquismo: un acercamiento desde la perspectiva comparada de los fascismos europeos », C. R. Salvado, Universo de micromundos. VI Congreso de historia local de Aragón, Saragosse, Prensa de la Universitad de Zaragoza, 2009, p. 61.
(**) C. Molinero, M. Sala, J. Sobrequés i Callicó (dir.), Una inmensa prisión. Los campos de concentración y las prisiones durante la guerra civil y el franquismo, Barcelone, Crítica, 2003.
(***) G. Gómez Bravo, Geografía humana de la represión franquista. Del Golpe a la Guerra de ocupación, 1936-1941, Madrid, Cátedra, 2017.
(****) Cf. B. Chamouleau, mémoire inédit d'HDR, « Politique des savoirs sur l'ordre civil post-franquiste : une histoire des droits humains en Espagne, années 1940 à 1990 ».
« Franco : l'histoire comme champ de bataille », entretien avec François Godicheau (propos recueillis par François Mathou), in L'Histoire n°502, décembre 2022, p. 17-19.
Cet entretien de 2022 avec Godicheau apparait, avec le recul, annonciateur du tout récent numéro thématique de L'Histoire paru cette année (L'Histoire « Collection », n°103, avril-juin 2024) et que j'ai d'abord évoqué plus haut. Entièrement consacré au sujet de l'Espagne de Franco (1936-1975), du début de la guerre civile à la mort du dictateur (et même au-delà, jusqu'aux questions mémorielles toujours actuelles), ce numéro de 132 pages contient de nombreuses contributions, avec la participation de François Godicheau, mais aussi d'autres spécialistes français et internationaux, dont l'historien britannique Paul Preston, auteur notamment du livre majeur Une guerre d'extermination. Espagne, 1936-1945 (Paris, Belin, 2016, rééd. Tallandier, coll. « Texto », 2019) dont j'ai déjà eu l'occasion de parler en ces lieux (dans un autre fuseau, il y a quelques années). Ce magazine, qui est en fait un mook (ou livre-magazine), apparait, du reste, par son contenu écrit et par ses nombreuses illustrations, cartes et infographies, comme faisant un peu office de catalogue de l'exposition toulousaine dont j'ai parlé plus haut (plusieurs exemplaires étaient en vente à la boutique du musée lors de ma visite, en juillet dernier), et en tout cas, il accompagne le propos de l'expo de manière très complémentaire (en reproduisant notamment des documents, objets et œuvres d'art présentées dans cette exposition).
Les contributions que contient ce numéro thématique abordent de nombreux aspects de ce vaste sujet : la personnalité de Francisco Franco Bahamonde et son entourage, la guerre civile (1936-1939) qui fut une guerre d'extermination ayant permis l'établissement de la dictature, l'exil (la Retirada) des républicains espagnols ayant pu s'enfuir à l'étranger et en particulier en France, la résistance désespérée des maquis républicains jusqu'en 1952, la terrible famine et les pénuries que connurent les Espagnols entre 1939 et 1952 du fait de la politique autarcique d'un gouvernement nationaliste, les piliers du franquisme (armée, parti unique, Église catholique, figure de Franco, terreur et répression, nationalisme, castillan comme langue privilégiée), le contexte géopolitique international qui permit au régime de Franco de survivre dans l'Europe de la guerre froide, les quarante ans de répression épouvantable pratiquée par la dictature franquiste avec des mesures punitives dépassant les dictatures italienne (fasciste, au sens premier du terme) et portugaise (salazariste), la politique familiale espagnole sous contrôle de l'Église catholique, la modernisation malgré tout de l'Espagne dans les années 1960, les oppositions au régime qui persistèrent après la fin de la lutte armée, la lente agonie de Franco en 1975, l'amnistie et la transition démocratique entre 1975 et 1982, la guerre des mémoires jusqu'à nos jours...
À noter que parmi les infographies proposés dans le mook, l'une d'elles présente à nouveau le bilan des victimes de la guerre civile espagnole et de la dictature franquiste, en corrigeant « légèrement » à la baisse le nombre de victimes des franquistes durant la guerre civile (130 000) par rapport au nombre donné dans l'infographie de 2022 évoquée plus haut (140 000), mais sans que cela modifie le caractère accablant du bilan des victimes du franquisme (180 000, dont 50 000 sous la dictature après la guerre civile), bilan qui reste bien plus élevé que celui des victimes attribué aux républicains (49 000 durant la guerre civile). Les statistiques comparées n'expliquent pas tout, évidemment, et ne dispensent pas d'entrer dans le détail de ce bilan des victimes concernant l'un et l'autre camp (ce qu'a notamment fait Paul Preston dans son ouvrage susmentionné), mais ledit bilan général doit sans doute, à l'évidence, régulièrement être rappelé (quitte à l'affiner en fonction de l'état de recherche) face à certaines tentations révisionnistes visant à réhabiliter Franco...
