Résumé

Tout commence au départ par une interrogation : Tolkien a-t-il été le premier, en écrivant la rencontre de Bilbo et Gollum dans le chapitre V de Bilbo le Hobbit, à inventer le schéma du duel par énigmes ? Certainement pas, tant la mythologie recèle d’affrontement verbal entre deux personnes. Tolkien avait-il ‘retrouvé’ le schéma ou bien faisait-il là référence à un texte ancien particulier ?

Répondre à ces questions nécessitait d’effectuer en premier lieu un recensement (illusoirement exhaustif) des joutes oratoires par énigmes entre deux personnages dans les différentes mythologies dont on sait qu’elles étaient connues et appréciées de Tolkien. Il s’agit des parties I à VI :

  • La partie I traite de ce thème dans la Bible et de la reprise de ce schéma, par l’intermédiaire du personnage de Salomon, dans les écrits apocryphes anglo-saxons.
  • La partie II présente le duel par énigmes dans la littérature celtique.
  • La partie III est un aparté destiné à mieux cerner les caractéristiques du duel entre Bilbo et Gollum afin d’être sensible à leur présence (ou leur absence) dans les mythes qui suivent.
  • La partie IV nous présente l’occurrence la plus ancienne d’un tel duel, occurrence qui se trouve dans la mythologie sumérienne.
  • La partie V, partie essentielle, traite des multiples occurrences (au moins 5) du duel par énigmes dans la mythologie nordique.
  • La partie VI détaille une joute oratoire qui se trouve dans le Kalevala, livre essentiel pour notre connaissance de la mythologie finnoise.

Arrivé à ce stade, il apparaît manifeste que Tolkien suit un modèle mythique classique et peut-être même à un (ou plusieurs) textes particuliers.

Pour remonter à la (les) source(s), il est nécessaire de prendre en compte les deux états rédactionnels du texte de Tolkien, puisque le chapitre édité en 1937 fut révisé profondément en 1947. Ceci fait l’objet de la partie VII. Dans cette même partie, nous rappelons le détail des différentes énigmes écrites par Tolkien.

Ainsi, nous sommes armés pour conclure, dans la partie VIII, quant au(x) texte (s) qui ont certainement influencé Tolkien dans le choix du schéma du duel par énigmes. Ceci grâce à la comparaison des différents textes, que ce soit au niveau de leurs caractéristiques comme au niveau de détails rédactionnels.

La partie IX annonce une étape supplémentaire, fondée sur une recherche lexicale dans tout le corps du chapitre V de Bilbo le Hobbit : si le schéma du duel par énigmes entre Bilbo et Gollum fait écho à des textes mythiques, le contenu même des énigmes n’aurait-il pas, pour tout ou partie, des origines littéraires anciennes ? Et qu’en est-il de leur agencement, n’y aurait-il pas une idée directrice qui les sous-tend ? Mais alors, dans quel but littéraire ?

Dans cette même partie, deux excursus s’attardent sur des expressions littéraires chères à Tolkien, mettant à jour deux nouvelles sources textuelles utilisées plus ou moins consciemment par Tolkien.

La partie X, commençant par s’interroger sur les caractéristiques particulières de la dixième et dernière énigme du duel oratoire entre Bilbo et Gollum, met à jour un artifice littéraire utilisé par Tolkien (la triplication de motifs) non plus seulement dans ce chapitre V mais aussi dans le conte tout entier. Il est proposé qu’il s’agit là d’une trace manifeste de l’influence des frères Grimm sur l’écrivain Tolkien et sa manière d’écrire des « contes de fées ».

Enfin, la partie XI nous rappelle qu’un second passage de Bilbo le Hobbit recèle une joute oratoire mettant en jeu des énigmes ; il s’agit bien entendu du chapitre XII qui voit l’affrontement de Bilbo et de Smaug. Est-ce fortuit ou bien, au contraire, n’y aurait-il pas un (ou plusieurs) liens entre ces deux affrontements ? Il apparaît que les liens sont légions. Quel rôle alors particulier joue ce second duel par rapport au premier ?