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#1 05-07-2009 21:17

Atalantea Lume
Inscription : 2009
Messages : 1

Le Chant des Signes (Noirs)

      Puisqu’il est devenu de bon ton  de se répandre en doléances innombrables, de tournures semblables et d’étalages éplorés, sur cette épave pourtant encore peuplée d’âmes qui n’ont rien de spectrales, et dont la blancheur fardée ne ferait pas pâlir celle des ombres de jadis qui parfois glissent encore entre les cyprès d’une campagne austère...





Souffrez donc, peuple de Faërie aux étoiles évanouies, souffrez de lire la prose tremblante d’un ancêtre atrabilaire, souffrez de reconnaître dans la nuance de ces signes, le sang noir de l’amertume dont les bouillons acres ont tant macéré que les fruits même s’en sont décomposés, souffrez finalement de découvrir entre ces lignes la version ténébreuse du flétrissement de ces lieux… Si vous avez assez de cœur, assez d’âme ou assez de déraison, peut-être parviendrez-vous à mener votre lecture jusqu’au bout de cette déchéance déclamée, sinon, vous abandonnerez comme de coutume en cours de route… sur des apophtegmes trop ardents.


Voilà maintenant plusieurs années que l’on s’interroge sur le déclin de ce symposium  imaginaire, sur la disparition de ses anciens, et que l’on pérore en hypothèses farfelues, en conjectures ingénues ou en désolations savantes. Je me propose donc de rajouter une pierre chaotique à cet édifice branlant d’où jamais rien ne ressort, si ce n’est _rarement _ le rongeur mesquin de la rémission.


Car enfin, ne voyez-vous pas que l’essence même de ces lieux n’existe plus, que son âme s’est gâtée sous le nectar vicié d’un sucre trop riche ? Ne voyez-vous pas que les joyaux d’antan ont disparu : le cor s’est essoufflé,  la main du harpiste s’est desséchée et le foyer s’est éteint. Non, la magie de ce forum n’existe plus, plus pour nous qui avons connu sa gloire et son déclin. Sans doute que quelques bonnes âmes tentent de raviver les braises calcinées, mais croyez m’en, bonnes âmes, le miel n’est pas bon combustible et les dents perlées n’offrent pas des remparts assez solides pour une pensée en mal d’étoffe.



Il y a dix ans, ce symposium, tombeau des heurs déchus, était finalement à l’image des havres littéraires de l’époque : docte, flegmatique, guindé et académique à la fois. Pas tout à fait austère pourtant, puisque des amitiés y sont nées sans pour autant s’étaler en place publique comme de la bave en mal de reconnaissance, car sans doute étaient-elles aussi un peu guindées, ces amitiés.
Pas tout à fait accueillant non plus ce havre, sans être d’une violence spectaculaire, les débats pouvaient être exaltés, les inimitiés ouvertes et les plus jeunes étaient contraints de se montrer à la hauteur des lieux emprunts d’une certaine solennité, sous peine de se faire réprimander.
Et puis, tant qu’on savait maitriser la forme, rien ne délimitait le fond, et le temps lui-même participait à la maturation de pensées plus substantielles que courtoises. 


Depuis, l’on s’est plaint de cette atmosphère placide et rigoriste que l’on a jugé (à tort) obtuse. Ah ça, le forum s’est ouvert depuis, tant et si bien qu’il n’y reste plus qu’un cercle d’amitiés affectées qui s’auto-congratulent plus souvent qu’elles ne cherchent à élever un débat qui traîne assoupi à six pieds sous terre. Sans doute pensera-t-on que le sujet est épuisé, que le chant des étoiles n’offre plus de nouveau répertoire à découvrir et qu’il vaut mieux aller compter fleurette sur des sentiers balisés de galanterie champêtre, que de prendre la peine d’explorer des sentes dangereuses qui mèneraient tout droit à la déraison de spéculations  fantaisistes et, comble de l’indécence, paradoxales. Sans doute vaut-il mieux, pour conserver le peu d’ivresse restante, ménager les fioles moyenâgeuses et les coupes chrétiennes.