La question « Le franquisme est-il un fascisme ? », déjà abordée en 2022 dans l'entretien avec François Godicheau que j'ai cité plus haut, est reposée à nouveau en 2024 dans ce magazine, mais cette fois-ci à trois historiens en proposant les points de vue de Godicheau (plus succinct que dans l'entretien de 2022) et ceux de Marie-Anne Matard-Bonucci (laquelle voit dans le franquisme une forme de traditionalisme totalitaire, caractérisé idéologiquement notamment par un national-catholicisme) et de Gutmaro Gómez Bravo (qui considère le franquisme comme étant une dictature militariste et antimoderne).
Pour une approche plus spécifiquement tolkienienne des choses, sachant que le positionnement pro-franquiste de J. R. R. Tolkien fut notoirement motivé par sa foi catholique conservatrice sur fond d'anti-communisme par ailleurs répandu au Royaume-Uni, les articles les plus intéressants de ce numéro thématique sont sans doute ceux concernant l'attitude de l'Église catholique durant toute cette période (de 1936 jusqu'à la fin de la dictature), principalement l'article de Benoît Pellistrandi « L'Église, du soutien à la dissidence » (p. 78-83). On y développe un propos qui complète largement ce qui est dit à sur ce sujet particulier dans l'exposition toulousaine, expo dont je partage ici un extrait du commentaire accompagnant les documents et objets présentés, notamment une affiche franquiste datant des environs de 1939 (année de la victoire militaire de Franco, qui reçu des félicitations du pape Pie XII pour cela) et célébrant la croisade national-catholique aboutissant à l'« Espagne, guide spirituel du monde » :
“1ª Cruzada - España orientadora espiritual del Mundo”.
Affiche espagnole franquiste, vers 1939.
L'Église catholique espagnole fut la première allié de Franco dans sa Croisade contre « l'anarchie », « le socialisme » et le « laïcisme » qu'incarnait à ses yeux la IIe République. La majorité de ses ministres appuyèrent le coup d'État dès le départ et offrirent à ses auteurs une couverture morale, bénissant l'épuration sanglante de l'Espagne par Franco, le « Caudillo d'Espagne par la Grâce de Dieu ». Au cours de ces quatre décennies, l'Église, âme de l'État Nouveau, marcha main dans la main avec le dictateur, légitimant son pouvoir, le protégeant et contribuant à réduire au silence la voix des centaines de milliers de victimes. Cependant la « faveur de Dieu » et l'alibi national-catholique avaient un prix. En échange du masque religieux qui prétendait cacher la nature violente et totalitaire du régime, l'Église et la religion catholique inondèrent tous les espaces de la société : l'éducation, les mœurs, l'administration, les fêtes, les traditions, les symboles. L'objectif était la re-catholicisation de l'Espagne. L'Église récupéra ses privilèges institutionnels que la République avait réduits, tout en négociant avec le régime de nouveaux accords. Le nouveau concordat signé avec le Vatican en 1953 réaffirma le caractère confessionnel de l'État, proclama l'unité catholique et confirma, en vertu des accords signés avec les États-Unis, la réhabilitation internationale de la « démocratie organique » et catholique de Franco. Pourtant, dans les années qui suivirent, la hiérarchie ecclésiastique, le catholicisme et le clergé espagnols furent affectés eux aussi par les changements sociaux, économiques et culturels qui touchèrent le pays et défièrent la dictature.
Extrait du propos de l'exposition « Anatomie du franquisme », présentée à Toulouse du 4 avril au 22 septembre 2024 au Musée départemental de la Résistance & de la Déportation de la Haute-Garonne.
L'article de Pellistrandi dans le numéro thématique de L'Histoire, rappelle utilement pour sa part que si l'Église catholique fut très longtemps un des piliers fondamentaux de la dictature franquiste, laquelle dictature lui ayant permis, par sa mainmise politico-religieuse sur l'éducation, la politique familiale et jusqu'à l'état civil, d'imposer son ordre moral ultra-conservateur dans tout le pays (et notamment au détriment des femmes), un délitement de l'alliance étroite entre l'Église et l'État espagnol se produisit dans les années 1960, avec une entrée en dissidence d'une grande partie de l'Église espagnole vis-à-vis du national-catholicisme : un certain progressisme chrétien catholique favorable à la démocratie émergea, via les mouvements de l'Action catholique diffusant progressivement la doctrine sociale de l'Église héritée des papes Léon XIII et Pie XI, tandis que le concile Vatican II et l'élection de Paul VI en 1963 entrainèrent des changements dans les relations entre l'Église et Franco, le Vatican devenant de moins en moins complaisant avec ce dernier et la dimension national-catholique de son régime dictatorial.
