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Lambendili, equente, tarquesta tyavuvalve sealye ar masta. Epetai inye lende, A alasse, a merende !Er nyanda penquanta tengwesta. | Amis des langues, disaient-ils, nous goûterons avec vous le haut-elfique et le pain. Même moi y suis donc allée, O bonheur, o festin ! pour n'y ronger à pleine gueule que grammaire. |
Valeria Barouch | Trad. personnelle, sur aimable autorisation de l'auteure. |
Une dizaine de jours après, il est grand temps pour moi de vous faire un petit compte rendu d'Omentielva Tatya, la deuxième conférence internationale sur les langues de Tolkien.
La première de ces conférences biennales s'était déroulée à Stockholm en 2005. J'y avais présenté une mais sans pouvoir y participer physiquement. C'est donc avec une curiosité pleine d'espoir mêlée d'un brin d'appréhension que je me suis rendu à cette rencontre.
Les pays d'origine des participants présents à Anvers : Autriche, Belgique, Ecosse, Etats-Unis, France (i. e. votre serviteur), Norvège, Pays-Bas, Pologne, Suède et Suisse. Il est intéressant de remarquer que ce sont des Pays-Bas et de Suède que sont venus les plus gros contingents - reflet de la proximité pour le premier cas sans doute, mais ce sont aussi les deux premiers pays où Tolkien a été traduit, et on succès y paraît largement plus ancien et ancré qu'en France - la société Tolkien des Pays-Bas a plus de 35 ans d'existence !
J'arrive donc à Anvers le mercredi 8 août sous une pluie insistante (qui ne cèdera vraiment que le dimanche). J'arrive un peu en avance, la Lessius Hogeschool est pratiquement vide - mais heureusement, d'autres participant ne tardent pas à arriver. Présentations, ouverture de la conférence conférence introductive de Tolkiendili flamands sur les liens entre Tolkien et la Belgique ; il se trouve que c'est un des pays que Tolkien a le plus visités, du fait de sa collaboration avec Simone d'Ardenne, une collègue philologue belge qui devint une amie de sa famille et partciulèrement de Priscilla Tolkien. (1) Il faut évidemment un peu de temps avant que tout le monde se dégèle - la plupart d'entre nous ne nous connaissons que par nos échanges tolkieniens en ligne. Bill Welden - lambendil de très longue date et inspirateur ultime de ces conférences – s'y attache en nous proposant une conversation en quenya, pour nous présenter les uns aux autres, avant d'entamer une... partie de cartes. Toujours en quenya, cela va sans dire - et "dire" n'a évidemment pas été très simple dans ce cas :)
A partir du lendemain, nous passons aux "choses sérieuses" avec les présentations des communications, des travaux plus interactifs sous forme de séminaires, et le soir après dîner, du néo-elfique en pratique. Voici le programme.
Pour ce qui est de l'étude de la langue a proprement parler, quatre thèmes ont été abordés:
- les questions de méthode
- les écritures, leur fonctionnement et leur déchiffrement
- la structure phonétique des langues
- l'étude de textes en des formes d'elfique plus anciennes et moins connues que celles illustrées dans le SdA et le Silm.
Pour l'usage créatif, ont eu lieu :
- la lecture de poèmes, originaux ou traduits ; l'un d'eux fut même chanté (nous avons regretté l'absence d'un instrumentiste !)
- des essais de conversation en elfique, d'abord pour tenter se présenter, puis autour d'un jeu de cartes, puis enfin lors d'une longue partie de jeu des questions.
Helge Fauskanger a lié les deux en présentant un projet de traduction en quenya de rien moins que l'Apocalypse de Jean, avec comme but d'évaluer sur un texte long quelles sont les plus grandes lacunes dans notre connaissance de la langue, et les plus gênantes pour la pratique. Il se révèle que les incertitudes grammaticales (sur l'emploi des cas) ou le manque de certaines constructions peuvent être au moins aussi gênantes que les lacunes lexicales.
La contribution la plus inattendue a été celle de Karolina Kazimierczak sur les liens entre la musique et les langues inventées dans l'oeuvre de Tolkien, ainsi que les compositions récentes qui s'en sont inspirées - avec des extraits. (2)
Une mention spéciale à Anders Stenström "Beregond" qui, en plus d'avoir pris grande part à l'organisation des deux conférences, et d'être l'éditeur des actes, s'est révélé un excellent Maître Queux - de ceux qui mettent l'étoile au front.
Un des grands intérêts de la conférence a été de rencontrer des approches très différentes des langues de Tolkien : l'étude descriptive, bien sûr, solidement représentée, mais aussi l'usage créatif (plus ou moins sérieux) et l'attention aux sonances elfiques du poète et du musicien, le tout se faisant dans une ambiance à la fois studieuse, ouverte et amicale - ce qui, je dois bien le dire, est bien agréable quand on se souvient d'assez nombreuses prises de bec, plus d'une fois acerbes, qui ont pu avoir lieu entre tenants des différentes approches, sur Tolklang puis Elfling par examples, mais aussi ici-même ou sur le forum de Tolkiendil. Là au contraire, les divergences d'opinion n'ont en rien empoisonné l'atmosphère mais ont plutôt été sources de discussion constructive. Je gage que le fait de se voir en vrai, en tant que personnes, y a beaucoup contribué.
Il y a bien évidemment des à côtés dans ce genre de rencontre : plaisir de la rencontre, discussions variées, linguistiques, historiques, tolkieniennes ou non... Deux petites escapades étaient d'ailleurs au programme : d'abord la visite du musée Plantin-Moretus, dans une ancienne imprimerie anversoise fondée au XVIe siècle et qui a perduré juqu'au XIXe, pleine de vieux manuscrits, d'incunables, de vieilles cartes, de fontes et d'anciennes presses à bras... et aussi un magnifique hôtel particulier, cette famille d'imprimeurs ayant été très fortunée. Ensuite, la visite du centre d'Anvers menée par Dirk Trappers, connaisseur des lieux. Le tout s'est terminé dans une brasserie voûtée - où un vieux prestidigitateur en habit XVIe distrayait la clientèle par ses tours...
Deux annonces de publications enfin :
- les actes de la première conférence, Omentielva Minya, viennent de paraître et ont été présentés à Anvers. Ils forment le premier volume d'une série titrée Arda Philology et publiée par les Forodrim, l'association tolkienienne suédoise. (3)
- en avant-première, tous les participants ont reçu une copie de Parma Eldalamberon n° 17. Et il s'agit d'un numéro de première importance : il reproduit un guide qu'a rédigé Tolkien pour expliquer la plus grande partie des passages en langues inventées dans le SdA... et l'on y trouve maintes informations depuis longtemps attendues. Je vais essayer d'en faire une revue le plus vite possible.
La prochaine conférence – Omentielva Nelya – est prévue pour 2009 et devrait se dérouler à Cambridge.
Bertrand Bellet
(1) Le sujet a été évoqué ici
(2) Ont été par exemple évoqués : Projet Ainulindalë de Bertrand Guillerm ; Essay on the development of music for Middle-Earth de David. J. Finnamore ; le site The Tolkien Music List qui tente de dresser la liste des compositions inspirées par l'oeuvre de Tolkien.
(3) Plus d'information sur cette page.
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Correction : dans le poème en exergue, sealye est une faute de frappe pour aselye.
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cher plénipotentiaire, :-)
Merci pour ce compte rendu détaillé.
Plaise à l'assemblée ci-présente de renouveler vos lettres de créance pour les futures conférences.
Silmo
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