Pourtant, il est intéressant de constater, et c’est ce qui fait notre amertume, que lorsqu’un débat prometteur est esquissé, il se perd bien souvent dans la journée dans des méandres de sous-entendus complaisants, des amas de pensées _voire de vagues impressions_ concises et légères, le tout toutefois largement enrobé du ton et des effets doctes et cauteleux qui sont désormais devenus le sceau de cette fabrique à érudition. Qui aurait la force dans ces conditions, de soulever la tourbe sous laquelle gît cette pensée dépecée ? Sûrement pas moi pour qui il faut au moins un mois pour mener une réflexion à son terme,  pour qui il a fallu bien des nuits à ruminer cet immodeste pamphlet, et que la vue d’un symposium à sociabilité active et à participation réactive, fait rentrer dans une ire convulsive, hélas aussi noire qu’impuissante.

Et, sans vouloir pousser l’immodestie à m’arroger la pensée d’ectoplasmes disparus, je crois que cette conception et cette impuissance, ne seront pas étrangères à quelques uns de ceux qui ne poussent plus les portes de ce temple.
Il y manque désormais cruellement de poussière et de retenue, il y manque des contradicteurs et des illuminés.

Finalement, contrairement à d’autres havres en Faërie qui ont prospéré parcequ’ils avaient des ambitions plus sociales (Tolkiendil) et/ou plus mercantiles (Elbakin), Jrrvf se mord la queue car il a failli à sa vocation première, il a failli en s’abâtardissant des bons sentiments des  lieux susnommés et en essayant de survivre malgré tout à travers (et souvent à rebours de) ce qui faisait sa spécificité : l’aventure littéraire poussée à son paroxysme spéculatif, conceptuel et transverse. 
Et pour ceux qui comme nous préfèrent les symposiums lents et guindés aux impressions intempestives, aux réflexions superficielles, aux connaissances empilées et aux amabilités flatteuses (qui cachent mal, oh si mal, les lames brillantes de la cupidité ou le fiel enjôleur des mesquineries humaines)  il ne leur reste plus que quelques pupilles pour pleurer l’encre de leur aigreur inassouvie. Il ne leur reste plus qu’à attendre patiemment la venue improbable d’une Ungoliant sémantique, promesse de toutes les révolutions cognitives virtuelles, Graal munificent des anciens dieux qui croupissent dans les longues salles oubliées de Makar et Meassë, ou encore par delà les monts Moglaires, entre les arachnombres et les arbres gibeteux ; patiemment, en attendant leur heure.

Et quant aux amitiés, ultime refuge à une désertion redoutée quoiqu’inéluctable,  de fières et réservées, elles se sont maintes fois mues en courtisanes mondaines, cherchant  fiévreusement d’un regard chargé de vanités, qui, les faveurs d’untel, qui, les éloges d’un autre, qui, la complaisance d’un troisième, en se poudrant toujours des vernis les plus lisses, soucieuses de ne jamais craqueler le masque exorbitant des apparences sous scellés et des secrets murmurés suavement par des alcôves intrigantes.



Las, le silence de mes ténèbres ne hantera plus ce symposium, belles âmes. Faute d’avoir eu le temps et le courage de poursuivre les sentes que mentalement j’avais tissées,  ma cacophonie n’aura pas, hélas, été à la hauteur des harmonies espérées, et celles-ci se sont noyées sous des cieux trop bleus. Le rideau des heures déchues s’affaissent donc dans le maelström de noirceur que vous me connaissez, outrage au beau, folie d’Eru et symphonie torturée que seuls les romantiques ont jamais su maitriser ; et comme je suis bon prince, je vous laisse en souvenir ce manteau fuligineux et dépenaillé, tissé par quelque guerrière d’Abyssinie et sur lequel vous pourrez exercer librement vos couteaux que je sais aiguisés.




La nuit ne tombera plus sur ces terres et l’harmonie du mal ne fera plus vibrer vos destinées angéliques.

Réjouissez-vous, ô belles âmes aux étoiles évanouies.




Melkor

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#2 05-07-2009 16:10

ISENGAR
Lieu : Tuckborough près de Chartres
Inscription : 2001
Messages : 5 031

Re : Le Chant des Signes (Noirs)

Salut Necs et Tof.

Merci pour la musique.

Comme une étrange coïncidence, votre sombre missive d'aurevoir s'accompagne du décès d'Allen Klein, l'ange noir des Beatles... Vous n'y êtes pour rien, au moins ? ;p

I.


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#3 07-07-2009 01:34

Silmo
Inscription : 2002
Messages : 4 115

Re : Le Chant des Signes (Noirs)


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(avec des couchers de soleil, j'adore les couchers de soleil)

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