Aujourd'hui, comme le rappelle Yves Saint-Geours dans un autre article du mook (p. 83), l'Église espagnole conserve des privilèges fiscaux hérités du franquisme, et reste influente dans l'enseignement (près du tiers des élèves espagnols sont scolarisés dans des établissements catholiques, contre 17 % en France, lesdits établissements catholiques espagnols bénéficiant d'un financement de l'État par contrat), mais l'Espagne a cependant connu une sécularisation très importante depuis la fin de la dictature et surtout depuis le début de ce siècle.
Je terminerai en signalant un autre article de ce numéro thématique, par l'historienne de l'art Paula Barreiro López, qui enseigne à l'Université Toulouse II-Jean Jaurès, Résister par la peinture malgré tout (p. 84-89), article dans lequel elle évoque le travail d'artistes figuratifs espagnols ayant bravé, dès les années 1940 et 1950, les menaces de censure et de répression de la dictature franquiste à travers des oeuvres engagées. L'article est accompagné de reproductions commentées d'œuvres présentes dans l'exposition toulousaine (sous leur forme originale ou en fac-similé), par exemple L'Odeur de la corde (Olor de soga), tableau surréaliste peint par Aurelio Suárez en avril 1947, qui exprime notamment la peur générale de subir une condamnation à la potence, suivant le caprice d'une justice franquiste s'imposant brutalement à tous dans la société espagnole de l'époque.
Aurelio Leonardo Suárez Fernández, dit Aurelio Suárez (1910-2003).
Olor de soga (L'odeur de la corde), 1947.
Huile sur toile, 46 x 38 cm.
Collection privée.
En 2003, Joseph Pearce prétendait justifier une opinion pro-franquiste, telle que fut notamment celle de J. R. R. Tolkien, concernant Franco et la guerre d'Espagne en affirmant que le conflit aurait simplement opposé « christianisme et athéisme ». Ledit Pearce préférait en effet interpréter ainsi, de façon univoque, les points de vue échangés entre C. S. Lewis et le poète et satiriste sud-africain Roy Campbell, devant Tolkien ayant pris le parti de Campbell, lors de leur rencontre oxonienne d'octobre 1944 évoquée dans la Lettre 83 de Tolkien à son fils Christopher : « En voyant la guerre en Espagne comme un combat à mort entre Chrétienté traditionnelle et athéisme séculier, Campbell était plus proche de la réalité que ne l'était Lewis avec sa représentation simplifiée d'une bataille entre « gauche » et « droite ». La guerre était au-delà de la politique. C'était un combat pour l'âme et le coeur religieux de l'Europe. » (Cf. Joseph Pearce, C.S. Lewis And The Catholic Church, San Francisco, Ignatius Press, 2003, 5. “Inklings and Reactions”, traduction de votre serviteur. VO : “In seeing the war in Spain as a fight to the death between traditional Christianity and secular atheism, Campbell was closer to reality than was Lewis with his simplified depiction of a battle between 'left' and 'right'. The war was beyond politics. It was a struggle for the religious heart and soul of Europe.”).
Le moins que l'on puisse dire, c'est que, n'en déplaise à Pearce, la vision de Campbell et la sienne ne sont pas moins simplistes que celle de Lewis s'agissant de la « réalité » (à la fois forcément politique, religieuse, sociale... et forcément complexe) de la guerre d'Espagne et de ses conséquences terribles déjà à l'oeuvre à l'époque de la discussion, en 1944, période où l'impitoyable répression du régime national-catholique de Franco déjà battait son plein, et ne s'arrêterait pas avant très longtemps. On pourra noter que le message exprimé sur l'affiche franquiste des environs de 1939 montrant l'« Espagne, guide spirituel du monde » (“España orientadora espiritual del Mundo”), évoquée plus haut, semble au fond illustrer assez pertinemment (mais fort peu glorieusement) le point de vue « apolitique » de Pearce...
Voila notamment pourquoi il me paraitra toujours important de rappeler les faits historiques, dans toute leur complexité et tels que les historiens aident à mieux les connaitre par leurs travaux de recherches, face aux tentations de n'avoir qu'un point de vue « supérieurement » (?) spirituel, religieux, idéologique, pour prétendre comprendre le passé et les témoins de celui-ci...
Peace and Love,
B.
[EDIT: correction de fautes]
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Merci pour cette revue très intéressante, Hyarion.
Mais je ne suis toujours pas daccord avec l'expression "positionnement pro-franquiste de J. R. R. Tolkien"
I.
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You're welcome, Isengar. ^^
Mais je ne suis toujours pas daccord avec l'expression "positionnement pro-franquiste de J. R. R. Tolkien" ;)
Tu sais bien que, au-delà même de l'expression, je ne cherche pas à imposer mon point de vue, mon cher JR, mais simplement à faire réfléchir sans vouloir chercher la vérité tout seul (ou prétendre l'avoir trouvé). ;-)
Pour compléter mon message précédent, même si, j'en conviens volontiers, les indices d'une sympathie en soi ne valent pas preuve d'une « adhésion » formelle, je pense que J. R. R. Tolkien avait assez clairement une préférence pour un des camps en présence durant la guerre d'Espagne, en l'occurrence le camp de Franco : le peu d'éléments que nous avons, même s'ils sont fragmentaires, me paraissent aller dans ce sens, et cela sans avoir besoin de « tordre » les faits ou de les surinterpréter. Le catholicisme conservateur de l'écrivain a logiquement motivé cette préférence, particulièrement sans doute en raison des violentes exactions anticléricales et antireligieuses commises du côté du camp républicain.
Je pense aussi, à cette aune, que Tolkien a pu probablement lire, entre autres et pour se forger une opinion, la « Lettre collective de l'épiscopat espagnol aux évêques du monde entier », datée du 1er juillet 1937 et dans laquelle l'ensemble des évêques espagnols (seuls les évêques de Vitoria, Tarragone et Orihuela [Murcie] ne signèrent pas cette lettre collective) ont entendu justifier leur « position face à la guerre », en accréditant notamment l'idée que la rébellion des nationalistes franquistes de juillet 1936 contre le régime républicain aurait été un mouvement préventif et défensif face à un soulèvement communiste qui aurait été en préparation avant ladite rébellion du camp d'en face (thèse franquiste jouant un rôle central dans la propagande du régime, et à partir de laquelle furent fabriqués des faux grossiers). Dans ce contexte, l'épiscopat espagnol de l'époque a présenté le conflit comme un affrontement manichéen opposant, d'un côté, un « mouvement national » prétendant défendre « l'ordre », « la patrie », « la civilisation traditionnelle » et « la religion », et d'un autre côté, « une révolution communiste », « matérialiste », « cruelle », « anti-espagnole » et surtout « anti-chrétienne ». Cette lettre collective des évêques espagnols contient tous les éléments nécessaires, notamment « spirituels », pour façonner une opinion catholique conservatrice « mondiale » en faveur d'un parti pris politique (évidemment franquiste) vis-à-vis de la guerre civile espagnole, au-delà même d'une inclinaison intellectuelle de ladite opinion a priori déjà plutôt favorable sur le principe.
Par ailleurs, même si on ne saura jamais ce que Francis Xavier Morgan aurait pensé de la guerre d'Espagne, puisqu'il est mort en 1935, il semble que celui-ci ait eu a priori plutôt tendance à considérer le régime de la IIe République espagnole comme étant illégitime, du moins si l'on en croit la critique qu'il fait, dans un passage d'une lettre citée par José Manuel Ferrández Bru, des élections municipales espagnoles d'avril 1931 dont les résultats sont à l'origine du changement de régime, avec la chute de la monarchie et le départ en exil du roi Alphonse XIII (un Bourbon catholique accommodant avec les pratiques dictatoriales du pouvoir en Espagne durant les dernières années de son règne, mais aussi, incidemment [©Elendil], un pícaro, comme le révèle un petit documentaire très court d'ARTE, mis en ligne en février dernier, au contenu explicite interdit en libre accès entre 06h00 et 22h00, mais disponible jusqu'en octobre 2028). La République étant perçue par ses adversaires comme l'antichambre de la révolution, je ne serais pas surpris que le père Francis Morgan ait eu un avis similaire. Or sur ce sujet, comme sur d'autres concernant l'Espagne et sa société, quelle influence aura pu avoir, sur le regard de J. R. R. Tolkien, celui qui fut son tuteur tenu en très haute estime, un prêtre catholique hispano-britannique vivant au Royaume-Uni mais ayant gardé des liens familiaux forts avec l'Espagne et vraisemblablement bien plus conservateur que libéral ? Cela fait partie des (quelques) éléments à prendre en compte, tant bien que mal.
Je ne suis pas sûr en tout cas que Tolkien ait été bien conscient, par exemple, de la dimension paradoxalement en partie religieuse du ressentiment suscité par les représentants de l'Église chez des populations chrétiennes pauvres se sentant trahies par le clergé, dans un contexte de tensions sociales extrêmement fortes en Espagne durant les décennies précédant la guerre civile. Cela a fait partie des motivations à l'origine de la violence anticléricale observée durant les premiers mois de l'affrontement provoqué par le coup d'État nationaliste de juillet 1936, dans un contexte d'exactions relevant aussi cependant et clairement de la terreur révolutionnaire. Voici ce qu'écrit François Godicheau, que je cite donc à nouveau, à propos de ce qui s'est passé du côté républicain, fut-ce durant une période plus courte et pour un bilan de victimes nettement moins élevé qu'en ce qui concerne la camp franquiste, ainsi que je l'ai évoqué dans mon précédent message :
[...] l'écroulement de l'État républicain [dans le contexte chaotique du début de la guerre civile] et la disparition de sa force coercitive ont entraîné une privatisation de la violence entre les mains des organisations politiques, mais aussi d'individus isolés mus par des motifs strictement personnels. Des dizaines de milliers de civils sont victimes d'une terreur révolutionnaire dont la violence est partout la réponse à la brutalité de la domination sociale : ceux qui sont assassinés derrière le mur du cimetière ou au bord d'un fossé par les hommes armés des comités locaux sont des propriétaires et des patrons s'étant distingués par leur intransigeance lors des conflits récents, des militants d'extrême-droite, phalangistes et carlistes, considérés comme des ennemis à abattre dans une guerre qui, pour tous ceux qui portent des armes, ne se réduit pas à un lointain front.
Parmi les victimes, un groupe se détache par le nombre, les ecclésiastiques, curés de village, moines et moniales, pris très vite pour cibles comme autant de soldats en robe noire ou brune. Les prises de position presque quotidiennes de l'Église et de ses moindres représentants, adversaires avoués de la République, systématiquement solidaires, dans les conflits sociaux villageois, avec les propriétaires et la Garde civile, font de ces hommes et de ces femmes l'exutoire privilégié de la colère populaire. Dans la violence à leur encontre, dans les incendies d'églises et de couvents et dans l'acharnement iconoclaste contre statues et objets sacrés, on trouve aussi bien la volonté de désacralisation des anarchistes libres-penseurs qu'une haine plus sombre et profonde, elle-même religieuse, à l'encontre de représentants de la foi traîtres à leur mission de bergers et de garants de l'unité de la communauté.
Bien que condamnée par un gouvernement mi-passif mi-impuissant et bientôt par l'ensemble des organisations républicaines et révolutionnaires, cette violence n'est pas complètement « incontrôlée », à la différence de la répression dans le camp franquiste : l'implication des comités révolutionnaires fait d'elle une terreur révolutionnaire, ressentie par beaucoup comme nécessaire pour gagner à la fois la guerre et la révolution, et « garantie » par des groupes de « milices de l'arrière » et autres « patrouilles de contrôle ».
François Godicheau, La guerre d'Espagne. De la démocratie à la dictature, Paris, Gallimard, collection « Découvertes », 2006, chapitre 1, p. 30-32.
Bien évidemment, je préfèrerai que l'on puisse en savoir bien davantage sur l'opinion de Tolkien, sachant que sa fille a témoigné que la guerre d'Espagne avait été, en tout cas, une importante source de préoccupation pour lui. L'écrivain étant mort deux ans seulement avant Franco, quelle évolution ou quelle absence d'évolution a pu connaitre son opinion sur le temps long ? Georges Bernanos et François Mauriac ont prouvé, par des textes très clairs, que l'on pouvait, dès l'époque de la guerre civile, être catholique conservateur et condamner le camp franquiste, et notamment ses prétentions à se réclamer de la foi catholique, fut-il soutenu par la majorité de l'Église espagnole.
Ce qui fixa notre attitude, ce fut la prétention des généraux espagnols de mener une guerre sainte, une croisade, d'être les soldats du Christ. Ici, je voudrais qu'on nous comprît enfin. D'aimables confrères ont écrit plaisamment que je regrettais qu'il n'y ait eu que quinze mille prêtres massacrés et que je trouvais que ce n'était pas assez. Parlons sérieusement : les sacrilèges et les crimes commis par une foule armée et furieuse, au lendemain d'une rébellion militaire réprimée, sont d'une horreur insoutenable. Nous disons seulement que les meurtres commis par des Maures [des troupes marocaines franquistes venues du Maroc espagnol] qui ont un Sacré-Cœur épinglé à leur burnous, que les épurations systématiques, les cadavres de femmes et d'enfants laissés derrière eux par des aviateurs allemands et italiens au service d'un chef catholique et qui se dit soldat du Christ, nous disons que c'est là une autre sorte d'horreur, dont vous avez le droit d'être moins frappés que nous ne sommes ; mais il ne dépend d'aucun de nous que les conséquences n'en soient redoutables pour la cause qui devrait nous importer par-dessus toutes les autres, et qui est le règne de Dieu sur la Terre.
François Mauriac, « Mise au point » (juin 1938), in Mémoires politiques, Grasset & Fasquelle, 1970 (1re éd.: Paris, Grasset, 1967), p. 90.
À qui me reproche de mettre en cause les gens d'Église qui ont payé déjà de tant de sang leurs erreurs ou leurs fautes, je pourrais répondre qu'il est difficile de les mettre autrement en garde contre ces erreurs et ces fautes. [...] Supposez que la Croisade tourne mal. Vous lirez dans une future histoire de l'Église que la lettre collective de l'Épiscopat espagnol n'a été qu'un emportement du zèle de Leurs Seigneuries, une maladresse regrettable, qui n'engage nullement les principes. Pour écrire la même chose à présent, je vais m'attirer la désapprobation de M. Paul Claudel. Eh bien, quoi ! j'en ai assez de ces niaiseries. Qui sait ? Peut‑être l'auteur de la future histoire de l'Église utilisera‑t‑il un jour ces modestes pages pour appuyer son argumentation, prouver que l'opinion catholique unanime n'était pas avec ces gens‑là.
Georges Bernanos, Les Grands Cimetières sous la lune (1938), III, Le Castor astral, 2008, rééd. Paris, Points, 2014, p. 112-113.
Nous ne sommes pas en mesure, en l'état des connaissances, de dire si Tolkien a exprimé une réflexion aussi poussée que nos deux écrivains français (qui se sont, eux, largement exprimés publiquement dès l'époque des faits). Rien ne prouve, en tout cas, qu'il soit allé aussi loin qu'eux, même seulement en privé. En octobre 1944, en tout cas, plus de cinq ans après la victoire militaire de Franco, Tolkien semblait toujours disposé à trouver des qualités à son action face aux « Rouges », et il restait vraisemblablement marqué avant tout par le souvenir des violences anticléricales du camp républicain, à une époque pourtant où, comme je l'ai écrit précédemment, la répression du régime franquiste national-catholique battait déjà son plein, et dans des proportions sanglantes qui allaient se révéler jamais atteintes, ni par le camp républicain espagnol, ni même par le régime fasciste italien, comme l'a dit François Godicheau dans l'entretien pour L'Histoire cité dans mon précédent message.
Bien entendu, Tolkien est connu pour ne pas être partisan des logiques étatiques totalitaires, voire des logiques étatiques en général (jusqu'à se plaindre, avec un zeste d'antifiscalisme, d'un « gouvernement socialiste » [travailliste] britannique qui, en 1956 et en contexte politique démocratique, lui prendrait son argent) : je doute fortement, à cette aune, qu'il ait pu cautionner en soi la nature totalitaire du régime franquiste. Pour autant, le catholicisme brouille quelque peu les cartes, tant vis-à-vis de la nature du régime de Franco (évoquée plus en détail par Godicheau cité précédemment) que vis-à-vis de l'opinion et des forts a priori de Tolkien, notamment concernant ce que l'écrivain appelait les « Rouges » (“Reds”) qu'ont combattus et vaincus les franquistes. Tolkien était capable de critiquer le clergé catholique, d'un point de vue de croyant fervent, mais qu'a-t-il pu penser au juste des évêques espagnols qui ont très majoritairement soutenu les franquistes, ou de certains prêtres catholiques ayant au contraire soutenu les républicains, notamment au Pays basque ? C'est d'un point de vue plus détaillé dont nous manquons... mais non d'un avis général, favorable au camp de Franco, au camp franquiste vainqueur de la guerre civile, sinon explicitement au régime franquiste, mais la date de 1944 laisse planer quand même, du moins à mes yeux, un doute légitime.
Bien entendu, il faudrait évoquer largement la situation internationale, de plus en plus tendue depuis le début des années 1930, qui participa au façonnement des opinions publiques vis-vis des évènements d'Espagne auxquels furent mêlées les grandes puissances européennes, contexte international ce que je ne ferais ici que succinctement aborder, à travers le point de vue français et en citant, une fois de plus, Godicheau :
...dès le 19 juillet [1936], le Premier ministre [espagnol] Giral envoie un télégramme à son homologue Léon Blum, chef de file du Front populaire français, pour lui demander de lui vendre armes et avions. Les deux pays sont liés par un accord d'assistance en cas d'agression. Mais en dépit de l'inclination personnelle de Léon Blum, la France n'intervient pas : le tollé soulevé par la droite qui dénonce l'aide apportée à la « république rouge », à la « révolution sanguinaire » espagnole est relayé au sein même de la majorité par le Parti radical qui s'oppose résolument à toute aide. Mais l'hostilité de l'opinion publique n'est pas la seule raison de la neutralité française dans ce conflit : l'allié anglais pèse de tout son poids pour que la France n'intervienne pas, allant jusqu'à menacer, si elle passe outre ses avertissements, de ne pas lui venir en aide en cas d'agression allemande. L'Angleterre, qui, depuis 1931, considère avec méfiance la République espagnole et avec une réelle hostilité le gouvernement du Frente popular, souhaiterait que les militaires [rebelles nationalistes] l'emportent rapidement. En effet, le mouvement révolutionnaire qui se développe dans le camp républicain et affecte des intérêts britanniques relance en Angleterre la peur de l'expansion du communisme, un des deux fondements de sa politique extérieure avec la prudence face à Hitler et à la menace de guerre.
François Godicheau, La guerre d'Espagne. De la démocratie à la dictature, Paris, Gallimard, collection « Découvertes », 2006, chapitre 2, p. 48-49.
En juillet 1947 à l'Assemblée Nationale, dans sa déposition devant la commission parlementaire d'enquête « sur les évènements survenus en France de 1933 à 1945 », Léon Blum, chef du gouvernement français tout récemment arrivé au pouvoir lorsque débuta la guerre civile en Espagne, a raconté lui-même dans quel contexte et quelles circonstances il fut entravé dans sa volonté initiale d'apporter un soutien gouvernemental de la République française à la République espagnole : il évoque ainsi notamment « la campagne de presse et la campagne de couloirs parlementaires » en France en août 1936, lesquelles notamment « s'alimentaient des articles de la presse anglaise qui, dans sa très grande majorité, montrait plutôt de la sympathie au coup de main franquiste ». Léon Blum parle également des échanges qu'il a eu à l'époque avec notamment le député travailliste britannique Philip J. Noel-Baker, venu le voir à Paris, etc., mais je ne développerai pas ici : toute la déposition de Blum (faite en deux auditions en 1946 puis 1947) est passionnante, abordant non seulement « les affaires d'Espagne », mais plus largement toutes les questions diplomatiques et militaires, du point de vue français, relatives aux origines du déclenchement de la Deuxième guerre mondiale en 1939, et je ne peux que recommander la lecture de ce texte, remarquablement écrit (fut-ce sous une forme retranscrite), comme toujours avec Léon Blum – ah, comme nous sommes loin de cette qualité de la langue (et de l'esprit) aujourd'hui, avec nos pitoyables pantalonnades parlementaires actuelles en France ! –, ledit texte figurant dans le volume IV-2 (1937-1940) de L'Œuvre de Léon Blum (Albin Michel, 1965).
Bref, même en invoquant l'idiosyncrasie de Tolkien pour parler de ses idées, y compris politiques ou politico-religieuses (idiosyncrasie qui ne ferait pas de lui quelqu'un d'exceptionnel : malgré le poids de tous les déterminismes, notamment sociaux, en dehors des cercles militants les plus sectaires, les points de vue singuliers en politique ne manquent pas, sans quoi les enjeux des élections en régime démocratique seraient beaucoup plus simples qu'ils ne le sont), on ne peut pas considérer que le jugement de l'écrivain n'ait pas été significativement influencé par tout le contexte de l'époque, très propice à diverses tentatives d'orientation et manipulation de l'opinion. Personnellement, si tant est qu'il ait pu émettre des réserves (ce qui n'est pas du tout impossible, même en n'allant pas aussi loin qu'un Bernanos, aussi ardent catholique que vigoureux pamphlétaire), je ne serais pas choqué que Tolkien ait franchement vu comme n'étant pas une mauvaise chose, ou a minima comme un moindre mal, la victoire de Franco en 1939, et qu'il ait été avant tout fortement réceptif, par inclination personnelle (catholique conservatrice) et comme bien d'autres des contemporains (compatriotes britanniques et/ou coreligionnaires catholiques) de l'écrivain, aux informations – qu'elles aient relayées, répétées, amplifiés, déformés, ou même inventées par la propagande franquiste diffusée internationalement – mettant en cause le camp républicain en matière d'exactions et de crimes. On parle beaucoup aujourd'hui des biais de confirmation, des mensonges et des fake news qui nuisent à la capacité de s'informer correctement et de juger en conséquence, mais tout cela était évidemment également d'actualité à l'époque, et c'est sans doute pour cela que peut encore nous parler, aujourd'hui, une réflexion d'un autre grand écrivain et témoin des évènements, George Orwell, cette réflexion datant de 1942 :
Je n'ai guère de preuves directes des atrocités de la guerre civile espagnole. Je sais qu'un certain nombre ont été commises par les républicains, et un nombre bien plus grand – ce nombre ne cessant de s'accroître – par les fascistes. Mais ce qui m'a frappé alors, et qui continue à me frapper, c'est que le crédit qu'on accorde aux récits d'atrocités dépend exclusivement des choix politiques de chacun : on croit aux atrocités ennemies et on refuse de croire à celles de son camp, sans même prendre la peine d'examiner les faits. J'ai récemment dressé une liste des atrocités commises depuis 1918. Il ne s'est pas passé une seule année sans qu'il s'en commette ici ou là, et l'on chercherait en vain un seul cas où la gauche et la droite ont cru simultanément aux mêmes histoires. Plus curieux encore, la situation peut à tout moment se renverser brutalement, et les atrocités parfaitement prouvées d'hier devenir un mensonge ridicule pour la seule raison que le paysage politique a changé.
George Orwell, « Retour sur la guerre d'Espagne » (« Looking Back on the Spanish War », écrit en août 1942, partiellement publié en juin 1943 dans la revue londonienne New Road), in Sur le nationalisme et autres textes, traduit de l'anglais par Françoise Bouillot, Paris, Payot & Rivages, 2021, II, p. 76-77.
Je terminerai cette longue digression historique (sur un sujet dont nous avons déjà parlé ailleurs, dans un contexte extérieur alors plus tendu, me concernant), en signalant que le magazine L'Histoire a aussi, avant les deux numéros précédemment évoqués relatifs en tout ou partie au franquisme, consacré un dossier spécifique à la guerre civile espagnole (« Guerre d'Espagne : pourquoi la république a perdu ») dans son numéro 427 daté de septembre 2016. Dans ce dossier figure un autre entretien accordé par François Godicheau (oui, encore lui, mais c'est un des meilleurs spécialistes, du moins à ma connaissance, et il renvoie toujours lui-même à de nombreuses autres sources pour qui voudrait aller plus loin), publié sous le titre « Guerre d'Espagne : la fin des légendes » et qui est aujourd'hui accessible en ligne sur le site de la revue :
https://www.lhistoire.fr/guerre-despagn … 3%A9gendes
La carte de la guerre d'Espagne accompagnant cet entretien mis en ligne est, de mon point de vue, une remarquable synthèse pour un conflit aux implications si complexes.
Je ne doute pas, mon cher JR, que tu sois déjà familier de toutes ces choses (sauf peut-être des petits secrets du pícaro Alphonse XIII ?), mais qui sait... tout cela, même partagé un peu en vrac, pourra peut-être servir à d'autres...
Amicalement,
B.
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A l'occasion de quelques articles dans la presse, dont Le Point, et d'un documentaire d'Arte qui sera diffusé en octobre, on nous rappelle (puisque cela remonte au moins à 2017) que Le Hobbit a inspiré un paléontologue du CNRS de Toulouse, Ludovic Slimak, pour nommer les restes d'un homme de Néandertal : le chercheur a donné le nom de Thorin à ce représentant d'une lignée humaine disparue.
S.
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À l'occasion de la parution ce mois-ci d'un recueil de récits choisis de H. P. Lovecraft dans la Pléiade, prestigieuse collection de l'empire éditorial Gallimard déjà plusieurs fois évoquée précédemment en ces lieux, je comptais signaler ici un récent article à ce propos de l'écrivain et chroniqueur littéraire Louis-Henri de La Rochefoucauld, article mis en ligne sur le site du magazine L'Express le 20 octobre dernier, et dans lequel il est aussi un peu question de Tolkien, et notamment du « fameux » projet de parution d'écrits de ce dernier dans ladite Pléiade, projet que d'aucuns ont pu penser qu'il serait tout-à-coup facilité suite au rachat des éditions Christian Bourgois par le groupe Madrigall d'Antoine Gallimard (rachat déjà évoqué ici le mois dernier).
Interrogé à propos de ce contexte éditorial, supposé plus favorable maintenant qu'il ne l'était il y en encore quelques mois (j'en avais aussi parlé précédemment), le directeur éditorial de la Pléiade, Hugues Pradier, est resté en fait assez évasif : « Oui, certainement, on peut l'imaginer... »
Mais de toute façon, l'article de L.-H. de La Rochefoucauld étant logiquement consacré avant tout à l'entrée de Lovecraft à la Pléiade, et puisqu'il existe un fuseau dédié au créateur de Cthulhu, il m'a semble plus indiqué d'évoquer plus en détail, entre autres, ledit article dans ledit autre fuseau :
https://www.jrrvf.com/fluxbb/viewtopic. … 299#p93299
Peace and Love,
B.
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Il a déjà été question dans ce fuseau de la société Palantir, spécialisée dans l’analyse de données et utilisée entre autres par les services secrets. J’ai appris dans l’émission Secrets d'info de ce samedi sur France Inter qu’il existe une émanation de Palantir qui travaille sur l’utilisation de l’intelligence artificielle dans le domaine de l’armement. Voir aussi ici.
Cette société s’appelle Anduril….
Céline
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Il a déjà été question dans ce fuseau de la société Palantir, spécialisée dans l’analyse de données et utilisée entre autres par les services secrets. J’ai appris dans l’émission Secrets d'info de ce samedi sur France Inter qu’il existe une émanation de Palantir qui travaille sur l’utilisation de l’intelligence artificielle dans le domaine de l’armement. Voir aussi ici.
Cette société s’appelle Anduril….Céline
Tolkien aurait apprécié :/
(antiphrase)
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merci - amicalement, vincent
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